Le président de la CUS, Jacques Bigot, ne s’attendait pas à devoir ferrailler autant sur la création d’une zone d’aménagement concertée (ZAC) dans le sud de l’agglomération, à Fegersheim, en bordure de la RD 1083. Mais les opposants au projet d’aménagement, agriculteurs exploitant des parcelles sur la future ZAC et habitants de la commune, ont rapidement su mobiliser : panneaux au bord des routes, tracts, une manifestation qui a réuni plus de 500 personnes le 22 juin… Avec des arguments massue : « Voulez-vous une zone industrielle pleine de camions à côté de chez vous en lieu et place de nos beaux champs ? »
C’est pourquoi Jacques Bigot a choisi de présenter jeudi soir, lors de la première réunion publique de concertation, la ZAC en version « light », « seulement » 50 ha, et non 100 comme prévu initialement par le POS de Fegersheim et le schéma de coordination de la CUS. Les travaux ne sont annoncés que pour 2018 et les terrains viabilisés qu’à la condition express que des entreprises s’implantent. Pour le président de la CUS, la création de cette ZAC est une condition nécessaire au maintien de l’attractivité de l’agglomération :
« C’est bien simple, les entreprises regardent trois critères quand elles investissent : le niveau de formation du bassin de population, l’accessibilité globale et les réserves foncières disponibles. Sur la formation, on est bon grâce notamment à l’Université. Sur l’accessibilité, on est de mieux en mieux, mais sur les réserves foncières, on approche de la saturation… Il nous reste à peine 10 ha disponibles, soit deux années de commercialisation. Une ZAC a besoin de 5 à 6 ans pour être créée, on ne peut pas risquer la pénurie et voir des entreprises s’implanter ailleurs. »
Les friches industrielles rappelées à Jacques Bigot
Mais les opposants ne voient pas très bien pourquoi il est urgent de créer une ZAC à Fegersheim quant à Erstein, à 8 km plus au sud, la zone d’activités peine à se remplir, comme l’explique Jean-Philippe Meyer, l’un des agriculteurs exploitant des parcelles dans le périmètre concerné :
« A Erstein, seule une dizaine d’hectares est occupée sur les 21 aménagés pour la zone d’activité. Et il y a des friches industrielles partout autour… Pourquoi est-ce qu’on nous prive de bonnes terres agricoles au lieu de réutiliser des terrains industriels abandonnés ? Si la zone de Fegersheim finit par s’étendre sur 100 ha, je vais perdre près d’un tiers de ma surface d’exploitation… Je peux fermer boutique. »
Les agriculteurs présents sur la future zone vont perdre en moyenne 7% de leur surface agricole. Ils se battent donc d’abord pour eux mais la question des friches fait sens dans la population, d’autant que les riverains croisent régulièrement des entreprises fantômes dans les environs. Autre argument avancé par le collectif des opposants, pourquoi ne pas utiliser les 200 ha de la zone de Reichstett, vacants depuis la fermeture de la raffinerie ? Mais pour Jacques Bigot, ces friches ne sont pas mobilisables :
« En fait, il n’y a pas tant de friches que ça. Il y a souvent des entreprises peu ou mal entretenues, mais dont l’activité existe bel et bien. L’expropriation est un processus complexe et très long… On a besoin d’ensembles mobilisables d’un seul tenant. Quant à la friche de la raffinerie de Reichstett, il faut trouver 20 millions d’euros au bas mot pour dépolluer le site avant de l’exploiter… Et ça ne règle pas notre besoin d’une ZAC au sud de l’agglomération. »
Les habitants très divisés
Le maire de Fegersheim, René Lacogne, est mal à l’aise avec ce dossier qui divise sa commune et transforme en opposants des riverains qu’il croise tous les jours. Face aux arguments avancés par le collectif, il répond que les nuisances d’une zone industrielle sont déjà présentes :
« A l’est de la route, la zone d’activité est en déclin. On a besoin de revitaliser cette zone d’autant que les camions circulent déjà sur la RD 1083 mais ils ne s’arrêtent pas ! Je dis donc aux opposants que nous ferions mieux de garder l’activité économique chez nous plutôt que de se contenter de la voir passer. La création de cette zone va apporter de 800 à 1 400 emplois, c’est important pour le développement de notre commune. »
Une estimation au doigt mouillé qui n’engage personne, et que rejettent les opposants, dont Bernard Schaal, l’un des leaders du collectif anti-ZAC :
« C’est désespérant de voir une municipalité qui compte des écologistes dans ses rangs penser qu’il suffit de créer des zones pour que des emplois soient créés. C’est un mode de pensée archaïque, une vision technocratique du développement économique. Qu’ils stoppent l’étalement urbain sérieusement, en recyclant les zones industrielles abandonnées et si c’est compliqué, ils ont la majorité au gouvernement, qu’ils changent les lois pour que ce soit plus simple ! »
Le collectif ne trouve aucune excuse au président de la CUS. Ce qui promet un débat animé jeudi soir, d’autant que le collectif a promis de s’inviter avec une bonne cinquantaine de partisans et d’installer ses remorques devant l’entrée. Ambiance.
Présentation de la ZAC par la CUS
Y aller
Réunion publique sur la ZAC de Fegersheim, jeudi 12 septembre à 20h au centre sportif et culturel à Fegersheim.
Aller plus loin
Sur Rue89 Strasbourg : A Fegersheim, Strasbourg sacrifiera 50 ha de terres agricoles
Sur Rue89 Strasbourg : coup de frein à l’étalement urbain, 534 ha de terres « sanctuarisés » dans la CUS
Sur DNA.fr : Zones d’activités : changeons de logique ! (Tribune des élus écologistes Alain Jund et de Jacques Fernique)
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