« C’est une victoire écologiste qui va dans le sens de l’intérêt général », se réjouit Alain Salvi, président du Conservatoire d’espaces naturels (CEN) de Lorraine. Dans le sud des Vosges, en amont du village de Saint-Maurice-sur-Moselle, la petite station de sports d’hiver de Rouge Gazon et ses alentours attiraient les convoitises du secteur du tourisme. En 2022, les gérants du domaine skiable s’apprêtaient à revendre 110 hectares autour de la station, créant une opportunité pour le groupe Morlot. Cette entreprise avait un accord avec la commune et planifiait la construction d’un hôtel de luxe sur ce site classé pour son patrimoine naturel et son paysage typique de la région.
Une préemption par la Safer
Mais en décembre 2022, la Société d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer) du Grand Est a préempté les terrains, comme elle peut le faire s’agissant de prairies et de pâturages. En France, le statut des terres agricoles est protégé. Face à l’intérêt écologique et paysager du site, le Conservatoire d’espaces naturels (CEN) de Lorraine s’était alors porté candidat pour acquérir la zone en vue de la préserver, en maintenant l’utilisation de la zone par des éleveurs.
Le maire de Saint-Maurice-sur-Moselle n’a pas apprécié cette préemption, estimant qu’il était logique que tout revienne automatiquement à la commune. Après une longue médiation orchestrée par la préfecture, un accord entre le CEN et la municipalité a été communiqué ce vendredi 16 février. Les 45 hectares les plus en altitude, constitués de prairies de montagne et de forêts, sont attribués au Conservatoire d’espaces naturels.
L’accès au public maintenu partout
Par ailleurs, 36 hectares entre le domaine skiable et la zone définitivement protégée sont légués à la commune, qui a l’obligation de consentir à un bail emphytéotique de 50 ans avec le CEN. Et les 30 hectares de la station de sports d’hiver appartiennent désormais à Saint-Maurice-sur-Moselle.
Alain Salvi explique que « le Conservatoire s’est montré ouvert dans la négociation pour éviter que la situation ne tourne au vinaigre » :
« Au départ, la Safer envisageait de nous attribuer toute la zone hors du domaine skiable. La commune souhaitait gagner du foncier. Donc nous avons décidé de proposer la solution du bail emphytéotique pour 36 des 80 hectares à préserver. Au final, on arrive quasiment au même résultat, la zone est intégralement protégée au moins pour les 50 prochaines années. Dans un demi-siècle, le contexte ne sera plus le même et on espère évidemment que ces écosystèmes seront conservés. »
Une convention d’occupation de ces 36 hectares doit être signée entre le CEN et la commune dans les prochaines semaines. « Nous avons convenu que ces terres resteront ouvertes aux randonneurs et au ski de fond, tout comme l’espace qui nous revient entièrement. Il n’est pas question de fermer l’accès au public, mais d’empêcher des projets d’aménagement et de mettre en place un code de bonne conduite pour assurer la quiétude du site », précise Alain Salvi.
« Un maillon essentiel »
Dans un communiqué, le Conservatoire d’espaces naturels de Lorraine rappelle que le périmètre protégé par l’accord « constitue le dernier massif véritablement sauvage entre le Rossberg, la réserve naturelle régionale de la forêt des Volcans et la Réserve naturelle nationale du massif du Grand Ventron » :
« Cette protection représente un maillon essentiel dans la cohérence de la protection des Hautes Vosges, élément constitutif de la trame écologique sur la grande crête entre le Hohneck et le Ballon d’Alsace. »
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