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« L’État m’aide pour acheter un vélo de Chine, pas pour un vélo reconditionné en France »

Le groupe La Poste a installé des ateliers de reconditionnement des vélos électriques de ses facteurs. Des modèles solides et fabriqués en France mais que les particuliers ne peuvent acheter qu’en acceptant de se passer des subventions publiques.

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« L’État m’aide pour acheter un vélo de Chine, pas pour un vélo reconditionné en France »

La presse locale a salué l’installation en avril 2021 à Saint-Dié-des-Vosges d’une chaîne de reconditionnement des vélos électriques de La Poste. Recy’Clo, c’est son nom, fait appel à l’établissement et service d’aide par le travail (Esat) « Les Alisiers » pour produire ces vélos. Le service est donc écologique, local mais aussi social puisqu’il permet à des personnes handicapées de travailler.

C’est formidable mais voilà : les acheteurs de ces vélos ne peuvent pas bénéficier des aides à l’acquisition prévues par l’État (de 150 à 2 000€ selon les cas), la Région Grand Est (closes depuis 2023) ou l’Eurométropole de Strasbourg (de 300 à 500€)… Tous ces dispositifs ne fonctionnent que pour des achats de vélos neufs.

Cette situation a ulcéré Raphaël, cycliste de Cronenbourg :

« Quand j’ai regardé pour un modèle électrique en magasin, les prix des vélos-cargos démarraient à 2 500€… Et puis je suis tombé sur Recy’Clo qui me proposait un vélo solide me correspondant parfaitement pour 1 300€. Je l’ai acheté puis j’ai demandé les aides. Quelle ne fut pas ma surprise en constatant que l’État prenait à sa charge jusqu’à 40% du prix d’un vélo importé de Chine mais refusait de m’aider pour un vélo fabriqué et reconditionné en France ! »

Le ministère de la Transition écologique confirme l’exclusion des vélos reconditionnés des aides à l’achat et à la conversion mais assure que leur prise en compte est « à l’étude ». De son côté, la Région Grand Est justifie cette exclusion par « une offre encore très réduite », par des prix moindres mais surtout par des craintes de fraudes.

Suite à ces refus, Raphaël, qui travaille dans le secteur des déchets et du recyclage, essaie d’alerter les administrations afin d’inclure les vélos reconditionnés dans le dispositif :

« Ce sont des vélos garantis et remis à neuf selon une norme Afnor, c’est tout ce qu’il y a de plus sérieux. Je vais contester le refus de l’État, ça me prendra du temps mais ça me semble important. J’ai essayé de contacter l’élu de la Région Grand Est en charge de ce dossier, sans succès pour l’instant… Je vais écrire au député de ma circonscription… »

Un vélo de facteur reconditionné dans l’atelier de Saint-Dié-des-Vosges Photo : doc remis

Directeur du développement de Recy’Clo, Serge Da Silva essaie aussi d’obtenir un changement de doctrine de l’État :

« On a alerté tous les échelons de l’administration sur ce problème mais nous n’avons eu aucun retour. Quelques métropoles incluent déjà les vélos reconditionnés dans le périmètre de leurs aides, à condition par exemple que l’atelier de reconditionnement soit dans la région, mais l’aide de l’État est de loin la plus importante. Son absence freine le développement de notre filière. »

La filiale du groupe La Poste a ouvert en juin 2022 un atelier de reconditionnement auprès de « Savoir et compétences » à Illkirch-Graffenstaden et prévoit de recycler 2 000 vélos par an dans une dizaine de sites à terme, quitte à prendre en charge d’autres flottes de vélos électriques que celle de La Poste. Dans ces ateliers, chaque vélo est entièrement démonté et remonté avec des pièces en bon état ou neuves (30% des cas). Les batteries sont systématiquement changées mais elles viennent d’Asie, du moins « jusqu’à ce qu’une solution française soit trouvée » précise Serge Da Silva.


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