Rue89 Strasbourg : Après votre licenciement, vous attaquez votre employeur devant le tribunal des prud’hommes. Pourriez-vous détailler les raisons à l’origine de votre conflit avec votre employeur ?
Daniel* : Ça faisait quinze ans que j’étais dans cette boîte du secteur bancaire. Mais ces dernières années, tout s’est dégradé. Certainement en réponse à la crise économique que nous vivons, la direction a peu à peu modifié le contrat de plusieurs collègues et ceci sans leur aval. Ce qui bien sûr est interdit par la loi. En tant que délégué syndical, je les ai défendus pour faire reconnaître le droit du travail. D’autant que j’ai moi-même vu mon contrat modifié. Et c’est en consultant ma fiche de paie que je l’ai découvert. J’ai donc fait intervenir le syndicat qui a fait appel à l’inspecteur du travail. Et nous avons finalement retrouvé nos conditions de travail d’origine.
R89S : Depuis cet épisode, que s’est-il passé ?
Daniel* : Nous avions retrouvé nos conditions de travail, mais nous subissions une très forte pression. Intellectuellement, il n’y avait pas de souci, j’étais solide. Mais mon corps a fini par lâcher. J’ai atterri à l’hôpital à la suite de douleurs abdominales très intenses. On m’a alors confirmé que c’était dû au stress, que j’avais fait un « burn-out ». Par la suite, je suis tombé en dépression et je suis resté en arrêt de travail pendant plus de deux ans. Et puis récemment, j’ai été mis en inaptitude par la médecine du travail, ce qui a conduit à mon licenciement.
R89S : Que tirez-vous de cette épreuve ?
Daniel* : Aujourd’hui, j’essaie de me reconstruire, de sortir de cette dépression. Toute cette histoire m’a beaucoup affecté psychologiquement. J’assimile tout ça à une forme de harcèlement moral. Une forme très perverse, car elle se fait subtilement, tout en finesse. Quand ça vous arrive, vous êtes très seul. Pourtant je suis quelqu’un de solide à l’origine. Mais psychologiquement, ça n’était plus possible : on me demandait de m’asseoir sur le droit du travail.
Cette épreuve m’a permis de comprendre qu’il fallait que je fasse plus attention à moi. Je m’acharnais tellement à aider les autres que je m’oubliais. À un moment donné, il fallait que quelqu’un prenne le bâton de pèlerin et aille au front. Alors je l’ai fait. Mais vu les circonstances aujourd’hui, je me dois maintenant de penser à moi avant de penser aux autres.
Et vous, que pensez-vous qu’il pourrait arriver à Jean Tusse après son burn-out ? Pourrait-il être licencié pour inaptitude au travail, comme Daniel ?
*Le prénom a été modifié.
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