Les dernières semaines ont été marquées par de nombreux dérapages sur Twitter ou Facebook d’élus, responsables ou encore collaborateurs socialistes et écologistes. Et ce, sans nul besoin de convoquer des exemples nationaux, le local se suffit pleinement à lui-même.
Le développement des réseaux sociaux a joué un rôle important pour la démocratie. Ils permettent en effet d’informer plus rapidement et plus directement les citoyens. Ils sont un vecteur de vigilance et de débat. Dans le même temps, ils favorisent l’interaction en autorisant un dialogue direct, surtout lorsque l’élu rédige lui-même, ce qui ne semble pas être le cas de M. Ries.
Là où la « chose politique » paraissait jadis lointaine, inatteignable, il est aujourd’hui offert à tout à chacun de savoir, constater, commenter, débattre et interpeller. L’image moins codifiée de l’action publique ainsi véhiculée par les réseaux sociaux, et à encore plus forte raison au niveau local, permet une meilleure appréhension des préoccupations et des attentes du citoyen et permet aussi d’attirer et intéresser plus facilement à l’action publique.
S’attaquer aux réseaux sociaux est un retour en arrière, une négation du droit de voir et de savoir pour le citoyen. Les réseaux sociaux ne sont pas une bête incontrôlable prenant le contrôle malgré eux de ceux qui s’y aventurent, les poussant à exprimer des sentences dépassant leurs pensées. Ils ne sont que des outils avec lesquels chacun agit en son âme et conscience. La rencontre du politique avec la réalité d’un monde en évolution et numérisé est une chance, à condition que chacun assume ses responsabilités.
Pénaliser l’outrance et l’irresponsabilité et non le citoyen
Plutôt que de condamner les excès et outrances en sa qualité de chef de majorité, le Sénateur-Maire de Strasbourg a préféré évoquer une possible interdiction des réseaux sociaux à l’occasion du Conseil Municipal du 29 mai. Cette réaction est un double aveu : celui d’une incapacité à maîtriser sa majorité et celui d’une profonde méconnaissance de ce que sont les réseaux sociaux. En voulant interdire l’usage des réseaux sociaux au sein du Conseil Municipal, Roland Ries sanctionne le citoyen et non le fauteur de trouble.
Par la politique de l’autruche et le refus simpliste de s’attaquer au vrai problème, le Sénateur-Maire ne réalise pas que l’ère d’Internet et de la démocratie numérique n’est pas un gadget mais une réalité qui s’impose aux responsables politiques.
Lorsque le conseiller municipal délégué à la vie numérique dérape sérieusement le problème n’est pas Twitter mais l’outrance de ses mots; lorsque l’Adjoint à l’Urbanisme assimile le drapeau français à l’extrémisme, le problème n’est pas Facebook mais l’irresponsabilité de ses propos ; lorsque l’Adjoint aux Finances, qui se targue de sa qualité de magistrat à la cour des comptes, fragilise le dossier du Racing Club de Strasbourg où Région et CUS s’étaient accordées, en rompant la confidentialité de la réunion de la Direction Nationale du Contrôle de Gestion de la FFF et ce dans le seul but de se mettre en avant et de communiquer au détriment de l’efficacité, le problème n’est pas Twitter mais l’ego de cet élu.
Si la communication politique numérique n’est plus négociable, il est dommageable que certains considèrent que le numérique permet en revanche de rendre le respect d’autrui et le sens de la responsabilité optionnels. La réflexion que nous devons mener est celle de la mise en place d’une déontologie de nature à ne pas faire du champ politique virtuel une zone de non droit et d’excès mais un espace supplémentaire d’exercice d’un dialogue politique digne et constructif.
Là est attendue l’intervention de celui qui par le suffrage universel est le maire de tous les Strasbourgeois et non un chef de clan. Son rôle n’est pas d’avoir peur des réseaux sociaux mais d’imposer aux membres de sa majorité des usages dignes et en accord avec leurs fonctions. L’élu 2.0 ne doit pas confondre proximité avec vulgarité.
Pascal Mangin
Pour aller plus loin
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