Nouveau revers pour la préfecture du Haut-Rhin et l’entreprise Mines et Potasse d’Alsace (MDPA). Lundi 1er août, le tribunal administratif a maintenu la suspension des travaux de confinement des 42 000 tonnes de déchets ultimes enfouis sous la nappe phréatique. Dans une décision du 25 mai faisant suite à un recours de la Collectivité européenne d’Alsace (CeA) et des associations Alsace Nature et Consommation Logement Cadre de vie (CLCV), les juges avaient alors considéré que la préparation des barrières de confinement en béton avaient bien un aspect définitif et irréversible. Or, de tels travaux de confinement des déchets toxiques ne sont pas autorisés pour le moment.
Un « risque de propagation des fissurations » selon la MDPA
Les avocats de l’entreprise MDPA et de l’Etat ont soutenu qu’il y avait urgence à reprendre les travaux pour « sécuriser le site et prévenir toute pollution de la nappe phréatique d’Alsace ». Me Le Roy-Gleizes, avocate de la société MDPA, a soulevé « le fait que la roche se fracture, si bien que la tenue mécanique du pilier et du toit est dégradée, aggravant les surfaces endommagées (EDZ) et le risque de propagation de ces fissurations, nécessitant la réalisation de boulonnage de soutènement pour sécuriser la mine ».
Mais le tribunal administratif n’a pas retenu les arguments de MDPA et de la préfecture, préférant reprendre l’un des points soulevés par la CeA et les associations CLCV et Alsace Nature :
« Les nouveaux éléments produits par la société MDPA ne permettent pas non plus de caractériser une urgence à poursuivre, dans les plus brefs délais, les travaux de réalisation des barrages de confinement numéros 1 et 2, ni à entamer, dans les mêmes conditions, les travaux relatifs au barrage n° 3. »
Un énième revers pour MDPA et le gouvernement
C’est un énième défaite pour l’entreprise MDPA et le gouvernement, dont l’entêtement confine à l’absurde. En octobre 2021, la cour administrative d’appel de Nancy avait cassé l’arrêté de l’État qui visait à laisser indéfiniment les déchets toxiques à Stocamine. La préfecture du Haut-Rhin a ensuite pris un arrêté qui mettait en demeure MDPA de procéder à des travaux présentés comme seulement « préparatoires au confinement. »
Les associations Alsace Nature et la CLCV avaient alors attaqué l’arrêté préfectoral en estimant que ces travaux seraient irréversibles et qu’il était donc urgent de suspendre toute opération dans les anciennes mines de sel. Leur requête avait d’abord été rejetée. Suite au début des travaux le 10 mai 2022, une nouvelle procédure de suspension initiée par la CeA et Alsace Nature a fini par convaincre le tribunal administratif de Strasbourg.
Les galeries de Stocamine stockent aujourd’hui 42 000 tonnes de déchets dits « ultimes ». Ce sont des « big bags » pleins de produits chimiques que les techniques de traitement des années 90 ne permettent pas de dépolluer. Dans l’enquête publique relative à la demande de stockage définitif, il est bien spécifié que la composition exacte des déchets « ultimes » entreposés n’est pas connue.
Une enquête pénale en cours sur la nature des déchets
D’autres substances hautement toxiques sont présentes comme de l’arsenic, du cyanure ou encore de l’amiante, mais dans des quantités inconnues. Certains composants comme le cyanure pourraient être plus présents qu’initialement estimé. En 2017, 24,16 des 25,70 tonnes de mercure, soit 94% des barils présents, ont été déstockées. Au total environ 2 000 des 44 000 tonnes sont remontées à la surface.
En avril 2021, Rue89 Strasbourg démontrait que les informations transmises par Stocamine sur les 42 000 tonnes de déchets toxiques stockés sont probablement inexactes. Deux mois plus tad, Alsace Nature portait plainte contre X et espèrait « enfin » obtenir un inventaire complet des substances chimiques stockés sous la nappe phréatique. En mars 2022, le pôle environnement du parquet de Strasbourg a annoncé avoir saisi l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (Oclaesp) dans le cadre de l’enquête pénale en cours sur la nature des déchets enfouis.
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