La salle d’audience du tribunal administratif est presque comble ce jeudi 2 novembre. Seul face aux représentants de la préfecture du Haut-Rhin, de l’entreprise Mines de potasse d’Alsace (MDPA), de la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal) et du ministère de la Transition écologique, Me François Zind, avocat d’Alsace Nature, expose ses arguments. Ce dernier tente de suspendre l’arrêté préfectoral qui autorise le confinement définitif des déchets de Stocamine.
En jeu lors de l’audience : 42 000 tonnes de produits toxiques stockés à Wittelsheim, sous la nappe phréatique rhénane, la plus grande ressource d’eau potable d’Europe occidentale. L’association écologiste demande l’extraction de ces déchets estimant qu’ils pollueront, un jour, peut-être dans plusieurs siècles, la nappe phréatique. « Les citoyens ont le droit de vivre dans un environnement sain et équilibré, comme le proclame la Charte de l’environnement », rappelle Me François Zind.
Cette stratégie d’Alsace Nature s’inspire notamment d’une décision prise le 27 octobre par le Conseil constitutionnel. Après avoir validé le projet d’enfouissement de déchets radioactifs à Bure, les Sages du Conseil ont tenu à préciser : « Le législateur doit veiller à ce que les choix destinés à répondre aux besoins du présent ne compromettent pas la capacité des générations futures et des autres peuples à satisfaire leurs propres besoins. »
« On dépasse ce que l’État peut prévoir »
Dès lors, pour l’avocat François Zind, « permettre l’enfouissement définitif est impossible », car personne ne peut affirmer avec certitude que l’eau de la nappe ne sera pas fortement polluée. « Vous avez une occasion merveilleuse de faire appliquer le principe de précaution (intégré dans la Constitution, NDLR) », lance t-il, à l’adresse des juges administratifs. Ce principe oblige théoriquement les administrations à prévenir tout risque de dommages graves et irréversibles à l’environnement.
Guillaume Bailly, du Bureau du sol et du sous-sol du ministère de la Transition écologique, assure que le confinement des déchets par des barrages en béton est la meilleure solution pour les générations futures : « Son objectif est justement de préserver la nappe phréatique. » Comme à son habitude, l’État fait valoir que le déstockage des déchets n’est plus possible vu la dégradation du site de Stocamine. Une conclusion que conteste fermement Alsace Nature, exemples de déstockages en Allemagne et en Suisse à l’appui.
Présent au tribunal, le député strasbourgeois Emmanuel Fernandes (LFI) se dit « surpris et inquiet » que le gouvernement prévoie un confinement impliquant un engagement, une surveillance et de potentielles opérations de dépollution sur plusieurs siècles : « C’est illusoire. On dépasse ce que l’État peut prévoir. Il est impossible de porter un budget aussi loin pour assurer le financement des opérations. »
Le tribunal administratif de Strasbourg rendra sa décision mardi 7 novembre.
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