« J’ai acheté un abonnement mensuel pour finalement être obligée de prendre ma voiture une semaine après. » Vanessa Mikuczanis fait partie de ces déçues du Réseau express métropolitain européen (Reme). Au lancement de ce qui devait être une « révolution » selon l’exécutif de l’Eurométropole de Strasbourg (EMS) et de la Région Grand Est, cette habitante de Soultz-sous-Forêt a cru dans l’augmentation des cadences promise sur le réseau TER autour de Strasbourg. Mais les annonces étaient trop optimistes, le Reme ne propose que la moitié des trains promis, et encore. Et la secrétaire d’une association strasbourgeoise a fini par abandonner le train.
Vanessa Mikuczanis a créé un groupe Facebook pour rassembler les voyageurs mécontents et a lancé une pétition pour exiger un remboursement d’au moins 50% pour les mois de novembre, décembre et janvier. Une juste compensation, selon elle, pour un service extrêmement dégradé depuis le lancement du Reme le 11 décembre 2022.
10% des trains supprimés au lancement du Reme
Les chiffres confirment le ressenti des usagers. Entre le 11 décembre et le 11 janvier, 704 trains prévus à la circulation ont été supprimés sur le réseau du Reme. Les annulations de dernière minute sur la première semaine du réseau express métropolitain ont concerné 10% des trains en circulation dans la semaine du 11 décembre. Le taux de suppression diminue les semaines suivantes… mais cette amélioration de la fiabilité du service a nécessité de réduire l’offre initiale. Dès la deuxième semaine de fonctionnement du Reme, le nombre de trains supplémentaires en circulation est passé de 800 à 410.
L’observation du nombre de trains supprimés quotidiennement sur le Reme donne la même impression de lancement chaotique. A la fin de la première semaine de fonctionnement du réseau express métropolitain, 64 trains ont été supprimés le mercredi 14 décembre et 70 trains ont été annulés le vendredi 16 décembre.
« Quand on paie un service, on est dans le droit de l’attendre »
André Lott est vice-président de la Fédération nationale des associations d’usagers de transports (Fnaut) Grand Est. L’organisation demande un remboursement des abonnés depuis décembre 2022 et reste ouverte sur le montant minimal à obtenir. « On est plus dans une logique de geste financier que de remboursement complet », détaille le vice-président.
Le symbole d’un remboursement permettrait tout d’abord de dédommager les voyageurs touchés par l’inflation. La Fnaut Grand Est cherche aussi à produire un précédent, qui permettrait un nouveau remboursement en cas de nouvelle dégradation du service. Pour André Lott, il s’agirait enfin d’une reconnaissance des erreurs commises : « Ça signifierait que les collectivités sont allées trop vite dans la mise en place du dispositif. »
Du côté des syndicats de cheminots, les revendications sont similaires. Secrétaire régional Unsa ferroviaire Alsace, Ludovic Wintenberger rappelle les difficultés subies par les agents de la SNCF :
« Ils sont en première ligne et face à l’exaspération des clients, ils se retrouvent parfois à gérer des situations de tension. »
Espérant que des moyens seront mis en place pour offrir un service de qualité, Alexandre Welsch, secrétaire régional du syndicat Sud Rail, soutient les demandes des usagers :
« Dans n’importe quel commerce, quand on paie un service, on est dans le droit de l’attendre. Donc je comprends et trouve légitime les demandes de remboursement. »
Un geste commercial décidé par la Région
Face aux nombreuses protestations, l’Eurométropole de Strasbourg (EMS) ainsi que la Région Grand Est ont annoncé jeudi 12 janvier avoir mis en demeure la SNCF pour ses manquements. L’occasion pour le vice-président de l’EMS en charge des mobilités Alain Jund d’inviter la SNCF à dédommager les usagers. Quelques jours plus tôt, au micro de France Bleu Alsace, la directrice régionale de la SNCF pour le TER Grand Est, Stéphanie Dommange, a renvoyé au conseil régional la responsabilité d’un geste commercial.
50% de l’abonnement pris en charge pour trois mois
Vendredi 13 janvier, en début de soirée, Thibaud Philipps, vice-président de la Région Grand Est en charge des Transports, a annoncé sur Twitter une prise en charge à 50% de l’abonnement des usagers du TER Grand Est pour les trois prochains mois (février, mars et avril 2023). Le maire d’Illkirch-Graffenstaden (LR) évoque aussi 1 500 000 billets à petits prix de février à avril :
« On est en train de finir de caler le dispositif avec la SNCF. Ce sont des billets à des tarifs très attractifs, à moins de 10 euros. L’idée est de pouvoir répondre aux attentes des voyageurs occasionnels qui peuvent aussi subir les difficultés par rapport au trafic régulièrement perturbé. »
Le vice-président de la Région Grand Est Thibaud Philipps envisage encore un autre moyen de pression sur la SNCF :
« La SNCF est notre prestataire. Nous avons passé une convention pour ajouter des trains mais nous nous rendons compte que la SNCF n’est pas en capacité de respecter ses engagements. Donc en tant que financeur, on se pose aussi des questions sur les 14 millions d’euros que l’on cofinance avec l’Eurométropole de Strasbourg sur le Reme à raison de 500 000 euros par mois. »
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