« On ne peut pas retourner dans notre pays », souffle Santiljiana, d’un air résigné. Devant le Centre administratif à Strasbourg, un rassemblement se tenait ce mercredi 5 avril pour interpeller la mairie sur l’expulsion imminente des habitants du squat « Bourgogne » et réclamer une solution d’hébergement collective. Les militants dénoncent l’ingérence des services de police et de la préfecture. Le rassemblement se constitue d’habitants du squat, de personnes en exil, de militants et de membres d’associations.
En décembre 2021, plus de 200 personnes, dont beaucoup de familles avec enfants, ont trouvé refuge dans un immeuble rue de Bourgogne, à la Meinau, voué à la démolition. En novembre 2022, la justice a ordonné leur expulsion.
« On est dans une situation qui n’est pas normale, ça fait cinq ans et demi qu’on est là » reprend Santiljiana, mère de deux enfants âgés de sept et quinze ans. Avec ses enfants – scolarisés à Strasbourg – et sa mère, elle est actuellement hébergée chez une famille à Lampertheim. Elle a reçu une obligation de quitter le territoire français. « Ça fait bientôt six ans qu’on est là, ma fille a grandi en France », plaide Santiljiana. Elle relate aussi l’absence fréquente de réponse du 115. « Ils ne répondent presque jamais, et quand ils le font, ils nous disent qu’il n’y a pas de place pour les familles. »
Aux côtés de Santiljiana se trouve Lali, mère elle aussi. Venue de Géorgie, elle vit à Strasbourg depuis près de sept ans. Et a rejoint le squat Bourgogne en janvier 2023 avec son fils, actuellement en classe de 3ème.
« On cherche une solution, la préfecture nous propose des gymnases, sans plus de précision. On dit non parce qu’après, on risque d’être envoyé à Bouxwiller. Et après Bouxwilller, on sait qu’on nous renverra dans notre pays. Mais si on refuse, ils nous disent de rester à la rue. Alors on n’a pas de solution, on va de squat en squat. À celui de Bourgogne au moins, on est entre familles, on s’entraide. »
La détresse des habitants
Au total, entre 70 et 75 familles qui habitent dans le squat de Bourgogne, précise Gabriel Cardoen. Militant et membre de la Marche des Solidarités, il se décrit comme « celui qui transmet les informations et les contacts », aux personnes qui en ont besoin.
« Les gens ici mènent un combat contre le temps. La durée de présence de plus de cinq ans de certaines personnes ouvre la possibilité d’obtenir des papiers d’identité, en principe. Ça se fait par la circulaire Valls, à la discrétion de la préfecture évidemment. Les gens ici mènent un combat contre le temps. […]La préfecture dispatche les personnes à droite et à gauche. Ils veulent pas de groupement, quand ils sont tous ensemble c’est aussi plus facile d’avoir une solidarité, une communauté et une voix.
En évoquant les familles, il insiste sur leur situation intenable :
Il y a une vraie détresse, surtout de la part des mamans. On m’appelle parfois en me demandant de l’aide, en m’exprimant des pensées suicidaires. La plupart ne tiennent le coup que grâce à leurs enfants. On le voit aussi : quand on fait des réunions, il n’y a que les mères. »
Les places d’hébergement bouchées
Floriane Varieras, adjointe à la Maire en charge notamment du soutien aux personnes vulnérables et à la solidarité, affirme que la Ville a déjà alerté sur la situation : « On demande une mise à l’abri, parce qu’un squat n’est pas une situation souhaitable non plus. »
Elle rappelle que 500 places d’hébergement pérenne ont été créées par l’Eurométropole depuis le début du mandat. Les dernières places, ouvertes en novembre dernier, sont toutes occupées.
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