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Le sénateur Jacques Fernique en visite surprise au centre de rétention administratif de Geispolsheim

Le sénateur EELV Jacques Fernique a constaté des conditions de détention « humaines » tout en notant les risques d’infection liés au covid et un détournement de la fonction initiale du centre de rétention administratif de Geispolsheim, qui accueillait ce vendredi 11 décembre 50% d’ex-détenus interdits de territoires à leur sortie de prison.

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Le sénateur Jacques Fernique en visite surprise au centre de rétention administratif de Geispolsheim

C’est la troisième visite du Centre de rétention administratif (CRA) de Geispolsheim pour le sénateur écologiste Jacques Fernique. Vendredi 11 décembre, en début d’après-midi, l’ancien conseiller municipal de Geispolsheim se laisse guider dans l’établissement tout en observant d’un œil expert. « Les grilles ont été réhaussées non ? », demande-t-il dès l’entrée au commandant de la police aux frontières et directeur Jean-Philippe Collomb. Ce dernier acquiesce avant d’expliquer une mesure prise suite à de nombreuses tentatives de fuite et certains blessés par la chute.

A gauche, Jacques Fernique, sénateur EELV, face au directeur du CRA de Geispolsheim, Jean-Philippe Collomb. (Photo Guillaume Krempp / Rue89 Strasbourg / cc)

Un centre de détention pour expulsion

Le CRA de Geispolsheim, antichambre française de l’expulsion, se situe au bout d’un chemin de gravier, à une centaine de mètres d’une zone commerciale. Un panneau suranné, peu visible, indique l’établissement à côté de la Halle aux chaussures. Il compte 34 places destinées uniquement à des « hommes célibataires ». Sur place, 70 fonctionnaires de la police aux frontières y travaillent, entre surveillance et accompagnement des détenus jusqu’aux aéroports.

Ces derniers restent en moyenne 18 jours, estime le chef du centre, mais ils peuvent y être retenus jusqu’à 90. En général, la moitié des personnes sont escortées avant leur retour par avion dans le pays d’origine. L’autre moitié est reconduite en Allemagne, en Belgique ou en Espagne, dans les pays responsables de leur demande d’asile selon la procédure des accords de Dublin.

Le CRA de Geispolsheim compte 34 places destinées uniquement à des « hommes célibataires ». 70 fonctionnaires de la police aux frontières y travaillent, entre surveillance et escorte des détenus.

Une visite liée au covid et à un rapport de 2015

Jacques Fernique est d’abord venu observer les mesures prises face au Covid. « Après une fermeture du centre, nous avons rouvert à 50% des capacités et on nous a récemment demandé d’augmenter à 20 places », indique le commandant Jean-Philippe Collomb. Deux masques chirurgicaux par jour sont fournis à chaque détenu, ajoute-t-il. Dans le réfectoire, deux chaises et deux plateaux sur la table semblent indiquer une nouvelle disposition pour les trois repas quotidiens. Aux côtés de deux infirmières, le chef d’établissement assure qu’aucun cas covid n’a été détecté au CRA.

Lors de sa visite, Jacques Fernique se base sur le dernier rapport du contrôleur général des privations de liberté concernant le CRA de Geispolsheim.

Les interrogations du sénateur ne doivent rien au hasard. Jacques Fernique se base sur le dernier rapport du contrôleur général des privations de liberté concernant le CRA de Geispolsheim. Ainsi, l’ancien élu local et enseignant constate que certaines recommandations formulées en 2015 n’ont pas été suivies d’effet :

« 3. Il doit être remédié à l’absence de verrouillage intérieur des chambres dans un souci d’intimité et de sécurité.

6. La réduction de moitié du temps de présence de l’Office française de l’immigration et de l’intégration (Ofii) interroge, de même que sa prestation actuelle.

9. De véritables panneaux indicateurs devraient être posés au rond-point et à l’entrée de la voie.

11. La liste des objets interdits devrait être affichée. »

Un CRA plus souple

Dans la cour de la zone de détention, quatre hommes jouent au baby-foot à côté d’une salle de pause avec deux tables et deux jeux de société. Un peu plus loin, un fumeur allume sa cigarette sur un dispositif électrique accroché au grillage. « Ici, les détenus peuvent circuler librement, dans la cour et les bâtiments. Dans d’autres centres, ils sont enfermés dans leur chambre la nuit », décrit le chef d’établissement.

Autre particularité du CRA de Geispolsheim : les visiteurs ont un « accès direct » aux détenus dans le cour.

Autre particularité : les visiteurs ont un « accès direct » aux détenus dans le cour. « Les parloirs sauvages peuvent durer des heures l’été », décrit Jean-Philippe Collomb. Le sénateur reconnaît que le CRA de Geispolsheim est « plus humain » que d’autres établissements français, comme celui de Vincennes, où Streetpress a révélé des cas d’intimidations et de violences sur des détenus.

Le rythme soutenu de la visite rend difficile les échanges avec les détenus. Dans un français incertain, un Albanais répond au sénateur : « Ici, il y a pas de problème, c’est la justice le problème. » Dans le bâtiment E, un détenu d’origine nigériane préfère dénoncer son expulsion à venir, malgré des problèmes de santé et une famille en Italie. Interrogé sur ses conditions de détention, son voisin grimace simplement en évoquant la nourriture servie.

Les nouveaux détenus du CRA

Avec le Covid, le CRA de Geispolsheim fait face à une autre difficulté. Certaines personnes sont condamnées à une peine de prison assortie d’une interdiction de territoire national. Mais la pandémie complique certains rapatriements. « La population du centre compte 50% de sortants de prison, contre 15% en temps normal », décrit le commandant Jean-Philippe Colomb. Interrogée sur l’adéquation des moyens actuels à cette nouvelle mission, la commissaire divisionnaire Charlotte Priestman préfère invoquer son droit de réserve.

Au sortir de la visite, le sénateur fait un premier bilan avec sa collaboratrice parlementaire et Marie-Dominique Dreyssé, vice-présidente (EELV) de l’Eurométropole et ex-adjointe en charge des solidarités à la Ville de Strasbourg. Il constate que les détenus ne portent pas le masque, que les toilettes ne comportent toujours aucun loquet et les chambres aucun rideau. Sa camarade EELV parle d’une double peine pour les détenus « sortis de prison mais qu’on ne veut pas laisser libre. » La collaboratrice note que la visite n’a pas été proposée dans certains bâtiments.

« Il m’a dit que tout se passait bien pour lui »

L’échange est interrompu par un automobiliste gêné par le vélo du sénateur. Il laisse la place à Daniel, venu de Metz voir le frère d’un ami au passeport albanais périmé pour lui apporter des vêtements. Contacté suite à sa propre visite, le jeune rapporte : « Il m’a dit que tout se passait bien pour lui. Il est au chaud, il a à manger, ça se passe bien avec les gardiens. Tout est cool, et si c’était pas le cas, il me l’aurait dit. »


#Centre de rétention administrative

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