Depuis cinq mois, la mairie de Strasbourg s’est engagée dans un bras de fer avec les syndicats d’enseignants et de parents d’élèves. Après une première proposition de programme de semaine scolaire en décembre, validée par la directrice académique des services de l’éducation nationale (DACEN), les réactions acerbes ont continué de fuser. Alexandra Lopez, représentante de la PEEP, une fédération de parents d’élèves, s’en rappelle bien :
« Il y a eu deux grandes réunions publiques avec la ville de Strasbourg depuis décembre et la mise en place de groupes éducatifs locaux. Mais nous n’étions pas écoutés. Nous rejetions la décision prise par la mairie, à savoir de faire finir les enfants à des horaires différents dans la semaine. Nous avions fait beaucoup de propositions pour améliorer la rentrée 2014. Mais aucun retour de la part de la Ville… »
Sifflet à 15h45 pour tous
La version finale a pourtant été modifiée. À partir de septembre, les enfants de maternelle comme de primaire à Strasbourg auront cours le mercredi matin, jusqu’à 11h30, mais la cantine ne sera pas ouverte. Ils pourront être pris en charge par le service d’accueil municipal de 11h30 à 12h15 (facturé de 18 à 38€ pour l’année complète selon le quotient familial). Ils travailleront le reste de la semaine de 8h30 à 15h45.
Pour les primaires, 1h30 d’activité éducative est mise en place chaque soir. Par groupe de 15 , ils feront du sport, de la musique, de l’art plastique… Les écoliers s’inscriront pour l’une d’elle en septembre, et pourront changer tous les trimestres. Autrement dit, chaque élève aura une séance d’activité éducative par semaine, et quatre d’accueil périscolaire. Une heure de sortie de classe est également fixée par semaine. Toutes ces activités sont gratuites.
L’accueil périscolaire sera pris en charge par la mairie de Strasbourg. Ce service, qui concerne 3 000 enfants, sera facturé entre 10 et 46€ par mois en fonction du quotient familial.
Un ajustement nécessaire
Suite aux annonces du premier dispositif, de nombreuses réactions d’opposition s’étaient faites entendre, notamment durant la campagne électorale et y compris de la part des directeurs et enseignants de maternelle comme l’explique Françoise Buffet, adjointe au maire en charge de l’éducation et de l’application de la réforme des rythmes scolaires :
« À la base, les horaires de fin de classe n’étaient pas fixes, à 15h10 ou 16h15. Or, les enfants en bas âge font la sieste jusqu’à 15h. Les enseignants trouvaient donc inconcevable de les réveiller à la fin des cours, juste avant l’arrivée des parents. Avec les précédents horaires, les enseignants ne pouvaient plus prévoir d’activité l’après-midi. Nous avons donc pris le parti de lisser les horaires de sortie. Tous les enfants finiront donc à 15h45. «
Le second problème rencontré par la ville de Strasbourg a été de trouver des associations pour animer les temps d’activités éducatives d’une heure. Un appel avait été lancé en janvier mais très peu de prestataires avaient répondu. Françoise Buffet précise :
« Ils ont pour la plupart pointé le manque d’intérêt d’organiser une activité sur un laps de temps aussi court. Pour les activités sportives par exemple, le temps que les enfants se changent, il reste seulement 40 minutes pour jouer. Nous renouvelons un appel la semaine prochaine et espérons que les offres des associations seront plus nombreuses cette fois-ci. »
Alexandra Lopez de la Peep : « Nous sommes agréablement surpris »
L’annonce de ce nouveau dispositif a été bien reçue par les syndicats et les parents d’élèves, ce qui est une surprise compte-tenu de l’état de suspicion généralisée qui prévalait jusqu’alors dans leurs rapports entre la Ville. Les changements opérés sont satisfaisant, selon Alexandra Lopez, représentante de la PEEP :
« La fin des classes à 15h45 pour tous est une proposition qui se rapproche de ce que nous souhaitions pour les enfants strasbourgeois. Nous sommes agréablement surpris par cette décision. L’uniformisation de la fin des cours était très importante à nos yeux pour le rythme de l’enfant mais aussi pour l’organisation des parents. »
Cependant, quelques points de désaccord subsistent, reprend Alexandra Lopez :
« Les parents d’élèves ne voulaient pas que les enfants travaillent le mercredi matin. D’autant plus que les écoles ne proposeront pas de cantines. Ensuite, certains parents vont être obligés de laisser leurs enfants à la garderie ce qui va entrainer un coût supplémentaire. Enfin, nous regrettons qu’il n’ait pas été mis en place une réflexion spécifique pour la maternelle car les enfants en bas âge n’ont pas le même rythme que les enfants de primaire. »
Pour Isabelle Trabant, membre de la FCPE, autre fédération de parents d’élèves, la concertation entre les différents acteurs de la réforme scolaire n’a pas été optimale :
« Je n’arrive pas à comprendre pourquoi la ville a changé complètement le dispositif prévu. Nous avons eu l’impression tout au long de ces mois de préparation d’être mis sur la touche. Régulièrement, nous étions prévenus la veille pour le lendemain pour assister aux réunions. Nous regrettons également que la réforme s’applique à toutes les écoles de Strasbourg sans exception. La mairie ne s’est pas penchée sur les initiatives déjà en place dans les écoles et qui fonctionnent très bien. Certaines activités seront donc balayées suite à l’uniformisation des rythmes scolaires. »
Patrice Weisheimer de l’Unsa : « il faudra des animateurs compétents »
Patrice Weisheimer, membre du Syndicat Education Populaire (SEP-Unsa), quant à lui, espère une qualité renforcée dans les activités éducatives :
« Cela va prendre du temps de former des personnes compétentes pour encadrer des enfants. Nous craignons que la mairie ne se rabatte sur des jeunes ayant tout juste le brevet d’aptitude aux fonctions d’animateurs (BAFA). Les écoliers méritent des animateurs professionnels si l’on souhaite un véritable apport pédagogique dans ces heures d’activités. »
Le dispositif s’appliquera dans les 114 écoles maternelles et primaires de Strasbourg dès septembre 2014. Un suivi sera mis en place trois mois après la rentrée entre la Ville, les parents d’élèves et les enseignants pour évaluer l’application du dispositif et le réviser si nécessaire.
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