C’est dans la zone commerciale d’Eckbolsheim à l’ouest de Strasbourg que la première salle du Grand Est dédiée à la réalité virtuelle a ouvert. Sept casques, reliés à autant d’ordinateurs surpuissants, attendent les amateurs de ces jeux vidéos immersifs, qui permettent d’incarner un personnage dans un environnement virtuel. Le champ visuel est entièrement reproduit dans un casque qui traque les mouvements de la tête, et modifie l’affichage en conséquence. Des capteurs permettent de suivre les mouvements des mains et du corps, pour le reproduire dans le jeu. Au final, le joueur a le sentiment d’incarner un personnage.
Les ordinateurs, les casques Occulus de Rift et Vive de HTC, et les jeux proposés par VR Portal sont les mêmes que ceux qui sont disponibles dans le commerce mais, pour Hakan et Ali, les deux fondateurs trentenaires de cet espace, VR Portal permet de jouer dans de bien meilleures conditions que chez soi :
« Quand on est dans un salon, on peut prendre le risque de faire un mouvement un peu brusque et de casser quelque chose ou de frapper quelqu’un par inadvertance. On peut se prendre les pieds dans les câbles et tomber aussi. Et tous les salons ne sont pas suffisamment grands pour pouvoir évoluer dedans sans risque avec un casque sur la tête. À VR Portal, chaque espace est vierge, même les ordinateurs ont été évacués dans une autre salle. Et on a créé un système de câbles rétractables qui se place sur le casque sans s’emmêler, ce qui améliore grandement l’immersion. »
Gros passif de gamers des cofondateurs
Ali est ingénieur, il a installé les ordinateurs et le réseau. Hakan est électricien, c’est à lui que la salle doit son système de câbles rétractables. Ils ont tous les deux « un gros passif de gamer » mais Hakan a aussi une passion pour l’éclairage LED et il s’est chargé d’en installer partout, ce qui donne à l’endroit un petit côté « K-2000« , un brin kitsch mais qui peut plaire aux « gamers », la cible de VR Portal.
Une trentaine de jeux sont déjà disponibles, qui peuvent être utilisés solo ou en équipe :
« C’est le grand avantage de notre salle, on peut jouer avec ses amis sans avoir chacun à débourser 2 000 à 2 500€ pour un PC plus un casque… Beaucoup viennent seuls pour essayer puis ils reviennent avec leurs amis. On compte beaucoup sur cette dynamique de groupe. »
Ali et Hakan ont pris de gros risques pour ouvrir cette salle, ils ont investi chacun 37 000€ de leurs économies personnelles car aucune banque n’a accepté de leur prêter le moindre argent pour démarrer leur activité. D’origine turque, Ali et Hakan ont-ils été victimes de discrimination bancaire, comme une enquête du Défenseur des droits l’a démontré à Villeurbanne ? Ali et Hakan n’en sont pas persuadés :
« On a travaillé un business plan détaillé avec un expert comptable depuis plusieurs mois mais les banques nous ont dit qu’il « n’existait pas de modèle » pour notre affaire. Et c’est vrai, le marché est naissant. Il y a moins d’une dizaine de salles comme la nôtre en France. Les technologies de gestion d’abonnement et des licences collectives pour les jeux commencent tout juste à arriver… Et on ne sait pas quels seront les évolutions des coûts du matériel pour l’avenir. Donc ça fait beaucoup d’inconnues. »
Démarrage en douceur
C’est pourquoi Ali et Hakan démarrent doucement : un seul salarié à mi-temps, des horaires d’ouvertures limités aux soirées et aux week-ends et la mobilisation de la famille proche pour la communication, la gestion, etc. Travailleur indépendant, Hakan garde ses missions ponctuelles tandis qu’Ali, ingénieur télécoms, reste salarié.
« On espère que ça va prendre et qu’on pourra se développer. Les premières semaines sont encourageantes alors qu’on n’a pas communiqué et qu’on a fonctionné uniquement sur réservation. Et puis il y a beaucoup de développements possibles : on peut accueillir des séminaires pour les entreprises, développer nos propres jeux, ouvrir plus de salles et installer des tapis pour simuler le déplacement. Le top du top, ce serait de s’installer dans une salle de 300 m², avec des équipements entièrement sans-fils : les utilisateurs emportent les ordinateurs dans un sac sur le dos et peuvent se déplacer, dans la réalité et dans le jeu. Une seule salle en Europe propose ça. »
Pour les tarifs, Ali et Hakan ont observé ce qui se pratiquait dans les salles similaires. Beaucoup oscillent autour de 20€ à 25€ de l’heure, les casques de VR Portal sont accessibles à partir de 19€ de l’heure. Des cartes d’abonnement permettent de faire baisser le coût horaire (100€ pour 7 heures). VR Portal propose aussi quelques consommations et espère installer un esprit « cyber-café » :
« On va créer une équipe strasbourgeoise pour faire des matchs contre d’autres salles de réalité virtuelle, comme L’Iréel à Lille par exemple. On devrait assez rapidement voir exister un petit tournoi national sur quelques jeux les plus importants. »
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