Robert Grossmann : pour l’UMP, pas de négociation possible avec le FN

Par Robert Grossmann

Le moment est venu de répondre à tous ceux qui culpabilisent l’UMP au prétexte que le score du FN est trop élevé. Je n’ai pas supporté ces professeurs de morale entartuffés qui, sur internet ou ailleurs, nous sommaient d’indiquer notre choix en cas de duel PS/FN, comme si nous étions suspects d’anti républicanisme, comme s’ils étaient propriétaires des vertus!

Si le FN est fort aujourd’hui plus qu’hier il faut en chercher les raisons dans les malheurs et les déceptions suscités par les dégradations sociales que la crise a amplifiées et que l’on demandait à Nicolas Sarkozy de régler.

C’est dès le début de la présidence puis peu à peu durant son mandat que les électeurs FN se sont silencieusement fabriqués puis révélés, de la même manière, symétriquement mais très exactement, que les électeurs Mélenchon : « génération colère et déception ».

Tenter de les récupére in extrémis en faisant une campagne droitière semblait donc voué à l’échec. Trop tard ! Osons le dire, les déçus et les meurtris, trop nombreux, ont provoqué de longue date la défaite de celui qui s’est débattu avec une crise aussi inattendue qu’inouïe, alors même qu’il s’est bien battu. Hollande lui aussi est allé à la pêche de l’électorat FN mais aucun moralisateur n’a pensé lui en faire reproche.

Cet électorat n’est pas fasciste.

Cet électorat n’est pas fasciste et il est urgent, comme Sarkozy y a parfaitement réussi en 2007, de le détourner du miroir aux alouettes qu’est le FN.

Mais ce n’est pas en embouchant les mêmes trompettes que Le Pen qu’on y réussira. C’est en apportant des réponses aux désespoirs de tant de nos concitoyens, réponses à la mondialisation, aux délocalisations, au chômage, à l’équilibre sociologique de la France, à une meilleure intégration des étrangers, aux violences dans les banlieues, aux trafics sous terrains, au rétablissement de l’ordre républicain dans chaque parcelle du territoire. Les travaux d’Hercule.

C’est désormais aux nouveaux gouvernants de s’y atteler. Y réussiront-ils ? Tout en le souhaitant pour la France on est en droit d’être sceptique.

L’UMP, mouvement de la droite républicaine et du centre, quant à elle, doit renouer avec les valeurs historiques du gaullisme et du centre, ses fondamentaux, bien oubliés sinon malmenés jusque là. Oui il faut remettre l’homme au centre de tout : « la seule querelle qui vaille est la querelle de l’homme ». Il faut renouer avec « la participation » de de Gaulle, privilégier une politique sociale forte, réhabiliter l’idée de nation, l’amour de la France et de sa grandeur.

Il faut une régionalisation plus avancée en ayant en mémoire le projet audacieux du 29 avril 1969.

Oui il faut privilégier l’esprit de la République contre les communautarismes. Oui il faut une Europe forte et protectrice, réconcilier les vrais gens du « peuple de France » avec cette Europe qui leur apparaît comme hostile.

Il ne faudrait surtout pas croire que le salut réside dans une alliance avec l’état major du FN. Pas de confusion entre une majorité de l’électorat du FN et l’état major des Le Pen. Ceux qui ont voté FN savent-ils que ce mouvement, même ripoliné sauce marine, est l’héritier du Pétainisme et de la collaboration, de l’OAS qui a tenté d’assassiner De Gaulle ? Savent-ils que papa le Pen était lié à des Waffen SS qu’il fit venir à ses congrès, notamment un dénommé Schoenbrunner ? Je ramène de vieilles lunes ? Tout a changé au FN ? Que nenni !

Papa, auteur du « détail de l’histoire » et de « Durafour crématoire », n’a jamais été exclu ni même renié de ce parti qui se voudrait respectable ! Marine n’est qu’une présentation cosmétique d’un nationalisme dévoyé, du racisme, de l’antisémitisme et des méthodes musclées. Comment les héritiers de de Gaulle ou de Robert Schumann pourraient-ils pactiser avec les héritiers de Pétain ?

Négocier avec l’état major du FN serait marchander son âme pour un plat de lentilles électorales. Pourtant, garder ses valeurs humanistes nécessite des vertus morales fortes lorsqu’on constate que le PS continue à instrumentaliser le vote FN.

Le grand défi de l’UMP ou de ses métamorphoses prévisibles consiste à rassembler le peuple de France et à faire revenir dans le giron de la république les électeurs qui, consciemment ou non, se sont égarés dans les extrêmes. Maintenant que la sommation s’est transformée en défaite loin toutefois du KO annoncé par la gauche, la reconstruction ne peut passer que par la pose de fondations ancrées dans nos valeurs humanistes. En un mot notre conception de l’homme est celle de la dignité si fortement concentrée dans le Non du 18 juin qui n’était que la reprise moderne du Non éternel affirmé par Antigone.

Robert Grossmann