Rien qu’à l’oreille, on peut flairer le succès d’une réunion publique ; celle réunissant les parents d’élèves de l’école primaire Marguerite Perey, lundi 28 août, n’y déroge pas. Tout commence doucement, pianissimo, alors que les familles attendent studieusement les explications sur l’organisation de la rentrée scolaire. Une semaine plus tôt, le mardi 22 août, ils découvraient dans un mail de la mairie que l’établissement de leurs enfants resterait fermé à cause de trois départs d’incendies, provoqués en réaction à la mort de Nahel durant l’été. Nocive pour la santé, la suie imprégnerait encore une partie des murs et du mobilier.
Une heure plus tard, c’est la cacophonie. Entre les indignations du public, les appels au silence venant de l’estrade et le vacarme des enfants, difficile de suivre. L’explication des élues de la Ville, des directrices d’école et du personnel de l’Académie de Strasbourg n’auront pas convaincu l’audience. Plusieurs parents dénoncent le manque de consultation, la communication tardive et les difficultés d’adaptation à l’organisation décidée pour la rentrée.
Redéploiement tactique des enfants
À l’estrade, la directrice académique adjointe des services de l’Éducation nationale, Valérie Bistos, se voulait pourtant rassurante. « Ce soir, nous voulons que vous soyez rassurés et éclairés dans la réorganisation que nous avons mis en place. » L’adjointe à la maire chargée de l’éducation, Hülliya Turan, renchérit :
« L’ensemble des partenaires sont présents pour offrir la scolarité la plus agréable possible pour les enfants. Toutes les conditions sont réunies pour que les enfants réintègrent l’école Marguerite Perey après la Toussaint. »
La directrice de l’école Marguerite Perey, Nathalie Amman, rappelle l’organisation de la rentrée : les quinze classes de l’élémentaire Marguerite Perey vont être réparties entre les écoles Wurtz et Langevin :
« La constitution des classes ne bougera pas, elles resteront les mêmes. Et concrètement, elles s’ajouteront aux classes des autres écoles. Dans une salle, il y aura donc deux fois treize enfants. »
Soit 26 élèves encadrés par deux instituteurs qui feront classe ensemble. « C’est quelque chose que l’on fait régulièrement dans d’autres contextes, comme dans les dernières semaines du CE1, pour habituer les enfants à être plus nombreux dans une pièce, » indique Nathalie Amman.
Cette organisation d’urgence allonge les temps de trajets pour les parents. Suivant l’endroit où ils habitent, cela peut représenter une dizaine de minutes supplémentaires pour déposer leurs enfants. Là aussi, la directrice se veut rassurante :
« Nous avons pris ça en compte, nous décalons de dix minutes toutes les sonneries. Désormais, les portes s’ouvriront à 8h30 et les enfants démarreront à 8h40, puis ils finiront à 12h10, etc. »
« Je suis déçue de la façon dont vous gérez les difficultés »
Après cette dernière annonce, le public s’agite soudain. Dès que le micro commence à circuler, Aida s’en saisit et n’hésite pas à être directe :
« On est à quelques jours de la rentrée et vous nous mettez face au fait accompli. J’aurais aimé qu’on soit consulté, on a des délégués pour ça. Et puis, pour les parents qui travaillent le matin, une minute, c’est une minute. Comment on fait, quand on a un enfant qu’on doit déposer à la maternelle Perey (qui reste ouverte NDLR) et d’autres à Wurtz ou Langevin ? Je suis déçue de la façon dont vous gérez les difficultés. »
Une longue acclamation appuie son propos, alors que les encadrants font la moue. La directrice de l’école Perey évoque timidement la constitution d’un « pédibus » – un ramassage scolaire à pied – que les parents pourraient mettre en place eux-mêmes. Hülliya Turan tente un retour au calme :
« Si on n’a pas le silence, on ne pourra pas se comprendre. Et si cette réunion se tient maintenant, c’est parce que nous étions en plein été, on ne pouvait pas prévenir les parents plus tôt. »
« Ça compte, ces minutes en plus »
En parallèle, les professeurs accrochent aux murs des affiches avec la composition des classes. Dans les minutes qui suivent, les parents désertent progressivement leurs chaises pour voir ces listes et des enfants commencent à gambader dans le gymnase. Après environ une heure de discussion, dans le brouhaha, la fin de la réunion est actée.
Venue avec sa fille, Myriam reste déçue à la fin de la séance :
« On était assis derrière, on n’entendait pas tout. Et pour la rentrée, j’aurais aimé qu’on nous demande à quel établissement on souhaite être transférés, pour moi c’est plus rapide d’aller à Langevin. Je commence à bosser à 9h à l’hôpital d’Hautepierre et je n’ai pas de voiture, ça compte ces minutes en plus. »
Pour économiser du temps, plusieurs parents auraient souhaité que les enfants soient accompagnés vers l’école. « La Ville aurait pu mettre en place un pédibus, plaide Yasmine. L’église du quartier le fait pour accompagner les enfants qui vont vers l’aide aux devoirs de la paroisse, ça ne me paraît pas si difficile à organiser. Si on avait consulté les parents, on aurait pu leur suggérer. »
Belinda abonde, en insistant sur la sécurité des enfants : « Il y a un petit qui s’est fait heurter par une voiture à vélo dans la rue devant, juste avant l’été. Pour moi, il y aura deux rues à traverser, je ne peux pas envoyer mon fils seul. »
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