En 2008, Jean Waline et Olivier Bitz étaient adversaires. Aux élections cantonales (devenues départementales), le jeune Olivier Bitz (PS), aujourd’hui adjoint au maire en charge du dossier de la rénovation des bains muncipaux poussait, à la surprise générale, le professeur Waline (droite) à la retraite politique, après 31 ans de carrière. Vendredi 16 octobre, le passé était mis de côté. Le professeur de droit et ancien membre du Conseil constitutionnel était invité à parler de « l’évolution du service public » aux bains municipaux, en tant que Strasbourgeois attaché et usager du lieu.
Et cela tombe bien, il avait le même avis que la municipalité : ce qui est ouvert au public doit le rester, dépenser pour rénover coûte trop cher (la somme de 30 à 40 millions d’euros à toujours été avancée sans que les études associées soient publiées), il faut confier la gestion du lieu à quelqu’un d’autre et il faut ouvrir les espaces inoccupés pour le futur exploitant, qui paiera la rénovation.
L’universitaire, qui a d’ailleurs jugé nécessaire de préciser deux fois sur le fait qu’il était là en tant qu’homme « libre » et « indépendant », s’est expliqué chiffres à l’appui. En 2013 comme 2014, plus de 150 000 entrées ont été enregistrées. Le budget est passé 3,1 millions d’euros à 2,9, alors qu’en revanche les recettes ont grimpé de 377 000 à 405 000 euros de recettes.
Défendre les choix
Interpellé lundi au conseil municipal par l’opposition sur le faible dialogue dans la première réunion, le maire Roland Ries (PS) avait répondu que certes il y avait « une concertation », mais qu’il avait avant tout fixé « un cadre », à savoir confier la gestion du bâtiment à un prestataire extérieur. Quand bien même certains ne sont pas d’accord avec celui-ci, ce cadre ne peut être remis en cause. Lors de cette deuxième réunion les intervenants ont surtout justifié ce cadre.
Pierre Laplane, directeur général des services de l’Eurométropole a expliqué que certains services publics n’étaient plus rendus par les agents de la collectivité et a détaillé les autres modes de gestion déjà en place à Strasbourg (convention, délégation etc.) qui garantissaient tout de même un « contrôle ». Pour la première fois l’économie en faisant recours à l’externalisation des activités de nettoyage des écoles et des piscines a été avancé. « Là où la collectivité payait 100, elle débourse 60 ». Cependant, l’exploitation sociale et précarisation des travailleurs par ces entreprises, dénoncée par des syndicats ou agents n’a pas été soulevée.
Alexandre Feltz (sans étiquette), adjoint à la Santé publique a, lui, détaillé le programme Sport ordonnance, qui doit bénéficier de davantage de créneaux dans les bassins de la piscine de la Victoire. Interpellé sur les bienfaits du sauna pour la santé « qui me font renoncer à mes séances de kiné », dixit un participante, il a répondu que cela correspondait à une activité de bien-être importante, mais qu’aucune étude ne prouvait qu’elle guérissait de maladies.
« Pas question de fermer les bains » pour Olivier Bitz
Votée en juin, une « charte de la rénovation » devait rassurer les citoyens, mais les participants (plus nombreux qu’à la première réunion, proches des quatre-vingt dix), ne l’ont pas comprise comme les rédacteurs. La phrase le « maintien d’activité de baignade » (au singulier) au même prix que les autres piscines de l’Eurométropole a été comme « juste une piscine sur les deux et pas les bains ». L’adjoint Olivier Bitz a affirmé que cela signifie bien les deux piscines et aussi les bains et sauna.
Après la réunion, l’adjoint Olivier Bitz estime que ces réunions servent à désamorcer l’incompréhension :
« Il n’est pas question de fermer les bains romains et sauna. Mais je ne m’engage pas sur un prix futur, car la priorité est de donner plus de créneaux au Sport sur ordonnance, dont les enjeux en santé sont plus important. »
Le prix des sauna et bains en questions
Pour autant les débats se crispent sur cette thématique, en partie car aucun budget séparé des activités n’est présenté, mais que cette activité est jugée aujourd’hui trop coûteuse. Olivier Bitz a avancé que les recettes sont de 8,84€ de recettes par entrée, pour un coût total de 26€, la différence étant prise en charge par la collectivité. Une moyenne qui a beaucoup fait réagir l’assemblée, alors que les entrées sont à 15€ et les abonnements ont été supprimés. Il reste cependant des tarifs réduits sous conditions à 8€ et 30€ les 5 entrées, mais cette proportion étonne.
Les participants, qui mettent en avant les milieux modestes qui fréquentent le lieu et comprennent mal que la part de la collectivité doivent baisser quand cela n’est pas remis en question dans d’autres domaines. L’exemple de l’Opéra, dans des proportions bien plus élevées, est revenu plusieurs fois.
Après les échanges, voici la direction que prennent les débats :
- Il y aura un seul exploitant privé de tout le bâtiment, dans un contrat encadré avec la Ville et l’Eurométropole propriétaire.
- La trentaine d’agents de l’Eurométropole ne travaillera plus sur ce site. La collectivité compte employer 1 000 agents de moins en 2020/2022 (de 8200 à 7400 salariés environ) pour stabiliser les dépenses de personnel.
- Les espaces rénovés devront générer une nouvelle activité, rentable, permettant de financer les activités maintenues.
- Le sauna et les bains bains romains ne devraient pas être fermé, leur prix pourrait en revanche augmenter.
- Les créneaux pour les activités de Sport sur ordonnance seront augmentés, ceux de natation réduits s’il n’y a pas de nouveau bassin construit.
- Quelques baignoires et douches resteront à disposition (entre 10 et 12 usagers s’y rendent tous les jours)
- Les piscines seront au même prix qu’ailleurs dans l’Eurométropole.
Un restaurant ? Un institut de formation ?
Les réunions publiques devraient en théorie davantage porter sur l’utilisation des autres parties du bâtiment, notamment la cour arrière actuellement utilisée comme parking pour les employés (une piscine extérieure avait été envisagée en 2009) ou les 5 000m², la moitié de la surface, successivement abandonnés par les municipalités. Olivier Bitz a toujours dit que ces questions n’étaient pas tranchées. L’idée d’un restaurant (sans plus de détail sur le type) a par exemple été évoquée et ne soulève pas d’opposition.
Reste qu’une activité de restauration ne permettra pas de compenser les 2,5 millions de déficit actuels, auxquels s’ajouteront la prise en charge des lourds travaux de rénovation. Olivier Bitz propose aussi à l’issue de la réunion la mise en place un institut de formation pour les intervenants dans le programme Sport sur ordonnance, un dispositif qui va s’élargir à la France entière avec la loi de Santé.
Bien qu’en désaccord avec « le cadre »? Bernard Aghina du collectif « la Victoire pour tous » voit un motif de satisfaction des réunions :
« On dirait qu’il y a une meilleure prise en compte de l’attachement au lieu et au fait de pouvoir continuer à y accéder. La piste de l’hôtel de luxe, ce qui exclurait beaucoup de Strasbourgeois du site, semble un peu moins forte qu’il y a quelques mois. Mais il faut rester vigilant. »
Il reste cependant peu clair en quoi ces réunions impactent la rédaction de l’étude prévue pour décembre, notamment car les débats portent sur ce qui doit être préservé et non ce qui peut être fait. Le directeur de la société publique locale Deux Rives Eric Bazard a assisté aux deux réunions :
« Je découvre que les Bains n’étaient pas un lieu de loisir et que les enjeux évoluent avec les époques. Dans tout ce qui est demandé rien ne semble infaisable. Nos travaux ne doivent pas déterminer si c’est au privé ou au public de gérer le lieu, mais de savoir ce qui est possible sur le plan technique. Reste à trouver l’équilibre financier. »
La dernière réunion est prévue le vendredi 30 octobre, toujours en salle Louis Pasteur au Palais universitaire à 19h, en présence du maire Roland Ries.
Aller plus loin
Sur Rue89 Strasbourg : Trois choses à savoir sur la première réunion sur les Bains municipaux
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