Enquêtes et actualité à Strasbourg et Eurométropole

Quand des nuages de fumées se dégageaient du port du Rhin

Alors que les Strasbourgeois redécouvrent leur port à l’occasion de l’extension du tramway au delà du Rhin, voici quelques images d’archives issues de son passé industriel. À l’époque, le port était un noeud logistique pour les énergies fossiles et d’immenses tours stockaient de la vapeur pour produire de l’électricité, dans un vacarme assourdissant !

Vidéo

Cet article est en accès libre. Pour soutenir Rue89 Strasbourg, abonnez-vous.


Aujourd’hui au port du Rhin, les foodtrucks s’installent en masse, les artistes remplacent les ouvriers à la Coop et de nouveaux habitants investissent ce quartier qui était loin de tout avant que le tramway ne revienne le relier au centre-ville de Strasbourg.

Mais qui se souvient du port industriel ? Les deux grues sur les docks Malraux témoignent d’un passé qui a été balayé en une dizaine d’années mais dont certains se souviennent. Comme le montrent ces images d’archives de l’ORTF, diffusées par l’INA, les énormes installations du port s’hérissaient dès les bassins Austerlitz, Vauban et Citadelle. Car dans les années 50, le port de Strasbourg était un « hub » énergétique pour le pays, comme l’explique Didier Bonnet, journaliste et auteur de « Un port au coeur de la ville » :

« Dès le début du XXe siècle, la gestion du port de Strasbourg a été confié aux milieux économiques. De par sa situation, le port s’est trouvé en capacité d’être un noeud logistique pour les énergies fossiles à destination du reste du pays, avec le pétrole qui venait de Rotterdam et le charbon de la Ruhr. Le port a aussi reçu un coup de pouce de l’État, afin de bénéficier d’une taxation identique à celle des ports de mer… Il s’en est suivi un âge d’or avec l’installation d’industries lourdes consommatrices d’énergie : papeterie, génie mécanique, acieries et même du textile dans toute la zone du port sud… »

Aujourd’hui, certaines de ces usines existent encore aujourd’hui mais ont changé de nom. Stracel est devenue Blue Paper, Solac est devenue NLMK Coating, etc. En revanche, le port a reculé par rapport à la ville et la plupart des installations visibles dans le film n’existent plus. Les grands portiques en acier (à 42 s.) étaient utilisés pour les charbonnages et ont été démontés dans les années 70.

À l’arrière plan, des armatures pour des réserves de vapeur (capture d’écran / INA)

D’immenses réservoirs de vapeur

À partir de 1 mn 15, ce sont les impressionnantes installations électriques. À l’époque la production d’électricité provenait du charbon et les usines de génération se trouvaient le long de ce qui s’appelle aujourd’hui l’avenue du Rhin. Didier Bonnet précise :

« À l’arrière plan, on aperçoit de grandes structures cylindriques. Ce sont des armatures qui guidaient une sorte de sac géant qui servait à stocker de la vapeur pour produire de l’électricité. Je me souviens du bruit et de la fumée que produisaient ces installations lorsqu’elles étaient en service, et qui nous fascinaient quand nous étions plus jeunes. On se trouve pas loin de l’actuel Vaisseau. »

À 2 mn, on aperçoit un chantier naval. Il a également disparu, le dernier bateau construit à Strasbourg a été lancé dans les années 60. Il s’agissait de navires de transports pouvant atteindre presque 100 mètres de long.

Quant aux gravures au début du film, elles montrent le « port de la tête noire », tel qu’il était dès le XIVe siècle à Strasbourg. Il se trouvait au niveau de l’actuelle Ancienne Douane. On voit aussi une gravure du canal de Zurich, qui permettait de relier le Rhin, inexploitable à cette époque (relire l’épisode de notre série « Au bout de la rue, la ville » consacré au port du Rhin).

Pour Didier Bonnet, le port du Rhin actuel n’a pas démérité :

« À la fin du Moyen-Âge, les bourgeois de Strasbourg ont voulu se payer la plus grosse grue de l’époque. Et ils l’ont fait, elle pouvait alors soulever des chargement d’une tonne, du vin essentiellement. Aujourd’hui, le port autonome s’enorgueillit de disposer de la plus importante machine de levage de l’espace rhénan, capable de soulever plus de 500 tonnes, ce qui est pratique lorsqu’il faut charger les pièces en provenance d’Alstom notamment. Ils sont toujours dans la même tradition qui consiste à disposer du meilleur équipement de leur secteur. »


#archives

Activez les notifications pour être alerté des nouveaux articles publiés en lien avec ce sujet.

Voir tous les articles
Partager
Plus d'options