Jean-Claude Meyer est né en 1946, au 36 rue de la Krutenau. Presque en face de l’ancienne manufacture des tabacs, juste derrière l’usine de torréfaction des cafés Brosio. Après-guerre, le quartier porte les marques des bombardements. Le terrain de jeu préféré de la bande de gamins à laquelle il appartient est d’ailleurs une caserne de huit étages, partiellement détruite, là où se dresse aujourd’hui le parking des Bateliers. À l’époque, il n’y avait pas ou très peu de voitures dans les rues.
Dans cet épisode de « Mémoire de quartier », il revient sur sa jeunesse dans une Krutenau « haut-les-mains », entre « guerre des boutons » en bandes rivales et bagarres au moment de la foire. « Tous les prétextes étaient bons pour se battre », glisse t-il dans un sourire, presque nostalgique. Il livre aussi quelques anecdotes sur un ancien camarade de classe devenu célèbre : Simon Schneider, aussi connu comme le « Arsène Lupin alsacien. »
Jusque dans les années 70-80, la Krutenau est un quartier ouvrier. La manufacture des tabacs emploie alors 800 employées, des femmes en majorité. En 1945, elle produit la moitié des cigares français. À l’autre bout de l’actuelle rue de Zurich, l’ancien arsenal militaire abrite l’usine Baco (anciennement Baumgarten & Compagnie). Elle est transférée à la Meinau en 1964. « La rue du Maréchal Juin n’existait pas, se souvient Jean-Claude Meyer. C’était une espèce d’impasse qui donnait sur l’usine. »
Le quartier compte aussi de nombreux commerces et artisans. Comme la confiserie Robin, entre 1924 et 1975, au 2 rue Paul Janet. Ou encore les fameux cafés Brosio, dont le magasin de vente se situe rue de Zurich. On y trouve également un cinéma, dans le bâtiment de l’actuel TJP, rue des Balayeurs. Théâtre et cinéma en 1929, le Podium devient « Cinéma Brasserie Krutenau » en 1935 jusqu’en 1951, puis « le Rexy » dans les années 50. « On y allait tout le temps, se remémore Jean-Claude Meyer. Mais il a fermé dans les années 60. »
Mais les usines comme les ouvriers disparaissent à partir des années 70, lorsque l’opération de réhabilitation du quartier débute. Les usines ferment. Les commerçants et artisans prennent leur retraite. Mais Jean-Claude lui, reste. Ancien poseur de faux-plafonds, puis vendeur chez les cafés Brosio, il profite aujourd’hui de sa retraite à quelques rues de là où il a grandi.
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