Une manifestation était organisée ce mardi 3 octobre pour alerter sur l’absence de moyens et d’effectifs au sein des accompagnants d’élèves en situation de handicap. Plus largement, l’intersyndicale dénonce le manque de reconnaissance de la profession.
Ce mardi matin, Koenigshoffen se réveille par un concert de sonnettes et de sifflets. Traversant le quartier, un cortège réunissant pêle-mêle des AESH (Accompagnants des élèves en situation de handicap), des enseignants et des parents d’élèves, tente de faire le plus de bruit possible pour se faire entendre. Marchant de l’école Camille Clauss jusqu’au rectorat de l’Académie de Strasbourg, la manifestation alerte sur la faiblesse du salaire, les problèmes récurrents d’effectifs et l’absence d’un vrai statut pour les AESH.
La mobilisation répond à l’appel national lancé par plusieurs syndicats de l’éducation, comme la FSU, la CGT Éduc’action, ou la FCPE. À Strasbourg, une cinquantaine de personnes se sont mobilisées pour tenter de faire entendre leurs revendications. Les écoles élémentaires Camille Clauss à Koenigshoffen et Marcelle Cahn à Poteries étaient fermées ce matin.
Depuis l’école Camille Clauss, les manifestants se rendent à pied vers le rectorat. Photo : RG / Rue89Strasbourg / cc
Peu d’attractivité, peu d’effectif
Malgré la taille réduite du cortège, les AESH paraissent satisfaites. « L’année dernière, pour une manif similaire, on était qu’une quinzaine », glisse Kankou, AESH à l’école du Hohberg. Même satisfaction pour Dalenda, qui travaille dans l’école primaire Camille Clauss. « J’avais l’impression d’être incomprise. Mais le fait de voir tous les enseignants nous suivre, ça nous réconforte, on avait besoin de ça. »
Dalenda (à droite) marche avec deux de ses collègues AESH de l’école Camille Clauss. Photo : RG/ Rue89Strasbourg / cc
Au sein de son établissement, enseignants et AESH profitent de la journée pour alerter le rectorat sur une absence d’effectifs qu’ils jugent intenable : pour dix élèves notifiés en situation de handicap, ils ne disposent que de trois accompagnants et demi. En plus des enfants et des parents d’élèves, la situation affecte le reste du personnel, comme Justine qui enseigne à Camille Clauss :
« Nous, on se sent démunis, on n’est pas formés pour gérer ça. Alors, quand quelque chose arrive et qu’il n’y a pas d’AESH, on doit bricoler. Parfois, ça peut être des enfants qui se mettent en danger, ou mettent en danger les autres enfants. Ça représente du stress supplémentaire à gérer. »
Parmi les raisons qui expliquent cette pénurie de personnel, la faible rémunération revient fréquemment dans les discussions et sur les pancartes. « Le mois dernier, j’ai gagné 982 euros et 55 centimes, pour 24h de présence. J’ai onze ans d’ancienneté. » Fiche de paye à la main, Delphine montre du doigt les faibles sommes qu’elle touche tous les mois, pour nourrir ses trois enfants. Malgré cela, la quadragénaire affirme tenir à son métier :
« Jamais je ne regretterai ce choix. J’ai fait ce métier parce que je le voulais, parce qu’il y a beaucoup d’humanité dedans. On aide des enfants en souffrance, et on reste dans le métier pour eux. »
Delphine est AESH depuis 11 ans à Strasbourg. Photo : RG / Rue89 Strasbourg / cc
Absence de statut
Alors que la mobilisation arrive au rectorat, aucun interlocuteur ne se présente pour échanger avec les manifestants. Des prises de paroles s’improvisent, on raconte ses expériences, ses galères. Le manque de formation des AESH face à la pluralité des handicaps revient très fréquemment dans la bouche des travailleurs concernés.
Les manifestants collent leurs doléances devant le rectorat. Photo : RG/ Rue89 Strasbourg / cc
Florence Fogelgesang, la co-secrétaire départementale de la FSU, espère comme beaucoup l’obtention d’un vrai statut pour les concernés :
« Pour le moment, ils sont dans un no man’s land. Il n’y a pas de feuille de mission, on leur demande tout et n’importe quoi. Cette journée de grève, c’est aussi pour ça : que les AESH deviennent un vrai métier, avec un statut défini, comme fonctionnaire de catégorie B. (…) Les travailleurs dont on parle, ce sont essentiellement des femmes avec des enfants, dans des situations précaires qui vivent avec la peur de se faire virer. Sécuriser les emplois, ça aiderait déjà à réduire le turn-over. »
Progressivement, d’autres petits cortèges se rejoignent à la rue de la Toussaint, devant le rectorat. Finalement, une délégation sera reçue vers 11h. Elle en sort avec peu de gains, relate Florence Fogelgesang : « On n’a pas obtenu grand chose, à part la promesse de formations plus concrètes, mais sans plus de détails. La secrétaire générale de l’Académie de Strasbourg s’est également engagée à vivre une journée dans la peau d’une AESH, à l’école Saint-Jean. Mais là encore, on ne sait pas quand. » Le collectif reste mobilisé en attendant des mesures plus concrètes, assure la syndicaliste.
Par un arrêté publié le 28 septembre, la préfecture du Haut-Rhin autorise le début des travaux du confinement des 42 000 tonnes de déchets toxiques de Stocamine.
L’autorisation de confiner les déchets dangereux de Stocamine a été publiée ce jeudi 28 septembre. Dans un arrêté volumineux, la préfecture du Haut-Rhin acte le « stockage confiné, pour une durée illimitée, en couches géologiques profondes » des déchets dangereux à Wittelsheim. La société des Mines de Potasse d’Alsace (MDPA) devra procéder aux travaux de confinement et à la « surveillance » des effets du stockage, notamment sur la nappe phréatique.
Le site de Stocamine se trouve sous la commune de Wittelsheim. Photo : Mathilde Cybulski / Rue89 Strasbourg
L’arrêté était attendu depuis plusieurs semaines par les élus alsaciens, les industriels des MDPA et les opposants au confinement définitif. L’association Alsace Nature, qui demande l’extraction des 42 000 tonnes de déchets ultimes déposera « dans les jours qui viennent » un recours devant le tribunal administratif, pour tenter de bloquer ces travaux censés durer 42 mois.
Le 26 juillet, le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu avait confirmé aux élus locaux que l’État était favorable à l’enfouissement définitif.
Patients géorgiens : aux frontières de la santé (1/3). Malade depuis l’enfance, Juka, 25 ans, est venu en France avec sa famille en 2017. Pour survivre et parce que les soins dans son pays de naissance n’étaient pas accessibles, le jeune homme fait partie des dizaines de Géorgiens soignés par les Hôpitaux universitaires de Strasbourg.
À la table d’un café du quartier gare, à Strasbourg, Juka peine encore à commander sa boisson en Français. « Je veux prendre des cours. Mais avec la dialyse trois fois par semaine, c’est compliqué », concède-t-il. Arrivé en France fin 2017 avec sa mère et sa sœur, le jeune homme originaire de Géorgie souffre depuis tout petit d’urétérohydronéphrose chronique. Une maladie qui affecte la vessie et les reins, parfois de façon irréversible et qui provoque des douleurs lombaires. « J’ai été diagnostiqué dès mes 10 mois », précise-t-il. Dans son pays d’origine, selon lui, impossible d’être soigné correctement.
Malade malgré deux opérations
« J’ai été opéré deux fois en Géorgie quand j’avais trois puis cinq ans, de la vessie et des reins, mais je suis toujours malade », explique-t-il. Depuis le 30 novembre 2022, Juka doit se rendre au centre de dialyse trois fois par semaine, car son état de santé s’aggrave. « Mes reins ne filtrent plus suffisamment si on ne les aide pas », explique-t-il avant de détailler ses analyses médicales.
Il est inscrit sur la liste des personnes en attente d’une greffe de rein. « S’ils en ont un, ils m’appellent et je me fais opérer », résume le jeune homme. Une perspective qui semble le soulager et pour laquelle il a obtenu un titre de séjour « vie privée et familiale » pour raison de santé en 2019. Visa qu’il renouvelle tous les ans auprès de la préfecture.
À son arrivée en France, Juka et sa famille ont d’abord demandé l’asile politique, sans préciser que son état de santé nécessitait une prise en charge spécifique. « C’est ma mère qui s’en est chargée, j’étais très jeune à l’époque et elle n’avait pas trop compris comment ça fonctionnait », explique le jeune homme.
Des interprètes géorgiens à l’hôpital
Juka n’a pas attendu d’avoir des papiers pour prendre rendez-vous à l’hôpital. Muni de son dossier médical en géorgien, il téléphone au Nouvel hôpital civil dès 2018 et obtient son premier rendez-vous le 15 mai, sans intermédiaire et en trouvant seul le contact du service compétent pour le prendre en charge :
« Le jour de mon rendez-vous, il y avait un interprète avec moi donc c’était très facile de se comprendre. Le médecin du service de néphrologie a dit que m’opérer serait facile, qu’il faudrait qu’on me greffe un rein, mais il ne savait pas quand ça serait possible. »
Pour les patients qui ne parlent pas français, l’hôpital fait régulièrement appel à des interprètes. En 2022, l’association Migration Santé Alsace a dispensé 5 040 heures d’interprétariat en Alsace en langue géorgienne, dans des établissements hospitaliers et médicaux-sociaux. « C’est la langue où la demande était la plus forte en 2022, et cette demande augmente encore », précise Marie Priqueler, directrice de l’association. Entre sept et huit personnes assurent cet interprétariat au sein de la structure.
Juka, 25 ans, est arrivé en France depuis la Géorgie fin 2017 et bénéficie désormais d’un titre de séjour lui permettant de se faire soigner. Photo : CB / Rue89 Strasbourg / cc
Autour de lui, beaucoup de Géorgiens malades
En attendant cette greffe, Juka doit subir des examens médicaux – scanner, IRM, prises de sang – une fois par mois en moyenne. Il va au centre de dialyse où il passe trois heures dans une salle entouré de trois autres malades, les lundis, mercredis et jeudis… « Il y a beaucoup de personnes d’autres nationalités, je pense que j’ai rencontré une soixantaine de Géorgiens là-bas, au centre de dialyse », assure-t-il.
Une affluence qui ne le surprend pas :
« En Géorgie, les médecins ce n’est pas comme en France. J’habitais à Chaschuri, et je devais toujours me rendre à la capitale pour voir mon médecin. C’est à une heure de route en voiture. Car dans ma ville, il n’y avait qu’un seul chirurgien et la rumeur courrait qu’il opérait après avoir bu de l’alcool. Et même à Tbilissi (la capitale de la Géorgie, NDLR), le médecin m’a dit que je ne pourrai jamais être greffé d’un rein alors que c’est la seule solution pour que je guérisse. »
Une impossibilité surtout financière selon Juka. « Nous n’avions pas d’assurance là-bas », poursuit-il. « Même avoir accès à la dialyse, ça coûte entre 800 et 900 lari (environ 300 euros, ndlr) par séance, c’est beaucoup trop cher et ce n’est pas remboursé », appuie-t-il.
Pas de confiance dans les médecins de son pays
Dans un rapport de la clinique de droit de Sciences Po sorti en 2022, Léa Meltz et Isabella Barjon font état des difficultés pour avoir accès à des soins médicaux en Géorgie, tels que la greffe ou le changement de sexe. Le rapport fait état d’un entretien avec une oncologue à Kutaisi en février 2022, qui explique que « la greffe de reins n’existe pas en Géorgie, même si l’on parvient à trouver son propre donneur ».
Les étudiantes précisent que les modalités de remboursement pour certains soins sont peu élevées et ajoutent que les Géorgiens semblent avoir du mal à faire confiance à leur système de soin. Au-delà des problèmes financiers d’accès au soin, Juka avoue effectivement ne pas avoir confiance en les médecins de son pays :
« Avant ma naissance, mes parents ont eu un autre enfant qui est mort très jeune après avoir été opéré dans l’hôpital de notre ville. Il y a des vidéos de chaînes télévisées qui font état de situations où les docteurs ont maltraité des patients. »
« Ici, je n’ai pas peur de mourir »
En France, Juka a accès à des soins médicaux gratuitement. « Ici je n’ai pas peur de mourir, car je sais que les médecins sont compétents et que l’on peut me soigner », explique-t-il. En triturant ses lunettes de soleil, le jeune homme répète sa reconnaissance et dit être venu en France « pour survivre ».
À la Permanence d’Accès aux Soins de Santé (PASS) du nouvel hôpital civil, l’équipe menée par Sophie Darius accueille et oriente les patients quelle que soit leur pays d’origine et leur situation administrative. Parmi les Géorgiens qu’ils reçoivent, la soignante observe des pathologies plus diverses que celle liées à des insuffisances rénales.
Sophie Darius, cheffe de service de la PASS et Jérôme Penot, responsable du service social des HUS. Photo : CB / Rue89 Strasbourg
Mais les observations de Sophie Darius s’arrêtent là concernant les patients originaires de Géorgie. « On ne demande pas de carte avant de soigner les gens. Il ne nous appartient pas de déterminer si la personne a accès aux soins dans son pays d’origine », tranche Jérôme Penot, responsable du service social des Hôpitaux universitaires de Strasbourg (HUS) et référent social de la PASS :
« Penser au patient uniquement selon sa nationalité va à l’encontre de notre mission. Nous sommes un service public dont l’essence est l’égalité et le soin pour tous. On observe qu’il y a beaucoup de patients, qu’ils arrivent avec des parcours de vie parfois chaotiques et qu’il faut les accompagner et les soigner le mieux possible. Nous n’avons le temps pour rien d’autre. »
Un accompagnement médical et social
Parfois, l’équipe de la PASS est amenée à remplir des formulaires que les patients joignent à leurs demandes de titre de séjour, ou de régularisation. Ces formulaires peuvent être des « informations médicales qui viennent éclairer l’administration pour l’étude de la demande d’asile », précise Jérôme Penot.
Les deux assistants du service social et les deux secrétaires médico-sociales collaborent également avec le SIAO67, en charge de l’hébergement d’urgence, pour établir les critères de vulnérabilité des patients qui les consultent – ce qui influence leur priorité dans l’attribution d’un hébergement.
Depuis qu’il est en France, Juka a toujours pu être hébergé par les dispositifs prévus par l’État et il a désormais un titre de séjour en règle. Selon la loi, la France a déterminé que son « état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité » et qu’il « ne pourrait pas bénéficier effectivement [dans son pays d’origine] d’un traitement approprié. »
« On ne quitte pas son pays par plaisir »
En septembre 2023, Juka a du mal à se projeter en France. Mais il sait qu’il ne pourra peut-être jamais retourner dans le pays de sa langue maternelle. « Même après la greffe, il y a des soins lourds et je sais que je ne pourrai pas y avoir accès, même à Tbilissi », soupire-t-il.
Avant de venir à Strasbourg, Juka n’avait jamais été en France et ses amis habitent encore en Géorgie. Ils restent en contact par les réseaux sociaux. Une distance qui rend le jeune homme triste et parfois isolé :
« Bien sûr que je serais resté en Géorgie s’il y avait eu les médecins pour me soigner. On ne demande pas l’asile par plaisir, on ne quitte pas son pays par plaisir. »
Avec sa dialyse trois fois par semaine, Juka ne peut pas suivre de formation pour exercer un métier. Pourtant, il sait déjà qu’il aimerait être chauffeur de tram s’il devait rester à Strasbourg. « Ici j’ai ma sœur avec moi et ma mère, c’est déjà ça », relativise-t-il.
« La plupart des gens ne savent pas à qui s’adresser »
L’organisation Médecins du monde (MDM) va à la rencontre de personnes en situation de grande précarité, pour certaines vivant en squat, originaires de Géorgie et malades. Irakli, travailleur social, remarque que beaucoup d’entre eux ne sont pas dans la demande de soin :
« Quelle que soit leur pathologie, la plupart des gens ne savent pas à qui s’adresser lorsqu’ils arrivent en France. Ces personnes sont souvent isolées et c’est lorsque nous les rencontrons que nous les orientons. Elles souffrent souvent de maladies du foie, de handicaps ou de problèmes oncologiques. Toutes nous expliquent les difficultés d’accès au traitement en Géorgie, alors que c’est une question de vie ou de mort. »
Au fil de leurs maraudes dans les différents squats de Strasbourg, MDM constate que des patients pourtant pris en charge par l’hôpital finissent par retourner vivre à la rue et ont des difficultés administratives pour obtenir leurs papiers. « Il y a de moins en moins de visas délivrés pour les étrangers malades », explique Irakli, « et parfois deux personnes dans des situations similaires vont avoir des réponses différentes ».
Diplômée à Lille en 2012. Après Paris et Marseille, je me suis installée à Strasbourg en 2020. Je suis aujourd’hui indépendante en radio et web, pour Rue89 Strasbourg, Mediapart, Louie Media et France Culture. J’aime les reportages et les enquêtes au long cours, sur les sujets de société et sur notamment sur les violences sexistes et sexuelles.
Du 4 au 10 octobre, le festival de film FémiGouin’Fest vient mettre à l’honneur les femmes, les queers et les lesbiennes aux cinémas Star et au Cosmos. Une sixième édition plus ambitieuse avec des invitées de marque, des animations exclusives et des films pour tous.
Sept jours, treize films, six rencontres et des soirées à thèmes. Voilà pour la version augmentée de la sixième édition du FémiGouin’Fest, le festival de films lesbiens, queers et féministes. « On a eu tellement de succès en 2022 qu’on a été beaucoup plus ambitieuses cette année », s’enthousiasme Alice Renault, co-fondatrice du festival.
« On a de plus en plus de jeunes et de queers et en même temps, notre public devient de plus en plus éclectique. Ça montre la demande pour ce genre d’évènements et ça nous donne de la force pour en faire plus, » explique Julie Picard, responsable des publics des cinémas Star, qui co-organise l’évènement.
Du 4 au 10 octobre, les cinémas Star et le Cosmos se transformeront en un espace dédié au matrimoine. « C’est un acte militant et politique qui vise à faire émerger les films que nous avons sélectionné », poursuit Alice. « C’est du militantisme d’agir dans le milieu culturel. Il s’agit de prendre cette place, de l’occuper et de sentir la puissance collective pendant ces sept jours », conclut Julie.
Des films pour les initiées…
Pour les habitué·es du festival, Alice recommande la séance spéciale dédicacée aux pionnières du cinéma lesbien avec le documentaire Dykes, camera, action, samedi 7 octobre, à 19h15 au Star :
« Un bel hommage aux éditions précédentes du festival, car il est fait mention de films que nous avons déjà projetés. Un documentaire qui retrace les parcours et les obstacles rencontrés par des réalisatrices lesbiennes et queers, depuis les années 1970 et surtout aux États-Unis. Et où on comprend que leur invisibilisation en France est flagrante. »
Autre recommandation de Julie pour les habitué·es, Orlando, ma biographie politique. Réalisé par Paul B. Preciado, c’est un film « pointu, à la frontière du documentaire et du théâtre, de l’expérimental et de la littérature ». Avec des extraits de textes de Virginia Wolf, du réalisateur et des personnages eux-mêmes, le film vient mêler les perceptions et les narratifs.
La séance est prévue en avant-première, mercredi 4 octobre à 19h30 au Star, et sera suivie d’une rencontre avec l’actrice Naelle Dariya.
Visuel du film Orlando, ma biographie politique. Photo : document remis
Des projections pour rencontrer le cinéma queer et lesbien
Pour les spectateurs et spectatrices qui découvriront le festival, Julie, des cinémas Star, recommande d’aller voir les trois premiers épisodes de la série Split (qui sortira prochainement sur France TV Slash), lundi 9 octobre à 19h45 au Cosmos :
« Elle est produite par Iris Brey et met en scène une histoire d’amour lesbienne accessible au grand public, c’est une vraie romance, pas un drame ni un documentaire. »
De son côté, Alice, co-fondatrice du festival, conseille Les sentiers de l’oubli, projeté jeudi 5 octobre à 19h45, au Star :
« Le film aborde un sujet peu présent au cinéma : celui du désir d’une femme qui, après la mort de son mari, part habiter en ville. Elle y rencontre une voisine et commence le désir et ces questionnements. En plus les images sont magnifiques. »
Visuel du film Les sentiers de l’oubli. Photo : document remis
Alice et Julie conseillent toutes deux le film Lesbiennes, quelle histoire ?, didactique selon elles. « C’est certainement le plus accessible de tous nos films », estime Alice. Il sera projeté au Cosmos mardi 10 octobre à 20h30, et suivi d’une rencontre avec la réalisatrice Marie Labory.
Alice Coffin, astro bingo et goûter cosmique
La tête d’affiche la plus connue du festival est incontestablement Alice Coffin, journaliste, militante féministe et lesbienne, autrice du livre « Le Génie Lesbien » et élue écologiste à la mairie de Paris depuis 2020. « C’est vraiment en tant que militante qu’elle viendra parler samedi 7 octobre », précise Julie.
La journaliste donnera une conférence intitulée « Histoire, perspectives et enjeux de la visibilité lesbienne au cinéma » afin de rencontrer les intéressés dès 17h30 au cinéma Star Saint-Exupéry, rue du 22 novembre et dédicacer son ouvrage à l’issue de la rencontre.
Dans le cadre du festival, le Cosmos accueille aussi deux évènements axés sur l’astrologie dimanche 8 octobre. En premier lieu, l’astro-bingo du Cosmos, organisé par Julie, à 15 heures : « Il y aura des cartes qui font référence aux signes astrologiques, avec leurs caractéristiques, et des références à ces signes dans un film projeté », explique-t-elle. Avec, à la clé, des cadeaux.
Le même jour à 16h45 l’astrologue Astroterre « présentera son approche féministe de l’astrologie », à prix libre, sur la mezzanine du Cosmos.
Pour ce mois d’octobre, la sélection culture fait voyager. De la littérature italienne ou algérienne aux chants ukrainiens en passant par du cinéma espagnol et un festival de photographie à Mulhouse.
Festival européen du film fantastique, Musica, Bibliothèques idéales… Les grands rendez-vous culturels de la rentrée sont passés. Mais le mois d’octobre est aussi marqué par son lot de festivals et autres spectacles prometteurs. Le festival de cultures urbaines Opération Quartiers Populaires (OQP) a déjà commencé au Point d’Eau à Ostwald. S’ensuivent les journées de l’architecture les 13, 14 et 15 octobre, puis par la 32e édition nationale de la Fête de la science du 6 au 16 octobre. Ci-dessous, notre sélection culturelle du mois, qui prend des airs de voyage, de la littérature italienne ou algérienne aux chants ukrainiens en passant par le dixième anniversaire de la biennale de photographie de Mulhouse.
FemiGouin’Fest met à l’honneur le cinéma queer et feministe
Le festival du film lesbien et féministe strasbourgeois est programmé du 4 au 10 octobre aux Cinémas Star et au Cosmos. L’occasion de se refaire quelques classiques, mais aussi de découvrir des pépites. À commencer par le film d’ouverture, Orlando, ma biographie politique, réalisé par Paul B. Preceiado. Ce documentaire expérimental, réalisé par un incontournable artiste et penseur queer, s’inspire du roman de Virginia Woolf, Orlando. Dans cet ouvrage, le personnage principal change de genre. Le documentaire de Paul B. Preceiado poursuit cette histoire hors de la fiction. Vingt-six personnes trans et non-binaires, âgées de 8 à 70 ans, y incarnent le personnage d’Orlando au cours du récit. Une des actrices, Naelle Dariya, sera présente pour l’occasion !
Le FemiGouin’ Fest se tient cette année 4 au 10 octobre aux Cinémas Star et au Cosmos Photo : ACC / Rue89 Strasbourg
En plus des films, le festival se diversifie cette année en proposant des rencontres, notamment avec Alice Coffin samedi 7 octobre à 17h30 pour une conférence intitulée Histoire, perspectives et enjeux de la visibilité lesbienne au cinéma.
La journée du dimanche se déroulera sous le signe de l’astrologie au Cosmos. Avec un astro bingo animé par Madame de Kurbis, drag monster et Mizkeen, drag-queer, à réaliser en regardant le film Girlfriends and girlfriends de la réalisatrice espagnole Zaida Carmona.
Le Maillon donne la parole aux femmes victimes de guerre dans Mothers
Pour inaugurer sa saison, le Maillon propose une œuvre particulièrement ancrée dans l’actualité. Mothers. A song for wartime de Marta Górnicka, jouée dans la grande salle du théâtre les 4, 5 et 6 octobre, donne la parole aux victimes de la guerre en Ukraine. Prenant la forme d’un chœur chantant, 25 mères ukrainiennes, biélorusses et polonaises racontent dans leur langue (le spectacle sera surtitré en français) leur vécu, mais aussi leur lutte contre la destruction. Le chœur prend une dimension politique tout en rappelant les chansons populaires ukrainiennes comme le chtchedryck.
Mothers. A song for wartime de Marta Górnicka sera jouée dans la grande salle du théâtre les 4, 5 et 6 octobre, Photo : Michał Rumas
Ce n’est pas la première fois que Marta Górnicka, chanteuse et metteuse en scène, est programmée au Maillon. Elle y a déjà présenté Magnificat en 2012, Requiemmachine en 2014 et Hymn to love en 2018. Pour ce spectacle, elle s’est nourrie d’une expérience personnelle récente. Pendant plusieurs mois, l’artiste a organisé des ateliers à Varsovie avec des Ukrainiennes exilées, victimes de la guerre et des Biélorusses et des Polonaises qui les accueillent dans leur pays. En a émergé l’importance de la voix, de la culture et des chants ukrainiens, notamment comme moyen d’expression.
« Elles sont réfugiées, témoins de la violence et des bombardements. Celles qui ont fui avec leurs enfants en Pologne, à Varsovie ou dans d’autres villes d’Europe et d’ailleurs, veulent parler aujourd’hui, utiliser le pouvoir de leur voix pour nommer ce qui ne peut l’être », explique-t-elle dans une interview réalisée dans le cadre du festival d’Avignon. Mothers. A song for wartime, a été réalisé en coproduction avec le Maillon, qui accueille en octobre sa première française.
Au TNS, La Tendresse questionne la masculinité
« Qu’ont hérité les jeunes hommes des modes de pensée et d’éducation de leurs pères ? Quels rapports ont-ils avec les femmes, notamment après le mouvement #MeToo ? Quelles injonctions contradictoires pèsent sur eux ? » Voici une partie des questions qu’aborde La Tendresse, le premier spectacle de la saison 2023 proposé par le TNS, du 4 au 14 octobre. Dans cette pièce mise en scène par Julie Berès, huit acteurs et danseurs tentent de découvrir ensemble, avec leurs mots et leurs corps, ce que signifie appartenir au « groupe des hommes » aujourd’hui.
La Tendresse se joue au TNS du 4 au 14 octobre Photo : Axelle De Russé
Pratiquante de l’écriture de plateau et de la collaboration avec des dramaturges, des écrivains et des chorégraphes, Julie Berès a fait appel aux dramaturges Kevin Keiss et Lisa Guez ainsi qu’à l’autrice Alice Zeniter. Ensemble, ils se sont d’abord nourris d’essais sociologiques, philosophiques, de documentaires interrogeant les différentes masculinités. Ils ont ensuite rencontré une quarantaine de jeunes hommes issus de différents milieux. Il a été question de désir, de sexualité, d’héritage, d’argent, de sentiments, de tendresse… Puis l’écriture s’est finie sur le plateau, après avoir choisi huit interprètes.
« La Tendresse est un spectacle politique mais pas militant. Il parle d’une volonté de cette génération d’avoir le droit d’accéder à sa tendresse, sa faiblesse, l’aveu de ses échecs, sa fragilité, son émotion – le droit de pouvoir avouer ce qui la fait souffrir. »
Julie Berès, dans un entretien de Fanny Mentré
Deuxième édition du festival de lutte contre le harcèlement de rue
Discussions, ateliers, moments festifs… Pour la deuxième année, la militante féministe Emanouela Todorova propose cinq jours de festival contre le harcèlement dans l’espace public, du 9 au 13 octobre. Celle qui tient le compte DisBonjourSalePute sur Instagram, devenu une association de lutte contre le sexisme, propose une deuxième édition de son festival après le succès de la première dédiée au consentement. Un stand mobile évoluera au fil des jours du quartier de Krutenau à la gare en passant par Cronenbourg, l’orangerie et le campus d’Illkirch-Graffenstaden.
L’autrice et incluenceuse Camille Aumont Carnel sera présente le 12 octobre. L’année dernière, elle avait fait salle comble avec une rencontre riche en discussion avec le public. Photo : ACC / Rue89 Strasbourg
Parmi les rendez-vous à ne pas manquer, le drag show de la House of Marley qui aura lieu lors de la cérémonie d’ouverture à 20h au Milano Torino Mito, la table ronde Quelles sont les mesures appliquées en Europe le jeudi 12 octobre à 18 h et la lecture / rencontre avec Emanouela Todorova autour de son livre Dis Bonjour Sale Pute. Si la plupart des événements sont gratuits ou à prix libre, il est vivement conseillé de réserver chaque événement sur helloasso. La plupart des rendez-vous de l’année précédente étaient complets !
Le Festival Strasbourg – Méditerrannée évoque la littérature de l’exil
Cette année, Sedef Ecer, Assia Djebar, Hala Mohammad et Frantz Fanon seront mis à l’honneur. Photo : DR Stras-Med
À ne pas manquer, le spectacle autour du livre Trésor national, de la romancière franco-turque Sedef Ecer. Il aura lieu le 5 octobre à 20h30 au Cheval Blanc à Schiltigheim et proposera une plongée dans l’âge d’or du cinéma d’Istanbul, sur les traces d’une actrice et d’un pays marqué, entre 1960 et 2016, par quatre coups d’État.
Puis, direction l’Italie le 20 octobre, avec la rencontre proposée à l’Institut culturel italien et la poétesse, enseignante et traductrice Rossana Jemma. Dans son recueil La strada verso il canto, elle évoque le déracinement, le risque de perdre son identité, mais aussi le pouvoir cathartique de la poésie.
Enfin, à réaliser en autonomie, le parcours dans Strasbourg proposé pour rendre hommage à l’Algérienne Assia Djebar, académicienne et femme de lettres ayant été en résidence à Strasbourg. Tombée amoureuse de la ville, elle en a fait l’objet d’un roman, Les nuits de Strasbourg, paru chez Actes Sud. Le festival propose de revenir sur les pas de son héroïne avec un circuit, de l’ancienne prison de la rue du Fil à la flèche de la Cathédrale.
Exposition sur le rapport entre la photo et le monde contemporain à Mulhouse
Pour les dix ans de la Biennale de la photographie de Mulhouse (BPM), l’exposition « 10 ans / 10 photographes » débutera le samedi 7 octobre à la Maison des Bergers, le long du quai des Cigognes à Mulhouse. Jusqu’au 13 novembre, elle réunira dix photographes ayant participé aux cinq éditions précédentes du festival. Pour le vernissage samedi à 14h, une visite permettra de rencontrer les photographes Pascal Amoyel, Christophe Bourguedieu, Nathalie Wolff et Matthias Bumiller. L’organisation d’une table-ronde à 16h à la bibliothèque Grand’Rue questionnera ensuite les enjeux et perspectives des festivals photographiques.
Les visiteurs pourront notamment observer l’exposition de Céline Clanet, Les Îlots farouches à la Maison des Bergers à Mulhouse. Photo : Céline Clanet
La ligne directrice de l’évènement : la possibilité ou l’impossibilité d’habiter le monde transformé par l’activité humaine. Selon Anne Immelé, directrice artistique de la BPM, la programmation soulignera « le rapport de la production photographique à sa contemporanéité ». Les photographies exposées proposeront « des approches sensibles et politiques du monde contemporain », elles interrogeront « la tension entre la nature et l’humain, les frontières et contradictions de la société post-capitaliste ou encore la relation des individus à leur territoire de vie ».
Les collectifs Presse-Papiers et Prenons la Une appellent à un rassemblement partout en France mardi 3 octobre à 18h30 pour protester contre l’exploitation du travail de la journaliste Ariane Lavrilleux dans une enquête judiciaire. À Strasbourg, le rassemblement est prévu devant le tribunal.
Le 19 septembre, la journaliste indépendante Ariane Lavrilleux a été perquisitionnée à son domicile à Marseille par neuf agents de la Direction du renseignement intérieur (DGSI). Ils cherchaient des éléments pour trouver qui, au sein de leurs services, a informé la journaliste spécialisée sur les sujets de défense au Moyen-Orient. Dans une enquête publiée sur Disclose en novembre 2021, Ariane Lavrilleux a démontré que des moyens de surveillance antiterroristes fournis par la France à l’Égypte ont été détournés pour servir dans des opérations militaires égyptiennes contre des contrebandiers présumés.
« Selon les documents ”confidentiel-défense” obtenus par Disclose, les forces françaises auraient été impliquées dans au moins 19 bombardements contre des civils, entre 2016 et 2018. Les frappes détruisant souvent plusieurs véhicules, le nombre de victimes pourrait se chiffrer à plusieurs centaines. »
Extrait de l’enquête d’Ariane Lavrilleux pour Disclose, sur l’opération « Sirli ».
Une violation du secret des sources
Après une garde à vue de 39 heures, la journaliste n’a pas été mise en examen dans le cadre de cette enquête de la DGSI mais sept des dix scellés obtenus lors de la perquisition (des notes, des clés usb, des données informatiques) ont été versés à la procédure. Cette saisie constitue une violation du secret des sources, un principe garanti par la loi sur la liberté de la presse de 1881 et par l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’Homme. Cette atteinte a été autorisée par la justice au nom d’un « impératif prépondérant d’intérêt public », une disposition particulièrement floue, prévue par la loi Dati de 2010.
Pour protester contre cette menace contre la liberté de la presse, une liberté dont jouissent tous les Français, le collectif Prenons la Une et le collectif Presse-Papiers, dont fait partie Ariane Lavrilleux, appellent à un rassemblement devant les tribunaux de France mardi 3 octobre à 18h30. Le rassemblement strasbourgeois, à l’initiative de Rue89 Strasbourg, est prévu sur le parvis du tribunal judiciaire, quai Finkmatt.
Manifestation à Marseille le 19 septembre pendant la garde à vue d’Ariane Lavrilleux Photo : remise
Le gouvernement contre la presse
Le gouvernement ne semble pas prendre la mesure du problème. Depuis qu’a éclaté cette affaire, tous les ministres ont soigneusement évité de répondre aux questions des journalistes. Interrogé par un député à l’Assemblée nationale mardi 26 septembre, le ministre de la Justice Éric Dupont-Moretti a répondu laconiquement : « La justice de notre pays est totalement indépendante » sans répondre sur l’atteinte au secret des sources des journalistes.
Cette affaire illustre l’incapacité des gouvernements successifs d’Emmanuel Macron à préserver la liberté de la presse, après plusieurs lois restrictives, et alors que la France manœuvre auprès de la Commission européenne pour autoriser l’usage de logiciels espions contre les journalistes dans le Media Freedom Act, un règlement européen qui doit préserver le pluralisme et l’indépendance des médias. Ce texte est étudié au Parlement européen à partir de lundi 2 octobre. Ces affaires extrêmement graves surviennent alors que doivent débuter mardi 3 octobre des États généraux de l’information, voulus par l’Élysée.
Les conditions de travail et la faible rémunération des AESH fait de l’école inclusive une promesse vaine. Témoignages d’accompagnantes livrées à eux-mêmes et de mères démunies et parfois, à bout de force.
« Depuis que mon enfant va à l’école, j’ai dû arrêter de travailler ». Alors que son fils, atteint de troubles autistiques, est en classe de CE1, Clarisse doit parfois venir le chercher lorsqu’il fait des crises. « Sa scolarisation a toujours été compliquée, mais on a commencé à voir la lumière au bout du tunnel quand une AESH formée lui a été attribuée », poursuit-elle.
En 2005, la loi pour l’égalité des chances des personnes handicapées instaure le droit « pour chacun à une scolarisation en milieu ordinaire au plus près de son domicile, à un parcours scolaire continu et adapté ». 13 ans plus tard, Clarisse tient à ce que cette promesse soit respectée pour son enfant. « Je veux qu’il aille en classe avec les autres enfants. Laisser les élèves handicapés entre eux, ce n’est pas ça l’inclusion. Il faut que mon fils soit accepté tel qu’il est », insiste-t-elle.
À l’école maternelle Reuss du Neuhof Photo : Aline Fontaine / Rue89 Strasbourg / cc
Un accompagnement réduit
Les AESH, personnels de l’Éducation nationale, sont recrutés pour « favoriser l’autonomie des élèves en situation de handicap », précise la Maison départementale pour les personnes handicapées (MDPH) du Bas-Rhin. Mais le nombre d’AESH ne suffit pas à couvrir les besoins d’accompagnement dans le département. Selon une enquête ouverte par le syndicat FSU67-SNUipp début septembre, au moins 60 élèves qui ont droit à un suivi par une AESH sont sans accompagnement.
Depuis plus de 15 ans, Isabelle accompagne les élèves en situation de handicap. « J’ai été AED, puis AVS, puis ASH et enfin, AESH », raille-t-elle au téléphone, citant les nombreux changements d’acronymes qui désignent tous sa profession :
« Quand j’ai commencé, j’accompagnais un élève, 100% du temps. Cette année, j’en accompagne trois. On a tendance à penser que c’est déjà bien que les élèves soient accompagnés, mais il faut voir la qualité de cet accompagnement… »
Léa (le prénom a été modifié), également AESH dans le Bas-Rhin, précise :
« On travaille avec des enfants présentant tous types de handicap, de l’autisme au handicap moteur, les maladies génétiques, les enfants haut potentiel intellectuel, avec des troubles de l’attention et de l’hyperactivité, des dyslexiques, dyscalculiques. On peut avoir des enfants dans plusieurs niveaux, de la maternelle au lycée, parfois dans la même journée. Ca nous oblige à faire beaucoup de gymnastique en peu de temps. »
« On doit prioriser l’accompagnement des plus handicapés »
Léa ressent une pression de plus en plus forte lié au manque de personnel qualifié face à l’augmentation du nombre de demandes d’accompagnement :
« Il m’est arrivé de suivre un enfant, de voir sa progression, de le voir avancer et de ne plus pouvoir le suivre l’année d’après. Alors que c’est justement quand il y a du progrès qu’il ne faut pas le lâcher. J’ai l’impression qu’on doit prioriser l’accompagnement des plus handicapés. Les autres n’ont qu’à se débrouiller tous seuls. Alors que ce n’est pas du tout ça, l’essence de mon métier. »
Partant du même constat de l’augmentation de sa charge de travail, Juliette (le prénom a été modifié), AESH depuis plus de 10 ans, est plus virulente. « On est de véritables vaches à lait », assène-t-elle :
« Les écoles font leur cuisine interne pour que tout se passe bien avec les moyens qu’on leur donne. On nous demande de tout faire, de courir d’une classe à l’autre, de s’adapter aux élèves en peu de temps. Changer d’élève accompagné, ce n’est pas comme changer de bureau… Les enfants ressentent qu’on est surmenées. »
Une formation de 60 heures
Pour devenir AESH, une formation initiale de 60 heures est nécessaire avant la prise de poste. « Avec des modules spécifiques pour certains handicaps tels que l’autisme, et une formation continue basée sur le volontariat », précise Véronique Weibel, inspectrice de l’Éducation nationale chargée de l’adaptation scolaire et de la scolarisation des élèves handicapés.
« Entre ce qu’on vous vend sur le flyer et la réalité du terrain, il y a un monde », assène l’AESH Isabelle :
« On imagine que notre métier consiste à faire de l’accompagnement aux devoirs avec des enfants en difficulté scolaire. Mais ce n’est pas du tout ça, il s’agit d’enfants en situation de handicap. »
La conséquence de cette brève formation, selon les AESH interrogées, se résume en un mot : démissions. « Dès la rentrée, on m’a dit que l’AESH assignée à mon fils avait démissionné », témoigne Carole (le prénom a été modifié), maman d’un jeune garçon autiste, scolarisé dans une école maternelle de l’Eurométropole.
D’après le syndicat des professeurs des écoles FSU67-SNUipp, 70 AESH ont démissionné pendant l’été 2023 et un cinquième des AESH quitte l’Éducation nationale chaque année. « Les personnes trouvent un emploi mieux rémunéré ou avec de meilleures conditions de travail », appuie Agathe Konieczka, co-secrétaire départementale du syndicat. Un chiffre que Jean-Pierre Geneviève, directeur académique du Bas-Rhin, trouve élevé… sans être en capacité de fournir des statistiques sur la longévité des carrières d’AESH au sein de son académie.
800 euros par mois et un travail dans un supermarché
Juliette comprend tout à fait les raisons de ces démissions. Après plus de dix ans à son poste, elle gagne un peu plus qu’un SMIC pour des semaines de 39 heures. « Heureusement qu’il y a les vacances pour se reposer, souffle-t-elle, il faut vraiment aimer ce métier pour y rester ».
Pour son emploi d’AESH, en travaillant quatre jours par semaine, Léa touche 800 euros par mois, soit entre 29 et 35 euros par jour. « En plus, je travaille dans un supermarché trois fois par semaine et l’intégralité des vacances scolaires pour pouvoir boucler mes fins de mois », poursuit-elle.
« Si on fait ce métier, ce n’est ni pour l’argent ni pour la reconnaissance. C’est pour les enfants et pour leur être utile. Nos conditions de travail se dégradent, celles des enseignants aussi. Et ce sont les enfants et les parents qui pâtissent de tout ça. »
« Je vis cette absence comme une maltraitance »
Côté parents en effet, l’accompagnement de leurs enfants par une AESH qualifiée et disponible permet de retrouver confiance en l’école. « Mon fils a droit à une AESH pendant 12 heures par semaine, mais il a clairement besoin de quelqu’un à temps plein », soupire Carole (le prénom a été modifié).
« Mon fils est autiste et il appréhende le changement, donc je casse ma tirelire pour qu’il soit dans un établissement privé où il y a plus de moyens. Dès la rentrée, il n’y avait pas d’AESH. On n’arrête pas de me dire que quelqu’un va venir, mais je ne sais jamais quand. Je vis cette absence d’accompagnant comme une maltraitance. »
Carole se bat encore pour qu’une personne accompagne son fils à l’école. « C’est pour ça que je ne veux pas qu’on puisse m’identifier », précise-t-elle. Toutes les personnes anonymisées dans cet article ont peur que leur témoignage les pénalise. « Dans mon contrat, il est marqué que je ne dois pas critiquer l’institution (l’Éducation nationale, NDLR), » appuie l’AESH Léa.
Bagarre juridique et investissement financier
Le fils de Sabrina vient d’entrer au lycée. Selon la MDPH, il a droit à un accompagnement individualisé par une AESH. Mais c’est simplement après avoir menacé le rectorat de Strasbourg de les attaquer en justice et passé des dizaines d’appels au ministère de l’Éducation nationale qu’elle a obtenu un accompagnement effectif. « C’est fatiguant de se bagarrer pour faire respecter ses droits. Tous les parents n’ont pas cette énergie. Il n’y a pas d’égalité », regrette-t-elle.
Alors que le fils de Clarisse va bénéficier d’un accompagnement plus limité que l’année dernière en 2022/2023, la mère apporte toujours à l’école, en début d’année, du matériel adapté à son fils : déroulés visuels, contrats motivationnels, boîte sensorielle, casque anti-bruit, élastique de chaise, coussin de chaise, élastique de chaise… Le but : que l’enfant continue d’apprendre même quand aucun AESH n’est présente.
« Je me suis formée pour être capable de lui apprendre à lire et à écrire. On a équipé notre maison avec une pièce dédiée à son apprentissage pour les moments où c’était trop difficile d’aller à l’école », raconte-t-elle. En tout, elle et son conjoint ont dépensé plus de 14 000 euros entre l’aménagement d’une pièce Snoezelen (colonnes à bulles, fibre optique, musique douce…), le recours à des personnels de santé libéraux (éducatrice spécialisée, psychologue, psycho-motricienne, orthophoniste…) et le matériel prêté à l’école pour être en mesure de donner à leur enfant un cadre d’apprentissage adapté à ses besoins.
D’autre parents au bout du rouleau
Naïma a aussi arrêté de travailler lorsque son fils a été diagnostiqué autiste. « S’il n’est pas accompagné, mon fils ne peut pas aller à l’école, ça ne se passe pas bien », poursuit-elle. « Il fait des crises et a l’autonomie d’un enfant de quatre ans », poursuit-elle.
L’enfant est supposé aller neuf heures par semaine en classe, mais Naïma doit souvent venir le chercher. Parfois, elle renonce même à l’amener à l’école. « L’équipe enseignante fait tout ce qu’elle peut. Mais c’est moi qui dit à l’AESH comment se comporter avec mon fils. Elle ne sais pas comment le gérer. Il peut être très virulent dans ses crises et elle est toute petite. Il faut de la force », soupire-t-elle.
Souffrant d’un accompagnant défaillant, la mère de famille préfère que son fils soit pris en charge à l’hôpital plutôt qu’à l’école. « À l’hôpital de jour, ils sont formés et je sais que je n’ai pas à leur expliquer comment faire », poursuit-elle. Désormais, Naïma espère que son fils obtiendra une place dans un institut médico-éducatif plutôt qu’à l’école pour obtenir enfin un temps de répit et consacrer quelques heures par semaines à sa fille aînée, dont elle n’a pas le temps de s’occuper depuis la naissance de son petit frère.
Une mobilisation prévue le 3 octobre
Mardi 3 octobre, plusieurs syndicats appellent à manifester pour l’amélioration des conditions de travail des AESH dans le Bas-Rhin. « Pour que les choses changent, il faudrait qu’on arrête toutes ensemble de travailler », conclut Juliette : « Il faut que l’État n’ait pas le choix de regarder la réalité en face et qu’enfin on nous entende ». Pourtant, certaines AESH savent d’ores et déjà que manifester leur coûterait trop. « On est déjà si peu payés que faire grève n’est pas possible pour moi », déplore Léa.
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Lina, âgée de 15 ans, a disparu samedi 23 septembre à proximité de Plaine, alors qu’elle marchait en direction de la gare de Saint-Blaise-la-Roche pour prendre le train vers Strasbourg. Un important dispositif de recherche est déployé pour la retrouver. Deux juges d’instruction ont été saisis ce 1er octobre, ce qui donnera davantage de moyens à l’enquête.
Fanny a appelé la gendarmerie pour signaler la disparition de Lina, sa fille de 15 ans, vers 14h samedi 23 septembre. Cette dernière devait se rendre à la gare de Saint-Blaise-la-Roche depuis la commune de Plaine, où elle habite, pour prendre un train à midi en direction de Strasbourg. Lina parcourait à pied les 2,9 kilomètres séparant son domicile de la gare. Son petit ami qui l’attendait sur le quai à Strasbourg, a prévenu la mère de la jeune fille, ne la voyant pas descendre du train à l’heure d’arrivée prévue.
Une « enquête en disparition inquiétante » a été immédiatement ouverte par le parquet de Saverne. Des investigations ont été lancées après l’alerte, avec des fouilles sur l’itinéraire emprunté par Lina et des auditions de membres de sa famille et de ses amis. Pour l’heure, la procureure de Saverne Aline Clérot « n’écarte aucune piste ».
Aucune activité bancaire sur son compte
La jeune fille n’a pas donné signe de vie depuis samedi 11h20, heure à laquelle son petit ami a reçu un message vidéo de sa part. La procureure de Saverne a précisé mardi soir lors d’une conférence de presse que le téléphone de Lina a cessé d’émettre à exactement 11h22. Les fouilles n’ont pas permis de le retrouver. Elle a également ajouté :
Les premières recherches ont permis de démontrer que Lina n’était jamais montée à bord du train pour Strasbourg. La mineure n’apparaît pas sur les vidéos exploitées des caméras de vidéosurveillance placées à l’intérieur des rames du train qu’elle devait prendre et dans la gare de Strasbourg. L’absence de caméras à la gare de Saint-Blaise-la-Roche ne permet pas de vérifier si elle est arrivée jusque là.
Aucune activité bancaire sur son compte n’a été constatée depuis sa disparition. De plus, son entourage n’a déclaré « aucune fugue récente ou ancienne permettant d’accréditer une disparition volontaire », selon la procureure de Saverne.
Plusieurs ratissages sans résultats
Depuis samedi, une équipe cynophile, un hélicoptère et des drones sont intervenus pour tenter de retrouver Lina. Lundi, une centaine de bénévoles ont participé à une battue avec la gendarmerie dans le secteur de Plaine. Mardi matin, 380 personnes se sont retrouvées pour une deuxième recherche, toujours sans succès.
D’autres opérations se sont poursuivies mercredi 27 septembre. Quinze gendarmes ont ratissé une zone à proximité de la commune de Rothau, à une dizaine de kilomètres de Saint-Blaise-la-Roche. Parallèlement, sept plongeurs de la compagnie binationale fluviale de Strasbourg ont sondé deux plans d’eau, notamment l’étang du Breux, près desquels passe la piste cyclable que Lina a probablement emprunté samedi. La procureure de Saverne a indiqué dans un communiqué de presse qu’aucune de ces interventions « n’a permis la découverte d’éléments utiles à l’enquête ».
Ce jeudi 28 septembre, dés 10h30, 80 gendarmes étaient au nord et au sud de l’étang du Breux. Ils ont effectué des recherches jusqu’à 15h près des communes de Plaine, Saulxures et Saint-Blaise-la-Roche, sans trouver aucun élément ou indice utile à l’enquête.
Une information judiciaire ouverte
Vendredi 29 septembre, les gendarmes ont procédé à des vérifications des traces ADN sur 6 véhicules (toutes des Renault Clio bleues ou grises), et réalisé des fouilles de maisons à Wildersbach et à Rothau ainsi que dans les bennes de la déchetterie de Saint-Blaise-la-Roche. Les enquêteurs ont aussi vérifié les images de vidéosurveillance de la supérette Proxy où Lina a entamé un stage il y a trois semaines selon une employée interrogée par les DNA. Une longue perquisition dans une maison à Diespach a eu lieu durant le week-end.
Dans un communiqué publié ce 1er octobre, la procureure de Saverne Aline Clérot et la procureure de Strasbourg Yolande Renzi ont annoncé l’ouverture d’une information judiciaire pour « enlèvement ou séquestration de plus de 7 jours ». Deux juges d’instruction du tribunal judiciaire de Strasbourg ont été cosaisis pour diriger les recherches dans l’affaire de la disparition de Lina, ce qui donnera plus de moyens et de possibilités aux enquêteurs. La section de recherches de Strasbourg et le groupement de gendarmerie du Bas-Rhin sont toujours en charge de l’enquête. Le parquet de Saverne s’est dessaisi de l’affaire au profit du parquet de Strasbourg, « en raison de la complexité de l’affaire ».
La gendarmerie de Schirmeck a lancé un appel à témoin lundi matin, décrivant Lina au moment de sa disparition : 1,60 mètres, cheveux blonds mi-longs, robe grise, doudoune et converses blanches.
La gendarmerie de Schirmeck appelle toute personne susceptible d’avoir des informations utiles à l’enquête en cours à la joindre au 03 88 97 04 71.
Le tribunal judiciaire de Mulhouse a accepté jeudi 28 septembre la reprise de Velcorex par une société coopérative formée par une partie des anciens salariés. Leur ancien patron, Pierre Schmitt, fait appel en arguant que l’entreprise seule ne peut survivre.
Alors que le groupe textile Pierre Schmitt, implanté dans le Haut-Rhin, est confronté à sa liquidation, sa filiale spécialisée dans les tissus, Velcorex, pourrait être reprise par ses salariés. La chambre commerciale du tribunal judiciaire de Mulhouse a accepté jeudi 28 septembre la reprise de l’entreprise par une société coopérative formée par une partie des anciens salariés, rapportent les Dernières nouvelles d’Alsace.
Le président du groupe qui porte son nom, Pierre Schmitt, sur le site de l’entreprise Emanuel Lang en 2020. Photo : Pierre Pauma / Rue89 Strasbourg / cc
Pour assurer la reprise de l’entreprise basée à Saint-Amarin et le maintien de ses 85 emplois, 52 salariés ont formé une société coopérative et participative (Scop), dont ils partagent le capital et le pouvoir décisionnaire. Les autres filiales du groupe Pierre Schmitt, les sociétés Emanuel Lang à Hirsingue et Philéa à Soultz-Haut-Rhin, sont en revanche liquidées par le tribunal.
« Cette scop est une aberration totale »
Le patron du groupe, Pierre Schmitt, a fait appel de la décision du tribunal et demande un sursis d’exécution pour bloquer la constitution de la Scop Velcorex et la liquidation de ses deux sociétés. « Cette scop est une aberration totale, les trois entreprises sont un tout », explique Pierre Schmitt au téléphone :
« Ce projet est un non-sens économique. Ça n’a aucun sens de revenir sur le vieux périmètre de Velcorex, aucune viabilité économique et aucune crédibilité. Le tribunal a sacrifié une filière d’avenir pour une solution de repli et je pense qu’on aura assez d’arguments pour le démontrer (en appel). »
Sans être plus précis, le président du groupe Pierre Schmitt assure qu’il parviendra à réunir les moyens financiers manquants pour éviter le démantèlement du groupe et les liquidations.
Pour protester contre les détentions de migrants, une poignée de Strasbourgeois se réunissent une fois par mois depuis 2008 au sein des Cercles de silence. La prochaine édition de cette discrète manifestation est prévue samedi mais la pertinence de cette opposition mutique sera ensuite débattue.
Visuellement, ils font presque partie du panorama de la place Kléber. Chaque 30 du mois, des « cercles de silence » se sont tenus depuis 2008 pour protester contre le placement d’étrangers sans titre de séjour dans des centres de rétention administrative. Le prochain Cercle de silence est prévu samedi 30 septembre à 18h, toujours au centre de la place Kléber.
Le déroulé est simple : les manifestants, tracts en mains, se disposent en cercle, suffisamment visible pour que les passants se rendent compte qu’il se passe quelque chose. Ce rassemblement mutique ne dure qu’une trentaine de minutes. À l’issue cette fois, les militants débattront de la pertinence de cette forme de protestation, qui attire de moins en moins de participants.
D’une centaine à quinze personnes
« Dans les premiers temps, on était facilement une centaine », raconte l’un des organisateurs de ces cercles de silence, Pierre Greiber. « Maintenant, c’est plutôt 15 ou 20. » Même si ce constat porte à croire que l’enthousiasme s’érode, Pierre Greiber reste convaincu que ces manifestations silencieuses sont utiles :
« Je crois qu’on touche quand même des curieux avec nos tractages. Et puis, je ne vois aucune raison politique d’arrêter puisque la situation des réfugiés ne s’est pas améliorée. Elle continue de s’aggraver même. Quant à la forme, s’il existe une forme de militance qui soit efficace pour faire bouger le gouvernement, je veux bien être prévenu. »
La plupart des participants aux cercles de silence sont également engagés dans d’autres collectifs ou associations venant en aide aux étrangers, aux migrants ou aux réfugiés. C’est le cas pour Pierre Greiber, qui est également co-président de la Cimade Grand Est. Pour lui, comme pour d’autres militants, le Cercle de silence est un outil parmi d’autres, qu’ils rechignent à abandonner.
Une cinquantaine de personnes, en majorité des étudiants était rassemblée, mardi 26 septembre, au campus de Strasbourg pour dénoncer la hausse des frais de scolarité des étudiants extra-européens.
Devant le Nouveau Patio, une petite foule d’étudiants tenait un rassemblement bruyant, ce mardi 26 septembre. L’ambiance est chaleureuse, jusqu’à ce que le calme se fasse lors de la première prise de parole. Un des membres du syndicat Solidaires Étudiant-e-s donne le mot d’ordre : dénoncer la hausse des frais de scolarité pour les étudiants extra-européens et empêcher son passage en conseil d’administration, qui doit avoir lieu à 14h. « On va faire en sorte que cette mesure ne passe jamais à Strasbourg », poursuit un membre de l’Alternative étudiante Strasbourg (AES), mégaphone au poing.
Rassemblement devant le Nouveau Patio contre la hausse des frais de scolarité pour les étudiants étrangers venant hors d’Europe. Photo : Emma Viola / Rue89 Strasbourg / cc
Pascal Maillard, secrétaire académique du Snesup-FSU, un syndicat de l’enseignement supérieur, ajoute :
« C’est une décision triplement discriminatoire. Elle instaure une inégalité entre les étudiants français, de l’Union européenne et tous les autres étudiants du monde. Elle établit une différence entre les étudiants favorisés qui ont de l’argent et ceux qui n’en ont pas. On peut utiliser les termes de discrimination et de xénophobie. Dans tous les cas, cette mesure a des effets racistes. »
« Les étudiants internationaux sont les boucs émissaires »
Le 19 septembre, la fin de l’exonération des frais d’inscription en master pour les étudiants étrangers hors Union Européenne avait déjà été votée en Commission à la formation et à la vie universitaire (CFVU) à Strasbourg. Cette initiative signifie que les étudiants extra-européens devront désormais débourser 3 770 euros pour suivre des cours à l’Université de Strasbourg en master, contre 243 euros pour un étudiant européen.
Cette initiative s’intègre au plan « Bienvenue en France », annoncé par le Premier ministre en 2018. Souhaitant attirer plus d’étudiants internationaux – l’objectif est d’en accueillir un demi-million d’ici 2027 – le plan repose sur une politique de visa simplifiée et la mise en place de frais d’inscription différenciés pour les étudiants extra-européens, dits « extra-communautaires ».
Après plusieurs prises de parole entrecoupées d’applaudissements, le groupe, souhaitant rentrer dans le bâtiment fermé et protégé par des vigiles, se divise pour occuper toutes les portes d’entrée. Quelques élus siégeant au conseil d’administration se retrouvent mêlés aux étudiants et à leurs slogans « Facs fermées aux intérêts privés, facs ouvertes à tous les étudiants ».
Dans un communiqué de presse, l’Université de Strasbourg assure que tous les gains « seront exclusivement consacrés à des programmes d’accueil des étudiants étrangers ». Elle précise que 500 étudiants seront concernés en 2024-2025 et environ 1 100 les années suivantes.
La décision votée par le conseil d’administration exonère les étudiants de licence, l’Université de Strasbourg souhaitant que le « plus grand nombre d’étudiants internationaux extracommunautaires » continuent d’accéder à l’enseignement supérieur. Pour les étudiants extra-européens inscrits en master en 2023-2024 qui s’inscriraient en 2024-2025, l’Université assurera une exonération partielle des frais d’inscription pour les ramener à ceux des étudiants nationaux, jusqu’à l’obtention du diplôme.
Pascal Maillard pense qu’il reste possible de faire tomber la décision :
« Certains membres souhaitaient siéger au conseil d’administration mais n’ont pas pu siéger. (…) Les étudiants élus au conseil d’administration envisagent pour cela de déposer un recours au tribunal administratif. »