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Connectez-vousUn œil sur le volant, l’autre sous le couvert des arbres, Grégoire Spitz compte silencieusement les tentes en traversant le parc du Glacis de Strasbourg, un jeudi soir d’octobre. « Cela faisait un moment que nous n’étions pas venus et il y en a des nouvelles », relève ce bénévole de l’association Caritas avant de s’arrêter. « Bonjour, c’est la maraude ! Il y a quelqu’un ? », hèle-t-il en s’approchant d’un petit groupe de toiles tendues le long du sentier, montées sur des palettes et recouvertes de bâches étanches.
En l’absence de réponse, le bénévole tire les fermetures Éclair pour regarder à l’intérieur. « On ne sait jamais, il peut y avoir quelqu’un de trop faible pour répondre. Ou une personne décédée. C’est déjà arrivé. » Grégorias, son binôme, revient lui aussi bredouille. Un homme passe à vélo et s’arrête à leur hauteur. Il désigne du doigt le remblai sur lequel il a installé sa tente il y a trois mois et d’où il « veille » sur le camp. Selon lui, la majorité des personnes vivant ici sont parties à la gare pour la distribution alimentaire de l’association Abribus.
Sur la petite place nichée derrière la porte du Fossé-des-remparts, ils sont cependant une demi-douzaine d’hommes à accepter les cafés proposés par l’équipe de la maraude. Parmi eux, Mohammed Ali, 34 ans, arrivé à Strasbourg il y a trois ans et au camp du Glacis depuis un an et demi. « Nous sommes une trentaine actuellement », reconnaît-il du bout des lèvres. « Le campement s’organise en “quartiers” : là, des ressortissants de pays d’Afrique de l’Est et du Moyen-Orient, là, d’Afghanistan, ici, d’Afrique de l’Ouest… »
« Il y a toujours eu du monde au Glacis », explique Grégoire Spitz, bénévole à Caritas. « Mais ça bouge beaucoup. Des gens arrivent, d’autres repartent, on ne sait jamais combien de personnes on va y rencontrer. »
Pourquoi tant de nouvelles arrivées alors ? Mohammed Ali élude. « Entre nous, on ne se pose pas de questions. Quand on voit quelqu’un arriver, on observe d’abord si ça se passe bien », poursuit le jeune homme, attentif à la « sécurité » du camp.
Chacun fait sa vie. « Si je vois quelqu’un dormir sur un banc et que j’ai une couverture en rab, je lui donne. Mais je ne peux pas faire plus, je ne suis pas assistante sociale », grince l’habitant du Glacis. Dans un coin, un jeune homme fait des aller-retours sur la musique d’attente du 115. Mohammed Ali, lui, n’appelle plus le numéro du service d’accueil d’hébergement d’urgence depuis longtemps. « Ils m’ont donné une semaine à l’abri une fois en trois ans. C’est tout. » Parmi les anciens du camp, plus personne ne prend la peine d’appeler désormais, affirme-t-il.
Certains sont même arrivés ici après un début de stabilisation. C’est le cas d’Exaucé, 26 ans, originaire de République démocratique du Congo. « Je suis en France depuis 2016 et à Strasbourg depuis 2017 », retrace-t-il dans un français impeccable, avec un large sourire. Après deux années passées à étudier le droit tout en travaillant à côté, le jeune homme s’est retrouvé en difficulté au moment du Covid. « J’ai perdu mon job et j’ai été placé en hôtel », explique-t-il. Exaucé a ensuite vécu un an et demi en hébergement d’urgence. Mais au printemps, il a connu « trois mois de galère » à la rue. Le jeune homme espère aujourd’hui obtenir un logement social. Mais « il n’y en a pas assez. Ils vont d’abord aux familles. En tant que célibataire, je ne suis pas prioritaire », précise-t-il. Une fois stabilisé, Exaucé espère poursuivre ses études pour obtenir sa licence.
À 20h, la petite équipe de Caritas décolle en direction de la place Brant. Quai du Maire-Dietrich, en face du Palais universitaire, une trentaine de tentes ont également fait leur apparition depuis septembre, sur l’étroite pelouse bordant l’Ill. Là aussi, les bénévoles comptent de nouvelles toiles et une poignée d’espaces libérés. « Quelques familles géorgiennes sont parties s’installer en face du Secours populaire à Krimmeri, à la Meinau », explique Grégoire Spitz. Un autre camp est en train de se former là-bas, à l’écart du centre-ville.
L’équipe s’approche d’un petit groupe d’hommes rassemblés au centre de quelques tentes, autour d’une grande gamelle fumante. « Vous voulez goûter ? », propose un des convives tandis qu’un autre se lève discrètement et dégaine son téléphone. La conversation s’amorce entre les bénévoles et les habitants du camp, avec ici encore la musique d’attente du 115 en fond sonore. Drôle d’écho diffusé par plusieurs combinés en même temps. Chaque communauté du campement tentant sa chance.
Quelqu’un décroche enfin au bout de la ligne de Jamal Mohammed. Le dialogue est difficile. « Allo ? Allo ? Il n’y a pas de place ce soir », répond la voix, sobrement. Le jeune homme souffle en raccrochant. Cela fait un mois qu’il vit place Brant. « Avant, je travaillais la journée. Je conduisais un camion. Mais j’ai arrêté, c’est trop compliqué et fatiguant quand on dort dehors. » Ici, il n’est pas loin des douches publiques de La Bulle, rue Fritz-Kiener. Et il se sent en sécurité, à côté de toutes les familles installées tout près. Pas comme à la gare, où il y a « beaucoup de problèmes ».
Le campement compte des tentes de toutes tailles. Dans la semi-obscurité plus éclairée par les écrans de téléphone portable que par les lampadaires, les familles se réunissent et discutent, puis viennent à la rencontre des bénévoles pour prendre un café et quelques paquets de chips. Ou pour leur demander d’appeler le 115 en leur nom. Angela Magalian se présente volontiers. « J’étais la première à installer ma tente ici le 31 août », retrace cette mère de famille de 33 ans. La jeune femme a quitté la Géorgie avec mari et enfants. « Mon compagnon a une sclérose en plaques. On ne pouvait pas le soigner là-bas. Certains soins coûtaient beaucoup trop cher », détaille-t-elle en évoquant un traitement à 2 000 euros.
Angela a quitté Brumath pour se rapprocher de l’hôpital de Strasbourg et appelle tous les jours le numéro de l’hébergement d’urgence pour demander un logement. Parmi les autres habitants, un certain nombre de personnes ont connu le camp de la place de l’Étoile, puis l’hôtel avant d’arriver place Brant.
Albanaise, Cristina dort « dans la voiture de son ami » avec ses deux enfants. « J’ai vécu un moment à l’hôtel, mais ça se passait très mal », explique-t-elle, évoquant à la fois l’impossibilité de cuisiner et des difficultés avec le gérant de l’établissement qui entrait chaque jour dans la chambre sans frapper pour intimer à ses enfants de ne pas en sortir.
Ce jeudi soir, elle est venue faire du repérage pour s’installer au camp et rejoindre son amie Dahlia, mère de famille, elle aussi. « J’ai un titre de séjour et je travaille la journée. Mes enfants vont à l’école. J’appelle tous les jours le 115 pour demander un logement. »
Au centre du camp, cinq familles syriennes ont installé leur tente il y a une semaine environ. « Nous sommes arrivés à Strasbourg il y a une vingtaine de jours », détaille Nour (prénom modifié), une adolescente de 15 ans traduisant pour ses parents. « Au début, nous étions à la gare, mais nous ne nous sentions pas en sécurité. On nous a dit de venir ici. » Sa famille a quitté la Syrie pour la Guyane française. « Nous avons des passeports, des papiers », insiste la jeune femme.
Au bout d’un quart d’heure de conversation, le petit groupe évoque un document leur ayant été remis en fin d’après-midi par deux hommes. À eux, ainsi qu’à toutes les personnes majeures présentes sur le camp. Il s’agit d’une convocation au tribunal le 20 octobre, dans le cadre d’un « référé mesure utile » déposé par l’Eurométropole de Strasbourg, propriétaire du terrain où ils se sont installés. Une procédure visant à préparer l’expulsion du camp. Les habitants découvrent la nouvelle au moment où le document leur est lu et traduit par les bénévoles. « Mais où allons-nous aller après ? »
La situation à la rentrée 2023 inquiète vivement les acteurs de terrain, comme Nicolas Fuchs, coordinateur régional de Médecins du monde :
« On constate une multiplication des lieux de vie et un renforcement des sites existants depuis plusieurs semaines. Et pour être tout à fait honnête, nous avons du mal à suivre. Un site en remplace un autre et, à chaque déplacement ou expulsion, on perd toute notre expertise et tout notre savoir sur le lieu. »
La réapparition d’une multitude de petits campements semble donc marquer le début d’un nouveau cycle, poursuit Nicolas Fuchs :
« À Strasbourg, on a commencé à voir des camps apparaître en 2017. Puis il y a eu des ouvertures de squats, par d’anciens habitants du Glacis d’ailleurs. Ensuite, il y a eu la crise covid où l’on a vu qu’il était possible, lorsqu’il y avait une volonté des pouvoirs publics de mettre tout le monde à l’abri. Il n’y avait plus personne dans la rue ou presque. Aujourd’hui, on compte environ un millier de personnes dehors à Strasbourg. »
Un chiffre corroboré par Floriane Varieras, adjointe à la maire de Strasbourg en charge des solidarités, qui confirme début octobre qu’environ « 800 personnes distinctes ont appelé le 115 en une semaine ».
Au mois de septembre, le 115 dénombrait ainsi 7 300 appels par semaine (une personne pouvant appeler plusieurs fois) avec un taux de décrochage de 26%, contre 3 900 appels par semaine un an auparavant, avec un taux de décrochage alors de 70%.
Comment en est-on arrivé là ? Nicolas Fuchs avance l’hypothèse d’un « problème de fluidité dans les parcours permettant de passer de l’hébergement d’urgence au logement » et une « volonté des pouvoirs public de faire le tri en fonction des situations, de l’existence ou non de titres de séjours ».
Nicolas Fuchs estime qu’il faut environ trois semaines à une famille pour entrer dans le circuit de la demande d’asile. Un délai pendant lequel les gens dorment souvent dehors, aux côtés d’autres victimes de ce système congestionné.
La cour d’appel de Colmar a débouté, mercredi 11 octobre, l’ancien patron Pierre Schmitt. Le dirigeant demandait un sursis pour les liquidations des sociétés Emanuel Lang et Philéa et pour la reprise par une partie des salariés de l’entreprise Velcorex sous forme de coopérative.
Nouveau revers pour Pierre Schmitt, figure du textile alsacien. Celui qui rêvait de relancer la filière dans la région, à la tête d’un groupe portant son nom, a été débouté par la cour d’appel de Colmar mercredi 11 octobre, alors qu’il demandait un sursis exécutoire pour les décisions prises concernant ses entreprises.
Après un redressement judiciaire début juin, la chambre commerciale du tribunal de Mulhouse avait prononcé la liquidation des sociétés Emanuel Lang et Philéa, tout en donnant son aval au projet de reprise des salariés de Velcorex le 28 septembre.
Parmi les 85 anciens employés, 52 co-dirigeront une société coopérative de production (Scop) créée pour reprendre l’entreprise de tissus de Saint-Amarin. Pierre Schmitt avait souhaité empêcher cette reprise, estimant que Velcorex n’est pas viable sans Philéa et Emanuel Lang.
Pierre Schmitt n’a pas réussi à convaincre la Cour qu’il pourrait réunir des fonds suffisants pour financer la poursuite de l’activité du groupe textile. Les deux entreprises d’Hirsingue seront liquidées, une soixantaine d’employés perdent leur emploi.
Déjà porte-parole nationale du Parti pirate (PP), Caroline Zorn prendra la tête de la liste française présentée aux élections européennes au nom de son mouvement. Avocate au barreau de Strasbourg, elle sera présentée aux militants du Parti pirate, lors d’un congrès national de lancement de campagne, du 14 au 15 octobre à Marseille.
Conseillère déléguée en charge du numérique à la Ville de Strasbourg et vice-présidente à l’Enseignement supérieur et au numérique à l’Eurométropole, elle est l’une des rares élues du Parti pirate en France, une formation qui peine à se faire une place dans le paysage politique. En Alsace, le maire de Wintzenheim-Kochersberg, Alain North, est également membre du Parti pirate.
Le Parti pirate s’est construit en 2007 en Suède, en opposition aux premières mesures restreignant les libertés sur Internet, et notamment le droit des marques. Le mouvement a ensuite évolué pour étoffer son programme à tous les segments politiques, autour des valeurs de liberté, de transparence et de partage.
Lors des élections européennes de 2019, le Parti pirate n’avait obtenu que 0,14% des voix en France – 1 406 voix en Alsace – et n’avait donc envoyé aucun élu français au Parlement européen. Le Parti pirate dispose de quatre eurodéputés : un Allemand et trois Tchèques.
« Nous nous basons sur vos écrits pour prendre des décisions. Alors qu’est-ce qu’on fait si ce n’est pas la vérité ? » La charge vient du procureur adjoint Alexandre Chevrier. Mardi 10 octobre, trois surveillants comparaissent devant le tribunal correctionnel de Strasbourg. Ali et Maxime (les prénoms des gardiens de prison ont été modifiés) sont poursuivis pour violence aggravée ayant entrainé une interruption totale de travail de moins de huit jours. En février, un détenu a fini « couvert de bleus et la cheville cassée », selon les termes de son avocat, après son arrivée à la Maison d’arrêt de Strasbourg.
Maxime comparaît aussi pour faux en écriture publique. Sa collègue Eva est poursuivie pour complicité de faux. Cette deuxième accusation occupera une bonne partie des débats dans une salle bondée.
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Connectez-vousAprès les attaques meurtrières du Hamas en Israël et la réplique de l’État juif contre les Palestiniens, le « Collectif judéo arabe et citoyen pour la Palestine » organise un rassemblement de soutien aux victimes palestiniennes vendredi 13 octobre à 17h30, place Kléber à Strasbourg.
Intitulée « Halte au feu et aux massacres, rassemblement pour la Palestine », d’autres associations signent cet appel au rassemblement : le NPA, l’Union juive française pour la paix, le collectif Justice et Libertés et l’Association des travailleurs maghrébins de France.
La porte-parole du collectif, Perrine Olff-Rastegar, explique qu’il n’existe pas de distinction parmi les victimes de ce conflit :
« Nous déplorons toutes les victimes civiles sans en privilégier aucune. Mais nous voulons aussi rappeler qu’Israël est la puissance colonisatrice qui impose un blocus inhumain à Gaza. En outre, Israël soutient une colonisation de peuplement sur les terres palestiniennes ».
Les organisateurs rappellent « qu’il n’y aura pas de paix possible sans que soit reconnue à toutes et tous l’égalité des droits ». Lundi soir, une manifestation en soutien aux Israéliens avait demandé à l’Europe de considérer le Hamas comme une organisation terroriste, le collectif de la manifestation de soutien aux Palestiniens demande qu’Israël soit considéré comme « un État colonial ».
Après les raids du Hamas en Israël samedi 7 et dimanche 8 octobre qui ont fait plus de 800 morts parmi la population civile, le gouvernement de Benjamin Netanyahou a annoncé un « blocus total » de Gaza, en coupant les approvisionnements en eau, en électricité et en gaz. En outre, le territoire de 365 km² peuplé de deux millions d’habitants est régulièrement bombardé depuis samedi, laissant craindre une catastrophe humanitaire.
La préfecture du Haut-Rhin a publié le 28 septembre un arrêté préfectoral autorisant « la prolongation pour une durée illimitée, de l’autorisation à la société des mines de potasses d’alsace (MDPA) de stockage souterrain en couches géologiques profondes de produits dangereux non radioactifs sur le territoire de la commune de Wittelsheim ». Cela doit permettre de débuter les travaux de confinement définitif de Stocamine, à grands coups de béton, des 42 000 tonnes de déchets toxiques situés sous la nappe phréatique.
Lundi 9 octobre, Alsace Nature a déposé une requête en référé suspension contre cet arrêté préfectoral. L’objectif étant d’empêcher le début des travaux. L’association demande l’extraction des déchets. Au terme d’une longue bataille juridique, elle avait déjà réussi à annuler un premier arrêté d’autorisation des travaux de confinement en 2021, en obtenant l’annulation d’un arrêté préfectoral du 23 mars 2017. C’est la procédure qui avait contraint l’État à produire ce nouvel arrêté.
Cette requête en référé suspension de 95 pages rédigée par Me François Zind, avocat d’Alsace Nature, dénonce la « violation du principe constitutionnel de participation effective du public ». Il estime que « l’information donnée au public est à considérer tout à la fois comme inexacte et insincère, et par voie de corrélation, incomplète et non pertinente » :
« Le fait d’affirmer que la date de 2027 serait la date au-delà de laquelle les conditions de sécurité ne sont plus réunies pour procéder au déstockage en raison de la convergence des galeries est une déclaration mensongère portant sur des faits substantiels : alors que 98% des observations émises lors de l’enquête publique sont défavorables au projet d’enfouissement définitif, le fait d’imputer à cette date des conséquences fausses a nécessairement influencé le public et l’administration. »
Extrait de la requête en référé suspension d’Alsace Nature
Me Zind relève également des « erreurs grossières d’appréciation des possibilités réelles de déstockage compte tenu des techniques actuellement disponibles » ou encore le « non respect des générations futures », qui risquent de voir leur ressource en eau potable contaminée par les déchets toxiques. Pour Alsace Nature, l’enfouissement définitif des déchets contrevient à l’article 2 de la Convention européenne des droits de l’Homme, qui impose aux États l’obligation de protéger « la vie et la santé humaine contre des dangers qui les menacent », notamment des pollutions, y compris pour les générations futures.
L’association environnementaliste remarque enfin que l’autorité décisionnaire (la préfecture), est aussi bénéficiaire de l’autorisation sollicitée en qualité d’actionnaire à 100% du pétitionnaire : l’État détient les MDPA. Cela crée une potentialité de conflit d’intérêt non conforme à la directive 2014/52/UE du Parlement européen selon Alsace Nature, notamment en ce qui concerne les études menées pour justifier le confinement des déchets.
Me Zind demande donc au tribunal administratif de transmettre le dossier à la Cour de justice de l’Union européenne. À défaut, Alsace Nature demande aux juges administratifs d’enjoindre les Mines de potasse d’Alsace à « maintenir l’ensemble des galeries en état afin de garantir » la possibilité de sortir les déchets. L’audience se tiendra jeudi 2 novembre à 14h au tribunal administratif de Strasbourg.
Parallèlement, la sénatrice alsacienne Sabine Drexler (LR) a initié un recours gracieux contre l’arrêté préfectoral du 28 septembre pour demander le renouvellement du cuvelage du puit d’accès à la mine afin de protéger la nappe phréatique d’un dysfonctionnement de ce dernier.
Elle demande également que des forages pour pomper l’eau polluée « soient réalisés immédiatement », et pas comme prévu, lorsqu’on constera que la nappe sera polluée « en surface, donc quand il sera trop tard ». Les sénateurs Jacques Fernique (EE-LV), Claude Kern (UDI), Christian Klinger (LR), Laurence Muller-Bronn (LR), André Reichardt (LR) et Elsa Schalck (LR) se sont associés au recours. Sur les neuf sénateurs alsaciens, deux n’ont pas signé le recours : Patricia Schillinger (Renaissance) et Ludovic Haye (Renaissance).
Le public ne demandait qu’à s’embraser. Chaque action, même anodine, créait une impressionnante ferveur dans le stade de la Meinau. Mais les supporters du Racing n’ont pas pu exulter vendredi 6 octobre face à Nantes, qui s’est imposé 2 buts à 1. L’équipe strasbourgeoise a semblé impuissante, incapable de se projeter vers l’avant, de percuter, de créer des occasions de but. Une sensation déjà perçue la semaine précédente contre Lens, qui avait alors battu le Racing 1 à 0.
Début septembre, à la toute fin du mercato estival (période où les clubs de football peuvent acheter et vendre des joueurs), le Racing a vendu son meilleur joueur, le milieu de terrain Jeanricner Bellegarde, au club de Wolverhampton. Morgan Sanson, prêté par Aston Villa, également très percutant au milieu, était parti quelques semaines plus tôt vers l’OGC Nice. En janvier 2023, le milieu offensif Adrien Thomasson s’était engagé au Racing club de Lens.
En toute logique, les dirigeants du club alsacien auraient dû profiter du mercato pour recruter des milieux de terrain. Mais le Racing club de Strasbourg (RCSA) a été racheté par le groupe américain BlueCo, déjà propriétaire du Chelsea Football club. L’objectif de cette manœuvre était selon Marc Keller, président du RCSA, d’augmenter la puissance financière du club afin d’être capable de jouer le haut du classement en Ligue 1.
Sauf que malgré les 55 millions d’euros dépensés par BlueCo, aucun accord avec un nouveau milieu de terrain en capacité de mener le jeu n’a été trouvé. Les attaquants Emmanuel Emegha, Dilane Bakwa et Angelo Gabriel, les défenseurs Junior Mwanga et Abakar Sylla… Tous sont des footballeurs prometteurs âgés de 20 ans. Mais pour façonner une équipe solide, BlueCo devait aussi chercher des joueurs expérimentés, d’autant plus depuis les départs de Habib Diallo et Alexander Djiku cet été. Seule nouvelle tête au milieu : Jessy Deminguet, 25 ans, mais l’accord avec Caen, son ancien club, avait été finalisé en février 2023, avant l’arrivée de BlueCo.
Le Racing club de Strasbourg est 11e du classement de Ligue 1 début octobre, un résultat qui s’explique en grande partie grâce à des victoires engrangées lorsque Jeanricner Bellegarde était encore présent. On voit mal désormais comment les bleus et blancs peuvent se ressaisir, à moins de changer radicalement d’organisation sur le terrain. Ou d’attendre le mercato hivernal en janvier.
Loïc Désiré, responsable recrutement du Racing depuis 2016, décrit à Rue89 Strasbourg la logique derrière le mercato estival :
« Nous avions la saison passée une moyenne d’âge assez élevée, 28 ans et demi, avec une équipe en fin de cycle. Il faut reconstruire et nous avons décidé de travailler sur l’avenir, en recrutant des jeunes joueurs à fort potentiel. Il faut simplement leur laisser du temps, et laisser aussi le temps aux plus anciens de devenir des leaders. Djiku, par exemple, l’est véritablement devenu la saison dernière. […]
Nous devons progresser dans le contenu c’est vrai, et nous le ferons. Il faut que tout se mette en place. Rien ne se fait en un jour, le Racing est bien placé pour le savoir, lui qui, il y a onze ans seulement, était encore en CFA 2 (cinquième division, aujourd’hui appelé National 3, NDLR). Il faut beaucoup de travail, de la confiance et un peu de patience. »
Mais chez les supporters strasbourgeois chevronnés, l’expérience de changements de propriétaires qui ont nui au Racing crée une grande méfiance. « Effectif rajeuni, expérience appauvrie : quel est le projet ? », interrogeait le groupe de supporters des Ultra Boys 90 (UB 90) sur une banderole lors du match contre Nantes, constatant l’impuissance des joueurs strasbourgeois. Dès juin, les Ultras distribuaient un tract hostile au rachat du club par BlueCo :
« Il n’est pas imaginable que le Racing devienne une sorte de sous-club ou filiale, dépendant d’un autre club. […] Lorsqu’un club est racheté par un propriétaire de club plus “huppé”, les moyens sont investis dans le grand club et le sous-club ne ramasse que les miettes, ou des joueurs de seconde zone. Prenez l’exemple de Troyes, qui appartient à City Group (également propriétaire de Manchester City, NDLR) : une franche réussite, aux dépens de Troyes… »
Le club de Troyes, racheté en 2020, est descendu en Ligue 2 pour la saison 2023-2024, alors que Manchester City a été sacré champion d’Europe en juin. Des joueurs remplaçants à Manchester viennent évoluer sous les couleurs de Troyes. Les supporters troyens considèrent que les décisions prises par le nouveau propriétaire sont responsables de la descente de leur équipe. Du côté de Strasbourg, toutes ces jeunes recrues jouent-elles à la Meinau simplement pour se former avant d’aller jouer à Chelsea plus tard ? Si c’était le cas, BlueCo ne s’y prendrait pas autrement.
La fédération des supporters craint que le RCSA n’ait plus de projet sportif indépendant et fasse des choix sportifs incohérents à cause du modèle de la multipropriété. « Le Racing doit suivre sa propre ambition sportive. Ce n’est pas un centre de recyclage qui nourrit l’ambition d’un autre club. » Ces mots ont été prononcés par Philippe Wolff, président de la Fédération des supporters interrogé par Rue89 Strasbourg début juin.
Le modèle de la multipropriété prend de l’ampleur en France : huit clubs, dont Strasbourg, appartiennent à des groupes qui possèdent au minimum deux clubs en cette saison 2023-2024. Interviewé par So Foot fin juin, Loïc Ravenel, chercheur au Centre international d’études du sport (CIES), analyse quelles sont les raisons qui poussent des investisseurs à s’établir en France :
« Il y a beaucoup de formation de joueurs. C’est une manière d’accéder à un important vivier de footballeurs dans un pays où les clubs sont assez sûrs, au sens où il y a du contrôle en France (une commission indépendante est chargée de surveiller les comptes des clubs, NDLR), les clubs font moins faillite qu’ailleurs. Est-ce que les propriétaires américains ne voient pas la Ligue 1 comme une ligue mineure ? Est-ce que ce n’est pas une solution pour eux d’avoir des clubs satellites pour faire jouer leurs joueurs prometteurs et les récupérer après dans une ligue majeure qu’est la Premier League ? »
De nombreux clubs de basket aux Etats-Unis fonctionnent ainsi. Les supporters alsaciens avertis ont bien compris cela. À chaque match, les ultras strasbourgeois déploient des banderoles opposées au modèle de la multipropriété. Dans la tribune des supporters de l’équipe visiteuse également, les Nantais ont arboré une banderole en soutien aux Strasbourgeois le 6 octobre. « La multipropriété est un fléau qui finira par tuer les clubs et leur identité. »
La Fédération des supporters du Racing a publié une lettre ouverte destinée au président Marc Keller mardi 10 octobre. Elle s’inquiète de voir le club alsacien devenir « un centre de post-formation et une pièce secondaire d’un business global ». Les fans demandent des éléments concrets et rassurants et disent être toujours dans l’attente d’une rencontre avec BlueCo.
« Je ne peux pas répondre, je n’arrive pas à parler depuis deux jours. » Parmi les quelque 600 participants au rassemblement de soutien à Israël lundi soir devant le siège du Conseil de l’Europe, l’émotion était palpable. Au lendemain d’un week-end apocalyptique, qui a vu le Hamas faire plus de 800 morts et 2 600 blessés en Israël, plusieurs familles juives sont traumatisées. La plupart se sont déjà réunies dimanche soir devant la grande synagogue de Strasbourg, à l’appel du consistoire israélite du Bas-Rhin, et prévoient de le faire chaque soir, tant que les otages pris par le Hamas ne seront pas libérés.
Marc, un juif strasbourgeois de 70 ans, a de la famille en Israël et des amis au sud du pays :
« Samedi, je suis resté scotché à la télévision, à zapper parmi les chaînes d’information. Je n’arrivais pas à m’arrêter. Ça a commencé par un sentiment de sidération, puis il y a eu comme une gradation dans l’horreur. J’ai appelé des amis, dont un qui avait sa fille à la rave party Supernova… Fort heureusement, elle a pu s’échapper. »
Établie à six kilomètres de la bande de Gaza dans le désert du Néguev, cette rave-party a été ciblée par le Hamas, qui a massacré 260 festivaliers sur place. Pour Marc, ce cauchemar était impensable :
« Comme tout le monde, je vivais dans un mythe d’infaillibilité de l’État d’Israël… Je pensais que rien ne pouvait échapper au Mossad (les services secrets israéliens, NDLR), que Tsahal (l’armée israélienne, NDLR) ne pouvait être mise en défaut. »
Marc s’affiche sans haine, avant les prises de parole :
« J’attends de l’apaisement à présent. J’espère que les élus et ceux qui s’exprimeront sauront faire la différence entre les Musulmans, les Arabes et le Hamas. »
Devant une banderole « Solidarité avec Israël – Jérusalem », Pierre Haas, délégué régional du Conseil représentatif des institutions juives (Crif) a appelé l’Union européenne à considérer l’ensemble du Hamas comme une organisation terroriste et ses responsables comme des criminels de guerre.
Malgré une sono poussive, Thierry Roos, président de l’association France – Israël, a rapproché les combats d’Israël de ceux pour les valeurs européennes et démocratiques :
« Le Hamas est la petite sœur de Daech, il se revendique d’un islamisme qui s’attaque à Israël comme l’État islamique s’est attaqué à la France au Bataclan, ou Al Qaïda aux États-Unis le 11-Septembre. Dans les jours qui viennent, il ne faudra pas céder à la propagande victimaire de l’État islamiste de Gaza. »
L’ancien élu de droite en a profité pour faire huer les partis La France insoumise (LFI) et du Nouveau parti anticapitaliste (NPA), jugés trop relativistes dans leur analyse du conflit.
Les prises de parole se sont conclues par La Marseillaise et la Hatikva, l’hymne d’Israël. Au moment de la dispersion, Valérie, 52 ans, qui se définit comme juive, sioniste (mouvement politique prônant la construction d’un État juif en Palestine) et strasbourgeoise, résume :
« Quand il s’est agi, 50 ans avant la Shoah, de créer une terre pour que les juifs soient à l’abri, c’est la terre d’Israël qui a été choisie. Mais aujourd’hui, peut-on encore dire que les juifs sont à l’abri en Israël ? »
Selon un bilan établi lundi soir, au moins 687 Palestiniens ont été tués par les bombardements de l’armée israélienne dans la bande de Gaza et plus de 3 700 ont été blessés depuis samedi.
« Ces derniers jours, on m’interroge beaucoup sur le campement place Brandt. Mais la question, c’est pourquoi on voit, dans toutes les grandes villes françaises, des campements qui émergent, qui se développent, et de plus en plus de personnes à la rue. » Au dernier étage du centre administratif, face à une poignée de journalistes ce lundi 9 octobre, la maire Jeanne Barseghian (EE-LV) présente les contours du recours à la préfecture contre l’État qu’elle va déposer. Le matin même, elle signait une tribune publiée par Libération avec d’autres maires pour alerter sur la prise en charge lacunaire des sans-abris.
Avec les municipalités de Rennes, Bordeaux, Paris, Grenoble et Lyon, dont les exécutifs sont tous à gauche, la Ville de Strasbourg dépose ainsi un recours gracieux pour demander le remboursement des sommes qu’elle a engagées dans l’hébergement d’urgence. L’État a l’obligation légale de proposer un logement aux sans-abris qui le demandent, même s’ils sont étrangers et sans titre de séjour. Juridiquement, ce recours gracieux constitue « l’étape préalable avant un recours contentieux », prévient la maire.
Concrètement, les différentes villes vont présenter les factures des sommes dépensées dans l’hébergement d’urgence. Pour Strasbourg, la municipalité et le Centre communal d’action sociale (CCAS) présenteront les 900 000€ dépensés pour la mise à disposition d’un gymnase, entre septembre 2022 et mars 2023. « En déposant ces factures, nous voulons montrer ce que nous sommes obligés d’assumer au-delà de nos compétences, et dire que nous ne pouvons pas pallier les carences de l’État. »
À la fin de la tribune, les édiles signataires demandent la « refondation » du système de prise en charge des sans-abris. Pour Jeanne Barseghian, cela passe par mettre « l’ensemble des acteurs autour de la table » et plus de « transparence sur les chiffres du sans-abrisme et de la grande précarité ».
L’appel à se mobiliser se veut large. Une manifestation intersyndicale est prévue ce vendredi 13 octobre, partout en France. Le mot d’ordre : « Contre l’austérité, pour l’augmentation générale des salaires et l’égalité femmes-hommes ». Plus largement, l’idée est également de défendre les services publics et de lutter contre la réforme des retraites (appliquée depuis le 1er septembre). L’appel est lancé par 13 organisations syndicales (CGT, CFDT, CFTC, FO, CFE-CGC, Unsa, Solidaires, Unef, Fidl, FSU, FAGE, VL et MNL). À Strasbourg, le rassemblement est prévu à 10h, place de la République.
Les cantines scolaires des écoles de la Ville de Strasbourg seront notamment fermées, jeudi et vendredi. Les services périscolaires pour les enfants de maternelle et les ateliers éducatifs pour les élèves d’élémentaire fonctionneront normalement jeudi, mais pas vendredi, où « ils fonctionneront dans la mesure du possible », avertit la Ville.
Vendredi, cette « mobilisation interprofessionnelle et intersyndicale qui concerne aussi bien les personnels enseignants que les personnels de la Ville », amènera un certain nombre d’enseignants à faire grève également.
Comme lors de chaque mouvement de grève, la Ville de Strasbourg rappelle que « si au moins 25% des enseignants de l’école de votre enfant sont grévistes, dont celui de votre enfant, la Ville organise un service minimum d’accueil (SMA) dans différentes écoles selon le quartier ».
Hasard du calendrier, ce même vendredi 13 octobre est également la date choisie par plusieurs syndicats de médecins généralistes pour fermer leur cabinet. Ils réclament notamment une revalorisation des tarifs des consultations.
D’importantes perturbations sont à prévoir dans les transports en commun. Sur le réseau urbain de la Compagnie des transports strasbourgeois, le cadencement des trams est rallongé à 8 minutes sur les lignes A, B, C et D. Sur la ligne E, un tram circulera toutes les 9 minutes et sur la ligne F, un toutes les 10 minutes.
La ligne de bus G circulera toutes les 8 à 10 minutes environ, la ligne H toutes les 10 à 12 minutes. Il faudra attendre entre 9 et 12 minutes sur la ligne C1, 10 à 12 minutes sur la C7 entre Baggersee et Neuhof, 9 à 12 minutes sur la C8, 8 à 9 minutes sur la L3 et 8 à 10 minutes sur la L6 entre Pont Phario et Fort Desaix.
Les dessertes des terminus Hoenheim Gare et Vendenheim Gare s’allongent à toutes les 16 à 20 minutes, l’arrêt du Port Autonome Sud ne sera desservi que toutes les 20 à 24 minutes. Certaines lignes de bus ne seront plus desservies que deux fois par heure, comme les 29, 30, 40 et 70, ou trois fois par heure comme la ligne 50.
Le Collectif représentatif des associations juives de France (Crif) appelle à des rassemblements de soutiens à Israël et aux Israéliens, en soirée du lundi 9 octobre, après les attaques du Hamas depuis samedi. À Paris, un cortège doit partir de la place d’Israël dans le 17e arrondissement. À Strasbourg, le Crif Alsace ainsi que l’association France – Israël appellent à un rassemblement à 18h15 devant le Conseil de l’Europe, à l’angle de l’avenue de l’Europe et de l’Allée Spach à l’Orangerie.
Pierre Haas, délégué régional du Crif, indique que ce lieu a été choisi parce qu’il « défend les droits de l’Homme ». Dimanche 8 octobre, un premier rassemblement a eu lieu devant la grande synagogue de Strasbourg, à l’appel du consistoire israélite.
Des attaques en provenance de la bande de Gaza ont eu lieu depuis samedi 7 octobre, contre plusieurs localités israéliennes proches. Ces attaques ont été menées par le Hamas, un mouvement nationaliste palestinien fondé en 1988, opposé à la paix avec Israël. Lundi matin, le bilan fait état de 700 morts côté israélien, et d’au moins 2 382 blessés pris en charge dans les hôpitaux, dont 22 dans un état critique et 345 dans un état grave.
Côté palestinien, au moins 413 personnes sont mortes et 2 300 ont été blessées depuis le début de la réplique de l’armée israélienne, qui a bombardé la bande de Gaza et mis en place un « blocus total » de ce territoire depuis lundi matin.
« Il y a 20 ans, lors de mon accident, il n’y avait pas d’endroit dans la région pour me permettre de poursuivre ma pratique à haut niveau. Depuis, j’ai participé à la création de mon club et d’un championnat. Il y a un net développement du handisport mais il reste beaucoup à faire », expose Benjamin Brun, 39 ans, assis dans son fauteuil près d’une cage de handball, une casquette vissée sur la tête.
Début septembre, en pleine période de rentrée des clubs et de reprise des entraînements, il est venu à la Foire européenne de Strasbourg pour proposer une démonstration de handfauteuil et présenter le club de Sélestat, dans lequel il est à la fois coach et joueur. « On manque toujours de moyens et de visibilité. On est là pour se faire connaître et pourquoi pas recruter », sourit-il en jetant un œil aux ballons et aux fauteuils réglables apportés pour l’occasion.
Fervent sportif, Benjamin Brun a été témoin de l’évolution du handisport. Son sport de prédilection est le handball, qui a toujours eu une place importante dans sa famille :
« Mon père a fait beaucoup de hand’ et a voulu transmettre sa passion à toute la famille. Finalement je m’y suis mis plus tard, parce que j’avais d’abord bien accroché avec le judo et je voulais absolument avoir ma ceinture noire. Mais à force d’accompagner mon grand frère ou ma petite sœur à leurs matchs, j’ai eu envie de tâter du ballon aussi. Puis je suis tombé amoureux de ce sport et j’ai évolué jusqu’en Nationale 2 avec le Colmar HC, juste avant mon accident. »
En 2004, le passionné de sport chute en snowboard. Sa colonne vertébrale est touchée et Benjamin Brun devient paraplégique. « Dès le centre de rééducation, j’ai voulu reprendre le sport. J’en avais fait toute ma vie et je voulais prouver que j’étais encore capable de faire de belles choses. »
Lors de son passage au centre de rééducation de Colmar, il commence à jouer avec des joueurs de handibasket qui viennent alors faire connaître et partager leur sport :
« J’ai découvert que l’équipe de France avait déjà été championne du monde et plusieurs fois championne d’Europe. Je me suis rendu compte que je pouvais à nouveau rêver de porter un maillot bleu. »
Benjamin Brun est ensuite recruté par le club de Strasbourg en septembre 2005. Une proposition qu’il accepte, le handibasket lui semble être le sport le plus accessible à l’époque.
Si la cage du handball lui manque, il n’existe à cette époque aucun club professionnel dans le Grand Est et pas de championnat français. Jusqu’à ce qu’un de ses anciens coéquipiers lui propose de développer le handfauteuil dans la région. « Nous avons découvert qu’il y avait une demande car nous avons tout de suite eu des joueurs motivés, qui avaient un bon niveau. »
La section se structure en s’appuyant sur le club de handball local et participe aux rencontres qui ont lieu une fois par an avec les autres clubs. Avant de participer à la création d’un championnat. « Ça a pris doucement, avec environ six équipes au départ, puis ça a grossi pour devenir le challenge Handi’Amo Tour avec seize équipes et des tournois dans chacun des clubs participants », détaille le sportif.
« Tout le monde peut faire du handfauteuil », annonce fièrement Benjamin Brun. « Les équipes sont mixtes au niveau du genre et de l’âge. Elles sont constituées de personnes handicapées et valides. Du moment que tout le monde est dans un fauteuil », explique le coach. Aujourd’hui, le club de Sélestat comporte dix joueurs, dont quatre handicapés. Un mélange qui enrichit le jeu et permet de partager de beaux moments entre « valides et handis’ », selon Benjamin Brun.
Une remarque que soutient Julie Colin, sa compagne. Valide, elle décide de tester le handfauteuil après sept ans de handball, jusqu’à rejoindre l’équipe et en faire sa pratique principale :
« Entre la mobilité et la maîtrise du fauteuil, les compétences se complètent et donnent une dimension très intéressante à ce sport. C’est vraiment super pour l’ouverture d’esprit de partager ces moments en mixité. Cela permet aux valides de se mettre dans les conditions de personnes ayant un handicap et de prendre conscience de ce que cela peut être au quotidien, dans une société qui a tendance à ne pas être adaptée pour tous. »
Du 28 août au 8 septembre 2024, Paris accueillera les Jeux paralympiques pour la première fois. Pour l’occasion, 4 400 athlètes seront présents pour s’affronter dans 549 épreuves de 23 disciplines. Si le handifauteuil a été reconnu trop tard pour faire partie des Jeux paralympiques de 2024, l’équipe de Sélestat espère que toutes les formes de parasports (terme générique pour désigner l’ensemble des sports pratiqués par les personnes en situation de handicap, physique ou mental) bénéficieront d’une meilleure visibilité.
Car malgré ce bilan constructif des dernières années, Benjamin Brun soutient qu’il y a encore beaucoup d’éléments à améliorer dans la pratique du handfauteuil et du handisport en général :
« On a fait du chemin, mais le manque de visibilité et de moyens persiste. Nous avons des difficultés à nous faire connaître auprès des personnes handicapées, comme des valides. Il y a encore des zones encore très mal équipées. Or, la distance peut être un frein très grand pour des personnes ayant déjà une mobilité réduite. »
Des ouvertures de section handifauteuil sont actuellement en discussion dans les clubs d’Achenheim ou de Metz. En Alsace, on trouve par exemple une équipe de cécifoot qui a accueilli cet été à Schiltigheim un tournoi international de préparation aux Jeux paralympiques.
Tito Timpano est entraîneur et responsable de cette section du SUC. Au Village des Sports, place Kléber à Strasbourg samedi 26 août, il reconnaît que les parasports ne sont pas vraiment mis en valeur pendant cet événement. Il explique être lui-même en train d’ouvrir sa section de canne de combat aux participants en fauteuil :
« J’ai déjà accompagné deux sportifs dans cette situation et on a remporté les championnats du monde ! Pour les entraîner, je me mets aussi dans un fauteuil et, en dehors de ça, il n’y a pas de grande différence. La même envie de compétition est présente. »
Le sport adapté, qui concerne des personnes avec une déficience intellectuelle ou un trouble psychique (trouble autistique, trisomie…) est encore plus confidentiel. À Strasbourg, seuls deux clubs en proposent : Nouvel envol et l’ASPTT. François Brua est responsable de la section sport adapté de l’ASPTT. Ancien éducateur et professeur d’EPS dans le médico-social public, il a toujours travaillé auprès d’un public de personnes ayant un handicap mental. Il défend l’importance du sport pour eux :
« L’accès au sport devrait être un droit pour tous. Mais souvent, en grandissant, les jeunes quittent les établissements médico-sociaux pour travailler la journée et n’ont plus accès à une activité sportive. Le but est de pérenniser ce qu’ils ont appris et de leur donner la possibilité de poursuivre. C’est un apport physique et cela les aide beaucoup à sociabiliser, même plus qu’au travail. »
Ancien joueur de badminton, il pense que ce sport pourrait facilement être adapté à un large public et propose à l’ASPTT d’ouvrir une section en sport adapté. Créée entre 2010 et 2012, elle commence avec une dizaine de licenciés. Aujourd’hui, elle en compte 80, de 13 à 65 ans, et a diversifié les sports proposés, avec du ski, des séjours à la montagne…
Fière de cette section, François Brua estime tout de même que « le sport adapté est l’enfant pauvre des parasports ». Peu visible, les moyens plus importants que demande cette pratique sont souvent un frein :
« Comme chaque joueur a une pathologie spécifique, il faut un accompagnement plus important et donc plus de personnel. Nous avons dû arrêter de proposer du judo adapté, car nous n’avions plus assez d’encadrants. Mais nous allons proposer du handball en sport adapté dès cette rentrée. »
La Fédération française des sports adaptés compte plus de 65 000 licenciés. Les sportifs de l’ASPTT le sont également et participent régulièrement à des compétitions, locales ou nationales. Du 24 au 26 novembre 2024, ils se rendront au championnat de France de badminton adapté qui a lieu cette année à Altkirch.
« Je suis venu vous dire que je m’en vais ». Cravate bien serrée, lunettes massives et costume gris parpaing, Patrick Wachsmann pourrait difficilement être confondu avec Serge Gainsbourg. Lorsqu’il se permet un trait d’humour pour son dernier rapport d’activité, l’ancien déontologue de l’Eurométropole (EMS) et de la Ville de Strasbourg prend de court son public. Face au conseil eurométropolitain, vendredi 6 octobre, le juriste s’est livré à un dernier discours offensif et grinçant. Ponctué de piques, d’exhortations et de quelques conseils.
Nommé déontologue de la Ville de Strasbourg en 2014, il a décidé de quitter ses fonctions le 17 février 2023. Patrick Wachsmann rejoindra prochainement le Conseil supérieur de la magistrature, après avoir assuré l’intérim pendant l’été. Pour Rue89 Strasbourg, il revient sur le rapport des élus à la déontologie, les réticences de ces derniers, ou encore le fiasco de la désignation de son successeur.
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Connectez-vous« La protection de l’enfance est notre première priorité. » C’est sur ces mots que Frédéric Bierry (LR), président de la Collectivité européenne d’Alsace (CeA) introduit les Assises alsaciennes de la protection de l’enfance vendredi 6 octobre. Mais les 1 100 travailleurs sociaux présents dés 9h du matin au Palais de la musique et des congrès n’ont la chance d’entendre l’élu que grâce à une vidéo diffusée sur grand écran : Frédéric Bierry est à Toulouse pour le Congrès national des sapeurs-pompiers de France.
Le président de la CeA assure que le budget pour la protection de l’enfance est de 317 millions d’euros en 2023. « C’est un effort sans précédent, une hausse de 100 millions d’euros du budget en sept ans », glisse Paul Geoffroy, le directeur général adjoint des solidarités de la CeA. Malgré cette hausse, Nicolas Matt, vice-président de la CeA en charge, notamment, de la protection de l’enfance, affirme que 200 mesures de placement ne sont pas effectuées.
Cela signifie que 200 enfants ne sont pas placés dans une famille d’accueil, un foyer ou suivis par un professionnel à leur domicile, malgré la décision d’un juge qui les considère « en danger ». En tout, en 2022, un peu plus de 4 000 mineurs étaient suivis par l’aide sociale à l’enfance en Alsace.
Rue89 Strasbourg a publié plusieurs enquêtes sur le sous-effectif et le manque de moyens dans le secteur de la protection de l’enfance en Alsace, avec notamment le suicide d’une adolescente et de son éducateur de l’Arsea en mars 2021. Des travailleurs sociaux ont manifesté à plusieurs reprises à Strasbourg en 2021 et 2022. Ces mobilisations commencent à avoir de l’impact.
En mai 2022, 300 mesures de placement n’étaient pas effectuées. « On a diminué d’un tiers ces placements non-effectués. L’objectif est de faire mieux, évidemment », concède Nicolas Matt.
Ludovic Marechal, directeur de l’aide sociale à l’enfance de la CeA, détaille les difficultés rencontrées :
« En 2022, on prévoyait de créer 208 places. On a pu en créer seulement 122. En 2023, 137 créations de places étaient prévues, on en aura que 77. Cela fait tout de même 200 places créées. On a du mal à recruter des assistants familiaux (familles d’accueil, NDLR). On a même perdu 113 places chez des assistants familiaux en 2022. On en aura aussi perdu en 2023 mais moins. Ils partent à la retraite.
Pourtant on a augmenté leurs salaires au-dessus de la rémunération réglementaire (un peu plus de 2 000 euros brut minimum, par mois, pour deux enfants accueillis, NDLR). En Alsace, une assistante familiale qui a deux enfants à charge, c’est la moyenne, gagne 2 554 euros brut. »
Ludivine Quintallet, élue écologiste d’opposition au département, regrette que l’exécutif de la CeA n’interpelle pas davantage le gouvernement pour obtenir une meilleure rémunération des travailleurs sociaux :
« Certaines professions du travail social ont été oubliées de la prime Segur (183 euros net par mois, NDLR). Le manque d’attractivité des métiers du social est l’une des causes de la tension dans la protection de l’enfance. »
La majorité des placements créés sont des mesures en milieu ouvert : des dispositifs de suivi des enfants par des travailleurs sociaux chez les familles. Ludovic Marechal explique qu’elles sont plus faciles à mettre en œuvre et souvent plus adaptées aux situations. Lors des différentes tables rondes organisées pour les Assises de la protection de l’enfance, les intervenants s’accordent sur le fait que le placement dans un foyer peut être traumatisant pour un enfant. Selon eux, le plus important est de mettre en œuvre des politiques de prévention pour éviter d’aller jusqu’au placement.
Au micro, Marie Schumpp, directrice santé, prévention et protection maternelle et infantile à la CeA indique que le nombre d’entretiens prénataux, entre des futures mères et des travailleurs sociaux, a été « multiplié par cinq » en 2023. Des actions plus simples que la création de places dans des structures d’hébergement. Mais ces dernières restent parfois nécessaires, quand le mineur est trop en danger chez lui.
Il est « difficile de trouver du foncier pour construire » selon le directeur de l’aide sociale à l’enfance Ludovic Marechal :
« On voulait ouvrir une maison d’accueil de 30 places à Colmar en 2023, mais ça sera pour septembre 2024 finalement. En plus, on a des contraintes réglementaires qui se sont ajoutées suite à l’incendie de Wintzenheim (d’un établissement d’accueil de séjour de vacances adaptées pour personnes en situation de handicap cet été, NDLR). On compte aussi créer un foyer de l’enfance de 30 places à Mulhouse mais cela va prendre plusieurs années. »
Anne Geiger, du collectif Protection de l’enfance Alsace en lutte, est éducatrice au service d’action éducative en milieu ouvert (AEMO) de l’Aresa. Elle réalise des suivis d’enfants chez leur famille suite à une décision d’un juge.
La travailleuse sociale confirme des améliorations suite à trois manifestations de son collectif et des échanges avec la direction de l’aide sociale à l’enfance :
« On a obtenu la création d’une nouvelle équipe : 6 à 7 postes supplémentaires de travailleurs sociaux, un poste de psychologue et un poste de chef de service. En 2022, on était souvent à plus de 30 enfants suivis par éducateur. Maintenant, on est à 27 mineurs pris en charge par travailleuse sociale. On a retrouvé de meilleures conditions de travail. »
Selon Nicolas Matt, la CeA prévoit de créer 130 mesures de placement supplémentaires en 2024. Un chiffre qui peut encore changer car le budget 2024 sera voté en décembre. Et qui risque de ne pas résoudre le problème des mesures de placement non effectuées, vu la diminution du nombre d’assistants familiaux.