Enquêtes et actualité à Strasbourg et Eurométropole

L’Eurométropole revalorise ses aides pour l’achat de voitures moins polluantes, de vélos ou de tickets CTS

L’Eurométropole revalorise ses aides pour l’achat de voitures moins polluantes, de vélos ou de tickets CTS

Changement de véhicule, achat de vélo électrique, tickets de bus et de tram… L’Eurométropole de Strasbourg a augmenté, depuis avril 2023, les aides pour permettre aux habitants d’avoir des modes de transport peu polluants.

Depuis le 1er janvier 2023, les véhicules les plus polluants sont interdits au sein de la zone à faibles émissions mobilité (ZFE) de l’Eurométropole de Strasbourg (EMS). En conséquence, l’EMS a communiqué mardi 13 juin au sujet d’une revalorisation des aides, effective depuis avril 2023, pour permettre aux habitants de se tourner vers des véhicules moins polluants et d’utiliser davantage les transports en commun ou le vélo.

En résumé, l’EMS a revalorisé toutes les aides à la mobilité de 500 euros. Parmi elles, deux aides à la conversion : une pour les professionnels et une pour les particuliers, pour leur permettre de racheter une voiture moins polluante. Avant avril 2023, ces aides allaient de 1 500 à 3 500 euros. Désormais, elles sont de 2 000 à 4 000 euros.

L’Eurométropole veut inciter les Strasbourgeois à prendre les transports en commun. Photo : Mathilde Cybulski / Rue89 Strasbourg

Des aides cumulables avec celles de l’État

Il existe trois paliers d’aide au changement de véhicule. Pour un revenu fiscal de référence (RFR) compris entre 14 089 euros et 22 983 euros, il est possible de bénéficier de 2 000 euros au maximum de l’Eurométropole. Pour un RFR compris entre 6 358 euros et 14 089 euros, la somme monte jusqu’à 3 000 euros. Enfin, pour des RFR inférieurs à 6 358 euros, l’EMS donne jusqu’à 4 000 euros.

Selon l’Eurométropole, « 70% des ménages de l’agglomération sont concernés par au moins l’une des trois tranches ». Ces aides sont cumulables avec la prime à la conversion offerte par l’État, qui peut aller jusqu’à 6 000 euros, et à laquelle peut s’ajouter une surprime de 1 000 euros (de l’État également), lorsque le bénéficiaire travaille mais ne réside pas dans une ZFE, et de 3 000 euros maximum lorsque le bénéficiaire réside dans une ZFE. Au maximum, il est donc théoriquement possible d’être aidé à hauteur de 13 000 euros pour un changement de véhicule.

Vendre sa voiture pour bénéficier d’un compte mobilité 

Pour inciter aux transports alternatifs, l’EMS propose également un compte mobilité depuis janvier 2022. Pour en bénéficier, il faut vendre sa voiture. Suite à une vente, l’Eurométropole peut verser jusqu’à 2 500 euros pendant trois ans pour l’utilisation du réseau de transports en commun (bus, tram) et financer la location ou l’achat de vélos électriques. L’argent peut aussi être utilisé pour acheter du matériel d’équipement (casque, lumières), ou réparer son vélo.

Cette somme peut également servir à recourir à l’autopartage (mise à disposition de véhicules en location au profit d’usagers pour la durée et la destination de leur choix) puisque l’entreprise d’autopartage Citiz fait partie des partenaires de l’Eurométropole pour le compte mobilité. Le directeur général de Citiz, Jean-François Virot-Daub, explique :

« Il y a toujours des cas où on a besoin d’une voiture pour aller en courses, pour un rendez-vous professionnel ou se rendre à des sorties et des loisirs. Globalement, cela sert à sortir de la ville. »

Le nombre d’utilisateurs de Citiz augmente, « on a ajouté une quinzaine de voitures en novembre 2022, et on pense en rajouter entre dix et vingt cette année dans l’Eurométropole », indique Jean-François Virot-Daub. Actuellement, l’EMS compte presque 300 voitures, dont 200 situées dans Strasbourg.

55 habitants bénéficient déjà d’un compte mobilité

À ce jour, une centaine de dossiers ont été déposés suite à une vente de voiture et 55 habitants bénéficient déjà des prestations proposées. Par exemple, Stéphane Gallardo, enseignant à Strasbourg, bénéficie désormais d’un compte mobilité de 2 000 euros. Il a trois ans pour les utiliser, pour lui, sa femme et ses trois enfants. Ce compte existe sous forme de porte-monnaie numérique : pour s’en servir, il suffit de présenter un QR code lors de l’achat en boutique ou en ligne, puis d’entrer le code PIN associé. La famille en a profité pour prendre un abonnement CTS à l’année, et utiliser l’autopartage avec Citiz, comme l’explique Stéphane Gallardo :

« Quand un de mes enfants a un match dans un village par exemple, le trajet peut être long ou compliqué car il y a moins de possibilités de transports en commun, alors on prend la voiture. Cela nous arrive aussi lorsqu’on veut partir en excursion et se balader. »

Stéphane Gallardo, bénéficiaire du compte mobilité. Photo : AR / Rue89 Strasbourg / cc

« Une fois les 2 000 euros dépensés, on va adapter nos pratiques »

Le père de famille estime qu’il aura utilisé la totalité du compte mobilité « bien avant » qu’il n’arrive à terme, au bout de trois ans :

« Une fois les 2 000 euros dépensés, on va adapter nos pratiques. Je vais faire comme avant et prendre des abonnements mensuels quand j’en aurai besoin. C’est possible que j’utilise moins Citiz. On aimerait bien prendre le train davantage, et je sais qu’il y a des aides de la région mais à cinq, avec l’aller-retour, on ne sera pas forcément gagnants financièrement. Il y a des efforts à faire du côté de la SNCF. Ce n’est pas normal qu’on soit davantage tenté de prendre une voiture que le train. »

Avant de prétendre aux aides, un rendez-vous gratuit, en présentiel ou par téléphone auprès de l’Agence du climat (affiliée à l’Eurométropole) est obligatoire. Il sert à obtenir un diagnostic personnalisé : « On rend un rapport avec des solutions de mobilité et les aides auxquelles les personnes peuvent avoir droit. On présente le coût écologique de chaque mobilité, la fréquence de passage des transports en commun, et les lignes qui passent à proximité », précise l’EMS. Reste que cet effort apparait en contradiction avec la décision de l’Eurométropole d’augmenter le prix des tickets CTS à partir de juillet.

L’objectif de Didier Mutter, directeur de l’IHU : « rester vivant en 2025 »

L’objectif de Didier Mutter, directeur de l’IHU : « rester vivant en 2025 »
Abonnez-vous

Cet article fait partie de l’édition abonnés. Pour lire la suite, profitez d’une offre découverte à 1€.

Contribuez à consolider un média indépendant à Strasbourg, en capacité d’enquêter sur les enjeux locaux.

    Paiement sécurisé
    Sans engagement
Abonnez-vous maintenant pour suivre l’actualité locale.

Déjà abonné ?

Connectez-vous

L’investigation locale à portée de main.

Abonnez-vous et profitez d’un accès illimité à Rue89 Strasbourg. Annulez quand vous voulez.

Déjà abonné ? Connectez-vous

Choisissez votre formule :
,

À l’IHU de Strasbourg, des opérations filmées sans le consentement des patients

À l’IHU de Strasbourg, des opérations filmées sans le consentement des patients

Cet article fait partie de l’édition abonnés. | Déjà abonné ? Connectez-vous

Abonnez-vous maintenant pour poursuivre votre lecture

Abonnez-vous
Abonnez-vous maintenant pour suivre l’actualité locale.

Déjà abonné ?

Connectez-vous

L’investigation locale à portée de main.

Abonnez-vous et profitez d’un accès illimité à Rue89 Strasbourg. Annulez quand vous voulez.

Déjà abonné ? Connectez-vous

Choisissez votre formule :
,

Les Atsem de Strasbourg en grève jusqu’à vendredi pour que soit reconnue la pénibilité de leur métier

Les Atsem de Strasbourg en grève jusqu’à vendredi pour que soit reconnue la pénibilité de leur métier

Les syndicats FO, Sud et Unsa ont déposé un préavis de grève les 12, 13, 15 et 16 juin pour les Atsem des écoles maternelles de Strasbourg. Leur objectif : que la pénibilité de leur métier soit reconnue. Pour cela, ils revendiquent une meilleure rémunération et une diminution de leur temps de travail. 

« Les Atsem sont en souffrance », c’est le constat que fait Cédric Mazounave, secrétaire général du syndicat Force ouvrière de l’Eurométropole de Strasbourg et agent de surveillance de la voie publique. Dans un communiqué commun publié le 9 juin, les syndicats FO, Sud et Unsa de l’Eurométropole ont appelé les Agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (Atsem) des écoles maternelles de Strasbourg à faire grève de 12h à 14h les lundi 12, mardi 13, jeudi 15 et vendredi 16 juin. Ils souhaitent la reconnaissance de la pénibilité du métier d’Atsem et demandent une meilleure rémunération ainsi que la diminution de leur temps de travail.

Les Atsem aident les enseignants et les petits enfants tout au long de la journée Photo : PF / Archives Rue89 Strasbourg / cc

Deux jours de RTT proposés

Les Atsem ont comme mission d’accompagner les enseignants des classes maternelles, pour accueillir, surveiller et participer aux activités proposées aux enfants. « C’est un métier exigeant, avec des tâches répétitives, de la manutention, où il faut parfois gérer des classes bruyantes », constate Patricia De Rosso, secrétaire générale du syndicat Unsa de l’Eurométropole de Strasbourg (EMS).  

Reçus le 7 juin par la direction de l’EMS, les syndicats ont discuté rémunération et temps de travail des Atsem mais « cette réunion n’a abouti à rien » indiquent-ils dans le communiqué : 

« L’administration de l’EMS a proposé d’octroyer deux jours de RTT aux Atsem, mais dans le même temps, à partir du 1er janvier 2024 deux jours de congés seront supprimés à tous les agents de la collectivité. Deux moins deux ça fait zéro ». 

Sur le temps de travail, « on avait évoqué les 32h mais c’est parti aux oubliettes », déclare Patricia De Rosso. Actuellement, les Atsem travaillent 35h par semaine. « Ce qu’on demande, en raison de la pénibilité du travail, c’est la modulation des 35h. On attend que l’administration fasse des propositions concrètes », indique-t-elle.

Le régime indemnitaire en question

Sur la rémunération, les syndicats souhaitent le relèvement du régime indemnitaire (ensemble des indemnités et primes). « Notre revendication principale est le versement d’indemnités de sujétions de 140€ par mois », précise Patricia De Rosso. Mais cette demande leur a été refusée lors de la réunion du 7 juin. Pourtant, les syndicats s’appuient sur une décision du Conseil de l’EMS qui, lors d’une délibération votée le 30 septembre 2022, avait décidé d’instaurer une prime de pénibilité pour certains métiers. Les Atsem ne figuraient pas sur la liste : « Ce sont les grandes oubliées de notre administration, pourtant elles étaient en première ligne lors du Covid », ajoute Patricia De Rosso. 

Un refus justifié par des questions budgétaires. En 2020, dans le cadre de l’Agenda social, l’EMS a mobilisé cinq millions d’euros pour revaloriser les rémunérations et renforcer le pouvoir d’achat de ses quelque 7 000 agents. Il reste actuellement 2,8 millions d’euros qui doivent bénéficier aux agents de catégorie C (dont font partie les Atsem) mais aussi pour la filière médico-sociale, dans la ligné des revalorisations accordées aux agents hospitaliers dans le cadre du Ségur de la Santé. 

Pour Patricia De Rosso, l’enveloppe est trop faible :

« En comparaison, Lyon a engagé 17 millions d’euros pour 9 000 agents. Le fait que ce soit un métier féminisé à 90% et de catégorie C y est aussi peut-être pour quelque chose dans le fait que les Atsem attendent toujours une reconnaissance financière… » 

Une réunion technique doit avoir lieu jeudi 22 juin pour aborder le temps de travail mais elle ne sera pas exclusivement réservée au cas des Atsem. Les syndicats de l’Eurométropole attendent les résultats de ces premières mobilisations avant de décider d’une reconduction de la grève. 

À la faculté d’Histoire, des retards de paiement de six mois à un an : « Tout s’effondre et ça retombe sur les vacataires »

À la faculté d’Histoire, des retards de paiement de six mois à un an : « Tout s’effondre et ça retombe sur les vacataires »

Cet article fait partie de l’édition abonnés. | Déjà abonné ? Connectez-vous

Abonnez-vous maintenant pour poursuivre votre lecture

Abonnez-vous
Abonnez-vous maintenant pour suivre l’actualité locale.

Déjà abonné ?

Connectez-vous

L’investigation locale à portée de main.

Abonnez-vous et profitez d’un accès illimité à Rue89 Strasbourg. Annulez quand vous voulez.

Déjà abonné ? Connectez-vous

Choisissez votre formule :

Gwenola Ricordeau au Molodoï jeudi 15 juin : « La police ne dysfonctionne pas quand elle commet des violences »

Gwenola Ricordeau au Molodoï jeudi 15 juin : « La police ne dysfonctionne pas quand elle commet des violences »

Professeure de justice criminelle aux Etats-Unis, Gwenola Ricordeau veut faire circuler les idées abolitionnistes en France. Après avoir publié l’ouvrage collectif « 1312 raisons d’abolir la police », la sociologue donne une conférence au Molodoï jeudi 15 juin.

Depuis le début de la mobilisation contre la réforme des retraites, la critique radicale de la police s’est un peu plus propagée en France. Parmi les manifestants et même au-delà, la répression à Sainte-Solline et les violences gratuites et autres humiliations racistes de la brigade BRAV-M à Paris ont choqué. Dans certains cortèges, en manifestation strasbourgeoise, le slogan « ACAB » (All Cops Are Bastards) a fini par devenir un cri de ralliement. Malgré ce rapport tendu aux forces de l’ordre d’une partie de la population française, l’abolitionnisme reste un courant marginal.

Enseignante en justice criminelle et professeure associée à l’université d’Etat de Californie, Chico, Gwenola Ricordeau a publié l’ouvrage « Pour elles toutes. Femmes contre la prison » aux éditions Lux en 2019. Elle y développe une réflexion appelant les forces progressistes, les féministes entre autres, à penser leurs luttes sans police ni prison.

En 2023, l’ancienne maîtresse de conférence en sociologie à l’Université de Lille publie une anthologie de textes abolitionnistes issus du monde anglo-saxon intitulée « 1312 raisons d’abolir la police ». Gwenola Ricordeau sera au Molodoï à l’invitation de l’Action Antifasciste Strasbourg (AFA SXB) jeudi 15 juin à 18h30. Dans sa description de l’événement, les organisateurs posent les questions suivantes : « D’où vient l’idée d’abolir la police et que recouvre-t-elle au juste? Si la police ne nous protège pas, à quoi sert-elle? Comment dépasser la simple critique de la police pour enfin en finir avec elle? »

Gwenola Ricordeau, directrice de l’ouvrage collectif « 1312 raisons d’abolir la police », sera présente au Molodoï à 18h30 jeudi 15 juin. Photo : Document Remis

Rue89 Strasbourg : Qu’est-ce que l’abolitionnisme pénal ?

Gwenola Ricordeau : C’est un ensemble de réflexions et de luttes pour l’abolition du système pénal, donc de la prison et de la police. Ces réflexions et ces luttes ont une histoire ancienne, même si les mobilisations qui ont suivi le meurtre de Georges Floyd et le mouvement Black Live Matter ont popularisé des slogans abolitionnistes de la police, notamment « Defund the police » (Définancez la police) ou
« Care not cops » (du soin, pas des policiers). 

Ce qui a permis le moment Georges Floyd en 2020 aux Etats-Unis, c’est une longue histoire de résistances à l’existence même de la police, de luttes dénonçant notamment le caractère raciste de la police, mais aussi de mobilisations anarchistes. Du point de vue des idées, on peut dire que l’abolitionnisme englobe divers courants de réflexions, en plus d’un champ strictement académique.

Vous enseignez à l’Université d’Etat de Californie, Chico, aux Etats-Unis. Est-ce que ce courant politique et académique y est plus développé qu’en France ?

Il y a eu dans le sillage du meurtre de Georges Floyd une avancée aux États-Unis. Il n’y a pas eu une telle popularisation de l’abolitionnisme en France ou en Europe. C’est le projet et l’intérêt du livre “1312 raisons d’abolir la police” : permettre au lectorat français l’accès aux analyses développées en Amérique du Nord, mais aussi une compréhension des luttes qui y sont menées.

Les réflexions sur la police aux Etats-Unis sont-elles valables en France ? N’y a-t-il pas une différence entre les polices françaises et américaines ?

Pour nous abolitionnistes, il n’y a pas de différence de nature entre la police aux Etats-Unis et la police dans les autres États occidentaux. La police étasunienne est raciste et elle l’est aussi en France. Ici comme ailleurs, elle est au service du maintien de l’ordre capitaliste. Ce n’est donc pas une différence de nature de la police qui permettrait d’expliquer des avancées différentes de l’abolitionnisme en France et en Etats-Unis.

Où trouve-t-on les réflexions et luttes abolitionnistes en France ? 

La résistance populaire à la police a toujours existé. La confrontation avec la police en manifestation, c’est une résistance à l’ordre policier. Des luttes, des personnes et des mouvements peuvent contribuer à la cause abolitionniste sans se revendiquer ou se penser comme tel. Je pense, par exemple, aux mobilisations contre les crimes policiers. 

Dans le livre “1312 raisons d’abolir la police”, je reviens sur les réflexions et les luttes des Black Panthers. Ce mouvement ne se revendiquait pas abolitionniste dans les années 60-70. Pourtant il y a chez les Black Panthers une analyse largement reprise dans le corpus abolitionniste aujourd’hui.

Les Black Panthers analysaient la police comme une force d’occupation du ghetto noir. Pour ces militants, il n’y a pas de différence entre police et armée. Ainsi, la lutte des Black Panthers est profondément solidaire de la résistance vietnamienne à l’armée impérialiste. L’armée et la police ont la même fonction : c’est un outil de maintien de l’ordre raciste et colonial. Comme force ennemie, la police doit donc être combattue. 

Parmi leurs actions, les Black Panthers observaient les patrouilles policières dans les quartiers africains-américains pour renseigner l’action de la police et défendre la population. Ces actions ont été largement reprises dans ce qu’on appelle aujourd’hui le « copwatching », qui fait partie des manières d’agir des abolitionnistes.

Vous êtes actuellement en tournée avec l’anthologie 1312 raisons d’abolir la police. A quel public s’adresse votre discours ? 

Mon abolitionnisme est un abolitionnisme révolutionnaire, qui rompt avec le réformisme et dénonce les promesses d’une police qui pourrait être une « bonne police ». De fait je m’adresse à une gauche révolutionnaire, antiraciste et féministe. 

Je fais donc la critique d’une gauche citoyenniste, qui lorsqu’elle évoque la police, dit qu’il est possible d’avoir une police qui soit dans le camp du progrès social et qui contribue à l’émancipation. En clair, je critique la France insoumise ou le parti communiste qui surfent sur le mythe d’une « bonne police », républicaine ou de proximité, et refusent d’analyser quelle est la fonction de la police dans le maintien de l’ordre capitaliste, raciste et sexiste. 

Selon moi, le résultat de cette analyse indique clairement qu’il n’y a pas de compromis possible avec la police lorsqu’on s’inscrit dans le camp du progrès social. Il faut reconnaitre qu’avec cette ligne on ne
rallie pas beaucoup d’organisations de gauche aujourd’hui (rires).

Quels sont vos arguments contre l’idée qu’une réforme de la police est possible ? 

La quinzaine d’auteurs réunis dans “1312 raisons d’abolir la police” font la critique des luttes et des discours qui présentent la police comme « dysfonctionnant ». Cette perspective est, par nature, réformiste selon nous. En effet, la police ne dysfonctionne pas quand elle commet des violences. Elle fonctionne parfaitement bien et répond ainsi à ce qui est attendu d’elle. Nous abolitionnistes, nous ne disons pas qu’il faut lutter contre les violences policières car nous estimons que la police est par essence violente, raciste et sexiste.

Un de mes livres précédents, « Pour elles toutes. Femmes contre la prison » critique le féminisme qui réclame toujours plus de prisons. Dans « 1312 raisons d’abolir la police », je poursuis cette perspective en appelant à « défliquer » les luttes progressistes et féministes et en critiquant les courants féministes qui nous entretiennent l’illusion d’une police qui pourrait contribuer à l’avancée du féminisme en recueillant toujours davantage de plaintes. Pour nous, la police ne protègera toujours que certaines femmes, pas toutes les femmes, et il n’y a pas d’avancée à se servir d’un outil profondément raciste et classiste comme la police.

Il faut donc rompre avec cette illusion. La police bénéficiera toujours aux puissants, à la classe possédante, aux Blancs. Tant qu’on dira qu’il y a des problèmes dans la police, on ne sortira pas des cycles scandales, proposition de réforme et retour à la « normale ».

Ce discours révolutionnaire est peu développé en France. Avez-vous subi des pressions ou intimidations depuis la sortie de votre livre et le début de votre tournée ? 

J’ai reçu des menaces, mais ce n’est pas surprenant quand on dit publiquement que la police est notre ennemi et qu’on assume cette conflictualité.

Hausse des prix du stationnement : critiquée, la Ville fait des concessions

Hausse des prix du stationnement : critiquée, la Ville fait des concessions

Après l’augmentation du prix du stationnement et l’apparition de places payantes dans de nouveaux quartiers, la Ville de Strasbourg annonce prendre en considération les enjeux des commerçants et commence à céder à l’opposition.

Depuis le 3 avril, les tarifs du stationnement ont augmenté à Strasbourg et d’autres secteurs comme celui du Neudorf ont été ajoutés à la zone payante dès 2024. Objectif : encourager l’utilisation des moyens de transports plus écologiques et inciter les voitures à se stationner dans les parkings en ouvrage, pour libérer l’espace public.

Mais face aux critiques farouches des résidents, des professionnels et des conseillers municipaux d’opposition, la Ville semble prête à faire des concessions. Trois mesures seront soumises au vote du conseil municipal du 26 juin, pour les professionnels, les « stationnement courte durée » et le prix du stationnement sur l’avenue des Vosges.

L’avenue des Vosges et Neudorf reconsidérés

Parmi les concessions annoncées par la Ville, l’avenue des Vosges pourrait passer en zone orange. Actuellement elle est en zone rouge et concentre l’attention des riverains étant donné le projet du tram qui devrait y passer.

« Après discussions avec les employeurs publics et privés », le quartier de Neudorf deviendra payant comme prévu en 2024, mais sera une zone verte et non une zone jaune.

Discussion ouverte avec les acteurs économiques

Depuis deux mois, les tarifs en zone rouge ont augmenté : de 2,10€ à 3,50€ pour la première heure de stationnement, puis 8€ pour les deux heures. Avant réservé à l’hyper-centre, ces nouveaux tarifs en zone rouge ont été élargis à quatre autres quartiers.

Ces mesures déplaisent aux résidents et aux professionnels. Jeudi 4 mai lors d’une conférence de presse, les présidents de la chambre des métiers et de la chambre de commerce et d’industrie d’Alsace ont alerté sur les conséquences de ces hausses de tarifs.

Selon Pernelle Richardot, les tarifs du stationnement en voirie n'ont pas augmenté. Mais beaucoup d'usagers ont le sentiment inverse... (Photo PF / Rue89 Strasbourg / cc)
Face à l’opposition, la Ville de Strasbourg veut adopter des mesures pour les professionnels, les acheteurs pressés et les habitants de certaines zones. Photo : PF / Rue89 Strasbourg / cc

Face aux critiques, Jeanne Barseghian, Pierre Ozenne (adjoint en charge des espaces publics et de la voirie) et Joël Steffen (adjoint au commerce, à l’artisanat et au tourisme), ont rencontré les acteurs économiques (employeurs, représentants d’ordres professionnels, syndicats et chambres consulaires).

Pour « compléter cette nouvelle organisation du stationnement » et calmer l’opposition, deux mesures ont été décidées suite à cette rencontre.

Expérimentation des places violettes pour les stationnements de courte durée

Pour permettre un stationnement de courte durée (1h30 maximum), 200 places violettes seront créées dans le centre-ville élargi (grande île, quartier gare, Krutenau, Bourse, Vosges, etc.). Avec un tarif d’un euro pour une heure, l’objectif est de faciliter l’accès aux commerces et services pour les clients qui ont des courses rapides à effectuer. 

Prévue dès cet été jusqu’au marché de Noël, cette expérimentation « répond au besoin de certains clients d’accéder en voiture pour, par exemple, récupérer un achat volumineux ». Un comité de suivi sera installé auquel participeront les acteurs économiques. 

Élargissement des forfaits professionnels

Pour répondre aux demandes des professionnels, Strasbourg a annonce l’élargissement du « forfait pro mobile » à 11€ par jour. D’autres activités économiques pourront bénéficier de ce forfait (coiffure à domicile, collecte de déchets spécifiques, fabrication de matériel dentaire…).

Pour les sages-femmes, la Ville prévoit la gratuité totale du stationnement dans le cadre de leurs déplacements. Elle indique également vouloir discuter de la création de nouveaux forfaits professionnels, et prévoit la mise en place d’un groupe de travail avec les acteurs économiques.

Après discussions avec les employeurs publics et privés, la Ville a également décidé de revenir sur le zonage de couleur, faisant passer le sud de l’avenue des Vosges de zone rouge à orange, et le nord du Neudorf en zone verte plutôt que zone jaune.

Pour mettre en œuvre ces nouvelles dispositions, une délibération sera proposée au Conseil municipal du 26 juin.

Des « mesurettes », pour l’opposition

Dans un communiqué diffusé à la presse vendredi 9 juin, Jean-Philippe Vetter (LR) dénonce des « mesurettes » loin d’être à la hauteur selon lui de la mobilisation des strasbourgeois. L’élu d’opposition a organisé début mai un happening pour dénoncer la hausse des prix du stationnement dans le quartier de Neudorf.

Il annonce que son groupe continuera de se mobiliser sur le sujet et remettra en main propre le 26 juin à Jeanne Barseghian la pétition qu’ils ont lancé, déjà signée par « plusieurs milliers de strasbourgeois ».

Alsace Habitat, IHU, Stocamine… Dès lundi 12 juin, semaine de l’investigation locale et abonnement à un euro

Alsace Habitat, IHU, Stocamine… Dès lundi 12 juin, semaine de l’investigation locale et abonnement à un euro

A partir du lundi 12 juin, Rue89 Strasbourg publie une enquête chaque jour. Pour vous permettre d’en profiter, il vous suffira de payer un euro. Une promo valable jusqu’au dimanche 18 juin.

Précarité des vacataires à l’Université de Strasbourg, protection insuffisante des femmes victimes de violences conjugales, omerta sur le harcèlement au sein du bailleur social Alsace Habitat… À partir du lundi 12 juin, Rue89 Strasbourg vous propose une nouvelle semaine de l’investigation locale. La recette reste la même : chaque jour, une enquête sur nos thématiques de prédilection, de l’environnement à la santé publique, en passant par le féminisme et les conditions de travail.

1€ le premier mois avec le code « abo2000 »

Ces articles ont nécessité beaucoup de persévérance de la part des journalistes qui en sont les autrices et les auteurs. En outre, ils représentent un effort financier significatif pour notre petit média porté, rappelons-le, par une entreprise strasbourgeoise indépendante. Chacune de ces enquêtes aura nécessité plusieurs milliers d’euros d’investissement et c’est pourquoi nous les réservons, contrairement à la première édition, à nos abonnés.

Mais bonne nouvelle : cette semaine est accompagnée d’une promotion pour découvrir l’édition abonnés de Rue89 Strasbourg. Un euro le premier mois avec le code « abo2000 » et c’est toujours sans engagement, le désabonnement ne nécessitant qu’un seul clic.

Publier des enquêtes dans un univers local est toujours une aventure particulière. Les personnes mises en cause sont parmi nos lecteurs, parmi nos cercles étendus parfois. C’est délicat et difficile, mais nous sommes persuadés de leur utilité publique.

À la base des enquêtes, les alertes

Nous le devons aussi aux personnes qui ont pris le risque de nous alerter, soit en nous contactant par la plate-forme anonyme, soit directement par le formulaire, soit par contacts communs, parfois en prenant des risques personnels. Qu’elles et ils soient ici remerciés pour leur courage et pour leur disponibilité.

Plus de 1 800 personnes sont actuellement abonnées à Rue89 Strasbourg pour accéder à nos enquêtes et soutenir notre démarche. Notre média doit atteindre 2 000 abonnés pour maintenir la composition actuelle de sa rédaction, soit cinq journalistes à temps plein et le recours régulier à une dizaine de journalistes indépendants.

Retour du camp de l’Étoile : « Il y a des nouvelles têtes tous les jours »

Retour du camp de l’Étoile : « Il y a des nouvelles têtes tous les jours »

Les tentes sont de retour place de l’Étoile à Strasbourg. Depuis mi-mai, de plus en plus de sans-abri trouvent refuge sous les arbres à côté de la gare routière, en face du centre administratif. Au moins 10 enfants y dorment, à nouveau, tous les soirs.

Debout à côté de sa tente, Armant compte à voix haute, dans un français parfait. « Il y a au moins dix enfants ici, dont les miens. Le plus jeune n’a qu’un an. » Depuis une semaine, l’Albanais de 29 ans a décidé de s’installer place de l’Étoile. « Je n’avais pas de tente, c’est la maîtresse de l’école maternelle qui m’a aidé pour en trouver une, quand je lui ai dit qu’on allait vivre dehors. »

Il est en France depuis cinq ans, à la rue depuis mai. Avec sa femme et ses deux enfants, ils n’ont pas de papiers. « On s’est installé sur cette place car au moins il y a d’autres personnes, donc on peut partir du campement sans avoir peur qu’on nous vole toutes nos affaires. » Avec ses grands yeux bleus, il parcourt l’étendue des tentes grises qui se multiplient chaque jour. « On appelle tous le 115, plusieurs fois par jour, mais ils n’ont pas de place pour des familles. »

En 2022, le camp de l’Étoile a accueilli jusqu’à 200 personnes vivant sous des tentes. Extrêmement médiatisé, il a fini par être évacué le 6 décembre 2022, après plusieurs mois de bataille juridique et politique entre les services de l’État et ceux de la Ville. Selon nos informations, la moitié des sans-abris ont fini par être orientés vers un centre d’aide au retour situé à Bouxwiller.

Une cinquantaine de personnes sur le camp

Les mercredis soirs, l’association des Vélos du Coeur passe apporter de la nourriture et des boissons aux migrants sans abri. L’une des bénévoles confirme l’observation d’Armant : le nombre de tentes ne cesse d’augmenter : « Entre le 31 mai et le 7 juin, je pense qu’elles se sont multipliées par trois ».

Dans la semaine, un point d’eau est également apparu place de l’Étoile. « C’est bien, parce qu’il fait chaud la journée et froid la nuit, c’est difficile avec un bébé si on n’a pas d’eau », explique Armant en guettant les abords du camp. « Il y a de nouvelles têtes tous les jours », précise-t-il pour justifier son regard distrait.

Le point d’eau en question fait partie de ceux mis en place par la Ville, l’été. « Des toilettes et d’autres points d’eau devraient arriver d’ici la fin de la semaine prochaine », explique Floriane Varieras, adjointe à la mairie en charge des solidarités :

« C’est sûr que des personnes allaient revenir. Avec le squat Sarlat et le campement à Cronenbourg, c’est un troisième lieu de vie informel sur lequel nous allons travailler, avec les services de la préfecture notamment ou avec des associations pour les évaluations médico-sociales. C’est navrant, mais on commence à avoir un processus interne à la Ville et les réflexes pour gérer ce genre de situations. L’idée, c’est que les personnes qui y vivent soient toutes relogées. Mais avec les projets de loi immigration qui sont en préparation, rien ne laisse présager que le nombre de personnes à la rue diminue dans les années à venir. »

Les services de la Ville ont compté 22 tentes le 8 juin, occupées par une cinquantaine de personnes selon notre estimation.

Depuis mardi 6 juin, un point d’eau est installé place de l’Étoile à côté de l’endroit où sont plantées la plupart des tentes. Photo : CB / Rue89 Strasbourg / cc

Mercredi 7 juin, 21 tentes accueillent une cinquantaine de sans-abris. Dans certaines, dorment jusqu’à six personnes. Autour de salons improvisés, sous les arbres, les femmes, les hommes et les enfants se regroupent en fonction de leur langue maternelle. Pour la plupart, l’albanais ou le dari (variété de persan parlé en Afghanistan). Les parents veillent sur les petits qui jouent au foot à côté des tentes, des passants qui attendent leur bus et des cars de tourisme aux immatriculations venues de toute l’Europe.

Kledis, 15 ans, fait le lien entre les différents mondes. Il est avec ses deux parents qui n’ont pas non plus de papiers. « On était à la gare, mais la police nous disait tout le temps de partir alors on est venus ici », résume-t-il, lui aussi dans un français parfait. Il parle couramment le français, l’albanais et l’anglais et est scolarisé dans un collège de la Meinau. Dans lequel il ne va plus. Selon le jeune homme, ses camarades le harcèlent et « en vivant dans une tente, c’est difficile d’être attentif à l’école ».

Des Afghans arrivés de Guyane française

Aux côtés de Kledis, Alena, 18 ans, tient elle aussi à raconter son histoire. Les deux adolescents se sont rencontrés à la gare. Pourtant la jeune femme a des papiers et toute sa famille aussi – elle, ses trois sœurs et ses deux parents. Originaires d’Afghanistan, ils ont demandé l’asile en Guyane française et l’ont obtenu en quelques semaines :

« Puis on nous a dit que la prise en charge s’arrêtait au bout de trois mois, on nous a donné un papier nous autorisant à venir en France métropolitaine en nous conseillant de ne pas rester à Paris. On nous a dit d’appeler le 115. Donc on appelle le 115, mais ils n’ont pas de place. »

Sous les arbres, la chaleur est tempérée en fin de journée. Mais les nuits sont froides et les après-midi insoutenables pour les sans-abri les plus âgés ou vulnérables. Photo : CB / Rue89 Strasbourg / cc

Son père, Hussein, 52 ans, peine à comprendre. Assis en tailleur sur un tapis bleu où les chaussures n’ont pas leur place, il regarde au loin et pose des questions presque enfantines. Son mal de dos s’est réveillé et la chaleur est difficile à supporter sous les toiles sombres de leurs maisons de fortune :

« Si un pays accueille des réfugiés, ne faut-il pas qu’il soit en mesure de leur donner un toit ? Ma famille et moi on ne demande qu’à s’intégrer en France, on veut apprendre la langue, trouver un travail… Ma femme est professeure, une de mes filles est anesthésiste et moi j’étais policier. La France nous accepte, on est reconnaissant. Mais là, on vit dans trois tentes. Vous avez des lois, non, pour nous protéger ? À quoi elles servent, ces lois, si c’est juste sur le papier ? »

Au moins trois familles sont dans le cas de celle d’Hussein et d’Alena, sur le camp de l’Étoile. Parmi elles, un couple de sexagénaires qui ne comprend pas bien ce qu’il a fait de mal.

« La France, vous avez bonne réputation ! »

Arash (le prénom a été modifié), 67 ans, doit s’assoir à l’ombre. Il fait trop chaud sous le soleil de juin pour que l’Afghan rassemble correctement ses pensées. Il arrive de Marseille, et a lui aussi le statut de réfugié.

Depuis huit mois, il dort dehors. À deux reprises, depuis qu’il est à la rue, le 115 lui a proposé un hébergement temporaire en hôtel, mais jamais plus de quelques jours. « On m’a dit qu’il faut que ça tourne, les places en hôtels », soupire-t-il :

« J’ai tout laissé en Afghanistan. Je pensais pouvoir commencer une nouvelle vie ici, une vie meilleure. La France, vous avez bonne réputation ! J’avais tellement d’attentes en arrivant ici, je pensais trouver un niveau de vie correct, un travail, une situation où je pourrais m’intégrer facilement et apprendre le français… »

À ses côtés, Ahmad (le prénom a été modifié) hoche la tête. Il a accepté de traduire du dari à l’anglais les propos de son concitoyen. Ceux-ci font douloureusement écho à la situation qu’il essaye de résoudre pour sa propre famille. Les deux hommes ont tenu à l’anonymat. « Si un jour je réussis à m’intégrer, imaginez qu’on retombe sur cet article, c’est la honte », assène Ahmad.

Mercredi 7 juin 2023, on comptait une cinquantaine de personnes rassemblées dans 21 tentes, avec au mois dix enfants, place de l’Étoile à Strasbourg. Photo : CB / Rue89 Strasbourg / cc

Il est arrivé de Guyane française avec sa femme et ses quatre enfants après avoir obtenu, lui aussi, le statut de réfugié :

« Dans le camp en Guyane, il n’y avait pas d’école. C’est pour permettre à nos enfants d’étudier qu’on est partis d’Afghanistan, car chez nous, les filles n’ont plus ce droit. Alors on est venus en métropole. Trois de mes enfants ont passé les tests pour rentrer au lycée international des Pontonniers. »

Depuis fin avril, Ahmad multiplie les initiatives pour trouver un toit :

« Que ce soit à la préfecture, à la Ville, dans les structures d’accueil pour demandeurs d’asile… On nous dit tout le temps que notre situation ne relève pas de leur responsabilité. On me répète d’appeler le 115. Mais ça ne marche jamais. »

« Je dois accoucher dans deux mois »

Pendant que l’homme se raconte, un ballon de foot vient s’écraser sur une tente adjacente. Immédiatement, l’enfant à l’origine du tir maladroit est réprimandé par Xohana. À 27 ans, l’Albanaise est enceinte pour la première fois. « Je dois accoucher dans deux mois », sourit-elle en gardant un œil sur le jeune qui est reparti en courant.

Arrivée il y a trois mois en France, Xohana est suivie par un gynécologue à Strasbourg. Elle appréhende :

« Je vais accoucher dans la rue, moi ? Et mon enfant va grandir dans la rue, lui aussi ? Je ne demande pas grand chose, simplement une chambre, même partagée, c’est tout ce dont j’ai besoin. Là, en ce moment, vivre dans une tente met ma santé en danger et celle de mon bébé également. »

En demande d’asile, la jeune femme devrait en principe être logée par l’Office français pour l’intégration et l’immigration (OFII), un service de l’État spécifiquement conçu pour accompagner les exilés le temps de leurs démarches administratives.

Toutes les personnes présentes sur le camp début juin ne relèvent pas de la responsabilité de l’OFII. Toutes, en revanche, devraient pouvoir être mises à l’abri par le 115, c’est-à-dire bénéficier d’un hébergement d’urgence, qui doit être selon la loi inconditionnel.

Même Kledjan, 33 ans, qui a refusé un hébergement proposé par l’OFII à 4h30 de Strasbourg, devrait pouvoir être logé au moins temporairement. Sa femme est suivie par un médecin dans la capitale alsacienne et l’idée de devoir en partir la terrorise :

« Déjà, on ne savait pas que si on refusait, on finirait à la rue. Ensuite, on attend d’être entendus par l’Office français pour la protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) pour demander l’asile. Personne ne nous a dit que ça se passerait comme ça. Au début on était dans un hôtel, puis on a dû partir. Nos enfants ont trois et sept ans, ils vont aller à l’école en septembre, on ne peut pas rester là. »

Contacté, le service de la préfecture du Bas-Rhin n’a pas pu répondre à Rue89 Strasbourg dans les délais impartis pour l’écriture de cet article.

« Le Racing ne doit pas devenir un sous-club » : les fans opposés au rachat par le propriétaire de Chelsea

« Le Racing ne doit pas devenir un sous-club » : les fans opposés au rachat par le propriétaire de Chelsea

La Fédération des supporters du Racing club de Strasbourg est opposée au rachat du club par le milliardaire américain Todd Boehly, co-propriétaire de Chelsea. Les associations craignent que le Racing serve l’ambition du club britannique. La direction reste opaque sur les négociations en cours mais promet de garder l’identité du club . . .
>

Abonnez-vous

Cet article fait partie de l’édition abonnés. Pour lire la suite, profitez d’une offre découverte à 1€.

Contribuez à consolider un média indépendant à Strasbourg, en capacité d’enquêter sur les enjeux locaux.

    Paiement sécurisé
    Sans engagement
Abonnez-vous maintenant pour suivre l’actualité locale.

Déjà abonné ?

Connectez-vous

L’investigation locale à portée de main.

Abonnez-vous et profitez d’un accès illimité à Rue89 Strasbourg. Annulez quand vous voulez.

Déjà abonné ? Connectez-vous

Choisissez votre formule :

Cinéma en plein air, Just Dance et sculptures géantes : le programme des animations de l’été 2023 

Cinéma en plein air, Just Dance et sculptures géantes : le programme des animations de l’été 2023 

Du 21 juin au 3 septembre, l’Eurométropole accueille les traditionnelles animations estivales, comme le cinéma en plein air ou le Festival des Arts de la Rue de Strasbourg. Parmi les nouveaux événements de l’été 2023 : un Just Dance place Kléber et des sculptures géantes sous la cathédrale.

A vos agendas ! Au sein de l’Eurométropole de Strasbourg, l’été est traditionnellement animé, avec plusieurs événements bien installées : la Fête de la musique pour commencer, puis le Festival des Arts de la Rue de Strasbourg (Farse), les projections sur la cathédrale, les activités nautiques devant la médiathèque Malraux et le cinéma en plein air tout au long de la saison estivale. Pour l’été 2023, quelques nouveautés ont aussi été annoncées en conférence de presse mardi 6 juin : un Just Dance géant place Kléber, des journées olympiques ou des visites guidées humoristiques.

La Fête de la musique pour commencer

Les festivités estivales débutent avec la Fête de la musique le 21 juin dès 18h. La place Kléber accueillera de nombreux artistes locaux. Le groupe Lyre le temps, originaire de Strasbourg, clôturera la soirée avec ses compositions swing, électro et hip-hop. Deux autres scènes, place Gutenberg et place Broglie, seront dédiées aux nouveaux talents (programmation à venir sur le site de l’Eurométropole).

Une programmation jeune sera proposée sur la place Saint-Thomas à partir de 14h. Les enfants pourront y essayer des instruments de musique ou composer une chanson avec l’atelier « Fabrique ta chanson ». 

De 18h à 19h le mercredi 21 juin, un Just Dance géant doit permettre à la foule de danser sur la place Kléber. L’animation est organisée en partenariat avec l’association Beatburst et le danseur « Of Hugo », trois fois finaliste pour la compétition nationale de la Just Dance World Cup. 

Cette année, plusieurs stands de prévention seront tenus par des associations, comme le Planning familial, Ru’elles, Ithaque et Dis bonjour sale pute. Ils doivent permettre de sensibiliser les visiteurs aux problématiques de violences sexistes et sexuelles. Ces stands serviront aussi de refuge pour des victimes de harcèlement ou d’agression. 

La Cathédrale sous un nouveau jour

Du 8 juillet au 3 septembre, une œuvre d’art éphémère sera exposée au pied de la cathédrale. Habitants et touristes pourront observer Nemeton, réalisé par le collectif d’artistes, d’architectes et de designers AV Lab. Ces derniers ont construit trois structures composées de métal, bois, miroirs et de feuilles thermoplastiques légères et robustes. La plus grande de ces sculptures géantes mesure treize mètres. 

En journée, les structures joueront avec le reflet du soleil. Photo : Document UV LAB

Cet été, pas de mapping vidéo sur la cathédrale. Les habituelles projections sur la façade de l’édifice seront remplacées par une « mise en lumière continue et progressive » du designer Daniel Knipper. L’artiste mettra en valeur la façade occidentale (côté rosace) de la cathédrale, dès la tombée du jour jusqu’à minuit.

Ces expositions artistiques seront accompagnées de festivités place du château, avec des concerts de musiques traditionnelles alsaciennes les mardis, des concerts de tous horizons les samedis et des spectacles de rue destinés aux enfants les mercredis.

Docks d’été et cinéma en plein air  

Cette année encore, les associations Les Films du Spectre et Speaker donnent rendez-vous aux habitants pour une programmation de films en plein air les jeudis et vendredis, à partir du 23 juin. Cet été, le cinéma s’ouvre à de nouveaux quartiers : 

    Le vendredi 23 juin : jardin des Deux Rives Le vendredi 30 juin : place Henri Will au Neudorf Le vendredi 7 juillet : parc de la Bergerie à Cronenbourg Le jeudi 13 juillet : plaine des jeux à Hautepierre Le vendredi 21 juillet : rue du Hohwald, quartier gare Laiterie Le vendredi 28 juillet : plan d’eau du Baggersee à la Meinau Le jeudi 3 août : parc du Heyritz Le jeudi 10 août : à proximité du square Icare, Neuhof Le vendredi 18 août : parc Albert Schweitzer, Koenigshoffen Le vendredi 25 août : parc de la Bergerie à Cronenbourg Le jeudi 31 août : parc du Heyritz
Les séances de cinéma en plein air ont été assez suivies à l'été 2018 à Strasbourg, ici à la Citadelle (photo JFG / Rue89 Strasbourg)
Photo : JFG / Rue89 Strasbourg / cc

Les films programmés tout au long de l’été seront dévoilés lors d’une conférence de presse le mardi 13 juin.

La presqu’île Malraux accueillera la plage éphémère et une base nautique du samedi 8 juillet jusqu’au dimanche 3 septembre. Les visiteurs pourront se détendre sur la plage en accès libre de 8h à minuit. Dans une volonté de développer un aspect nocturne, la base nautique sera ouverte du dimanche au jeudi de 15h à 19h et les vendredis et samedis de 15h à 21h. Les activités proposées iront du pédalo au kayak en passant par des barques à cinq places.

Les Docks d'été reviennent avec des horaires plus étendus sur la presqu'île Malraux. (Photo : Ville de Strasbourg)
La base nautique des Docks d’été revient avec des horaires nocturnes en prévision des hautes températures la journée. Photo : Ville de Strasbourg

Festival des arts de la rue et 14 juillet  

A l’occasion de la fête nationale, un bal populaire sera organisé dès 20h à la place de la Bourse. Le feu d’artifice sera tiré de la place de l’Etoile à 22h30. 

Le Festival des Arts de la Rue de Strasbourg (Farse) fera son retour les 11, 12 et 13 août, avec pour mot d’ordre : « (s’)inclure » et un nouveau directeur artistique, le comédien et responsable artistique de la Compagnie intranquille Axel Goepfer. Gratuit, le festival proposera de nombreux événements et rassemblera une trentaine de compagnies.

Journées olympiques et piscine itinérante

La Ville de Strasbourg organise les journées olympiques et paralympiques le vendredi 23 juin de 17h à 21h et le samedi 24 juin de 11h à 18h. De quoi découvrir les associations sportives du territoire et les disciplines olympiques, comme le rugby, l’aviron, le canoë-kayak, l’escrime, le skateboard, le karaté, ou encore l’escalade. L’accès sera gratuit. 

Pour la seconde année consécutive, une piscine itinérante nommée Carava’nage sera déployée sur le territoire de l’Eurométropole de Strasbourg. Fabriquée à partir d’anciens containers maritimes de 6,5 sur 2,5 mètres, cette piscine mobile passera par l’école Paul Langevin à Cronenbourg. L’objectif est de réunir une soixantaine d’enfants pour leur apprendre à nager. En accès gratuit, ces cours de natation, ainsi que des cours de vélo et de roller, seront dispensés du 12 juillet au 30 août dans différents quartiers. 

Pour celles et ceux qui auraient envie de se détendre en riant, les comédiens Pierre le crieur et Vladimir Spoutnik invitent aux visites Farfelues. Dans le rôle de guides touristiques, ils feront parcourir aux visiteurs un quartier de la ville à travers chansons, blagues et quiz. 

Après un accident mortel, une vélorution organisée vendredi à Cronenbourg

Après un accident mortel, une vélorution organisée vendredi à Cronenbourg

Les associations Strasbourg à Vélo et CroCollectif organisent une vélorution vendredi 9 juin, à partir de 18h à Cronenbourg. L’occasion de dénoncer le manque d’infrastructures adaptées aux cyclistes dans le quartier, après un accident mortel route d’Oberhausbergen. 

Vendredi 9 juin à 18h, l’association  Strasbourg  à  Vélo  et  le  CroCollectif invitent les Strasbourgeois à monter en selle et parcourir les rues de Cronenbourg. La vélorution partira du parvis de la patinoire Iceberg.

Le CroCollectif s’est formé en réaction à l’accident mortel qui a eu lieu le 27 janvier route  d’Oberhausbergen, dans le quartier de Cronenbourg. Une femme a été renversée par un poids lourd alors qu’elle traversait au passage piéton. 

Pour des « déplacements cyclosécurisés »

C’est pour dénoncer le manque d’infrastructures adaptées, notamment pour les cyclistes, que le collectif a fait le choix d’organiser cette nouvelle vélorution à Cronenbourg. Les militants tiennent à rappeler la nécessité de sécuriser le passage piéton devant la pharmacie Cronenbourg où a eu lieu l’accident.

Mais les revendications vont plus loin. Ils demandent « l’apaisement  significatif  de  la  mobilité » et  « l’amélioration de la sécurité des déplacements doux », le tout « sans  pour autant pénaliser la logistique urbaine et commerçante du quartier ».

Photo : document remis / CroCollectif et Strasbourg à Vélo

Sur sa page web, le collectif Strasbourg à Vélo dresse un bilan « alarmant de la cyclabilité » à Cronenbourg et dénonce « un manque d’ambition » de la Ville.

Pour cette balade, les organisateurs ont prévu de traverser le quartier à vélo, « collectivement et sereinement », en empruntant des axes que les cyclistes n’ont pas l’habitude de fréquenter en raison de leur insécurité.

Ils espèrent « qu’à l’issue de cette manifestation, des représentants de la municipalité présenteront des pistes d’actions ».

Après 12 ans, le festival Musaïka de Mulhouse risque de disparaître

Après 12 ans, le festival Musaïka de Mulhouse risque de disparaître

Après plus de dix ans d’existence, le festival de musiques du monde Musaïka à Mulhouse peine à trouver les financements nécessaires à sa survie. Le centre culturel des Coteaux pense à se tourner vers des financeurs privés.

« Chaque année entre cinq et six mille personnes viennent sur le festival. On réussit à toucher un public intergénérationnel, dans notre quartier et au-delà ». Au bout du fil, la voix d’Élise Cataldi reste enthousiaste. La directrice de l’Afsco, l’association qui gère le centre social et culturel (CSC) du quartier des Coteaux à Mulhouse, a vu naître le festival dès 2010.

Musaïka (doc remis)
Lors d’un événement du festival Musaïka en 2022. Photo : doc remis

Une version déjà réduite en 2023

« Depuis, on n’arrête pas de grandir », se félicite-t-elle. Deux soirées de concerts gratuits en plein air depuis 2019, des animations pour les enfants, des projections au cinéma Bel Air, des spectacles à la Filature, une balade gourmande, un partenariat avec les bibliothèques de Mulhouse… Dans le projet social 2021-2024 du CSC, les habitants font savoir leur « joie et fierté d’avoir ces concerts dans leur quartier ».

« Si nous n’avons pas trouvé de financeur solide d’ici septembre, nous pouvons dire au revoir à Musaïka 2024 », déplore la directrice. Cette année, l’association a déjà manqué de 30 000 euros pour boucler son budget. Malgré tout, elle a décidé de maintenir l’édition 2023, en « version plus réduite », pour limiter les coûts.

Cette année, l’organisation de Musaïka a donc coûté 70 000 euros, dont 5 000 euros financés par la Ville de Mulhouse et 5 000 par la Collectivité européenne d’Alsace (Cea). Le reste provient des fonds propres de l’Afsco, qui décide d’y allouer une partie de son budget global.

Un « formidable outil de mixité sociale »

Le festival Musaïka fait partie des évènements organisés par le CSC mais ce n’est pas l’essentiel de leur activité :

« Notre priorité, c’est de nous développer dans toutes nos activités. On n’a pas le temps de chercher des financeurs toute la journée, ni les moyens d’y dédier quelqu’un à temps plein. Surtout, ce n’est pas notre métier. Nous restons une structure sociale au service des habitants. Nous devons déjà nous adapter aux nouveaux enjeux politiques, à ceux de la ville… »

Le CSC compte 2 500 adhérents, sur un quartier d’environ 9 000 habitants. Et la directrice tient à ce que l’évènement reste gratuit :

« C’est un formidable outil de mixité sociale. Si on fait payer, une partie des gens du quartier ne vont plus pouvoir venir et ce n’est pas l’esprit du festival. »

Une baisse globale des subventions

Les coûts de l’électricité et de production du festival augmentent, ainsi que celui des salaires des quelques 70 employés du CSC des Coteaux. L’édition 2024 de Musaïka doit coûter entre 80 et 90 000 euros, explique Élise Cataldi.

Les frais augmentent, tandis que les subventions baissent. « La Collectivité européenne d’Alsace (CeA), la CAF et la Ville de Mulhouse ont gardé la même enveloppe de subvention. Mais elles ont plus de structures à financer », résume la directrice. Le nombre de CSC à Mulhouse est passé de 16 à plus d’une vingtaine. Le CSC des Coteaux a ainsi vu son aide financière de la CAF pour 2023-2024 baisser de 30% par rapport à l’année précédente. « C’est l’équivalent d’un salaire pour un employé à temps plein, pendant un an, que nous percevons en moins, explique Élise Cataldi, et d’autres baisses sont encore annoncées. »

Même tendance pour les subventions municipales, qui ont été "redistribuées" entre les différents CSC. "Celle qui est attribuée à l'Afcso a logiquement baissé", conclut la directrice. Le centre des Coteaux recevait 65 000 euros en 2018, puis l'enveloppe a baissé pour atteindre 60 500 euros en 2022 et diminuer jusqu'à 50 400 euros en 2023.

La Ville de Mulhouse prévoit d'entrer dans une "phase de diagnostic" sur ses propositions culturelles. La directrice du CSC espère que les acteurs seront concertés car pour le moment, le sentiment de frustration prévaut :

"On sait bien qu'il faut faire des économies, mais c'est comme pour la réforme des retraites. Si on ne comprend pas les choix qui sont faits, ça crée un sentiment d'abandon. Il faut se poser et réfléchir, dialoguer surtout. Nous, structure culturelle, ça nous oblige à monter des plans de financements différents. Mais nous devons trouver le temps, l'espace et la compétence pour le faire."

Le mécénat comme solution ?

Pour permettre au festival de perdurer, la directrice songe à démarcher des investisseurs privés et entamer un processus de mécénat. Mais le temps et la compétence manquent pour mener à bien cette mission. Peu développé en France, le mécénat permet à des structures de recevoir des fonds de la part d'entreprises, a priori sans contrepartie. Pour Élise Cataldi, il s'agit surtout de trouver le bon mécène :

"On ne peut pas être financé par n'importe qui. Notre base, c'est l'éducation populaire et les valeurs sociales. Donc a priori on irait vers des mécènes plutôt culturels. Sinon ça risque de créer une friction avec le sens que nous donnons à notre travail."

Dans le Haut-Rhin, le festival Momix a lui aussi vu ses subventions baisser depuis 2022 de façon drastique, au point d'appeler la Ville de Mulhouse à l'aide et d'envisager de s'y déplacer.

« On n’aurait jamais dû attendre un mois » : des manifestants frustrés par la faible mobilisation

« On n’aurait jamais dû attendre un mois » : des manifestants frustrés par la faible mobilisation

La manifestation du 6 juin contre la réforme des retraites a rassemblé 6 000 personnes à Strasbourg selon l’intersyndicale. Cette mobilisation crée une frustration chez de nombreux militants, qui estiment que l’intersyndicale aurait dû appeler à une mobilisation plus importante pour faire plier le gouvernement.

Ce mardi 6 juin, pour la quatorzième journée de mobilisation contre la réforme des retraites, l’avenue de la Liberté vide contraste avec la manifestation historique du 1er mai 2023 à Strasbourg. « Ils ont tué le mouvement, ils ont cassé la dynamique », lance un manifestant adossé à un mur, faisant référence à la décision de l’intersyndicale de ne pas appeler à une nouvelle mobilisation pendant plus d’un mois. Cette étonnante passivité a fait suite à plusieurs semaines de grèves et d’actions menées par les opposants à la réforme. Mi-avril, les militants de la CFDT Alsace, syndicat réputé peu enclin aux modes de lutte radicaux, bloquaient des entrepôts logistiques et plaidaient pour des « blocages coordonnés de l’économie ».

L’avenue de la Liberté était encore bien vide à 14h ce 6 juin. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

Amer, Pascal Vaudin, secrétaire général de la CFDT des transports du Bas-Rhin, affirme que le mot d’ordre de son syndicat à l’échelle nationale était de ne rien organiser en mai :

« On n’aurait jamais dû attendre un mois… Beaucoup de personnes ont baissé les bras et considèrent que le combat est fini. On va essayer de remobiliser maintenant. Je suis persuadé que ce ne sont pas uniquement les manifestations qui vont faire changer les choses. Nous avions organisé des opérations escargot, des blocages. Nous avons une équipe de militants prêts à participer. Je pense qu’il aurait fallu appeler à ce type d’action partout. »

Pascal Vaudin, de la CFDT transports, a participé à des actions de blocage en avril. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

« Il fallait profiter de la bonne dynamique »

Derrière les camions recouverts de banderoles, les différents syndicats rassemblent chacun quelques dizaines de militants. Seule la CGT a rameuté plusieurs centaines de gilets rouges éparpillés dans le cortège. Les organisateurs annoncent 6 000 manifestants contre 2 800 pour la préfecture, une mobilisation en net reflux comparé aux près de 20 000 personnes dans la rue le 19 janvier ou le 1er mai 2023.

Tout devant, la foule est plus compacte et entonne « ni patron, ni patrie, ni patriarcat ». De nombreux jeunes avancent au rythme d’un ensemble de percussions. « Ce n’était pas du tout une bonne idée de ne rien faire pendant un mois. Il y avait énormément de gens en manif. Il fallait continuer pour profiter de la dynamique qu’il y avait en avril », souffle un jeune homme. Philippe Gueth, de la CFDT Santé sociaux, explique quant à lui que l’intersyndicale n’avait « pas d’autre choix que de faire une pause » : « Beaucoup de salariés auraient arrêté de suivre les mobilisations parce qu’ils n’auraient pas réussi à suivre financièrement. C’est le retour qu’on a de certains adhérents. »

De son côté, Laurent Feisthauer, le secrétaire départemental de la CGT, se demande s’il n’aurait pas été opportun de « coller les 14 journées de mobilisation et de grève qui ont eu lieu depuis le 19 janvier » : « C’est plus difficile maintenant, avec l’explosion des recours aux intérimaires, aux contractuels… Les gens sont dans des situations tellement précaires que c’est quasiment impossible pour eux de faire grève. »

« Les travailleurs doivent s’organiser à la base »

Des employés de la SNCF à Strasbourg sont présents en tête de cortège. Au mois de mars, ils ont été les seuls en grève reconductible en Alsace. Pour Louise Fève, de la CGT cheminots, les grévistes doivent contrôler leurs mobilisations localement et ne pas dépendre de la stratégie d’une intersyndicale :

« Nous avons créé un comité de grève à la SNCF, pour que ce soit des assemblées générales ouvertes à tous les cheminots, syndiqués ou non, qui organisent la mobilisation, sans attendre les décisions de l’intersyndicale. On n’a pas besoin d’attendre des consignes, il faut arrêter de remettre son sort entre les mains d’autres. Il faut aussi sortir de la logique où seuls les secteurs dits stratégiques se mobilisent. Tout le monde doit se sentir concerné. Dans les mouvements sociaux qui ont permis d’obtenir des choses, en 1936, en 1968 ou en 1995, il y a eu des grèves étendues à de nombreux secteurs, y compris le privé. »

Louise Fève, de la CGT cheminots. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

« L’intersyndicale n’est pas allée au bout »

Dans le ciel, deux drones de la police filment les manifestants pour la première fois dans la capitale alsacienne. En retour, des militants chantent « À bas l’état policier » et déploient des parapluies. Isabelle, du collectif On crèvera pas au boulot, ne mâche pas ses mots concernant la stratégie de l’intersyndicale :

« Depuis le début, ils ont énormément manqué d’ambition en appelant uniquement à des journées de mobilisation espacées. Cela crée de la frustration chez nous, les grévistes, parce que c’est un sacrifice qui ne sert à rien. À l’échelle nationale, les éboueurs, les salariés des raffineries, les profs et les cheminots sont entrés en grève reconductible.

Il aurait fallu coordonner ces mobilisations et les actions de blocage pour qu’elles aient lieu en même temps, afin qu’elles soient impactantes. Il y a une immense colère des travailleurs contre cette réforme, il y avait la possibilité de monter d’un cran et de vraiment peser. Je trouve que l’intersyndicale n’est pas allée au bout du bras de fer. De toute évidence, les travailleurs doivent s’organiser à la base pour peser. »

Isabelle, du collectif On crèvera pas au boulot. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

« Nous sommes prêts à nous remobiliser »

Pont Saint-Guillaume, les forces de l’ordre ont érigé un barrage avec des barrières anti-émeute. Ils diffusent un message sonore signifiant que « toute manifestation sauvage sera considérée comme un attroupement ». Quelques dizaines de personnes tentent de sortir du tracé au niveau du boulevard de la Victoire mais sont immédiatement bloquées par la police. Après un bref échange de feux d’artifice et de grenades lacrymogène, les militants font demi-tour. Quelques panneaux publicitaires JC Decaux sont cassés au passage.

Alain, retraité, a pris un coup de matraque après avoir protesté contre l’arrestation d’une jeune femme. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

Vers 16h30 place de la République, la plupart des manifestants sont déjà partis. Certains discutent encore près de l’arrêt de tram. Une jeune femme est arrêtée par un imposant dispositif policier. Dans la cohue, les forces de l’ordre chargent des manifestants. Un retraité touché par un coup de matraque se plaint d’une forte douleur sur le flanc. Les derniers militants de dispersent suivis de près par des policiers. « Nous sommes prêts à nous remobiliser sur des thématiques qui touchent tout le monde comme les salaires ou les prochaines réformes que prévoit le gouvernement. Ce mouvement contre la réforme des retraites reste positif car il a mobilisé de nouvelles personnes qui se remobiliseront à l’avenir », assure Louise Fève.

Durant le mouvement contre la réforme des retraites, de nombreuses personnes se sont mobilisées pour la première fois. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

Dans une école Steiner près de Colmar, deux plaintes contre une enseignante qui a fait inhaler de la fumée aux enfants

Dans une école Steiner près de Colmar, deux plaintes contre une enseignante qui a fait inhaler de la fumée aux enfants

Une enseignante d'une école Steiner-Waldorf près de Colmar a fait un feu dans sa classe et fait inhaler la fumée à ses élèves pendant plusieurs minutes. Deux familles ont porté plainte contre l'enseignante pour mise en danger de la vie d’autrui. 

Mardi 30 mai, à l’école Mathias Grunewald de Wintzenheim près de Colmar, un établissement hors contrat avec l'Éducation nationale qui suit la pédagogie Steiner-Waldorf

Cet article fait partie de l'édition abonnés. | Déjà abonné ? Connectez-vous

Abonnez-vous maintenant pour poursuivre votre lecture

Abonnez-vous
Abonnez-vous maintenant pour suivre l’actualité locale.

Déjà abonné ?

Connectez-vous

L’investigation locale à portée de main.

Abonnez-vous et profitez d'un accès illimité à Rue89 Strasbourg. Annulez quand vous voulez.

Déjà abonné ? Connectez-vous

Choisissez votre formule :

À l’approche des Jeux olympiques, des sans-abris continuent d’être déplacés de Paris vers le Grand Est

À l’approche des Jeux olympiques, des sans-abris continuent d’être déplacés de Paris vers le Grand Est

Depuis avril, des sans-abris, en majorité sans-papier, arrivent de Paris à Strasbourg dans une opération de « desserrement » du dispositif d’hébergement d’urgence de l’Île de France. À moins d’un an du début des Jeux olympiques de Paris, le sas d’accueil régional situé à Geispolsheim a déjà accueilli plus d’une centaine d’entre eux.

Alors que Strasbourg fait déjà face à une saturation de son dispositif d’hébergement d’urgence, plus d’une centaine de personnes ont été accueillies dans le « sas d’accueil temporaire régional » mis en place en avril à Geispolsheim. Un troisième bus y est arrivé de Paris, mercredi 31 mai en fin de journée.

50 personnes arrivées le 31 mai

À son bord selon nos informations, une cinquantaine de personnes, en majorité des familles sans-abris. C’est le troisième convoi de ce type. Depuis avril 2023, deux bus sont déjà arrivés. Un premier le 11 avril, transportant 29 personnes, essentiellement des familles. Le deuxième le 3 mai, transportant 36 personnes isolées selon les DNA.

Pour la plupart, les personnes habitaient dans des squats ou des gymnases d’Île de France. Sur les 29 personnes arrivées en avril,  » aucune n’avait antérieurement déposé une demande d’asile », même si deux d’entre elles avaient « l’intention » de le faire.

Ce dispositif de « sas d’accueil temporaire régional » a été créé spécifiquement pour réceptionner les personnes en provenance de Paris, région où le dispositif d’hébergement est déjà saturé. Celui de Geispolsheim est l’un des dix mis en place à l’échelle nationale, selon un rapport d’information de l’Assemblée nationale, publié mardi 23 mai.

Il permet d’accueillir 50 personnes, dont les situations doivent être étudiées en trois semaines maximum. Selon des témoignages, ce délai est respecté dans la structure gérée par Coallia à Geispolsheim. Toutes les personnes ont accès à une consultation avec une infirmière à leur arrivée.

Une orientation « selon les situations administratives »

À l’issue des rencontres avec les services de l’État, les personnes sont réorientées « selon leurs situations administratives » vers les structures adaptées. Soit dans le cadre du dispositif national d’accueil (DNA), spécifique aux demandeurs d’asile, soit dans le dispositif d’hébergement d’urgence, géré par les services de l’État quelle que soit la situation administrative des personnes.

Pour le moment, sur la soixantaine de personnes déjà passées par le dispositif de Geispolsheim et ayant vu leur situation « étudiée », seules deux, isolées, sont restées dans le Bas-Rhin – dans des hébergements d’urgence relevant des compétences du Service intégré d’accueil et d’orientation (SIAO, c’est à dire de l’État). Les personnes restantes ont été orientées vers les autres départements de la Région.

coallia geispolsheim
À Geispolsheim, l’hôtel « première classe » réserve 50 places pour les personnes en provenance de Paris et accueille, à un autre étage, des familles envoyées par le SIAO du Bas-Rhin et dont « le droit au séjour est à clarifier ». Photo : CB / Rue89 Strasbourg / cc

Un risque de tension pour les structures locales d’accueil

Selon les députés, la mise en place de ces sas d’accueil temporaires régionaux « risque de tendre la situation dans le dispositif national d’accueil ». Ils craignent qu’en accueillant des personnes de Paris, en plus de celles déjà présentes dans le Grand Est, les logements pour demandeurs d’asile soient insuffisants.

Dans le même temps, la préfecture du Bas-Rhin a passé un appel à candidatures en avril pour créer 60 places d’hébergement d’urgence à destination des familles, dès juillet.

Des sas créés à un an des Jeux olympiques de Paris

La temporalité de la mise en place de ces structures régionales interroge : sont-elles créées pour vider Paris de ses sans-abris à l’approche des Jeux olympiques de Paris en juillet 2024 ? Selon la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra interrogée par l’AFP, absolument pas. Dans un communiqué publié le lendemain du rapport parlementaire, le ministre du logement Olivier Klein n’y fait pas référence. Pourtant, des hôtels qui accueillent des sans-abris pour le compte de l’État rompent leur contrat avec ce dernier pour pouvoir libérer les chambres pour les touristes, comme le raconte Mediapart.

De son côté, la Ville de Strasbourg dit ne pas disposer de plus d’information sur le nombre de personnes qui devraient être orientées dans le Grand Est. Contactés, la préfecture du Bas-Rhin, celle de Moselle, l’Office français pour l’intégration et l’immigration et le ministère de l’Intérieur n’ont pas répondu à nos demandes d’informations.