Alors que le drame de Nanterre s’est brutalement imposé dans l’actualité strasbourgeoise depuis mardi, les élus de Strasbourg ont pris la parole pour qualifier ces événements. Voici une collection des propos publiés.
Jeanne Barseghian, maire (EE-LV) de Strasbourg
La maire de Strasbourg, Jeanne Barseghian s’est rendue vendredi matin à Cronenbourg et au Neuhof pour se rendre compte par elle-même des dégâts subis après deux nuits d’émeutes. Pour la maire écologiste, « aucune violence n’est acceptable » déclare-t-elle dans un communiqué :
« Je condamne avec la plus grande fermeté les dégradations commises, les voitures et les bâtiments incendiés, les forces de l’ordre et les pompiers pris pour cible. Si je comprends l’émotion vive, la colère et l’indignation qui traversent le pays suite au décès du jeune Nahel, en revanche, aucune violence n’est acceptable. Le calme doit revenir. Je réitère mon appel à l’apaisement, à manifester pacifiquement soutien et solidarité aux proches de Nahel. L’enquête en cours doit permettre de faire la lumière sur les circonstances de la mort de ce jeune homme à Nanterre. La justice sera rendue par l’institution judicaire. »
Syamak Agha Babaei, premier adjoint à la maire de Strasbourg
Plus politique, Syamak Agha Babaei ignore les dégradations et voit dans cette « révolte, une lumière crue sur les maux du pays : les inégalités, les discriminations raciales et le mépris envers les classes populaires et racisées (c’est à dire victime de racisme, NDLR) ». Dans un post publié sur Facebook, le premier adjoint voit des « responsabilités nombreuses et partagées » :
« L’allègement du cadre légal d’usage des armes à feux sous le gouvernement Cazeneuve, la répression par les gouvernements successifs d’Emmanuel Macron du mouvement des Gilets jaunes, des mouvements écologistes et du mouvement contre la réforme des retraites racontent le même récit d’une longue marche vers une démocratie illibérale. L’abandon des quartiers populaires et l’accroissement des inégalités, fruit d’une absence criante de moyens des politiques d’égalité sur le plan national, ne peuvent qu’embraser la situation. Un racisme décomplexé ouvertement exprimé sur les antennes par des responsables politiques et médiatiques rend possible sur le terrain les pires crimes. »
Pour Syamak Agha Babaei, ce drame ne produira aucune leçon sans « un réexamen de l’histoire collective de notre pays » :
« Examiner l’histoire coloniale, écrire et documenter le racisme, la combattre sous toutes ses formes. La première lutte est celle contre les inégalités et l’injustice criante ; la seule qui vaille : celle qui se fixe pour objectif de donner une place équitable à chacune et chacun dans notre pays, quelque soit son quartier, son origine ethnique, sa religion, ses orientations. Une lutte collective pour l’émancipation. »
Catherine Trautmann (PS), ancienne maire de Strasbourg
Pour l’ancienne maire de Strasbourg Catherine Trautmann (PS), « les violences et dégâts causés cette nuit à Strasbourg sur les lieux de vie de tous les Strasbourgeois, sont inacceptables » et « ne servent en rien le combat pour la vérité et la justice ». Dans un communiqué, elle déclare :
« L’émotion légitime doit pouvoir s’exprimer pacifiquement, l’apaisement et le retour au calme sont une nécessité pour que vérité et justice soient faites sur la mort de Nahel et la responsabilité du policier. Oui la colère doit être entendue, mais elle ne doit pas se transformer en violence. Tous les enfants de la République ont droit à la justice. À aucun moment, la violence ne peut, ne fera et ne remplacera la justice. Les violences et les destructions ne font qu’ajouter la peine à la colère pour les habitants qui en sont les victimes. »
Pierre Jakubowicz (Horizon), conseiller municipal
Avec le groupe des élus macronistes au conseil municipal, Pierre Jakubowicz commence par adresser son « soutien aux habitants, agents et forces de l’ordre et de secours qui ont eu à faire face à ces violences. » S’il « comprend et partage la douleur face à la mort du jeune Nahel », « rien ne peut justifier la violence ». Un travers qu’auraient commis, selon lui, Syamak Agha Babaei et Emmanuel Fernandes (voir plus loin).
Jean-Philippe Vetter (LR), conseiller municipal
Le conseiller municipal d’opposition Jean-Philippe Vetter (Les Républicains) rappelle d’abord avec les élus de son groupe que « les mineurs, dont certains très jeunes, qui s’adonnent à ces graves méfaits, n’ont rien à faire dans les rues en pleine nuit et qu’ils sont sous la responsabilité de leurs parents » puis il apporte son soutien… « aux forces de l’ordre et aux services de secours qui remplissent leurs missions dans des conditions extrêmement difficiles ». En troisième position vient l’expression d’une « solidarité aux habitants de nos quartiers, qui subissent la double peine de voir leurs quartiers dégradés et de se voir assimilés à des délinquants avec lesquels ils n’ont rien en commun. »
Le texte a une quatrième pensée pour les « commerçants et professionnels contraints de fermer boutique ou d’interrompre leurs activités pour leur sécurité, celle de leurs clients ou de leur personnel ». Cette hiérarchie ne l’empêche pas d’appeler ses collègues de gauche à éviter « la récupération politique ». Les propos de Syamak Agha Babaei sont pour lui « inconséquents, voire dangereux ».
Frédéric Bierry (LR), président de la Collectivité d’Alsace
Frédéric Bierry, président (Les Républicains) de la Collectivité d’Alsace n’évoque pas le drame de Nanterre dans son communiqué. Il se dit « consterné et triste que des individus viennent dégrader les lieux d’éducation » et « condamne fermement les violences qui ont touché deux collèges » :
« Aucune cause, aucun combat ne justifient la dégradation d’une école de la République. La vidéosurveillance a été efficace et les images ont été transmises à la procureure de la République pour l’enquête. »
Sandra Regol (EE-LV), députée de Strasbourg – 1
Sur Twitter, la députée (EE-LV) de Strasbourg centre est en colère. Sandra Regol s’insurge contre les « appels à la paix qui rajoutent de la violence à la violence » :
« Cette colère est structurée par des années de déni de ces inégalités, de ces violences. Appeler au calme ne constitue pas une réponse suffisante car les mêmes mots sont utilisés depuis des années pour faire taire les voix qui dénoncent cet état de fait, proposent des moyens d’action… et sont toujours appelées à rester “calmes” face à la violence subie, à la fois directe, sociale et économique, taxés de “déciviliser” la France par leur “sauvagerie”. Il faut le dire, le rappeler, le marteler : les politiques sécuritaires sont une impasse, elles accentuent les inégalités et génèrent des violences sans apporter de solutions pour la sûreté de toutes et tous. Il est temps de reprendre le travail global, à partir de la mission première de la police : être au service de la population, toute la population, sans distinction. Les solutions sont sur la table : IGPN indépendante, récépissés, formation accrue des agents, sensibilisation aux luttes contre les discriminations, cesser de promouvoir les agents violents (avec leurs collègues, avec la population), police de proximité, révision de la loi de 2017… »
Emmanuel Fernandes (LFI), député de Strasbourg – 2
Le député (France insoumise) du sud de Strasbourg et d’Illkirch-Graffenstaden indique d’emblée qu’il y a « un problème avec la police » dans une interview à France Bleu Alsace. Dans un communiqué, Emmanuel Fernandes confirme :
« Après deux jeunes tués par des policiers poursuivis pour homicides volontaires (À Angoulême, un jeune de 19 ans a été tué en tentant de fuir une interpellation, NDLR), le lien de confiance entre l’institution policière et une partie des habitants est détruit. Il faut réformer la police nationale : la doctrine de l’emploi de la force doit être revue, allonger, améliorer et renforcer la formation des policiers, refonder le code de déontologie, instaurer le récépissé de contrôle d’identité, supprimer l’IGPN pour le remplacer par un organe de contrôle indépendant et abroger l’article 435-1 du Code de la sécurité intérieure, mis en place en 2017 par Bernard Cazeneuve, qui a occasionné une hausse dramatique des personnes tuées suite à des refus d’obtempérer. »
Le député LFI place les dégradations au second plan en les déplorant. Il propose la « démission de Gérald Darmanin » en « geste d’apaisement. » Selon le député, le ministre de l’Intérieur a favorisé ce « divorce entre la police et une partie importante de la population, en refusant d’admettre, et même en attisant par ses propos, les problèmes structurels qui traversent la police comme la montée du racisme. » Emmanuel Fernandes forme en outre le voeu que le gouvernement ne se lance pas dans une « surenchère guerrière avec des unités spéciales telles que la BRI, le Raid ou le GIGN. »
Bruno Studer (Ren), député de Strasbourg – 3
Le député (Renaissance) de Strasbourg-3, quartiers nord de Strasbourg et communes du nord de l’agglomération, a envoyé un simple « communiqué de soutien aux forces de l’ordre ». Bruno Studer n’a aucun mot sur les événements de Nanterre et assène :
« Les récentes nuits de violences ont engendré des actes d’une rare brutalité perpétrés par des individus parfois très jeunes. Il est essentiel de souligner que ces actes sont absolument inacceptables et injustifiables. Ils abîment la France, ils abîment nos villes. En ces heures difficiles, il est primordial de témoigner notre soutien indéfectible aux forces de l’ordre. Ces hommes et ces femmes courageux s’efforcent de protéger notre sécurité et de préserver nos biens communs. Leur dévouement et leur engagement méritent notre plus profond respect. »