Enquêtes et actualité à Strasbourg et Eurométropole

La construction de l’usine Huawei a débuté à Brumath

La construction de l’usine Huawei a débuté à Brumath
Minggang Zhang, directeur général adjoint de Huawei France

Annoncée en décembre 2020, l’usine Huawei va bien être construite à Brumath. Elle devrait être opérationnelle en 2025, afin de produire des équipements télécoms pour le marché européen. Du moins, pour ceux qui ne regarderont pas les liens de l’équipementier avec la dictature chinoise.

C’est la première usine Huawei hors de Chine. Il y a trois ans, le géant des télécoms chinois avait choisi l’Europe pour tenter de contrer les boycotts américains et européens contre ses produits, accusés d’abriter des failles de sécurité au profit de la dictature chinoise. Des organisations non-gouvernementales accusent en outre les technologies de Huawei d’être utilisées dans la répression de masse visant les Ouïghours, une minorité turcophone de l’ouest de la Chine. Des accusations démenties par la firme et qui n’ont pas gêné la Région Grand Est à l’époque, puisque la collectivité s’est beaucoup impliquée pour obtenir l’implantation de cette usine.

Samedi 2 décembre, Minggang Zhang, directeur général adjoint de Huawei France, a précisé sur France Inter, que la construction de l’usine avait débuté dans le business parc de Brumath. Un investissement de 200 millions d’euros pour des bâtiments de 60 000 m² implantés sur huit hectares. L’usine, construite par Bouygues, sera opérationnelle fin 2025 pour « produire un milliard de marchandises par an pour fournir l’ensemble du marché européen. 500 emplois seront créés en France. »

Minggang Zhang, directeur général adjoint de Huawei France sur France Inter samedi 2 décembre.

Cette opération séduction, qui ne correspond à aucune logique économique, n’a semble-t-il guère fonctionné puisque l’Union européenne appelle toujours les 27 pays membres et les opérateurs télécoms à exclure de leurs réseaux mobiles Huawei et ZTE, un autre constructeur chinois. En France, une loi de 2019 a limité l’implantation de Huawei et d’autres constructeurs chinois dans les infrastructures de télécommunication nationales.

Huawei est présent en France depuis 2003, avec six centres de recherche et un centre mondial de design à Paris. Huawei France a réalisé 2,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2021 et estime avoir conquis 20% du marché national. L’entreprise revendique près de 10 000 emplois générés et 80 millions d’euros d’investissements annuels.

Au Champ du Feu, la Collectivité d’Alsace veut construire un stade de biathlon en pleine forêt

Au Champ du Feu, la Collectivité d’Alsace veut construire un stade de biathlon en pleine forêt
Cette zone forestière doit disparaitre pour laisser place à une vaste installation de biathlon.

Malgré la diminution de l’enneigement liée au changement climatique, la Collectivité d’Alsace prévoit de construire un stade de biathlon sur une zone forestière. Des écologistes locaux y voient un projet anachronique et un gâchis d’argent public.

Quatre millions d’euros pour un stade de biathlon, une discipline qui lie le ski de fond et le tir à la carabine, au Champ du Feu, en 2024. À la Collectivité européenne d’Alsace (CeA), le réchauffement climatique n’existe pas. Le Département, avec sa majorité de droite, envisage le financement public d’une infrastructure pour les sports d’hiver à environ 1 000 mètres d’altitude, avec un bâtiment d’accueil, un parking et une zone pour le public. L’aménagement sur une superficie de quatre hectares nécessiterait le déboisement d’une zone naturelle forestière.

Schéma du projet de nouveau stade de biathlon au Champ du Feu.Photo : Document issu de la concertation publique
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Préfecture et municipalité resserrent la sécurité du Marché de Noël

Préfecture et municipalité resserrent la sécurité du Marché de Noël
A Strasbourg en Novembre 2022. Photographies du dispositif de sécurité du marché de Noël.

La préfecture du Bas-Rhin et la Ville de Strasbourg vont modifier les flux de personnes autour de la cathédrale, après avoir constaté des problèmes de gestion de foule lors des deux premiers week-ends du Marché de Noël.

La fréquentation du Marché de Noël 2023 atteint des niveaux très élevés, dès les premiers jours. Résultat : des bouchons de visiteurs sont observés dans quelques zones du centre-ville et notamment autour de la cathédrale.

« Autour de la cathédrale, il y a la file pour accéder à la plateforme, la file pour visiter la nef et le marché de Noël », détaille Guillaume Libsig, adjoint à la maire de Strasbourg. « Ça fait beaucoup, notamment lors des week-ends et le dispositif va être adapté pour éviter que les groupes ne se croisent. »

Guillaume Libsig était donc présent avec sa collègue Nadia Zourgui, adjointe à la maire de Strasbourg en charge de la sécurité, à une réunion avec la préfète du Bas-Rhin, Josiane Chevalier, dans l’après-midi du lundi 4 décembre pour évoquer ces questions.

Rappel des règles

Trois autres mesures ont été décidées, selon un communiqué conjoint de la préfecture et de la Ville de Strasbourg :

    Le contrôle des sacs et des bagages sera renforcé sur les ponts d’accès à l’ellipse insulaire ; Aucune implantation étendue ou non-prévue par les plans d’installation du marché de Noël ne sera tolérée ; Des équipes dédiées seront mises en place pour faire respecter strictement les dispositions de l’arrêté municipal du 23 novembre 2023 interdisant la présence sur le domaine public des activités artistiques et des activités commerciales.

« Certains commerçants avaient pris leurs aises », commente brièvement Guillaume Libsig, « notamment aux accès de certains marchés. Donc on va rappeler les règles mais il n’est pas question de modifier le plan d’installation des chalets, qui a été validé en 2021 et qui convient. » La préfète du Bas-Rhin prévoit de vérifier que ces améliorations soient bien en place vendredi 8 décembre.

Pierre Jakubowicz voit trop de déchets

De son côté, Pierre Jakubowicz, conseiller municipal d’opposition (Horizons), a envoyé une lettre à la maire de Strasbourg pour dénoncer la privatisation du ramassage des déchets sur les marchés de Noël :

« Cette société privée a installé quelques bennes de collecte, en nombre trop peu important, qui ne sont vidées qu’une seule fois par jour. Résultat : les déchets s’entassent et débordent, salissent et jonchent l’espace public, et ternissent l’image d’une ville féérique que nous devons entretenir à cette période. »

Vidéosurveillance à Strasbourg : des promesses à moitié tenues

Vidéosurveillance à Strasbourg : des promesses à moitié tenues
À Strasbourg, 300 caméras sont installées un peu partout dans la ville, dans le cadre de la vidéo-protection.

En 2021, la majorité écologiste de Strasbourg avait promis que la collectivité n’investirait pas davantage dans la vidéosurveillance. Une carte des dispositifs installés devait également être publiée pendant le mandat. Deux ans plus tard, l’exécutif de l’Eurométropole n’a pas honoré toutes ces promesses.

C’est un anniversaire en grande pompe qui a été célébré le mardi 7 novembre, au centre administratif de Strasbourg. Gendarmes, policiers, élus, universitaires… Tout un petit monde de la sécurité réuni pour souffler les 20 bougies du Centre de supervision vidéo, ou CSV, de l’Eurométropole de Strasbourg (EMS). Au programme : des « conférences-débats » aux vagues intitulés comme « L’apport de la vidéoprotection dans le continuum de sécurité locale », la signature d’une charte éthique en présence de la préfète du Bas-Rhin Josiane Chevalier et Pia Imbs, la présidente de l’EMS, ou encore une visite du fameux CSV.

L’occasion également de faire le point sur les chiffres et l’évolution de la présence des caméras à Strasbourg et dans 26 communes de l’Eurométropole (sur 33 au total), plus de trois ans après l’élection de Pia Imbs à la tête de l’EMS, grâce au soutien des écologistes de Strasbourg et de Schiltigheim.

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#Béatrice Bulou

La Kunsthalle de Mulhouse expose Julia Armutt, artiste éclipsée par son mari

La Kunsthalle de Mulhouse expose Julia Armutt, artiste éclipsée par son mari
Valie Winter, Tall Girl, 2023 | Sculpture gonflable, parachutes recyclés, ventilateurs industriels – environ 3,5 x 6m

La Kunsthalle de Mulhouse accueille jusqu’en janvier une exposition voulant redonner toute sa place à Julia Armutt, une artiste oubliée, au talent masqué par celui de son mari également artiste. Une histoire inventée mais dont l’écho est tristement actuel.

Du 24 novembre 2023 au 7 janvier 2024, la Kunsthalle de Mulhouse dévoile le portrait d’une artiste fictive, Julia Armutt, dont la carrière fut éclipsée par celle de son mari, Marcel Depré. Sont réunis les travaux de 19 artistes et duos d’artistes pour narrer la vie d’une artiste imaginaire qui devient la personnification des femmes artistes occultées de l’histoire de l’art. L’exposition se déroule dans le cadre de la Régionale 24, une coopération entre l’Allemagne, la France et la Suisse, qui permet de soutenir la création artistique des trois régions frontalières.

Ces travaux ont été sélectionnées par les deux commissaires, Juliette Steiner, metteuse en scène, comédienne et scénographe-plasticienne, et Sandrine Wymann, directrice de la Kunsthalle. Sur un fond de réflexion féministe, l’exposition se révèle en trois axes qui se sont construits au fil du projet, tels trois volets de la vie d’une femme.

Trois volets d’une vie

Le premier s’intéresse aux relations de couple, via les équilibres et déséquilibres qui en ressortent. En deuxième lieu se joue la question de l’absence, là où Julia Armutt s’efface pour laisser la place à d’autres artistes. Enfin, le troisième volet se construit autour de la notion de foyer, qui nous ramène à la dualité entre vie domestique et vie d’artiste vécue par l’artiste fictive, et bien d’autres. 

Vue de l’exposition « Julia Armutt » – Regionale 24 | Tall Girl, Valie Winter, 2023 Photo : JJ Delattre

Au rez-de-chaussée, une Tall Girl accueille les visiteurs et donne le ton. Elle fut réalisée lors d’une manifestation féministe en Suisse en commémoration du droit de vote pour les femmes (du 7 février 1971) par Valie Winter et un collectif de femmes. Telle la personnification d’une union féminine, cette Tall Girl est monumentale, toujours en mouvement et en action. Comme une femme qui se doit d’agir, elle est infatigable et impressionne. 

Nicole Hassler, avec Art lovers’ lipsticks, réunit des fonds de tubes de rouges à lèvres, récoltés auprès de 200 femmes, sous forme de rectangles monochromes exposées en lignes sur un mur. Son travail de longue haleine débute à l’aube du premier confinement, lorsque les rouges à lèvres se trouvaient oubliés au fond des tiroirs en raison du port du masque. Chaque toile porte le prénom de la femme donatrice. L’artiste offre ainsi une multitude d’identités, représentées ici par des teintes uniques. 

Un changement d’échelle s’opère de l’autre côté du mur : les fèves insolites de JJ von Panure, sélectionnées par le duo d’artistes et le duo de commissaires, dévoilent un quotidien reconnaissable par chacun et chacune. Avec ces micro-sculptures en céramique, qui deviennent les marqueurs de temps d’une vie, une pluralité d’histoires peut se créer dans les yeux des visiteurs.

Vue de l’exposition « Julia Armutt » – Regionale 24 | Valentine Cotte, Gisante (III), Où serais-je demain, 2023, Lisa Wintermantel, Heute gehts um dich und nicht um die Welt, 2023 et Nicole Hassler, Art Lovers’ Lipstick, 2022-2023 Photo : JJ Delattre
JJ von Panure, Fève des rois, 2017-2023Photo : JJ von Panure

Du centre d’art au plateau de théâtre

Julia Armutt est née de l’imagination de la metteuse en scène Juliette Steiner. Ce personnage fictif s’est créé au fil de l’écriture de son projet théâtral en cours. La pièce Une Exposition, soutenue par la Filature de Mulhouse, sera présentée dès avril 2024 au Théâtre TJP de Strasbourg. À la Kunsthalle, c’est alors le plateau du théâtre qui s’invite dans la galerie, pour que l’histoire de Julia Armutt se révèle davantage. 

Touchée par le manque de références féminines citées dans l’histoire de l’art face à l’abondance des noms masculins, Juliette Steiner s’est inspirée de l’histoire de l’urinoir de Marcel Duchamp. L’emblématique Fontaine, que Duchamp signa R. Mutt, demeure célèbre pour avoir marqué un tournant dans l’art contemporain. Mais son origine est discutée par plusieurs experts : Elsa von Freytag Loringhoven, artiste dada, serait la réelle autrice de l’œuvre. 

Vue de l’exposition « Julia Armutt » – Regionale 24 | Julia Armutt, La femme en boîte, 1991-2023 et Paula Beck, Growth, 2022-en cours Photo : JJ Delattre

Alors, Julia Armutt en devient presque une réinterprétation, en jouant un double rôle dans cette exposition : elle en est le sujet, mais elle est également invitée en tant qu’artiste. Une œuvre signée de son nom, La Femme en boîte est le noyau dur de la narration. Il est raconté qu’un jour, lorsque Julia Armutt était occupée à laver du linge à la laverie, un galeriste découvrit chez elle la sculpture d’une femme recroquevillée dans une boîte. Marcel Depré, son mari sculpteur, omettant de dire au galeriste qu’il s’agissait d’un autoportrait réalisé par sa femme, s’appropria cette œuvre. De là, la carrière de Depré s’envola, laissant sa femme dans l’ombre. À la Kunsthalle, c’est une nouvelle version de cette œuvre volée que nous découvrons : ici, la femme est sortie de la boite, elle n’est plus là : n’en reste que sa silhouette qui se dessine entre les couches de vêtements. 

Une dichotomie entre réalité et fiction se joue continuellement au sein de l’exposition : le vrai se mélange à l’imaginé, les œuvres se répondent et les narrations se multiplient.

Pour accompagner la déambulation dans l’espace d’exposition, des audio-guides mettent en scène Juliette Steiner et Estelle Depré, fille de Julia Armutt. Dans cette conversation théâtralisée, la metteuse en scène interroge la fille de l’artiste sur certaines œuvres. Dans nos oreilles, Julia Armutt semble presque avoir réellement existé : elle prend vie à travers les anecdotes racontées par sa fille.

Les œuvres deviennent des signes de son passage et questionnent la place de la femme artiste dans la société, devenant la preuve d’une réflexion partagée par les artistes contemporain·es. Entre femme et artiste, des vies plurielles se dévoilent, celle de Julia Armutt, mais aussi, celles de toutes les femmes négligées par l’histoire de l’art.  

Vue de l’exposition « Julia Armutt » – Regionale 24 | Hannah Gahlert, Valentine Cotte, Gisante (III), Où serais-je demain, 2023 et Nicole Hassler, Art Lovers’ LipsticksPhoto : JJ Delattre

Noël écolo, drag ou festif ? Six sorties culturelles pour profiter du mois de décembre

Noël écolo, drag ou festif ? Six sorties culturelles pour profiter du mois de décembre
La sélection de Rue89 Strasbourg pour célébrer Noël différemment.

C’est décembre et la sélection culture n’échappe pas à Noël, mais la sélection permet de sortir des allées encombrées entre les chalets et d’apprécier tout de même une forme de diversité culturelle malgré l’omniprésence des bonnets rouges et blancs. 

Marchés, décorations, célébration… Noël est le fil rouge du mois de décembre. Mais à chacun de décider comment le fêter. Ceux qui ne sont pas pressés peuvent profiter des deux grosses expositions de la saison : Toutankhamon. À la découverte du pharaon oublié au Parc des expositions et Aux temps du Sida au Musée d’art moderne. De son côté, le cinéma Star fête ses 40 ans en proposant une activité par jour, sorte de calendrier de l’avent mais jusqu’au Réveillon. La sélection suivante s’adresse aux amoureux de la neige, de la fête, de l’art ou tout simplement aux curieux qui veulent penser Noël autrement.

Un Noël éthique au Marché Off  

Cette année encore, le Marché Off s’est installé place Grimmeissen. Ce marché de Noël à part se veut éthique, éco-responsable et inclusif pour inclure des thématiques politiques dans le temps et l’univers des fêtes de fin d’années. C’est une passerelle réussie chaque année grâce à des stands de produits locaux artisanaux et biologiques, et une série de concerts, conférences et ateliers engagés sur cette petite place de la Petite-France jusqu’au 24 décembre.

Parmi les rendez-vous à noter, une réflexion sur la surconsommation de textile vendredi 8 décembre avec un stand de retouche de vêtement, un défilé d’upcycling (le contraire du recyclage, NDLR) et une table ronde organisée par des étudiants intitulée « Articulation de la politique sociale à propos de la seconde main ».

Des dizaines d’activités auront lieu pendant toute la durée du marché OFF. Cliquez pour accéder au programme. (Dessin Léontine Soulier)

Samedi 9 décembre, des associations locales qui luttent pour l’égalité et l’insertion des personnes en situation de handicap animeront une journée Handi Off avec jeux de sensibilisation à l’autisme, parcours en fauteuil et discussion. Autre sujet, la sécurité sociale de l’alimentation sera expliquée lors d’une conférence gesticulé le samedi 16 décembre à 16h30.

Marché de Noël interculturel du Wagon Souk

Installé rue du Rempart, derrière la Gare de Strasbourg, le Wagon Souk cède aussi aux sirènes de Noël avec un marché « interculturel » proposant des articles à offrir créés par des artistes et des artisans « d’ici et d’ailleurs, authentiques et originaux ». On y trouvera notamment des illustrations, des objets de décoration, des bijoux et… de la vanille de Madagascar. Les artistes présents changent selon les jours, il convient, l’événement sur Facebook détaille leurs passages. En revanche, l’apéro est ambiancé à chaque fois à partir de 17h30 par le collectif de DJs Agapanthes.

Voyage dans l’est : un puissant témoignage d’inceste au TNS

Briser le silence, briser la solitude, tout reprendre depuis le début. Dans son texte Voyage dans l’est, Christine Angot revient sur l’inceste dont elle a été victime, lorsque son père qu’elle rencontre pour la première fois à 14 ans la soumet à son emprise. Stanislas Nordey s’empare finement de ce témoignage puissant et nécessaire. Il propose une mise en scène épurée qui laisse toute la place aux mots. Le jeu de plateau se mêle au jeu face caméra avec des plans tournés en direct et projetés sur un immense écran, donnant l’impression au spectateur d’assister à différents points de vue, depuis différentes distances.

Avec Voyage dans l’est, Stanislas Nordey s’est emparé du témoignage de Christine Angot, victime d’inceste. Photo : JeanLouisFernandez

Sur les planches, le père, la mère, les futurs conjoints et trois comédiennes incarnant l’héroïne à trois âges différents. Les faits, racontés crûment, sont mélangé avec l’analyse, le recul de la femme adulte, à même de raconter les séquelles d’un tel traumatisme sur toute sa vie. Tout aussi dur que primordiale, cette pièce est à la fois un témoignage personnel, une libération de la parole et un acte militant.
La pièce se joue jusqu’au 8 décembre.

« La honte n’a pas changé de camp, ceux qui dominent continuent d’en être fiers. Mais la solitude, c’est fini. »

Avatar Christine Angot

De la musique et de la fête avec Paye ton Noël

Le festival de musique et de spectacles barrés Paye ton Noël propose une ribambelle d’événements place de Zurich du vendredi 8 au dimanche 10 décembre (prix libre) et au Molodoï (de 6 à 24€) du 14 au 16 décembre, ainsi qu’une soirée de courts-métrages au cinéma Star Saint-Exupéry (prix libre) le mardi 12 décembre. 

Cliquez sur l’image pour accéder à la programmation complète.

Paye ton Noël est l’occasion pour l’association organisatrice, Pelpass, de programmer des groupes et des compagnies rares, barrées, décalées… Nombre de concerts et de spectacles seront déroutants, souvent pour le meilleur. Mais parmi les valeurs sûres et montantes, il y a Gwendoline jeudi 14 décembre au Molodoï. Ce duo de Rennais, qui se présente comme « schlag wave » agite la scène indé française grâce à des voix profondes et des rythmiques nettes.

Le Krismass Show de l’Espace K

« Une pincée de paillettes, quelques grammes de sensualité et d’érotisme, une lichette de dérision, une rasade de parodie, un zeste d’absurde, une poignée de performances et surtout une bonne dose d’humour ! », voici la recette de l’Espace K pour un cabaret de Noël, le Krismass show proposé chaque soir du 7 au 22 décembre, avec une séance spéciale le 31. Entre sketchs, musique et arts du cirque, les numéros se succéderont pendant une heure trente. Il est également possible de participer à un buffet cocktail dînatoire en amont de la soirée.

Bande annonce du Krissmass show 2023 (vidéo Espace K / Youtube)

Interroger l’amour proche au Taps

Friendly ! par la Compagnie des Attentifs.Photo : Emmanuel Viverge

Est-ce qu’un homme et une femme peuvent être seulement mais vraiment amis ? Claire, une chercheuse en science sociale décide de répondre à cette question en testant Lucie et Mahamat, deux acrobates qui devront accorder leurs corps pour réaliser une performance artistique. Une pièce qui questionne le monde hétérosexué, par une troupe de Strasbourg, la Compagnie des Attentifs.

Un Noël en famille… avec des drags

Dernière soirée drag jeudi 21 décembre à la Péniche mécanique, quartier Malraux. L’occasion de (re)découvrir cette scène qui accueille de nombreux artistes locaux très talentueux. La drag queen Rose Tental, connue pour ses performances aussi touchantes qu’effrayantes et son humour acerbe, animera le cabaret drag de cette fin d’année sur le thème du Noël en famille, évidemment.

L’évolution des villes industrielles dans l’objectif de Jean-Louis Schoellkopf

Jusqu’au 25 février, le photographe colmarien Jean-Louis Schoellkopf expose son travail autour de la ville industrielle à La Filature de Mulhouse. Attaché au potentiel documentaire de son média, il propose de « décrire le travail, la culture ouvrière. Comment les changements dans les conditions de production influent sur la vie des ouvriers, des habitants et sur l’image de la ville. »

La photographie de Jean-Louis Schoellkopf se situe à cheval entre l’art et le documentaire. Photo : Jean-Louis Schoellkopf

Cette exposition réuni sept séries, prises entre 1996 et 2023. Après avoir immortalisé les mines de Saint-Etienne et de Liévin, la métallurgie d’Hayange, le tissage à Louviers ou encore la chimie à Ludwigshafen, le photographe s’est installé à Mulhouse pour y capturer des portraits des travailleurs et travailleuses locaux. Il s’est également emparé du lieu en posant son objectif critique sur certains bâtiments afin de questionner l’urbanisme de la ville. 

Dans l’ombre du Marché de Noël, les sans-abris n’ont jamais été si nombreux à Strasbourg

Dans l’ombre du Marché de Noël, les sans-abris n’ont jamais été si nombreux à Strasbourg

Alors que Strasbourg attend des millions de touristes pour l’édition 2023 du Marché de Noël, il n’y a jamais eu autant de personnes en demande d’hébergement dans la capitale alsacienne. La municipalité écologiste refuse de « cacher la misère ».

À quelques mètres du grand sapin illuminé de la place Kléber, quatre sans-abris se protègent du froid grâce à leurs couvertures rue de l’Outre. Ils contrastent avec les touristes qui déambulent vin chaud à la main. « Aujourd’hui on a pu rester ici comme le magasin est fermé », témoigne Baptiste, pointant du doigt la boutique de chaussures Minelli, lundi 27 novembre. L’édition 2023 du Marché de Noël de Strasbourg a commencé trois jours plus tôt. Elle devrait accueillir autour de trois millions de visiteurs.

Une telle installation de sans-abris malgré le Marché de Noël, à côté du grand sapin, aurait été difficilement concevable il y a encore quelques années.Photo : Fantasio Guipont / Rue89 Strasbourg

Au même moment, « 2 000 personnes demandent un toit à Strasbourg, c’est incontestablement une première », constate Marie-Dominique Dreyssé, vice-présidente de l’Eurométropole en charge des solidarités : « Certaines dorment dans des tentes, d’autres en squat… » Rien que sur la semaine du 20 au 26 novembre, 1 061 personnes distinctes ont appelé le 115 pour demander un hébergement d’urgence d’après un bilan du Service intégré d’accueil et d’orientation (SIAO) du Bas-Rhin.

De plus en plus de personnes vulnérables à la rue

Le taux de demandes non pourvues est de 94%, à cause de la saturation du dispositif, malgré l’obligation légale pour l’État de loger les personnes qui le demandent. Dans la semaine du 14 au 20 novembre 2022, le SIAO avait dénombré 926 personnes distinctes demandant un hébergement. Globalement, ce chiffre augmente petit à petit au fil du temps. Un employé du SIAO expose que le manque de places crée une accumulation des sans-abris en attente :

« On n’a jamais eu autant de demandeurs d’hébergement d’urgence, ça ne cesse d’augmenter depuis la pandémie. Les années précédentes, on était plus à 400 ou 500 demandeurs distincts sur une semaine. En 2021, à l’inauguration du Marché de Noël, on déplorait neuf familles à la rue. Aujourd’hui, elles sont plus de 80 à demander un abri. Il y a de plus en plus de profils vulnérables comme des personnes âgées, malades ou des femmes avec des enfants en bas-âge. La situation est catastrophique. »

Le dispositif d’hébergement d’urgence est de plus en plus saturé à Strasbourg.Photo : Fantasio Guipont / Rue89 Strasbourg

Noël peut être l’occasion de faire preuve de solidarité. Mais à Strasbourg, les enjeux touristiques et commerciaux priment parfois lors de ces festivités. En 2019, la municipalité socialiste était allée jusqu’à prendre un arrêté « anti-mendicité » interdisant « l’occupation prolongée de l’espace public » sur plusieurs périmètres du centre-ville comme la rue des Grandes-Arcades pendant le marché de Noël. Celles et ceux qui demandaient de l’argent ou dormaient sur place devaient donc quitter les lieux. Fraichement élue, la maire écologiste Jeanne Barseghian avait abrogé la mesure en 2020.

Une coordination entre plusieurs services

Toujours place Kléber, devant la boulangerie Brioche dorée, Steven fait la manche avec ses trois chiens. « Cette année la police est cool. Il y a trois ou quatre ans, c’était beaucoup plus difficile, je devais changer d’endroit dans la journée », assure t-il. Dans la Grande-Île, les observations des mendiants se ressemblent. Sur sept personnes interrogées, six disent avoir de bonnes relations avec la police municipale.

« À Rennes, on peut se faire réveiller par du gaz lacrymo. Ici, ça n’a rien à voir. On dort avec mon copain ruelle des Pelletiers. La police municipale vient vers 7h pour nous dire qu’il faudrait se lever si on est pas encore debout. Ils ont même fait le lien avec le CCAS (centre communal d’action sociale, NDLR). »

Luna, sans-abri à Strasbourg
En face des chalets du Marché de Noël, Steven demande des pièces place Kléber.Photo : Fantasio Guipont / Rue89 Strasbourg

« Nous n’avons pas de protocole spécialement dédié au Marché de Noël mais un dispositif annuel », affirme Nadia Zourgui, adjointe à la maire en charge de la tranquillité publique :

« En sortant des confinements, en 2021, on a mis en place un groupe de travail entre la police municipale, les services sociaux et de propreté pour que les choses se passent dans le dialogue. »

Tout en déplaçant des affaires, Luna ne s’étonne pas des conflits d’usage dans le centre-ville. « C’est normal, ça ne fait pas classe d’avoir des gens qui dorment devant une vitrine. Nous, on fait en sorte que les choses soient nickels quand on part, parfois plus propres que quand on est arrivé. On n’a aucun problème avec personne pour l’instant cette année. » La jeune femme continue à demander la pièce rue des Grandes-Arcades, sans être embêtée.

Le partage de l’espace public

Contacté, le président des Vitrines de Strasbourg Gwenn Bauer n’a pas souhaité répondre aux questions de Rue89 Strasbourg. L’association de commerçants est une promotrice de l’arrêté anti-mendicité et avait même regretté en 2019 que ce dernier ne couvre pas une zone supplémentaire sur la Grand’Rue.

« Il n’y a aucune volonté de cacher la misère. Nous refusons d’empêcher les sans-abris d’être au centre-ville et de mendier. Cela a causé des critiques de commerçants mais nous souhaitons aussi répondre à leurs problématiques », précise Floriane Varieras, adjointe à la maire en charge de la solidarité :

« Le but est de permettre un partage de l’espace public le plus juste possible. Les consignes, c’est que les sans-abris ne peuvent pas rester devant des vitrines, des portes de lieux d’habitation ou de travail. Mais il est fondamental de considérer que l’espace public n’est pas uniquement dédié aux personnes qui vont acheter. »

Au moment du Marché de Noël, les inégalités sociales deviennent plus violentes qu’à l’accoutumée.Photo : Fantasio Guipont / Rue89 Strasbourg

Marie-Dominique Dreyssé était adjointe au maire en charge des solidarités lors du mandat précédent. Selon elle, l’approche politique de la gestion de l’espace public a beaucoup changé :

« Je ne dis pas que tout est parfait et que tout le monde est content maintenant mais il y a une vraie volonté de dialogue. On veut absolument éviter que les sans-abris et les commerçants se montent les uns contre les autres. La problématique n’est plus du tout la même aujourd’hui qu’il y a quatre ans parce que le nombre de personnes à la rue a augmenté. »

Prévenir les sans-abris en amont

« Tous les matins, il y a une première tournée pour voir où sont les sans-abris », raconte Éric Schumacher, policier municipal et délégué CFTC : « On vérifie s’ils sont en bonne santé et on discute avec eux. Il y a des couvertures de survie dans la voiture si nécessaire. » Lorsque le service propreté doit intervenir, les policiers municipaux et les services sociaux préviennent les sans-abris en amont.

Peter et Yilka sont installés sous les arcades de la rue de la Division-Leclerc. « La police nous a dit que ce trottoir sera nettoyé demain », relate Peter. Les deux Tchèques vont trouver un autre emplacement pour la nuit. Germain Mignot, chargé de mission à la Fondation Abbé Pierre (et élu communiste au conseil municipal), se souvient qu’avant la mise en place de ce dispositif, « il n’était pas rare que des gens soient réveillés à 5 ou 6h du mat’ parce que le service propreté allait passer immédiatement ».

Yilka s’installe où il peut, selon les boutiques ouvertes et les passages du service propreté.Photo : Fantasio Guipont / Rue89 Strasbourg

En juin 2021, le conseil municipal a adopté à l’unanimité la déclaration des droits des personnes sans abri de la fondation Abbé Pierre. Le texte décliné en 14 articles proclame notamment la liberté de se déplacer et de s’installer dans l’espace public, le droit à la mendicité, au glanage, au logement si la personne le demande ou encore l’accès à de l’eau potable, des douches, des toilettes et de l’électricité.

La police aux frontières en ville

Si Germain Mignot reconnait une nette évolution et une meilleure considération des personnes à la rue que lors du mandat précédent, il estime que la Ville pourrait aller plus loin. Il cite le squat Sarlat, dont les habitants ont été expulsés le 22 novembre alors que les bâtiments appartenaient à un bailleur social de l’Eurométropole. « La mise à disposition d’accès à l’eau et à des toilettes pour les camps et bidonvilles est aléatoire et non complète », poursuit-il. La municipalité avait effectivement tardé plusieurs mois avant d’installer un point d’eau et des toilettes au camp de l’Étoile en 2022.

Dans son dispositif de sécurité du Marché de Noël, la préfecture a décidé de mobiliser « des effectifs de la police aux frontières (PAF) ». En Ville, une partie des personnes qui dorment sous des tentes sont migrantes, parfois en situation administrative irrégulière. Sabine Carriou, de l’association de solidarité Les Petites Roues, s’interroge sur cette présence accrue de la PAF : « Il risque d’il y avoir davantage de contrôles d’identité, et donc de tension pour ces sans-abris qui sont déjà dans une situation très difficile. »

Interrogée sur le type d’interventions réalisées par la police aux frontières au Marché de Noël, la préfecture n’a pas répondu à la sollicitation de Rue89 Strasbourg. Elle n’a pas encore décidé d’ouvrir un gymnase la nuit malgré la neige tombée le 1er décembre, mais elle a déclenché le premier niveau du plan grand froid permettant « d’accroitre temporairement les capacités de mise à l’abri des personnes sans-domicile dans des centres d’hébergement ». La plupart des sans-abris devront encore se contenter de leurs couvertures et des effluves émanant des chalets parsemés dans la ville.

Nouvel an : la préfecture impose à nouveau un couvre-feu aux moins de 16 ans

Nouvel an : la préfecture impose à nouveau un couvre-feu aux moins de 16 ans

Pour la troisième année consécutive, la préfète du Bas-Rhin prévoit un couvre-feu pour les mineurs de moins de 16 ans, le soir de Nouvel an. Dans un arrêté publié vendredi 1er décembre 2023, elle multiplie les arguments relatifs aux interpellations de 2021 et 2022 pour appuyer cette décision.

Depuis 2021, les mineurs de moins de 16 ans non accompagnés sont interdits d’être dans la rue après 22 heures, le soir de Nouvel an à Strasbourg. La Saint Sylvestre 2023 ne dérogera pas à cette nouvelle habitude. Dans un arrêté signé le 1er décembre 2023, la préfète du Bas-Rhin Josiane Chevalier réitère l’instauration d’un couvre feu.

Six communes de l’Eurométropole concernées

Entre 22h le 31 décembre 2023 et 6h le 1er janvier 2024, « la circulation et le stationnement » des mineurs de moins de 16 ans non accompagnés « sont interdits sur les territoires des communes » de Strasbourg, Hœnheim, Bischheim, Schiltigheim, Illkirch-Graffenstaden, Lingolsheim et Ostwald.

Pour justifier cette interdiction, la préfète considère que cette nuit est sujette à des « violences et dégradations urbaines » depuis 1987 à Strasbourg. Elle estime que les statistiques des interpellations de 2019 révèlent l’implication accrue de mineurs dans des faits d’incendie de voitures et qu’il faut donc « protéger » les 13-16 ans.

Josiane Chevalier vante le couvre-feu du 31 décembre 2020, à l’époque lié à l’épidémie de Covid-19, comme une mesure réduisant de trois quart les incendies de véhicules. Pour le Nouvel an du passage de 2021 à 2022, 95 véhicules ont été incendiés malgré le couvre-feu, contre plus de 200 au Nouvel an 2019-2020.

L’arrêté précise également que malgré les mesures de couvre-feu des deux dernières années, « de nombreuses interventions de force de l’ordre et de secours » avaient été nécessaires étant donné les « violences urbaines », avec 44% des personnes interpellées âgées de moins de 16 ans.

Au tribunal administratif de Strasbourg : « La politique du fait accompli, ça ne marche pas »

Au tribunal administratif de Strasbourg : « La politique du fait accompli, ça ne marche pas »
Xavier Faessel, président du tribunal administratif de Strasbourg, Laetita Kalt et Claire Andres-Kuhn, chargées de la communication de l’institution en plus de leurs fonctions de magistrate et d’adjointe administrative.

Avec plus de 9 000 affaires jugées en 2023, le tribunal administratif de Strasbourg est chargé de régler les conflits avec les administrations. Méconnue du grand public, l’institution doit parfois juger des dossiers éminemment politiques mais aussi de simples querelles de voisinage. Rencontre avec son président, Xavier Faessel.

Installé dans un ancien hôtel particulier du quartier des Contades à Strasbourg depuis 1919, le tribunal administratif (ou TA) est le plus ancien de France. Chaque année, environ 8 500 affaires y sont jugées. Un chiffre en constante augmentation : « Nous nous attendons à atteindre 9 300 dossiers en 2023 », estime son président, Xavier Faessel, en poste depuis 2019.

Des affaires médiatiques, d’autres plus banales

Avec ses deux salles d’audience, et les dossiers de plus en plus nombreux à traiter, le bâtiment devient étroit pour la juridiction qui doit juger des affaires mettant en cause les administrations (préfectures, municipalités, collectivités territoriales…) dans le Bas-Rhin, le Haut-Rhin et la Moselle. En plus du président, sept vice-présidents, vingt premiers conseillers et quatre conseillers sont chargés, tout au long de l’année, d’étudier les litiges qui leurs sont soumis. Toutes et tous sont des magistrats professionnels, des juges employés par le ministère de la Justice et accompagnés d’agents de greffe et de personnels d’aide à la décision.

« Nous sommes saisis de questions très spectaculaires, comme l’enfouissement des déchets à Stocamine, l’autorisation de survol du marché de Noël par des drones (ou l’évacuation de squats et campements de sans-abris, NDLR). Mais nous devons aussi trancher des questions relatives à des permis de construire, des candidats qui ont échoué à un examen ou encore des désaccords sur des garages à vélo ! Nous sommes des juges du quotidien et notre rôle est de faire en sorte que la vie continue, malgré les conflits. Pour que les gens contestent une décision, c’est que l’enjeu pour eux est significatif. »

Environ 50% des affaires soumises au TA concernent le droit des étrangers – contestation d’une obligation de quitter le territoire français ou refus de régularisation par exemple. « Mais cela ne représente pas 50% de notre charge de travail », précise Xavier Faessel. Le nombre de dossiers augmente constamment (environ 700 de plus entre 2022 et 2023). « Nous sommes tributaires du nombre de décisions prises par les administrations : plus il y en a, plus il y a de probabilité qu’elles soient contestées », poursuit-il.

Les dossiers sont répartis selon le type de droit auquel ils s’apparentent :

« Nous avons six chambres : fonction publique, marchés publics, droit fiscal, droit de l’environnement, responsabilité hospitalière, social et travail, et urbanisme. Les magistrats changent de chambre et tous font du droit des étrangers, car ce contentieux peut être répétitif et qu’il implique une grande charge humaine. »

Cette répartition est spécifique au tribunal administratif de Strasbourg. Pour Xavier Faessel, il est essentiel que les professionnels du droit soient polyvalents. Un juge administratif peut par ailleurs demander à être détaché temporairement dans une juridiction judiciaire (pénale ou civile), et inversement.

Des requêtes en ligne ou sur papier

Toute personne qui estime qu’une décision d’une institution est injuste ou illégale peut saisir le tribunal administratif, en urgence – procédure appelée « référé » – ou selon une procédure ordinaire. En moyenne, en 2022, une affaire était traitée en sept mois et dix jours par le TA de Strasbourg, selon les chiffres communiqués par l’institution.

La requête s’effectue en ligne ou sur papier auprès du greffe du tribunal. Elle peut être résumée « en des termes très simples », explique Xavier Faessel :

« Une personne peut estimer que la loi a été violée ou que l’administration s’est trompée. Il y a des règles de procédure, par exemple joindre la décision contestée à la requête pour qu’on sache quel acte administratif est mis en cause. Une fois la demande reçue, le greffe du tribunal administratif va l’étudier et contacter le requérant s’il manque des éléments. »

Il n’est pas obligatoire d’être représenté par un avocat pour plaider sa cause, même si « la plupart du temps, les requêtes sont présentées pas des professionnels, car l’argumentaire doit être juridique », nuance le magistrat. « On ne peut pas saisir les juges juste parce qu’on s’est levé du mauvais pied ».

Devant le TA, la procédure est écrite. « Les institutions communiquent à l’écrit, donc les requérants doivent eux aussi produire des écrits », résume Xavier Faessel. Une manière de procéder qui « peut sembler rigide » mais qui, selon lui, permet aux juges d’être plus efficaces, étant donné le nombre d’affaires traitées. « Les personnes sont obligées de tout expliquer dans les pièces écrites, c’est un bon système », estime-t-il, « même si des précisions peuvent être faites à l’oral lors de l’audience ».

Travail collectif et rapporteur public

Après qu’une requête a été faite, un juge de la chambre concernée par la question se saisit du dossier. « C’est le magistrat rapporteur, il s’occupe de contacter l’administration mise en cause, de communiquer les réponses avec le demandeur et assure les allers-retours entre les deux », explique Xavier Faessel. Une fois les échanges complets, les magistrats se rassemblent lors des séances d’instruction.

« Deux semaines ou huit jours avant l’audience, on se présente nos affaires entre juges pour en discuter, relever nos difficultés ou nos doutes, s’il y en a. Si nous estimons que le dossier est prêt, nous décidons de le programmer en audience. Sinon, on se remet à travailler dessus. »

Un des magistrats du TA a un rôle un peu particulier : c’est le rapporteur public.

« C’est l’un des juges qui prend ce rôle pour une durée d’un à trois ans. On le fait tous à un moment donné. Sa fonction consiste à présenter une solution à l’affaire jugée au tribunal, en son âme et conscience, selon le droit applicable. C’est son avis indépendant. »

Présent dans presque tous les dossiers, il est parfois dispensé de conclure (pour des affaires de retrait de permis de conduire par exemple) et ne participe pas au délibéré (le moment où les juges décident, après l’audience).

L’intérêt ? Selon Xavier Faessel, « il présente son raisonnement et ses conclusions à l’oral, lors de l’audience. Comme ça, le public entend ce que pense un juge. Il se rend compte qu’il peut y avoir des hésitations, des doutes », explique-t-il. « Parfois, les avocats utilisent les doutes exprimés par le rapporteur public lorsqu’ils font appel de nos décisions », poursuit-il.

Souvent, le tribunal suit les conclusions du rapporteur public :

« C’est un juge comme nous, avec la même culture juridique. Donc la plupart du temps, sur un même dossier, nous arrivons aux mêmes solutions. Mais parfois pas. En novembre 2023 au Conseil d’État par exemple, le rapporteur public a estimé que la dissolution des Soulèvements de la Terre était justifiée. C’est pourtant une autre interprétation qu’a retenue le Conseil, qui a décidé d’annuler leur dissolution. »

TA Strasbourg
Dans la salle d’audience, le rapporteur public est assis à gauche, face au public. Au milieu, siège le président et à ses côtés, les juges conseillers (s’il s’agit d’un tribunal à plusieurs juges). À droite, le greffier ou la greffière qui annonce les dossiers.Photo : CB / Rue89 Strasbourg

Quant aux dossiers plus politiques dont est saisi le tribunal administratif de Strasbourg, comme l’enfouissement des déchets ultimes à Stocamine, la légalité du contournement ouest de Strasbourg (GCO), celle du contournement de Châtenois ou encore la vidéosurveillance par drones du Marché de Noël, Xavier Faessel l’assure : il n’y a aucune autre boussole que la légalité des actes contestés qui entre en jeu dans les décisions.

« Évidemment que nous sommes prudents. Mais nous nous contentons de dire ce qui est légal et ce qui ne l’est pas. En tant que juges, notre travail consiste à établir les limites des règles de droit. Lorsque l’on rend un jugement en référé (en urgence, NDLR), on peut par exemple être en formation collégiale (trois juges, NDLR) alors que ce n’est pas obligatoire selon la procédure, pour être sûrs d’avoir bien compris tout le dossier. Nous tâchons d’être encore plus méthodiques et d’afficher encore plus de neutralité. »

Neutralité et temps long pour les affaires sensibles

Un exercice dans l’apparence du tribunal donc, mais également dans la manière de rédiger les décisions afin qu’elles soient compréhensibles par le grand public.

« Le dossier GCO, par exemple, était extrêmement complexe en droit. On y a consacré autant de temps d’audience que pour 20 ou 30 dossiers. C’est le temps qu’il nous a fallu pour le traiter avec soin, tout en étant le plus transparent possible. »

Le TA a rendu une dizaine de décisions sur le GCO, dont une très contestée malgré ces précautions. Depuis un peu moins de dix ans, le TA dispose d’un service communication, géré par la magistrate Laetitia Kalt et l’adjointe administrative Claire Andres-Kuhn, qui précise : « Les décisions ne peuvent pas être simplifiées en droit, mais elles peuvent l’être dans les communiqués que nous rédigeons et qui apportent une lecture plus claire ».

Xavier Foessel, Laetitia kalt et Claire Andres-Kuhn
Xavier Faessel, président du tribunal administratif de Strasbourg, Laetita Kalt et Claire Andres-Kuhn, chargées de la communication de l’institution en plus de leurs fonctions de magistrate et d’adjointe administrative.Photo : CB / Rue89 Strasbourg

Ces communiqués concernent les affaires les plus médiatisées, ou celles qui présentent une nouveauté dans l’état du droit. C’est le cas de celle du 7 novembre 2023, où les juges ont décidé de prendre en compte le droit des générations futures pour suspendre l’autorisation d’enfouissement des déchets ultimes sur le site de Stocamine – première utilisation concrète de ce droit après une décision du Conseil Constitutionnel de fin octobre 2023.

« Il n’y a pas d’intérêt à rester dans notre confort. Quand il y a une belle idée, on le dit et on l’applique. Ce droit des générations futures a été soulevé par les avocats et il pose une bonne question. L’État s’est pourvu en cassation devant le Conseil d’État, qui jugera de notre bonne application de ce principe. »

Car les décisions du tribunal administratif de Strasbourg sont susceptibles d’être remises en cause. Soit par la Cour administrative d’appel (à Nancy) soit directement par le Conseil d’État dans le cas d’une procédure d’urgence. Ce dernier est la plus haute juridiction administrative française – sa décision est finale.

« Un autre objectif de notre travail est de permettre à l’administration de prendre de meilleures décisions, nos jugements permettent de faire avancer le débat », poursuit Xavier Faessel. Dans le cas de Stocamine et du droit des générations futures par exemple, les décisions de l’État devront désormais prendre en compte ce droit-là, au risque d’être annulées.

« La politique du fait accompli, ça ne marche pas »

En mai 2023, l’autorisation de construction du contournement routier de Châtenois a été annulée par le TA, malgré l’avancement déjà concret du projet et les centaines de milliers d’euros perdus chaque mois où le chantier stagne. « Il y a un vrai enjeu de protection de l’environnement sur ce dossier-là », estime Xavier Faessel.

« Il faut permettre aux Alsaciens de rouler en voiture, mais pas que. Peut-être que plein de gens se disent que notre décision complique tout, parce que le chantier est à l’arrêt alors que le projet est presque terminé. Sauf qu’il faut tenir compte de la règle de droit, et que la politique du fait accompli, ça ne marche pas. »

Quelles que soient les conséquences de leurs décisions, les juges administratifs doivent rester impartiaux, quelle que soit la personne qui les saisit. « Ce n’est pas à nous de dire ce qui est bon ou mauvais, ce qui est blanc ou noir », conclut Xavier Faessel. « Parfois, dire non à un étranger qui conteste une obligation de quitter le territoire français est cruel, mais c’est ce que dit le droit », assène-t-il.

40 animations insolites pour fêter les 40 ans du cinéma Star

40 animations insolites pour fêter les 40 ans du cinéma Star
Une façade anniversaire a été mise en place pour annoncer l’événement. Photo : ACC / Rue89 Strasbourg

Jusqu’au 1er janvier, le cinéma Star invite ses publics à célébrer ses 40 ans. À la manière d’un calendrier de l’avent, une activité est proposée chaque jour pendant 40 jours. De la projection de Bridget Jones en pull moche en passant par la soirée Butch de Noël : petit tour d’horizon.

Quarante ans d’existence, la meilleure année depuis 18 ans et des nouveaux projets à succès : le cinéma Star a de nombreuses raisons de se réjouir en cette fin d’année. Pour célébrer son anniversaire de jeune quadra, le cinéma a donc décidé de proposer chaque jour, jusqu’au 1er janvier, une activité différente à ses spectateurs. Stéphane Libs, directeur depuis 17 ans du Star, détaille :

« L’important pour nous est de célébrer le cinéma tout en remerciant les spectateurs de toutes les générations de nous rester fidèles. Aujourd’hui, à l’heure où l’on est tenté de rester dans son canapé pour regarder des films sur un petit écran, aller au cinéma est un acte militant ».

Bridget Jones en pull moche et Snowpiercer en plaid

Un grain de folie. C’est sans doute ce qui fait le charme des cinémas Star. Stéphane Libs en est bien conscient et il est heureux de l’alimenter :

« Je suis aussi président d’un syndicat national, le Syndicat des cinémas d’art, de répertoire et d’essai (Scare). Ce poste implique que je sois en lien avec des exploitants de toute la France et le Star est connu nationalement comme précurseur de l’extra-cinéma, c’est-à-dire des activités originales que nous mettons en place au-delà de la pure projection de films. On est connus pour être un peu foufous ! »

Stéphane Libs, directeur du cinéma depuis 17 ans, est connu en France pour « être un peu foufou ».Photo : ACC / Rue89 Strasbourg

Pour surprendre et amuser ses spectateurs, le Star propose dans sa programmation d’anniversaire plusieurs événements insolites. Amoureux de sucreries et de films futuristes ? Rendez-vous le 12 décembre pour la soirée plaid – à ramener – et pop-corn (ça, c’est le cinéma qui offre) avec la projection du chef d’œuvre de Bong Joon Ho, Snowpiercer (l’histoire d’un train gigantesque condamné à tourner autour de la terre, dans un futur post-apocalyptique, inspirée d’une bande dessinée toute aussi incroyable, réalisée par deux Français, Jacques Lob et Jean-Marc Rochette).

Après le plaid sur les genoux, les spectateurs sont invités à participer à la projection du Journal de Bridget Jones avec leur plus moche pull de Noël le vendredi 15 décembre, à 19h45. De quoi donner fière allure à la salle. 

Pour un autre type d’immersion, une salle sera transformée en cockpit de « Star Airline », avec une équipe d’hôtesses de l’air et de stewarts prêts à faire embarquer les participants à destination du film Les Amants passagers de Pedro Almodovar, le 14 décembre à 19h45. Le 17 décembre, le cinéma propose une « séance qui fait du bien » où l’on expliquera aux spectateurs stressés comment se détendre grâce à des auto-massages shiatsu. Une soirée « Butch de Noël » sera également proposée le 21 décembre, comme un avant goût des fêtes de famille avec le film queer Ma belle famille, Noël et moi. 

Animations pour les plus jeunes

Le Star a également prévu des animations pour les plus jeunes. Le vendredi 1er décembre sera rythmé par un atelier de cartes de vœux et d’écriture de lettres au père Noël. Une séance spéciale du « Doudou Club » aura lieu le 3 décembre, avec la projection d’Ernest et Célestine en hiver, en présence de Doudou – la mascotte -, évidemment. Un goûter sera servi lors de cette séance accessible à partir de 2 ans. 

Mercredi 13 décembre à 15h30, ce sera au tour de Shaun le Mouton d’être la star de l’écran. Une séance un peu particulière puisque la mère Noël y fera une apparition pour un « Secret Santa ». Les participants sont donc invités à ramener un cadeau (d’une valeur inférieure à 5€) pour l’offrir à un autre spectateur. 

Les activités ont commencé le 24 novembre. Une récolte de jouets et une soirée Polar en partenariat avec la Tâche Noire ont déjà eu lieu. Photo : ACC / Rue89 Strasbourg.

Les adultes seront également invités à se prendre au jeu le 7 décembre, lors d’un quiz sur « Noël au cinéma ». Ils pourront aussi se trémousser aux notes de l’ensemble vocal Koïra, invité pour la journée mondiale des chorales, le lundi 11 décembre à 19h30. Une visite du cinéma est prévue pour les curieux, le 2 décembre à 18h30 sur inscription. « Cet anniversaire est aussi l’occasion de refaire découvrir le lieu aux spectateurs et leur permettre de se l’approprier« , précise Stéphane Libs.  

Mannele, vin chaud et sucre d’orge

Entre les apéros pour le Club des jeunes cinéphiles, ses avant-premières et ses participations à différents festivals, Stéphane Libs fait le choix d’intégrer le Star au sein d’un quartier, d’une ville. 

« On voit que dans le regard des gens, nous sommes passés d’un cinéma d’Art et d’essai à un cinéma de proximité. Nos quarante ans sont donc aussi rythmés par de petits gestes du quotidien, comme partager un verre de l’amitié avant d’assister à la projection de notre traditionnel film surprise, ou participer à une récolte de jouets pour le magasin Carijoux ». 

Une activité par jour jusqu’au 1er janvier inclus : c’est le programme du Star pour ses 40 bougies. Photo : ACC / Rue89 Strasbourg

Le cinéma prévoit également tout un tas de rendez-vous gourmands : distribution de mannele le 6 décembre, du vin chaud le 10 décembre, des sucres d’orge le 22 décembre et d’autres confiseries les 24 et 29 décembre. 

Pour l’occasion, le cinéma lance également sa boutique en ligne avec des produits équitables illustrés par deux artistes passés par les Arts décos de Strasbourg : Anouk Ricard et Blutch. On y retrouvera également les anciens goodies du Star, comme le traditionnel tote bag portant l’inscription « Cinéphile /si.ne.fil/ adj. et n. : personne qui a tendance à se rendre au Star plutôt qu’au St-Ex ou inversement. »

Affiches et cuisine panafricaines au Jabiru Café

Affiches et cuisine panafricaines au Jabiru Café
Quelques unes des douze affiches réalisées par les élèves de la HEAR, exposées au Jabiru Café.

Au cœur du quartier de la Krutenau se niche le Jabiru Café, enseigne de la cuisine et des cultures panafricaines. En 2022, le café et des étudiants de la Haute École des Arts du Rhin ont collaboré sur un projet d’affiches. Elles sont exposées depuis le 14 novembre dans la salle du restaurant.

Ouvert depuis 2019 au milieu des maisons à colombages de la Krutenau, le Jabiru Café a fait du panafricanisme son concept. Ce terme désigne un espace géographique ayant une parentalité historique avec les cultures du continent africain, qui s’étendent au-delà de ses frontières. Loin de réduire leur diversité, il s’agit plutôt de les mettre en avant, tout comme leur influence dans nos sociétés, hier comme aujourd’hui. 

En novembre, le plat mis en avant est le « hudut », une préparation à base de lait de coco, origan et bananes plantains, issu de la culture Garifuna – un peuple issu du métissage d’esclaves noirs naufragés au large de Saint-Vincent, et des populations autochtones.

Le Jabiru café, situé rue de Zurich dans le quartier de la Krutenau, expose des affiches créées par des étudiants de la HEAR.

De l’assiette à l’affiche : 12 suggestions, 12 affiches

En 2021, une collaboration est imaginée entre les professeurs de la section « Illustration » de la Haute école des arts du Rhin (HEAR) et Gilles Dolatabadi, gérant du Jabiru. Un projet est présenté aux étudiants de 3e année pour que des petits groupes réalisent 12 affiches qui illustrent les thèmes des douze « suggestions du mois » de l’année 2021-2022.

Sur chacune des douze affiches, on retrouve le titre de la thématique mensuelle, le nom du plat ainsi que le texte historique. Mais surtout, on peut y voir des illustrations sérigraphiées qui représentent les histoires de ces plats.

Échanges culinaires, artistiques et historiques

Les étudiants ont pu goûter les différents plats et ont eu accès à de nombreux éléments : listes de mots et de visuels, descriptions historiques et échanges avec les salariés du restaurant. 

« Pour les artistes, ça a été l’occasion de découvrir des cultures différentes. J’ai pu partager nos connaissances via ces douze thématiques et eux m’ont partagé un peu sur leurs pratiques artistiques et la manière dont ils ont travaillé ensemble. »

Gilles Dolatabadi, gérant du Jabiru Café.
Affiches réalisées par les étudiants de la HEAR dans le cadre du projet avec le Jabiru Café.

La question de la légitimité à illustrer des histoires de peuples dont ils et elles ne sont ni originaires, ni spécialistes a été soulevée par une des étudiantes de la HEAR. Pour Gilles Dolatabadi, l’important est d’exposer les faits, de continuer à faire exister cette mémoire pour en respecter le souvenir. « Ces histoires dérangent, elles sont souvent borderline » analyse le gérant du Jabiru Café, « parce qu’elles parlent d’esclavage, de guerres et de religions, des sujets trop peu abordés en France métropolitaine ». En mai 2022, au Jabiru Café, la suggestion du mois était justement en lien avec l’abolition de l’esclavage en Martinique et en Guadeloupe. 

D’autres thématiques abordent le métissage issu des déplacements (souvent forcés) de populations. Ces récits de l’histoire mondiale peuvent croiser des histoires singulières, quelquefois locales. Ce fut le cas avec le thème « Romance et Casamance » qui mettait à l’honneur Fatou Diome, romancière strasbourgeoise et sénégalaise. Les affiches permettent de faire perdurer sur les murs du Jabiru ces récits multiples.

Pour dénoncer la COP28 à Dubaï, le collectif Dernière rénovation repeint le grand sapin de la place Kléber

Pour dénoncer la COP28 à Dubaï, le collectif Dernière rénovation repeint le grand sapin de la place Kléber

Ce jeudi 30 novembre, le collectif écologiste Dernière rénovation a badigeonné de peinture orange le grand sapin de Noël de la place Kléber, en déployant une banderole dénonçant la COP28 aux Émirats arabes unis.

Au milieu des touristes émerveillés par le grand sapin de Noël de la place Kléber surgit subitement une poignée de militants écologistes jeudi 30 novembre vers 17h. Sous les regards médusés des badauds, ils franchissent une petite barrière séparant le conifère de la foule, sortent des extincteurs et badigeonnent ses branches d’une peinture orange. Deux membres du collectif Dernière rénovation tendent une banderole et dévoilent leurs t-shirts, avec des messages critiquant l’organisation de la COP28 à Dubaï (Conférence internationale de l’ONU sur les changements climatiques).

Plusieurs badauds sont intervenus pour aider la police.

Le collectif écologiste a voulu profiter de l’exposition du Marché de Noël pour alerter sur la tenue de la conférence internationale, qui a démarré le même jour aux Émirats arabes unis. Les militants dénoncent des « COP qui s’enchaînent et se ressemblent, sans progrès significatif ni accord contraignant ». Ils critiquent le choix d’organiser cette COP à Dubaï, capitale d’un des États exportant le plus de pétrole au monde.

« On souhaitait souligner l’hypocrisie d’organiser une COP à Dubaï »

Cinq minutes à peine après le début de l’action, deux hommes dans la foule viennent s’interposer. L’un arrache la banderole, l’autre écarte un militant par le bras en pestant contre les écologistes. Très vite, des policiers interviennent et mettent à l’écart les militants après avoir relevé leur identité. En fond sonore, un jeune chante un air mièvre, alors que la situation revient à la normale.

De nuit, la peinture orange était à peine visible sur l’arbre.Photo : Fantasio Guipot / Rue89 Strasbourg

« C’était important de marquer le coup », explique Simon, membre de Dernière rénovation :

« On souhaitait souligner l’hypocrisie d’organiser la COP à Dubaï mais aussi de confier la présidence de la conférence à Sultan Al-Jaber (également président directeur général de la Abu Dhabi National Oil Company, NDLR), qui pourrait profiter de ce sommet pour réaliser des contrats. »

Au sujet de la peinture ayant aspergé l’arbre, il assure qu’elle partira avec un peu d’eau. « Et même si le sapin était détérioré, qu’est-ce qui est le plus choquant ? De la peinture sur un sapin, ou ce que vivent les pays du Sud, qui subissent de plein fouet les conséquences du changement climatique ? », questionne le militant.

À l’heure de publier cet article, les cinq militants ont été interpellés par les forces de l’ordre mais il n’y a pas d’information sur de potentielles arrestations.

Au collège Kléber, une équipe de gestion de crise mobilisée après la plainte pour menace de mort

Au collège Kléber, une équipe de gestion de crise mobilisée après la plainte pour menace de mort
Après la mobilisation des enseignants du collège Kléber suite à une plainte pour menace de mort, le rectorat de Strasbourg annonce soutenir l’enseignant.

Après la manifestation des enseignants du collège Kléber jeudi 30 novembre suite au dépôt de plainte d’un enseignant pour menace de mort, le recteur de l’Académie de Strasbourg Olivier Faron a annoncé lors d’une conférence de presse la mobilisation d’une équipe de sécurité dans l’établissement.

« Je condamne fermement et sans appel ce qu’il s’est passé. Les propos tenus par l’élève à l’encontre du professeur sont inadmissibles et inacceptables. » Olivier Faron, recteur de l’académie de Strasbourg, a annoncé soutenir la plainte déposée par l’enseignant du collège Kléber, lors d’une conférence de presse jeudi 30 novembre.

Le même jour, les enseignants de l’établissement se sont mis en grève pour demander une meilleure prise en charge des violences récurrentes constatées dans l’établissement. Cette mobilisation fait suite au dépôt d’une plainte, par un professeur, pour menace de mort. Selon l’enseignant, l’élève aurait menacé de le tuer à la sortie de l’établissement, après que le professeur ait confisqué son téléphone mardi 28 novembre.

Exclusion temporaire et signalement à la procureure

Sur place dans l’établissement jeudi matin, Olivier Faron a rencontré les enseignants en grève et assure avoir pris des mesures concrètes :

« L’élève est temporairement exclu et passera en conseil de discipline le 19 décembre. Si l’enseignant le demande, nous l’appuierons dans sa plainte en couvrant les frais d’avocat. Il pourra aussi bénéficier d’une protection fonctionnelle de la part de notre administration. Une équipe mobile de sécurité est présente au collège Kléber depuis jeudi matin : deux personnes expertes en gestion de crise sur des questions de sécurité et la prise en charge psychologique. »

Jean-Pierre Geneviève, directeur académique des services de l’éducation nationale (Dasen), précise qu’un signalement a été fait auprès de la procureure de la République de Strasbourg, au titre de l’article 40 du code de procédure pénale – qui exige que « [t]oute autorité constituée [qui] dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenue d’en donner avis sans délai au procureur de la République ».

Lors de cette conférence de presse, le recteur a précisé attendre des équipes de direction des écoles, collèges et lycées des remontées systématiques des incidents de ce type. « Nous faisons en sorte que ces remontées soient le plus opérationnelles possibles. Elles sont classées selon leur niveau de gravité, entre 1 et 3 », poursuit-il. Précisant qu’il prend personnellement en charge les remontées de type 2 et 3.

« Il faut rétablir l’autorité, comme l’a déjà dit Gabriel Attal (ministre de l’Intérieur, NDLR). Les enseignants ont l’autorité sur les élèves et le moindre fait d’incivilité doit être remonté. Tous ceux qui commettent des faits graves feront l’objet de sanctions adaptées. »

Olivier Faron, recteur de l’Académie de Strasbourg

Travailler sur la sécurisation

Réaffirmant son soutien aux équipes de direction, d’enseignement et de vie scolaire, Olivier Faron a souligné que le groupement scolaire Kléber est un exemple de mixité sociale. « Mais cela pose des questions de sécurisation et d’organisation de l’espace », a-t-il précisé. Plus de 3 000 élèves y sont scolarisés.

« Nous travaillons avec la Collectivité européenne d’Alsace et la Région Grand Est pour sécuriser l’accès aux établissements, car c’est à eux qu’appartiennent les bâtiments. »

Admettant que les établissements avaient des « points de faiblesse » concernant leur sécurisation, Olivier Faron assure que des travaux pourront être faits en « extrême urgence » pour y remédier. Une sécurisation par ailleurs définie largement par le recteur qui n’exclut pas d’y inclure de la « cybersécurité ».

Pas d’éducation prioritaire avant 2024

Les enseignants mobilisés souhaitaient aussi disposer de plus de moyens, en passant le collège en réseau d’éducation prioritaire (REP). Mais ce ne sera pas le cas avant, au moins, 2024 :

« Notre académie a un indice de positionnement social qui décline par rapport à 2022. La carte de l’enseignement prioritaire va être ouverte car elle date de 2015. Nous allons y travailler en 2024 avec la carte de la politique de la Ville, qui va également impacter les quartiers politiques de la ville (QPV, NDLR). »

Olivier Faron, recteur de l’Académie de Strasbourg

Selon le recteur, la carte de l’éducation prioritaire devrait alors être étendue pour l’Alsace. « Avec 31 000 personnels sur l’Académie, je souhaiterais que nous ayons le double de moyens. Mais pour le moment, la question centrale est celle de la répartition des moyens actuels ».

Deux familles sans-abris relogées dans un bâtiment municipal après l’occupation d’une école

Deux familles sans-abris relogées dans un bâtiment municipal après l’occupation d’une école
À l’école élémentaire des Romains, la mobilisations d’une association et de parents d’élèves a permis de trouver un logement temporaire à deux familles sans abris.

Après trois heures d’occupation de l’école élémentaire des Romains, dans le quartier de Koenigshoffen à Strasbourg, deux familles sans-abris ont été relogées dans un bâtiment de la Ville de Strasbourg, jusqu’au 31 mars.

La satisfaction est partielle pour Cécilia Quintiliani, porte-parole du collectif Pas d’enfant à la rue, qui avait annoncé l’occupation de l’école des Romains, mercredi 29 novembre. L’objectif était de loger deux familles sans-abris dont les enfants sont scolarisés dans cet établissement. Finalement, la Ville de Strasbourg leur a trouvé une solution d’hébergement. « Jusqu’au 31 mars, elles pourront habiter un appartement chacune », précise Cécilia Quintiliani.

Un hébergement trouvé en trois heures

En tout, six enfants seront donc à mis l’abri pour l’hiver. Certains d’entre eux dormaient sous une tente depuis cinq mois. Portée par le collectif et l’association de parents des élèves indépendants de l’école des Romains, l’occupation s’est déroulée entre midi et 15h30. « Des élus sont venus pour trouver une solution, comme lors des occupations précédentes », explique Cécilia Quintiliani, faisant référence à l’école de la Ziegelau notamment – où une solution temporaire d’hébergement par une association avait été proposée à une mère et ses enfants en juin.

Pour la première fois cependant, la solution trouvée pour sortir ces deux familles de la rue est un relogement, temporaire, dans un bâtiment appartenant à la Ville de Strasbourg. « Nous avons pu proposer cela grâce à l’association Les petites roues, qui se porte garante », explique Floriane Varieras, adjointe à la maire en charge des solidarités.

Un bâtiment de logements du quartier de Koenigshoffen, dont la Ville est propriétaire, abritera jusqu’au 31 mars 2023 les deux familles, dans deux appartements de 100 mètres carrés. L’association Les petites roues est signataire d’une « convention d’occupation temporaire du domaine public » avec la Ville et payera 75 euros par mois et par logement. « Je viens de souscrire à une assurance habitation pour pouvoir signer la convention », explique Sabine Carriou, présidente de l’association.

Une solution exceptionnelle

« C’est la première fois que nous procédons comme ça », poursuit-elle. Habituellement, l’association fait appel aux dons pour pouvoir payer quelques nuits d’hôtels aux personnes vulnérables qui ne sont pas prises en charge lorsqu’elles demandent un hébergement d’urgence en appelant le 115.

« La solution trouvée cette fois-ci est exceptionnelle et nous permet d’absorber ces deux cas », expose Floriane Varieras, « mais ma satisfaction est modérée », expliquant que les précédents locataires des logements qui seront rénovés et dans lesquels les familles sont relogées venaient tout juste de partir :

« C’est très bien pour les deux familles qui dormiront au chaud dès ce soir, mais dès qu’on dé-zoom un peu, la situation est tragique. La semaine du 20 novembre, la maraude du Service d’accueil a rencontré 192 personnes personnes sans-abri et 50 enfants. Et c’est un chiffre plancher car il ne prend pas en compte toutes les personnes qu’elle n’a pas rencontré. »

Floriane Varieras, adjointe municipale en charge des solidarités

En juin, une enquête de Rue89 Strasbourg estimait à au moins 35 les signalements effectués auprès du rectorat par les chefs d’établissements scolaires relatifs au sans-abrisme de leurs élèves. « Ce serait bien qu’on ne soit pas à chaque fois réduits à occuper une école pour que les enfants à la rue bénéficient d’un hébergement », tranche Cécilia Quintiliani.

Appel à ouvrir les gymnases

Pour Floriane Varieras, il est temps que la préfecture décrète le plan « Grand Froid » et ouvre conséquemment des gymnases pour mettre au chaud celles et ceux qui dorment dehors, enfants et adultes inclus : « J’ai l’impression que chaque semaine sont battus les records de personnes à la rue et que le gouvernement ne prend pas la mesure du problème. »

Quant aux discussions entre Ville et préfecture – cette dernière est responsable de l’hébergement d’urgence -, Floriane Varieras explique qu’elles existent. « Mais eux aussi travaillent à moyens constants, ils n’ont pas plus d’argent du gouvernement alors que la demande augmente », explique-t-elle.

Pour le moment, Floriane Varieras assure que la solution de louer à des familles sans-abri des appartements qui appartiennent à la Ville, via des associations, « n’est pas systématisable », ces appartements étant très rarement disponibles.

Un professeur du collège Kléber porte plainte pour menace de mort, les enseignants en grève jeudi

Un professeur du collège Kléber porte plainte pour menace de mort, les enseignants en grève jeudi

Suite à une plainte contre un élève pour menace de mort déposée par un professeur mardi 28 novembre, la quasi-totalité des enseignants du collège Kléber seront en grève jeudi 30 novembre. Ces derniers demandent une meilleure prise en charge des violences récurrentes constatées dans l’établissement.

« Vous allez voir à la sortie du collège, dans la rue avec mes copains. Je te tue. » Daniel Elbaz, professeur de musique et délégué syndical Sgen au collège Kléber, rapporte les termes précis issus d’une plainte pour une menace de mort subie par l’un de ses collègues, mardi 28 novembre. Un peu avant-midi, l’enseignant aurait confisqué le téléphone d’un élève, qui lui aurait répondu ainsi.

Cet événement a provoqué une réaction immédiate de la part de l’équipe enseignante qui a décidé à la quasi-unanimité d’entrer en grève jeudi 30 novembre et de se rassembler devant l’établissement dès 8h. « Ce n’est pas un syndicat qui est à l’origine de cette mobilisation, mais tous les professeurs de façon spontanée », assure une enseignante. « Il y a eu des réunions informelles en salle des professeurs, des discussions dans les couloirs et sur WhatsApp », indique Gilles Comte, enseignant d’histoire-géographie et délégué CGT.

Des explosions de mortiers, des agressions…

L’équipe du collège Kléber réclame une réponse concrète de la direction à ce type d’incidents, qui arrivent régulièrement selon les professeurs interrogés par Rue89 Strasbourg. Daniel Elbaz affirme qu’une enseignante a porté plainte après le vol de son portefeuille par des élèves mardi. Il énumère d’autres cas similaires :

« La veille, lundi, un puissant mortier a explosé dans un couloir faisant trembler les murs de l’établissement. C’était déjà arrivé avant les vacances de la Toussaint. Début octobre, une conseillère principale d’éducation et une professeure ont été bousculées et insultées par des jeunes qui n’étaient pas élèves mais s’étaient introduits dans l’enceinte du collège. L’une des deux est encore en arrêt maladie fin novembre. »

« Il y a aussi les agressions entre élèves », dénonce une professeure : « Un jeune de confession juive s’est fait asperger la tête avec du déodorant par un autre élève qui lui a dit qu’il allait le gazer et que c’était dommage que les camps de concentration n’existent plus. » Face à ces violences, les enseignants demandent « l’ouverture d’un véritable dialogue avec la direction », comme l’explique Jean-Pierre Gavrilovic, délégué syndical du Snalc :

« Lorsque j’échange avec la cheffe d’établissement, elle me dit qu’il n’y a pas de problème particulier. Le fait que ces incidents ne soient pas pris au sérieux par la direction est très difficile pour les enseignants. Il faut qu’on se mette tous autour d’une table, qu’on fasse une réunion extraordinaire. Les choses ne peuvent pas continuer comme ça. »

Les enseignants demandent des réponses concrètes

Gilles Comte, de la CGT, détaille ce que devrait faire la direction du collège dans de telles circonstances :

« On attendrait des réponses immédiates, des mails ou des réunions pour parler des faits, et des sanctions disciplinaires. Là, on a l’impression qu’ils nous cachent ces événements. Il n’y a aucune communication dessus. On est au courant parce qu’on en parle entre nous. »

Daniel Elbaz évoque le fait que des élèves du collège Kléber viennent de l’école élémentaire des Romains à Koenigshoffen et ne sont vraisemblablement pas acceptés, par manque de places, au collège Twinger, qui est dans un réseau d’éducation prioritaire (REP) :

« Aujourd’hui, le collège Kléber n’a pas suffisamment de moyens comme il n’est pas en REP. Les effectifs ne sont pas réduits par exemple… »

Contactée, la direction du collège Kléber n’a pas fait suite à la sollicitation de Rue89 Strasbourg. Elle a cependant déclaré à France 3 que les événements du mardi 28 novembre étaient « d’une gravité extrême », que l’élève nie les faits et qu’il fait l’objet d’une mesure conservatoire lui interdisant de se rendre dans l’établissement.

De Strasbourg à Paris, 59 propositions pour une presse libre et indépendante

De Strasbourg à Paris, 59 propositions pour une presse libre et indépendante

Les États généraux de la presse indépendante débutent. Une centaine de médias se sont mobilisés pour apporter 59 propositions au débat public sur l’avenir des médias. Objectif : garantir une presse libre, plurielle, en capacité de produire des révélations, et loin des grandes fortunes. Deux rendez-vous : une journée de lancement à Paris jeudi 30 novembre, à suivre en direct, et une soirée de débats à Strasbourg vendredi 15 décembre.

Comment lutter contre la concentration des médias alors qu’en Alsace, les deux titres de presse quotidienne appartiennent tous les deux à une filiale du Crédit mutuel, la principale banque de la région ? Comment éviter que des journalistes se retrouvent en garde à vue pour avoir fait leur travail ? Comment garder les journalistes libres d’informer sans craindre de pressions de la part des actionnaires de leur média ?

Ce jeudi 30 novembre, à Paris, un journée de débats ouvrira les États généraux de la presse indépendante (EGPI). Une initiative portée par une centaine de médias indépendants, dont Rue89 Strasbourg, rassemblés pour faire entendre une autre voix dans le débat public, alors que débutent les États généraux du droit à l’information, organisés par le gouvernement et qui risquent bien de ne déboucher sur rien. La journée de lancement des EGPI est à suivre en direct ci-dessus à partir de 17h.

La presse indépendante fait ses propositions

Après plusieurs semaines d’échanges, une centaine de médias indépendants ont formulé 59 propositions pour améliorer le sort de la presse française. Elles sont à découvrir dans ce livret, publié avec le concours du Fonds pour une presse libre. Parmi celles-ci, on peut compter pêle-mêle :

    La refonte complète de la loi de 1986. L’objectif est de renforcer, en les abaissant, les seuils de concentration des médias. Doter l’équipe rédactionnelle d’un média d’une personnalité juridique, qui lui confère un droit d’opposition en matière éditoriale lorsque son indépendance est mise en cause par un actionnaire, par la direction ou par un annonceur. Ce droit collectif complète les droits individuels des journalistes : clause de conscience, de cession. Travailler afin que le délit de presse n’ait pas sa place devant les tribunaux de commerce. Il faut prévoir des immunités de poursuites civiles (notamment dénigrement commercial, secret des affaires, etc.) et empêcher les poursuites en référés visant à censurer avant toute publication des contenus journalistiques.

Ou encore :

    Élargir le champ des bénéficiaires de la protection du secret des sources au sein des médias et des organisations qui accompagnent les lanceuses et lanceurs d’alerte.

Une soirée de débats à Strasbourg

À Strasbourg, Rue89 Strasbourg organise une soirée de débats autour des États généraux de la presse indépendante, vendredi 15 décembre à partir de 18h30 à l’auditorium de la Bibliothèque nationale universitaire. Avec des membres de la presse indépendante alsacienne, des universitaires et des représentants d’organisations de journalistes, il sera question de l’écosystème des médias en Alsace.

Gilles Triolier parle des difficultés de publier des enquêtes dans un environnement local. (vidéo FPL / Youtube)