Enquêtes et actualité à Strasbourg et Eurométropole

Violences sexistes et sexuelles à la Croix-Rouge du Bas-Rhin : victimes ignorées et lanceurs d’alerte suspendus

Violences sexistes et sexuelles à la Croix-Rouge du Bas-Rhin : victimes ignorées et lanceurs d’alerte suspendus

La direction territoriale de la Croix-Rouge du Bas-Rhin est alertée depuis au moins 2021 de cas de violences sexistes et sexuelles commis en interne. La direction nationale a diligenté une enquête. Mais à l’issue, victimes et bénévoles se sentent ignorés, voire accusés d’avoir parlé.

La Croix-Rouge du Bas-Rhin, une association composée de 600 bénévoles, est confrontée à une sérieuse crise interne. Au moins trois hommes, dont deux ayant des fonctions d’encadrement ou d . . .

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Cyclistes frustrés à la Vélorution « inter-quartiers »

Cyclistes frustrés à la Vélorution « inter-quartiers »

La vélorution du vendredi 21 juillet a été très frustrante pour ses participants. L’itinéraire ne correspondait plus aux axes dont les aménagements devaient être dénoncés et les cyclistes ont dû rester sur les pistes cyclables, afin de ne pas gêner la circulation automobile.

Vendredi 21 juillet en fin d’après-midi, des cyclistes en tout genre se massent près de la passerelle des Deux-Rives, au Port du Rhin. Vélos couchés, courbés ou surélevés, munis d’une cargaison ou d’une enceinte, strasbourgeois ou venus d’ailleurs écoutent avec attention les porte-paroles de l’association Strasbourg à vélo.

Une vélorution sans occupation

À l’origine de cet appel, Benoît Écosse et Alice Guiffard rappellent les modalités quelques peu particulières pour cette cinquième « vélorution » organisée à Strasbourg depuis le début de l’année. Dépités par un itinéraire modifié lundi par la préfecture, les organisateurs se désolent de ne pas pouvoir passer par les axes sur lesquels ils entendaient démontrer leur inadaptation à la circulation cycliste. Deuxième mauvaise nouvelle et c’est une première : les participants devront rester sur les pistes cyclables. Une perte de « l’essence même de la masse critique », développera Benoît Écosse un peu plus tard :

« Le principe de la vélorution est d’occuper l’espace sur la chaussée pour contrebalancer le monopole de la voiture. C’est comme ça qu’on a pu obtenir des pistes cyclables sur l’avenue des Vosges. Si on ne peut pas militer sur ces espaces pour un meilleur partage, le message revendicatif ne peut pas passer. »

L’arrivée des vélos surélevés à la passerelle des Deux-Rives Photo : RM / Rue89 Strasbourg / cc
Top départ pour la vélorution, sur les airs du groupe australien King Gizzard Photo : RM / Rue89 Strasbourg / cc

A l’apparition de deux vélos surélevés, les quelques « bouh » qui ont accueillis les contraintes annoncées disparaissent au profit des « hourras » et des sonnettes qui retentissent. Quelques minutes s’écoulent, puis les coups de sifflet tintent et la vélorution se met en route. À l’arrière, le cortège est entraîné sur les airs de King Gizzard and the Wizzard Lizard – un groupe australien de rock progressif – qui apporte aux premiers coups de pédales un côté lyrique et chevaleresque. Sur leur visage, caressés par une fine brise de vent, se dessinent peu à peu de larges sourires.

Des contraintes appliquées avec fermeté

Très rapidement, la manifestation ralentit, contrainte à chaque intersection de s’arrêter et d’attendre patiemment avant de pouvoir repartir. « C’est n’importe quoi, on ne fait que gêner les cyclistes et les piétons, alors qu’on ne voit quasiment aucune voiture », scande un cycliste auprès d’un policier, chargé de sécuriser les intersections.

Les cyclistes dans l’attente que l’avant du cortège se débloque Photo : RM / Rue89 Strasbourg / cc
Nouvel arrêt, rythmé par la sono de Bike’n’sound Photo : RM / Rue89 Strasbourg / cc

Après le pont d’Anvers, quelques cyclistes commencent à investir la chaussée sur l’avenue de la Forêt-Noire, où la circulation automobile est absente. Dans l’harmonie des sonnettes et rejointe par les autres cyclistes, la file de vélos se transforme en une masse conséquente emplie d’éclats de rire et d’une liberté diffuse. Un bref instant de joie stoppé à la seconde intersection. Les policiers prennent à part les organisateurs de Strasbourg à vélo, qui annoncent :

« On nous impose de rappeler à tous les participants de revenir sur la piste cyclable sans quoi nous devrons stopper la manifestation. »

Un skate-board se distingue des deux roues, avec le symbole du mouvement Extinction Rebellion Photo : RM / Rue89 Strasbourg / cc

Benoît Écosse rappelle qu’il est habituel d’occuper la chaussée avec les vélorutions :

« On l’a perçu comme une gestion autoritaire de la manifestation, on ne s’attendait pas à ce niveau de fermeté des policiers, ni à la menace que la manifestation soit arrêtée. Que ce soit chez les responsables et les vélorutionnaires, on a ressenti de la frustration et de l’incompréhension. »

« Au dépens des autres mobilités »

Pour le membre de l’association, la décision de la préfecture vise à « ne surtout pas déranger le trafic automobiliste au dépens de ceux qui font le choix d’autres mobilités ». Il fait ici référence aux nombreux cyclistes et à la personne en fauteuil roulant croisés dans l’autre sens, gênés par l’ampleur du cortège formé par les quelques 200 cyclistes selon Strasbourg à vélo.

Les cyclistes en route vers la place de Bordeaux Photo : RM / Rue89 Strasbourg / cc

Résignés, les participants se remettent en route sur les basses de Bike’n’sound en prenant garde de ne pas déborder des pistes cyclables. La vélorution atteint la place de Bordeaux où une pause avait été annoncée. L’occasion pour les cyclistes d’échanger un peu et de se rencontrer, puisqu’ils ne peuvent pas se parler sur les pistes.

L’un reproche à la préfecture « l’excuse de l’heure de pointe » : « on est en juillet, les gens sont en congés, ça ne tient pas la route », lâche-t-il agacé. À côté de son vélo-cargo, Pierre, 42 ans, en profite pour afficher son désarroi :

« Rester sur les pistes crée des embouteillages de dingue, c’est hyper contraignant et on se gêne les uns les autres. Chacun fait son petit itinéraire l’un derrière l’autre, c’est pas marrant. On n’a pas le sentiment d’être ensemble, en fait. Par la puissance du nombre, on aurait dû avoir notre place sur la route. »

Les coups de sifflets marquent la reprise de la manifestation, direction Koenigshoffen où se déroule un festival de la contre-culture vélo, Cyclocamp. Les policiers pressent les derniers du cortège afin de ne plus avoir à bloquer l’intersection. À l’allure tranquille, la vélorution reprend en longeant le quartier de la gare puis les nombreux jardins aux douces odeurs fleuries, s’interrompt de temps en temps avant de reprendre au gré des feux rouges.

Le cortège arrive finalement à destination, après deux bonnes heures de déambulation lente et entrecoupée. Les vélos envahissent le site du festival, parc Saint-Gall, ce qui remplit de joie ses organisateurs. L’un d’eux, Fabien Morin, commente tout souriant :

« C’est vraiment une belle surprise de voir tout ce monde arriver d’un coup ! On n’avait aucune idée du nombre que nous serions parce que beaucoup d’étrangers sont venus directement de la vélorution. »

L’amertume de ne pas avoir obtenu « la liberté désirée », comme le résume Benoît Écosse, se dissipe peu à peu alors que les balances résonnent avant que les musiciens lancent les festivités du Cyclocamp.

Après les émeutes, le blues des élus de quartiers

Après les émeutes, le blues des élus de quartiers

La période d’émeutes urbaines qui a suivi la mort de Nahel a mobilisé les élus référents de quartiers. Mais elle a aussi mis en évidence les limites cruelles de leurs fonctions.

« Élu de quartier, c’est vraiment un truc bizarre quand même. » Au bout d’une heure d’entretien à la terrasse d’un café, le commentaire d’Hervé Polesi sonne comme un aveu. Souvent perçu comme secondaire, voire anecdotique pour les plus cyniques, la fonction d’élu référent de quartier n’est pas exactement le . . .

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À Meisenthal, ARToPie comme lieu des possibles artistiques

À Meisenthal, ARToPie comme lieu des possibles artistiques

Vosges alternatives, notre série d’été sur la vie militante en zone rurale (3/8) – Depuis plus de 20 ans, l’association ARToPie agite les Vosges du Nord. Installé dans une ancienne fabrique de couverts à Meisenthal, cet espace autogéré dédié à la création accueille des artistes en résidence et participe à la transformation du Bitcherland.

La vue a tout d’une carte postale. Petit bourg de 700 habitants, encadré par les collines boisées des Vosges du Nord, Meisenthal se situe à une heure de voiture de Strasbourg, en Moselle. L’isolement des lieux fera préférer la voiture au train pour les visites occasionnelles.

En descendant la route serpentant vers le centre, un bâtiment s’impose au regard : celui de l’ancienne verrerie fermée à la fin des années 1960. Il accueille aujourd’hui le Centre international d’art verrier (CIAV), dont les boules de Noël font la renommée de la commune, ainsi que la Halle verrière, une salle de concert connue dans toute la région. Au cœur du village, à l’ombre des hauts murs de cette immense halle, un bâtiment d’apparence insignifiant. Sur son mur, sept lettres colorées tranchent avec la verdure environnante : ARToPie.

Le village de Meisenthal, en Moselle, situé à 70 km environ au nord-ouest de Strasbourg. Photo : AL / Rue89 Strasbourg

Un tiers lieu associatif autogéré

Centre de création artistique porté par l’association du même nom, ARToPie accueille des artistes de passage. En échange d’une somme modique et d’un peu de participation à la vie du lieu, musiciens, plasticiens et comédiens peuvent venir travailler ici. Profiter, au calme, des 2 000 m² d’espace et du matériel mis à disposition par l’association.

Ils sont une vingtaine en cette semaine du mois de juillet. Ici, une comédienne travaillant son texte, là, un musicien enchaînant quelques accords. Plus rarement, on croise un bénévole de l’association. Les artistes s’organisent librement. « On s’approprie un cadre qui est devenu familier », témoigne Claire Robert, membre du groupe de chants traditionnels À Hue et à Dia, habitué d’ARToPie. « En fin de répétition, on va donner un coup de main pour le ménage, même pour des choses qui ne nous concernent pas. » Et une autre membre du groupe, Alexandrine Guedron, de poursuivre : « On fait notre cuisine, on s’installe. Il y a quelque chose de très familial ici. »

« Un lieu propice à travailler »

Elsa Chomienne, scénographe en résidence avec le collectif Même Acabit, fait le même constat : « On se sent un peu comme chez nous quand on arrive, c’est propice à travailler dans de bonnes conditions. »

Installée dans un atelier au rez-de-chaussée, elle fabrique un masque pour une prochaine performance. Sans lever le nez de son ouvrage, Elsa reprend : « Ce côté très alternatif est plus adapté à ma façon de travailler. Dans des contextes institutionnels, on doit se plier à plus de contraintes. »

Venues de Strasbourg, les trois membres du collectif d’arts visuels vivent dans les étages du bâtiment pendant leur semaine de résidence. Seul un escalier et quelques portes séparent l’atelier de l’espace d’habitation. En haut, plusieurs chambres, des dortoirs collectifs, un salon, une cuisine et une salle de bain. Sans le grand tableau récapitulatif de l’occupation des chambres, et la tirelire « prix libre » pour la machine à laver, on pourrait se croire dans n’importe quelle colocation strasbourgeoise.

« On peut créer notre propre politique »

Simon Perot est membre du conseil d’administration d’ARToPie. Verrier de profession, il est arrivé à Meisenthal « à cause de Stéphane Bern qui tournait un téléfilm, un peu nul, dans l’univers des verreries. » Il travaille un temps au CIAV avant de découvrir le centre de création artistique. Séduit par la dynamique du lieu, il s’engage comme bénévole : « Tu files des coups de mains, puis on te demande de faire ci ou ça parce que tu connais. Et au bout de trois mois, on m’a proposé d’intégrer le CA. »

Il décrit le fonctionnement de la structure reposant sur le bénévolat : comment de l’envie d’un adhérent naît un nouveau projet collectif, ou encore les discussions sans fin sur l’organisation.

« On ne vote quasiment jamais. Le vote, c’est presque un échec, c’est que l’on n’a pas trouvé une solution en discutant. »

Simon raconte aussi comment, il y a deux ans, le seul salarié a donné sa démission. « Il se trouvait dans une position où on pouvait le voir comme un chef. Une situation en contradiction avec l’idéal d’autogestion. » Une fois l’unique salarié redevenu bénévole, les Artopiens décident de ne pas le remplacer. Renforçant de fait l’indépendance de la structure.

« En dehors du salariat, on a peu de charges. On ne dépend donc pas de subventions. Ainsi, nous ne sommes pas tributaires de la politique locale, on peut créer notre propre politique. »

Simon Perot, verrier et membre du CA d’ARToPie. (Photo AL / Rue89 Strasbourg).

Meisenthal calling

Au début des années 2000, le site est encore en friche. Salariée du mouvement d’éducation populaire Culture et Liberté, Anabelle Senger anime une troupe de théâtre. « Il nous fallait un lieu, et les municipalités n’étaient pas chaudes pour nous aider, parce qu’on était un peu les gauchos de service », se souvient Stéphane Kouvert, ancien salarié de Culture et liberté.

Une rencontre fera naître ARToPie : celle d’Anabelle et du sculpteur Stephan Balkenhol. La star de l’art contemporain est séduite tant par la jeune femme, que par son projet de créer un lieu alternatif à l’interface des arts et de l’éducation populaire. « Un soir, ma frangine m’appelle et me dit : ”On vient de voir un endroit, c’est dingue. Vient tout de suite le visiter.” On a visité toutes les deux, de nuit à la lampe torche. Le lendemain, ils l’ont acheté », témoigne la sœur d’Anabelle, Céline Senger, membre du CA d’ARToPie.

Le sculpteur devient propriétaire de l’ancienne orfèvrerie, ARToPie est née, nous sommes en 2002. 21 ans plus tard, malgré le décès d’Anabelle, le projet reste le même.

« On était dans cette idée de transmettre un savoir, que les gens deviennent autonomes, aient un sens critique, agissent par eux-mêmes. Il y a toujours ce même esprit. »

Un lourd passé de contre-culture dans le Bitcherland

À sa création, le tiers lieu ne s’installe pas sur une terre vierge d’expérimentations. Le Bitcherland possède déjà une histoire riche de contre-culture. « Le premier truc que j’ai appris ado, c’est courir ! », raconte Lucien Hullar, dit Lulu, qui se décrit volontiers comme « le premier punk de la région ».

Courir pour quoi ? « Pour fuir la violence. » Bandana à têtes de mort sur le crâne, il raconte les bagarres dantesques entre villages et sa rencontre avec le rock, dans un look épingle à nourrice et perfecto. Avec quelques amis, ils organisent des concerts à la fin des années 70. La Mano Negra, Parabellum… Autant de groupes pour lesquels il faudra « pousser les murs » des foyers de jeunes. L’initiative fait des petits et pendant les années 80 et 90 toutes les vallées résonnent aux sons des guitares saturées. « Je retrouve cette dynamique ici. »

Pour Stéphane Kouvert, le passé industriel de la région a, lui aussi, constitué un terreau fertile pour les alternatives.

« À l’époque, les ouvriers allaient à l’usine en journée et travaillaient le soir dans les champs. Ils ne pouvaient s’en sortir qu’avec une grosse solidarité. Quand ces industries ont décliné, ça a poussé les gens à se serrer les coudes. Ils se disaient qu’il fallait faire autrement et ensemble. »

Du lien social pour les gens de tous milieux

Le jeudi à ARToPie, c’est jour de marché. Dans la cour, une foule nombreuse se presse devant les étals. De la viande crépite sur un barbecue. Dans un coin, deux mamies se racontent les derniers potins du village. Malicieuses. Derrière la buvette, Daniel Maréchal, un bénévole, observe l’affluence : « Ici, on crée du lien social, il y a des gens de tous les milieux. » À côté, ses courses en main, Céline Senger commente :

« Au début, on était vus comme des extraterrestres parce qu’on créait un lieu alternatif. Ça s’est vraiment ouvert aux habitants de Meisenthal avec le marché. »

Elle raconte la peur de l’entre-soi. Les ateliers organisés pour les gamins du village, les concerts, les fêtes populaires… Toutes les initiatives destinées à faire tomber le mur invisible séparant villageois et Artopiens. Après 20 ans d’efforts, en observant les habitants, les bénévoles et les artistes se mélanger, Céline se dit qu’ils y sont finalement arrivés.

« Le piège Meisenthal »

Dans le village, une expression circule : « le piège Meisenthal ». Elle désigne ces gens qui viennent et ne repartent pas. Trait d’humour pour taquiner les résidents de passage, l’expression n’est pas sans fondement. Pour s’en rendre compte, il faut remonter la rue de Bitche. Sur la boîte aux lettres de l’imposante bâtisse qui domine le village, un nom : association Bitchissime. C’est là.

En 2021, douze personnes achètent collectivement l’ancienne miroiterie pour créer un lieu d’habitation et des ateliers d’artistes. La proximité avec ARToPie devient évidente quand Simon Perot nous ouvre la porte du chalet du Saupferch. « Ça faisait un moment que l’on rêvait de trouver un endroit pour installer nos ateliers de manière pérenne. » Si la partie habitation est terminée, il faut encore un peu d’imagination pour visualiser les futurs ateliers. « Ici, on va faire un labo de sérigraphie. Là, je vais installer mon four », détaille le verrier en serpentant entre les outils qui encombrent l’espace.

« L’idée, c’est vraiment de s’inscrire dans une complémentarité d’ARToPie. Pour l’instant, on n’est pas à même de le faire, car les ateliers sont encore en travaux. »

Depuis le balcon du chalet, Simon observe la vallée. Du doigt, il désigne un petit bâtiment en contrebas. « Là-bas, c’est ARToPie. » Autour, le village de Meisenthal. Paisible en cette fin d’après midi.

« L’autre jour, Arnaud qui est punk s’est fait prendre en stop par une petite mamie. Quand il lui a demandé si elle avait peur, elle lui a répondu : ”C’est toi qui devrais, tu ne sais pas comment je conduis !” C’est des trucs incroyables, ça n’arrive qu’à Meisenthal. Pour moi, il y a une vraie transformation dans le fait qu’aujourd’hui les gens s’écoutent. »

Avec tous ces artistes de passage, les gens du village se sont habitués à l’inhabituel.

#Meisenthal

Jeanne Barseghian et d’autres élus alsaciens de gauche appellent au « déstockage de Stocamine »

Jeanne Barseghian et d’autres élus alsaciens de gauche appellent au « déstockage de Stocamine »

Une partie des élus de gauche alsaciens, dont la maire de Strasbourg Jeanne Barseghian, signent une tribune dans Libération afin d’exiger que les déchets enfouis à Stocamine soient remontés et traités, avant qu’ils ne polluent la nappe phréatique.

Jeanne Barseghian, maire (EE-LV) de Strasbourg a signé une tribune pour demander que les 42 000 tonnes de déchets enfouis à 550 mètres sous terre à Stocamine près de Mulhouse soient remontés pour être traités, avant que l’ancienne mine ne s’effondre et que les déchets ne polluent définitivement la plus grande réserve d’eau potable d’Europe. Le texte, paru jeudi 20 juillet dans Libération, a été cosigné par d’autres élus de gauche dont Sandra Regol, députée (EE-LV) de la première circonscription du Bas-Rhin, Emmanuel Fernandes, député (LFI) de la deuxième circonscription du Bas-Rhin, Jacques Fernique, sénateur (EE-LV) du Bas-Rhin, Antoine Homé, maire (PS) de Wittenheim, Loïc Minery, vice-président (EE-LV) de Mulhouse Alsace agglomération (EE-LV) et Marcello Rotolo, conseiller régional (PS) et maire de Soultz.

L’objectif de cette tribune est de donner une stature nationale au débat sur Stocamine. Car bien que le gouvernement ait pris la main sur ce dossier en œuvrant pour un stockage définitif, bien peu de parlementaires ont conscience des menaces que cette décision fait peser sur les ressources en eau d’une bonne partie des Européens

Des travaux définitifs dès septembre

La tribune rappelle l’incendie souterrain à Stocamine en 2002, qui a mis fin au stockage de nouveaux déchets, et la dernière décision : un avis favorable de l’enquête publique pour un enfouissement définitif de ces déchets toxiques, malgré une opposition de 98% des voix exprimées. Les travaux devraient débuter en septembre, malgré des recours juridiques et une enquête en cours sur la légalité des déchets stockés.

Dans leur tribune, les élus alsaciens déclarent :

« Le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu devrait se prononcer en faveur d’un enfouissement définitif, ainsi qu’il nous l’a confirmé lors d’une récente rencontre. Nous, élues et élus de gauche en Alsace, faisons front commun pour nous opposer à l’enfouissement définitif des déchets dangereux de Stocamine qui menacent l’avenir de nos enfants et de nos écosystèmes. »

Les élus insistent sur les dangers méconnus d’une contamination de la nappe phréatique, notamment en raison de « l’effet cocktail » que produiront les déchets lorsqu’ils entreront en contact les uns avec les autres au fur et à mesure de l’affaissement des galeries. Selon eux, l’enfouissement définitif « méconnaît le principe, à valeur constitutionnelle, de précaution ».

Le Parlement européen accepte d’occuper le bâtiment Osmose, en location à l’État

Le Parlement européen accepte d’occuper le bâtiment Osmose, en location à l’État

Après des négociations qui ont duré plusieurs années, le Parlement européen a finalement accepté mercredi 19 juillet d’occuper le bâtiment Osmose. Financé et construit par les collectivités locales pour conforter le siège de Strasbourg, le bâtiment sera loué au Parlement européen à un prix très avantageux.

C’est officiel, le Parlement européen va enfin occuper les 15 000 mètres carrés (m²) du bâtiment Osmose, situé en face du bâtiment iconique au Wacken. Mercredi 19 juillet, les parlementaires européens réunis en commission des budgets ont voté en faveur de la location de ce bâtiment avec 26 voix pour, 11 contre et 3 abstentions.

Commandé et construit par le gouvernement français, la Région Grand-Est, la Collectivité d’Alsace (CeA), L’Eurométropole et la Ville de Strasbourg à partir de 2019 afin de conforter le siège du Parlement européen à Strasbourg, le bâtiment est resté vide depuis sa livraison en novembre 2021. Un deuxième immeuble, de 40 000 m² devrait être construit dans un second temps.

Le Parlement européen (à gauche) devrait donner sa décision le 6 juin à propos de la possible acquisition du bâtiment Osmose (à droite). Photo : Achraf El Barhrassi / Rue89 Strasbourg / cc

Les travaux du bâtiment Osmose ont été financés par les collectivités locales à parts égales, avec l’espoir que le Parlement européen rachète ces locaux. Ce sera finalement l’État qui achètera le bâtiment pour 53,5 millions d’euros, afin de le louer 700 000€ par an au Parlement européen, un tarif cinq fois inférieur au marché. Avec ce bail emphytéotique de 99 ans, Parlement dispose en outre d’une option d’achat, minorée du montants des loyers !

Strasbourg au cœur des décisions

Qu’importe les efforts des collectivités et de l’État français, puisque cet accord permet d’enfin occuper ce bâtiment et effectivement de conforter le siège du Parlement européen à Strasbourg, ce dont se félicite la maire dans un communiqué :

« Je me réjouis que le Parlement européen s’ancre encore davantage à Strasbourg, alors que nous fêtons cette année les 70 ans de son existence. En s’installant dans le bâtiment Osmose, le Parlement européen s’étend au cœur du quartier européen, Archipel 2, vitrine européenne de la ville de demain. »

Jeanne Barseghian, extrait du communiqué publié le 19 juillet.

À bout, les internes en chirurgie orthopédique de l’hôpital de Strasbourg cessent le travail

À bout, les internes en chirurgie orthopédique de l’hôpital de Strasbourg cessent le travail

Une vingtaine d’internes apprentis-chirurgiens ont cessé le travail au Centre hospitalier de Strasbourg depuis lundi. Épuisés, ils ne peuvent plus répondre aux trop nombreuses sollicitations des urgences.

Depuis lundi 17 juillet, 17 internes, futurs médecins en fin de formation initiale, affectés au Centre hospitalier universitaire de Hautepierre, ont cessé le travail. Ils ont été placés en arrêt maladie pour épuisement (burn out).

Le Syndicat autonome des internes d’Alsace (Saia) dénonce dans un communiqué diffusé jeudi 20 juillet une « détresse psychologique intense », résultat de « profonds dysfonctionnements organisationnels impactant la prise en charge des patients ».

Selon Clémence Guegan, présidente du Saia et interne en gynécologie, les obligations des gardes imposées aux internes en chirurgie orthopédique (traitement des déformations et des accidents du squelette et des muscles) les empêchent de mener leurs missions :

« L’emploi d’un internat en chirurgie est déjà très lourd, les gardes se superposent, pour des interventions qui pourraient largement être traitées par les médecins urgentistes eux-mêmes. Quand une personne vient aux urgences avec une entorse simple, un avis de l’interne orthopédique de garde n’est pas forcément nécessaire… »

Un fonctionnement qui a contraint un patient à attendre plus de huit heures qu’un interne puisse se rendre aux urgences pour une simple suture, détaille Clémence Guegan qui appelle à une amélioration dans le triage des patients aux urgences.

« Un suicide ferait bouger les choses ? »

Mais surtout, depuis le 2 mai, début du semestre des internes, le service SOS Main est en sous-effectif critique. Alors qu’il a besoin de six internes minimum pour assurer les gardes et de quatre autres internes pour les astreintes, le service ne pouvait compter que sur quatre internes au total… puis trois lorsque l’un d’entre eux a été placé en arrêt maladie.

Les gardes de SOS Main ont été fermées une semaine sur deux, avec des redirections vers la clinique Rhéna depuis cette date, mais une enquête du Saia auprès de ces internes a révélé d’importants dégâts liés à ce surmenage permanent, comme l’explique Clémence Guegan :

« On a posé des questions et 70% des internes en orthopédie ont admis être déprimés, tous étaient en grande souffrance avec notamment le sentiment de mal traiter leurs patients. L’un d’eux m’a demandé si “un suicide ferait enfin bouger les choses ?” On a alerté la direction générale sur l’urgence d’une solution pérenne, mais rien n’est venu. »

Alors qu’une reprise des gardes de SOS Main était prévue lundi 17 juillet, aucun des internes ne se sentait en capacité de reprendre cette charge de travail. Ils ont donc été placés en arrêt maladie « pour leur propre protection », détaille Clémence Guegan.

Contactés, les Hôpitaux universitaires de Strasbourg indiquent par écrit qu’une « réunion pluri-professionnelle est en cours sur le sujet », sans plus de précisions.

Cyclocamp du 21 au 30 juillet à Strasbourg, un festival international de la contre-culture vélo

Cyclocamp du 21 au 30 juillet à Strasbourg, un festival international de la contre-culture vélo

Le festival international de l’auto-réparation de vélo, aussi appelé « Cyclocamp », se tient pour la première fois à Strasbourg à partir du vendredi 21 juillet. L’évènement se présente comme un espace où les participants échangeront durant dix jours sur les pratiques et les savoirs autour du vélo.

Loin des sentiers du Tour de France, des passionnés de vélos convergent vers le parc Saint-Gall à Koenigshoffen, à l’ouest de Strasbourg, pour un festival international de l’auto-réparation de vélo, le « Cyclocamp », prévu du vendredi 21 au dimanche 30 juillet. Tel qu’imaginé lors de sa première édition à Ottensheim (près de Linz, en Autriche) en 2011, la douzième édition du Cyclocamp aspire à être un espace d’échanges autour de la culture cycliste.

Fabien, coordinateur du projet et membre du collectif Cambouis qui organise l’événement, développe :

« L’idée est de partager nos connaissances autour de la thématique du vélo. Il y aura bien sûr des ateliers de réparation, d’initiation, mais aussi des ateliers créatifs où l’on fabriquera des objets à partir de pièces de vélo, ou l’inverse, des ateliers qui proposeront de construire des vélos à partir d’autres objets. »

Aux abords de Koenigshoffen, installation du festival international cyclocamp, deux jours avant son ouverture. (Photo du collectif Cambouis).

Politiser le vélo

Partager des connaissances mais aussi des « problématiques », ajoute le membre du collectif. Le festival se veut être un espace où les cyclistes pourront confronter leurs différentes revendications et y apporter des solutions. Fabien prend l’exemple des pistes cyclables de l’avenue des Vosges et de la Forêt-Noire :

« On va pouvoir expliquer comment nous avons lutté pour les avoir et comment nous les avons obtenues. Ces rencontres permettront de réfléchir ensemble à comment faire avancer la législation, qui peut être très différente d’un endroit à un autre. »

Une lutte nécessaire pour le collectif, qui voit le vélo comme un outil d’émancipation et de réappropriation insiste Fabien :

« C’est un moyen pour transporter nos affaires, notre matériel, ou même des personnes. Le vélo apporte une sécurité de dingue aussi : on a beaucoup moins de chance de se faire emmerder dans la rue. Au-delà de ça, c’est l’un des rares objets dont on comprend réellement la mécanique et qu’il est assez facile de réparer. »

Un festival « auto-géré »

Le festival se fixe également pour objectif d’être le plus accessible possible. Tout fonctionnera sur la base du prix libre, une partie de l’alimentation sera végane et certains ateliers ne seront pas ouverts aux hommes par exemple :

« On va faire en sorte que chacun et chacune puisse trouver sa place, apprendre des choses ou bien les transmettre. On veut aussi laisser tout le monde libre de prendre des initiatives pour que les activités n’émanent pas seulement du collectif. »

Le tout dans un espace « auto-géré » où « chacun mettra les mains à la pâte », précise Fabien, qui n’omet pas de rappeler les concerts programmés pour les vendredi et samedi soir. Une ambiance musicale qui débutera dès la Vélorution organisée par Strasbourg à vélo vendredi avec un itinéraire qui se termine à l’entrée du festival.

« Dès que je sors le soir, j’ai l’impression de prendre un risque »

« Dès que je sors le soir, j’ai l’impression de prendre un risque »

Malgré des associations qui luttent contre les violences sexistes et sexuelles dans le monde de la nuit, et une multiplication d’initiatives locales, l’insécurité est toujours présente pour les femmes et les personnes LGBT+ qui sortent à Strasbourg.

« La dernière fois que j’étais en boîte, je me suis retrouvée un moment seule avec une amie, car les garçons qui nous accompagnaient étaient allés prendre l’air. On s’était mises sur le côté, dos à un mur pour faire une pause. Cinq garçons qu’on ne connaissait pas sont alors arrivés et nous ont encerclées », se rappelle Laura, une Strasbourgeoise de 24 ans qui a l’habitude de sortir en bar ou en boîte plusieurs fois par semaine. 

« Ils ont commencé à nous invectiver, à nous lancer des ”bah alors, on vous fait peur ?” et à en rire. On était très mal à l’aise. On leur a demandé de partir, mais ils continuaient à rire et se rapprocher. Finalement, on a eu besoin de les bousculer physiquement en leur donnant un coup d’épaule pour pouvoir s’extirper de la situation. Sur le moment, on a vraiment eu peur. On était en infériorité numérique et personne ne venait nous aider. »

Si la jeune femme associe ces sorties à des moments de détente et de loisirs, elle s’arrange souvent pour être accompagnée par des amis de sexe masculin, prévoit toujours son itinéraire de retour et reste sur ses gardes. « Je m’attends toujours à avoir au moins des remarques sur mon physique, mais ça peut aller jusqu’à la main aux fesses, à l’insulte ou a des moments beaucoup plus angoissants comme le jour où un homme à vélo m’a suivie pendant une dizaine de minutes à la sortie d’un bar », décrit la jeune femme.  

« On a un peu l’impression que tant que ce n’est pas un viol, ce n’est pas grave. Les autres comportements sont banalisés », se désole Laura. Photo : ACC / Rue89 Strasbourg

« Une accumulation de micro-agressions »

Pourtant, Laura ne signale presque jamais les auteurs de ces agressions, même si l’établissement dans lequel elle se trouve possède un videur :

« La dernière fois que je suis allée voir un vigile avec une amie parce qu’un homme n’arrêtait pas de la coller et de la toucher, il a dit qu’il n’avait rien vu et donc qu’il ne pouvait rien faire. On a un peu l’impression que tant que ce n’est pas un viol, ce n’est pas grave. Les autres comportements sont banalisés. Mais quand dix inconnus vous touchent la taille, ou vous font une remarque dans la même soirée, ça devient très lourd. On ne va pas porter plainte pour ça, mais l’accumulation de micro-agressions nous gâchent nos soirées. »

Depuis plusieurs années, la parole au sujet des violences sexistes et sexuelles dans les espaces publics s’est libérée, notamment grâce à des associations locales comme Ru’elles ou le compte Instagram Dis Bonjour Sale Pute. Photo : ACC / Rue89 Strasbourg / cc

Claire, jeune femme lesbienne de 22 ans, raconte également s’être retrouvée à plusieurs reprises dans des situations qui l’ont mise particulièrement mal à l’aise, sans vraiment savoir vers qui se tourner. Il y a un mois, elle s’est rendue dans un bar à rhum strasbourgeois avec sa copine, vers minuit : 

« On était en train de commander au comptoir – ça faisait à peine dix minutes qu’on était entrées – et un homme est arrivé derrière nous, nous a attrapé par les épaules puis a commencé à nous parler. On était déjà mal à l’aise qu’il nous touche sans notre consentement et par surprise. On lui a dit et il a fini par partir, mais au cours de la soirée, au moins cinq hommes se sont approchés pour nous fixer de manière très insistante, avec des sourires en coin assez explicites. Je ne me sens souvent pas en sécurité quand je sors. Ce soir-là, par exemple, on a eu peur qu’une des personnes nous suive à la sortie du bar. Ça m’est déjà arrivé. »

« Les videurs ne sont pas assez bien formés à ce type d’agression »

Alors que le moment devrait être festif, Claire raconte qu’elle reste toujours vigilante en gardant un œil sur son verre ou en le tenant. « Hors de question que je sorte fumer sans. J’ai déjà deux amies qui se sont fait droguer, dont une fois lors d’une soirée à laquelle je participais », raconte-t-elle. 

Elle et son groupe d’amis avaient alors décidé de tester un nouveau bar, le Blue Moon. « Elle s’est sentie mal d’un seul coup, elle avait du mal à bouger et a eu envie de vomir alors qu’elle n’avait pas beaucoup bu », se remémore-t-elle. Claire va lui chercher un verre d’eau et la retrouve dehors, isolée par un videur, en train de vomir. « Non seulement, il ne faisait rien pour l’aider, mais en plus, il voulait m’empêcher de la rejoindre, et même de lui donner l’eau. Le problème, c’est qu’ils ne sont pas du tout formés à réagir face à ce type de situation », déplore-t-elle.

La parole autour des violences sexistes et sexuelles (VSS) et des discriminations s’est beaucoup déliée ces dernières années. Si dans 91 % des cas, les viols ou les tentatives de viol ont été perpétrées par une personne connue de la victime, la rue et le monde de la nuit sont fréquemment dénoncés comme étant des lieux d’agressions qui rendent ces endroits hostiles pour une frange de la population.

Entre banalisation et résilience

De nombreuses personnes victimes de ces propos ou agressions mettent des parades en place. Eva, 24 ans, revient sur ces gestes qui sont devenus de petits rituels : garder son verre, sortir en nombre, aller dans des lieux identifiés comme « sûrs », s’assurer que toutes ses amies sont bien rentrées. « C’est triste de se rendre compte que c’est devenu normal de devoir vérifier que sa pote est toujours en vie et bien en sécurité chez elle à chaque sortie nocturne », laisse-t-elle échapper.

Eva souhaiterait que les personnels des établissements soient mieux formés et plus vigilants. Photo : ACC / Rue89 Strasbourg / cc

Maria, 31 ans, est fatiguée par ce que sortir en boîte ou en bar implique. Elle décline de plus en plus souvent les propositions de soirées :

« Même s’il ne m’arrive rien de grave, je suis souvent stressée, car je sais que je peux être importunée à tout moment. Par une remarque ou une insulte sur le chemin, puis avec une main aux fesses en boîte ou par un mec bourré qui va insister pour danser avec moi, alors que je lui ai déjà dit non. Je peux rajouter aussi le fait de devoir faire attention à mes copines pour pouvoir les aider si un mec ne veut pas les lâcher non plus. Tout ça accumulé, ça rend dingue. Dès que je sors, j’ai l’impression de prendre un risque. » 

De son côté, Laura refuse de limiter ses sorties, même si pour ça, elle a parfois l’impression de devoir occulter certains souvenirs : 

« Si je commençais à noter tous les moments pendant lesquels quelqu’un m’a emmerdée en soirée, je ne sortirais plus. Mais j’aime ça, donc je mets beaucoup de choses sous le tapis en espérant que ça s’arrangera et que le personnel des établissements sera enfin bien formé partout. »

Conscientes de cette situation, plusieurs associations réfléchissent à des outils pour éviter les agressions et améliorer l’ambiance des lieux publics. Dans de nombreux bars strasbourgeois, les femmes peuvent trouver, dans leurs toilettes, l’affiche du cocktail Mad’EMoiselle, mis en place depuis la rentrée 2020. 

Le fait de demander ce cocktail (qui est en réalité un nom de code) permet à toute personne témoin ou victime d’une agression, ou encore qui ne se sent pas à l’aise avec un rendez-vous, d’appeler à l’aide discrètement. Ce nom de code permet ensuite au personnel de l’établissement de pouvoir intervenir.

. Depuis l’année dernière, la mairie de Strasbourg a été choisie pour participer au programme européen SHINE, consacré à la prévention du harcèlement sexiste et sexuel sur les lieux de vie nocturnes et festifs.
À Strasbourg, plusieurs bars possèdent des affiches du cocktail Mad’EMoiselle et du programme européen qu’a rejoint la Ville consacré à la prévention du harcèlement sexiste et sexuel sur les lieux de vie nocturnes et festifs. (Photo ACC / Rue89 Strasbourg).

La mairie s’empare du problème

Cependant, ce type d’initiative ne semble pas suffire. Depuis 2022, la mairie de Strasbourg a été choisie pour participer au programme européen Shine, consacré à la prévention du harcèlement sexiste et sexuel sur les lieux de vie nocturnes et festifs. Des associations locales, la police, des gérants d’établissement nocturnes ou encore la CTS sont régulièrement conviés à des séminaires de discussion pour trouver des solutions. 

Pour l’instant, à part une première campagne de sensibilisation aux soumissions chimiques lancée fin 2022, le grand public n’a pas vu d’autres actions. Pour Nadia Zourgui, adjointe à la maire en charge de la tranquillité publique qui s’occupe du dossier, le rôle de la ville est surtout celui d’un chef d’orchestre :

« Nous avons de la chance d’être dans une ville dans laquelle beaucoup d’associations se sont saisies du problème. Notre rôle maintenant est de coordonner, de financer et de communiquer sur ces initiatives. Un appel sera bientôt lancé auprès des différentes associations afin de désigner un porteur de projet et d’allouer une subvention. »

Un état des lieux vient également d’être réalisé afin de recenser les potentiels partenaires et initiatives déjà mises en place. En parallèle, les restaurateurs, les gérants de clubs et de bars ont été contactés pour savoir s’ils seraient intéressés par une formation sur les violences sexistes et sexuelles. « J’ai été agréablement surprise de voir que certains d’entre eux mettaient déjà des choses en place », souligne l’adjointe. 

Une application pour identifier les lieux sûrs

C’est le cas de la nouvelle collaboration entre Ru’elles, qui lutte contre les violences sexistes et sexuelles dans les espaces publics, et Flag !, une association nationale qui regroupe des policiers et autres fonctionnaires du ministère de l’Intérieur et de la Justice, et qui lutte contre les violences anti-LGBT, sensibilise et forme le personnel au sein de ces ministères, pour améliorer la prise en charge des victimes. Ensemble, ces associations veulent installer à Strasbourg un réseau de « safe places », c’est-à-dire des zones sûres, recensées sur leur application.

« Nous participons à beaucoup de discussions avec la mairie. S’ils ont envie d’agir, pour le moment, ça traîne et cela reste flou. Comme on ne veut pas se contenter d’attendre, nous essayons aussi de développer des solutions qui pourront, peut-être, être reprises par la suite », décrit Tiphany Hue, créatrice de Ru’elles.

L’association strasbourgeoise Ru’elles et l’association nationale Flag! ont annoncé en mai 2023 la mise en place d’un partenariat autour d’une application pour identifier les « lieux sûrs » de la ville. (Photo DR Flag! et Ru’elle).

Tiphany Hue et Remy Butin, référent Grand Est de Flag !, ont donc déjà commencé à démarcher ensemble les commerces et établissements de Strasbourg. Depuis mi-mai, ils ont signé une vingtaine de partenariats explique ce dernier : 

« Nous les rencontrons pour leur proposer de rejoindre le dispositif “en lieu sûr”, résumé dans une convention qu’ils doivent signer. Ils s’engagent à apposer un macaron sur leur vitrine, sont géolocalisés sur notre application et doivent assurer un accueil respectueux aux victimes, leur proposer de joindre les secours et leur permettre de rester dans leurs locaux jusqu’à leur arrivée. »

Une formation pilote

Au-delà du monde de la nuit, des bars, boîtes et restaurants, d’autres établissements publics et commerçants seront démarchés pour permettre aux victimes d’agressions dans la rue, même en plein jour, de savoir vers qui se tourner rapidement. « Pour que ça change, il ne faut surtout pas minimiser ces actions. Beaucoup d’entre elles sont condamnables », rappelle Rémy Butin, qui a lui même porté plainte pour une agression homophobe dont il a été victime avec son copain au centre commercial des Halles.

Une fois la prise de contact établie, les signataires sont prévenus que Ru’elles proposera bientôt un module de formation sur la manière de réagir face à une agression, de récolter la parole des victimes, de rappeler quelles sont les peines encourues par l’agresseur, etc. Pour pouvoir proposer cette formation gratuitement, Typhany Hue est actuellement en contact avec la préfecture pour élaborer un premier module pilote qui pourrait être financé par l’État.

L’application permet également de signaler le lieu et l’heure de toute discrimination, soumission chimique ou violence conjugale. L’utilisateur est ensuite orienté vers les différentes possibilités officielles (dépôt de plainte, cellule d’écoute). 

« Les lieux sûrs, ça existe ! » 

Mais comment devient-on un « lieu sûr » ? À plusieurs reprises, le bar Les Berthom est revenu dans les endroits recommandés par les personnes interrogées. Anna, 25 ans, y est serveuse depuis près de six ans. Et elle se souvient très bien, dès son arrivée, son patron a abordé le sujet des propos et agressions sexistes : 

« Lors de la signature du contrat, il explique à chaque nouvel arrivant, surtout aux filles, que cela risque d’arriver. À nous, en tant que serveuses et aux clientes. Il ajoute tout de suite que nous ne devons pas laisser passer, que nous avons le droit de réagir si on nous parle mal ou si on nous met une main au cul, et qu’il faut le faire remonter directement au responsable présent. »

Anna a elle-même été victime de propos insultants et a décidé de porter plainte. « C’était un client qui venait souvent. Il avait des regards très lourds à mon encontre. Il n’arrêtait pas de me fixer, mais on ne peut pas grand-chose contre ça. » Puis un jour, il l’agresse verbalement :

« Ce n’était pas des compliments maladroits ou de la drague un peu lourde sur laquelle on ferme les yeux. Là, je me suis dit que je n’avais pas à subir ça. On a appelé la police et ils l’ont embarqué ». 

Cette fois-ci, même si la démarche peut prendre plusieurs heures, Anna a décidé de porter plainte. « Je vais y aller en dehors de mes heures de travail, mais mon patron m’a proposé de me rémunérer le temps que ça prendrait. »

Même vigilance du côté des clientes. Anna et ses collègues ont mis en place des stratégies pour désamorcer certaines situations, comme surveiller les hommes qui changent de table et vérifier si des clientes valident le fait qu’ils s’invitent auprès d’elles en leur faisant un petit geste discret. 

« Cela nous arrive également de prétexter que la table occupée par des clientes est réservée et qu’on va devoir les déplacer, si on voit que leur voisin de table commence à les mettre mal à l’aise. Cela permet d’éviter un conflit ouvert et de mettre les filles dans une situation encore plus angoissante. »

Selon la jeune serveuse, cette méthode fonctionne bien, car tous les employés, au service ou au bar, sont vigilants sur le sujet. « Cela fait partie de notre travail et ça devrait être le cas partout », conclut-elle.

Les salariés de Clestra organisent un rassemblement jeudi matin pour défendre leurs emplois

Les salariés de Clestra organisent un rassemblement jeudi matin pour défendre leurs emplois

En grève depuis trois semaines, les grévistes de l’entreprise Clestra à Illkirch-Graffenstaden appellent à un rassemblement devant la Direction régionale de l’économie, jeudi 20 juillet. Face au silence de leur direction, ils espèrent être reçus par un représentant de l’État.

Voilà trois semaines que l’usine de cloisons Clestra est à l’arrêt. Depuis 17 jours, une large partie de ses salariés se sont mis en grève, réclamant l’annulation d’un licenciement qu’ils jugent abusif et des réponses aux questions qu’ils portent sur l’avenir de leurs emplois, soupçonnant la direction de vouloir procéder à des suppressions de postes.

Pour obtenir des réponses, les grévistes se mobilisent ; après une médiation ratée avec l’inspection du travail, ils appellent désormais à un rassemblement devant la Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (Dreets) jeudi 20 juillet à 8h (un précédent appel mentionnait le tribunal et la préfecture). Les ouvriers espèrent qu’une délégation pourra être reçue par un représentant de l’État.

Dialogue social de sourds

Dès la reprise de la société Clestra, en octobre 2022 par le groupe Jestia, spécialisé dans la gestion d’Ehpad, les salariés se sentent maintenus dans le flou sur les intentions du groupe. Quelques mois plus tard, la holding propose à une quarantaine de salariés une rupture conventionnelle collective, que ces derniers refusent. S’ensuit un déménagement du site de la production, d’Illkirch-Graffenstaden au Port du Rhin, prévu pour 2024. Si ce départ était déjà prévu, les salariés découvrent que la surface du nouveau site sera bien trop petite pour accueillir toutes les lignes de production.

Les grévistes de Clestra, devant le siège de l’inspection du travail, lundi 17 juillet. Photo : Roni Gocer / Rue89 Strasbourg / cc

Dès lors, un climat de méfiance et de tensions s’installe durablement au sein de la société. Le licenciement d’un salarié le lundi 3 juillet, que les grévistes juste abusif et injuste, provoque un tollé et enclenche une nouvelle mobilisation. Ils sont en grève depuis cette date. Dans un communiqué diffusé par la section CGT, les salariés exposent leur colère :

« Le groupe Jestia, qui a repris il y a huit mois l’entreprise, refuse systématiquement de répondre aux
revendications légitimes des salariés, en matière d’emploi et de dialogue social. Pire, ils jettent de l’huile sur le feu en décidant en plein conflit social de changer le nom de l’entreprise et de P-DG ! Clestra, qui devait fêter cette année ses 110 ans, disparaît et devient Unterland Metal. Résultat : mécontentement et sentiment d’injustice sociale ne font que grandir, les salariés sont très en colère ! »

Pour le libéral Institut Montaigne, la municipalité écologiste a trop « dégradé les comptes publics »

Pour le libéral Institut Montaigne, la municipalité écologiste a trop « dégradé les comptes publics »

L’Institut Montaigne, un laboratoire d’idées libérales, relève que la municipalité écologiste a augmenté la dette publique, sans vraiment faire progresser la ville sur les marqueurs écologistes. Un bilan auquel réplique Syamak Agha-Babaei, premier adjoint à la maire en charge des Finances.

Dans un rapport publié mardi 18 juillet sur les bilans à mi-mandat des principales municipalités de France, le think-tank libéral Institut Montaigne dresse un état sévère de l’action des écologistes aux commandes de la Ville de Strasbourg depuis 2020.

Pour l’Institut Montaigne, les principales réalisations de l’équipe menée par Jeanne Barseghian sont la « gratuité des transports pour les jeunes », bien qu’il s’agisse d’une mesure mise en œuvre par l’Eurométropole, et « le lancement de la Zone à faible émission » (ZFE), une mesure également pilotée par l’Eurométropole mais surtout imposée par l’État. L’Institut Montaigne reconnaît « certaines avancées environnementales », dont le plan Canopée, crédité de 3 000 arbres plantés en « conformité avec l’objectif annoncé de 10 000 arbres », et la végétalisation de certaines cours d’écoles.

Pour l’Institut Montaigne, Jeanne Barseghian a trop dépensé depuis son élection (Photo Pascal Bastien / Rue89 Strasbourg).

Habituel rapport libéral à la dette publique

Mais l’Institut libéral trouve surtout inquiétante la « dégradation des comptes » de la Ville. Les auteurs déplorent que la municipalité écologiste ait « augmenté la dette de la collectivité de 11,7% », alors qu’elle avait « diminué de 5,6% en moyenne entre 2016 et 2019 ». L’Institut admet cependant que la dette par habitant de Strasbourg en 2021 est toujours « nettement en-dessous de celle des autres communes de la même taille ». Mais les auteurs s’alarment à propos de la capacité de désendettement de la collectivité, qui est passée selon eux de 5 années en 2019 à 7 années en 2021. Les auteurs estiment qu’en 2023, elle pourrait se rapprocher du « seuil d’alerte » de 12 années ! Dans leur conclusion, les auteurs du rapport estiment que « les dégradations de capacité de financement et la hausse prévue de la dette constituent un important point négatif du mandat de Jeanne Barseghian ».

Ces éléments font bondir Syamak Agha-Babaei, premier adjoint à la maire, en charge des Finances :

« Ce rapport est truffé d’erreurs et d’approximations, les auteurs ont confondu des chiffres et utilisé des méthodologies qui ne permettent pas d’effectuer des comparaisons. Sur la capacité de désendettement par exemple, personne ne projette des investissements à venir pour la calculer. Bien au contraire, on s’appuie sur les investissements réalisés, souvent inférieurs aux prévisions. Et notre capacité est dans la norme des villes de notre catégorie. »

Pour l’Institut, la municipalité ne prend pas assez en compte la dégradation sociale qui frappe les habitants de Strasbourg, avec « le troisième taux de chômage le plus élevé parmi les grandes métropoles de France (12,1%), l’augmentation des vols et violences dans les transports en commun (+8%, deux fois plus que la moyenne nationale) ». Une remarque qui permet à Syamak Agha-Babaei de pointer les incohérences du rapport :

« D’un côté, l’Institut Montaigne nous dit qu’on dépense trop et de l’autre, il nous accuse de ne pas aider les ménages les plus modestes. Nous avons investi beaucoup plus que l’équipe précédente, c’est un fait car nous pensons qu’il vaut mieux avoir une dette financière aujourd’hui qu’une dette sociale et écologique demain. »

Dernière du classement pour le bio dans les cantines

L’Institut Montaigne s’est aussi intéressé aux efforts des municipalités françaises pour augmenter la part d’ingrédients biologiques dans leurs cantines. Et là, « Strasbourg se classe dernière, loin derrière les autres villes » relate le document, alors même que « Jeanne Barseghian promettait dans son programme une alimentation 100% biologique et locale dans les cantines scolaires ».

Selon l’Institut, la part de bio servi dans les cantines strasbourgeoises n’est que de 30% en 2021, soit « le plus faible ratio des villes » analysées. Ouch. En outre, l’Institut relève que « le prix d’un repas en cantine pour une famille moyenne s’élève à 5,80€. Si ce prix est exactement le même qu’en 2020, au moment de l’élection, il n’en reste pas moins le plus cher de toutes les villes analysées. Un coût près de deux fois plus élevé qu’à Lille (2,61€), Nice (3,15€) ou Bordeaux (3,32€) ».

Syamak Agha-Babaei conteste ces calculs :

« Il y a dix tranches de prix, selon les revenus des familles, soit de 1,5€ à 6,5€ par repas. Le vrai prix moyen est de 3,49€. En outre, plus de la moitié des enfants de Strasbourg paient moins de 3,25€. Quant à la part de bio dans l’alimentation, elle progresse selon les capacités du marché. Nous ne faisons pas du bio s’il faut faire venir les ingrédients de l’autre bout de l’Europe. À la rentrée 2023, ce sera 50% des aliments et 100% du pain servis aux enfants. »

Quant à la transformation écologique de la ville, l’Institut Montaigne n’en voit guère les effets. « Entre 2020 et 2021, 1,7 hectares ont été artificialisés » à Strasbourg, le « chiffre le plus important de toutes les mairies EE-LV » – notent les auteurs, qui reconnaissent toutefois que ce chiffre « est en nette amélioration : une moyenne de 12,7 hectares avaient été artificialisés entre 2017 et 2019 ».

Dans les chapitres consacrés aux autres villes, les auteurs ont inclus des « commentaires de l’équipe municipale ». Strasbourg n’en a pas envoyé car, indique Syamak Agha-Babaei, « quand on a reçu leur questions, on a compris que le rapport était écrit à l’avance, avec des chiffres faux et une méthodologie douteuse. »

Stocamine : Alsace Nature lance un appel aux dons pour une contre-expertise

Stocamine : Alsace Nature lance un appel aux dons pour une contre-expertise

Après des années de bataille contre l’État et l’entreprise de stockage de déchets toxiques Stocamine, et alors qu’un arrêté préfectoral devrait être publié en septembre pour autoriser leur enfouissement, l’association Alsace Nature lance un dernier appel aux dons. Le but : opposer aux autorités une contre-expertise indépendante.

C’est une bataille sans relâche qui dure depuis octobre 2021. Stocamine, aujourd’hui, ce sont 42 000 tonnes de déchets toxiques (amiante, mercure, cyanure) qui sont enfouis dans les sols d’Alsace, mettant en danger la nappe phréatique rhénane, qui alimente sept millions de personnes en eau potable.

Alsace Nature se bat depuis des années en faveur d’un déstockage de ces déchets toxiques et dangereux, alors que l’État et Stocamine ne cessent de vouloir passer en force, dans le but de les y enfouir pour toujours.

L’entrée du site de Stocamine, à Wittelsheim, près de Mulhouse. (Photo TV / Rue89 Strasbourg / cc).

Malgré une première victoire juridique d’Alsace Nature en octobre 2021 en faveur d’un déstockage des déchets, l’État a tout tenté afin de construire un coffrage en béton (qui rendrait l’enfouissement définitif) en se pourvoyant en cassation.

Plus récemment, en janvier 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a donné raison à Alsace Nature et annulé partiellement le nouvel arrêté préfectoral qui autorisait les travaux nécessaires à l’enfouissement définitif des déchets toxiques. En avril 2023, le préfet du Haut-Rhin a rédigé un nouvel arrêté pour contester cette décision, et lance une enquête publique qui durera trois mois.

Une contre-expertise nécessaire mais trop couteuse

Le 26 juin 2023, le verdict tombe : les commissaires enquêteurs donnent finalement un avis favorable à l’enfouissement à durée illimitée des déchets, alors que 98% des 1 571 contributions à l’enquête publique expriment un avis défavorable.

Selon Alsace Nature, les seuls rapports d’expertise existants, recommandant d’enfouir les déchets toxiques de manière définitive, ont été demandés par l’État et Stocamine. C’est pourquoi l’association souhaite mener une contre-expertise, réalisée par des experts indépendants.

Quel avenir pour les déchets de l’ancienne mine de sel de Wittelsheim, comme ce Bigbag de déchet contenant de l’amiante, situé dans une galerie de stockage à – 500m ? Photo : Pascal Bastien / Divergence

N’ayant pas les moyens de financer seule cette nouvelle étude, Alsace Nature lance donc un appel à la contribution financière du public afin d’y arriver. L’association a besoin de réunir 38 000 euros afin de pouvoir mener à bien cette étude et la cagnotte se clôturera le mardi 31 octobre 2023.

La parution de l’arrêté préfectoral autorisant à nouveau les travaux d’enfouissement de déchets sur le site est prévue en septembre prochain. L’association souhaiterait pouvoir lancer et publier la conclusion de leur contre-expertise avant cette date.

Émilie Girard va diriger les musées de Strasbourg

Émilie Girard va diriger les musées de Strasbourg

Les musées de la Ville de Strasbourg, qui ont connu quelques mois mouvementés en 2022, vont changer de chef. Après Paul Lang, ils seront dirigés en janvier par Émilie Girard, qui vient du Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée de Marseille.

Dans un communiqué daté du 18 juillet, la Ville de Strasbourg annonce la nomination d’Émilie Girard, conservatrice en chef du patrimoine, en qualité de directrice de ses musées à partir du 1er janvier 2024, prenant ainsi la succession de Paul Lang, directeur des musées depuis 2017, qui a fait valoir ses droits à la retraite.

Émilie Girard, 44 ans, est directrice scientifique du Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (Mucem) à Marseille, un établissement où elle aura passé 17 ans et l’essentiel de sa carrière. Spécialisée en anthropologie culturelle et archéologie chrétienne, elle s’est diversifiée pour assurer, selon le communiqué, « le commissariat de plusieurs grandes expositions depuis 2013 parmi lesquelles La Galerie de la Méditerranée, Picasso – Un génie sans piédestal ».

Émilie Girard en 2021 (Photo Mucem).

Émilie Girard est en outre présidente du Conseil international des musées (Icom), une instance de coopération entre les musées publics à l’échelle mondiale. Selon la Ville de Strasbourg, les priorités d’Émilie Girard sont le « développement durable » et « le renouvellement des publics ». Strasbourg espère donc de sa nouvelle directrice, qu’elle saura « impulser la transformation de ce réseau de musées formé dès la fin du XIXe siècle, dans une logique vertueuse de mutualisation et de poursuivre cet héritage en l’inscrivant dans la période contemporaine ».

Contactée par Rue89 Strasbourg, Émilie Girard précise :

« Il y a de très importants chantiers à mener pour se conformer aux impératifs écologiques. C’est en outre le moment de le faire : tout le monde est bien conscient des enjeux et demande des décisions en ce sens. J’ai également axé ma candidature sur des efforts à apporter en faveur de l’inclusion et de la diversité des publics. »

Ses chantiers immédiats seront la réouverture du Musée zoologique, en partenariat avec l’Université de Strasbourg, et la politique des expositions temporaires. Mais elle devra aussi trouver des solutions pour régler les problèmes de personnel aux musées, qui les empêchent d’ouvrir en continu les jours de semaine, et le recours trop fréquent aux vacataires. Des enjeux qui n’ont pas rebuté Émilie Girard qui s’avoue en revanche enthousiasmée par le « très vaste éventail et la qualité des collections des musées de Strasbourg ».

Les musées de Strasbourg comprennent onze établissements, dont le musée d’art moderne et contemporain (MAMCS), le musée des beaux-arts, le musée des arts décoratifs, mais aussi le musée de l’Œuvre Notre-Dame, le musée historique et le musée alsacien.

L’État va subventionner une ligne aérienne Strasbourg – Berlin

L’État va subventionner une ligne aérienne Strasbourg – Berlin

Selon L’Informé, une nouvelle ligne aérienne subventionnée par l’État va relier Strasbourg à Berlin.

L’Informé fait état dans un article du mardi 18 juillet d’un appel d’offres de l’État datant du 16 juin pour « concéder à un transporteur aérien (…) le droit d’exploiter à titre exclusif ces services aériens à compter du 1er octobre 2023″ entre Strasbourg et Berlin.

Cette ligne aérienne entre les deux villes distantes de 750 kilomètres avait été abandonnée en 1999 selon L’Informé, faute de trafic. Elle devrait donc renaître grâce à des fonds publics : 4,5 millions d’euros puisés dans le Contrat triennal Strasbourg capitale européenne pour une liaison qui assurera deux allers-retours par semaine, 46 semaines par an.

Une enveloppe de 189 millions d’euros

Ce dispositif entre l’État, la Région Grand Est, la Collectivité d’Alsace, l’Eurométropole et la Ville de Strasbourg, doté de 189 millions d’euros pour les années 2021 à 2024, vise à financer des projets devant conforter le statut européen de Strasbourg. L’objectif affiché est donc de permettre aux parlementaires européens et à leurs équipes d’utiliser cette ligne pour se rendre aux sessions plénières à Strasbourg, une fois par mois. Deux autres lignes sont ainsi subventionnées vers Amsterdam et Madrid.

Selon L’Informé, le Parlement européen a soutenu le projet mais pas l’Allemagne, qui laisse la France subventionner seule cette ligne aérienne. Avec 96 eurodéputés, l’Allemagne envoie le plus gros contingent au Parlement européen, mais la vaste majorité d’entre eux rechigne à se rendre à Strasbourg et préférerait rester à Bruxelles, près de la Commission européenne.

Cette information survient alors que Strasbourg semble avoir perdu sa place sur une future ligne ferroviaire à grande vitesse entre Paris et Berlin au profit de Sarrebruck.

Vélorution « inter-quartiers » restreinte aux pistes cyclables vendredi 21 juillet

Vélorution « inter-quartiers » restreinte aux pistes cyclables vendredi 21 juillet

L’association Strasbourg à vélo organise une manifestation à vélo, appelée vélorution vendredi 21 juillet. Mais pour la première fois, le trajet – qui initialement devait passer par plusieurs axes inadaptés aux cyclistes selon l’association – doit se confiner aux pistes cyclables.

Vendredi 21 juillet à 17h30, une manifestation à vélo doit passer par cinq grands axes de circulation strasbourgeois, afin d’y dénoncer des aménagements inadaptés à la circulation cycliste. Cette vélorution, la quatrième de 2023 mais la première reliant plusieurs quartiers, est organisée par Strasbourg à vélo (SAV), une association née de l’organisation des précédentes vélorutions.

Une vélorution en juillet 2015 Photo : Christine Viale / Alternatiba / cc

Le parcours devait relier la passerelle des Deux-Rives à Koenigshoffen en passant par « les différents axes identifiés qui comportent des failles en matière de sécurité ou de confort pour les vélos », résume Alice Griffard, membre de SAV :

« Le boulevard Poincaré, l’avenue du Rhin… Ce sont des axes très structurants à Strasbourg et certains tronçons manquent de pistes cyclables, ou bien ces pistes existent mais elles ne sont pas suffisamment larges et sont parfois coupées par la circulation des voitures. »

Ce rassemblement de cyclistes se veut revendicatif mais aussi festif. Strasbourg à vélo espère une « déambulation joyeuse qui sera largement sonorisée », prévoit Benoît Écosse, le secrétaire de l’association, avec la promesse d’une surprise à l’arrivée.

Le tracé initialement prévu par Strasbourg à vélo, de la Passerelle des deux rives à Koenigshoffen Photo : Document issu du site de l’association

Un itinéraire stratégique

Les précédentes vélorutions ne se concentraient que sur un axe ou un quartier en particulier. L’itinéraire de vendredi devait mettre en évidence plusieurs difficultés majeures pour les cyclistes. Mais le trajet déposé à la préfecture a été retoqué, la manifestation devant « emprunter les voies cyclables » selon les autorités. Alice de SAV déplore :

« C’est la première fois qu’on nous demande de modifier tout le trajet afin de “ne pas gêner la circulation automobile.” En n’utilisant que les pistes cyclables, on perd le principe même d’une vélorution. »

En choisissant de manifester sur cinq axes de circulation, SAV voulait démontrer la dangerosité des intersections de l’avenue du Rhin, le partage futur des trottoirs de l’avenue des Vosges – après leur réaménagement lié à l’extension du tram nord, l’utilisation de la voie de bus le long boulevard du Président-Wilson… Quant à la route des Romains, « l’aménagement ne laisse que 80 centimètres de large pour les vélos et n’est plus en capacité d’absorber un flux cycliste de plus en plus important » selon Alice de SAV qui ajoute :

« L’itinéraire que nous avions préparé était symbolique et synthétisait les revendications que nous portons depuis des années. Nous voulons des infrastructures sûres mais aussi suffisamment larges, afin qu’elles puissent être utilisées par tous, comme les vélo-cargos par exemple. C’est à partir de ces nouveaux usages qu’il faut penser. On milite pour que chacun ait sa place. »

Selon le palmarès 2021 de la Fub, la Fédération des usagers de la bicyclette, Strasbourg n’occupe plus que la deuxième position nationale.

Samedi 22 juillet, le centre de Strasbourg occupé par une Grande braderie « sans vedettes »

Samedi 22 juillet, le centre de Strasbourg occupé par une Grande braderie « sans vedettes »

La 63e édition de la Grande braderie de Strasbourg se tiendra samedi 22 juillet dans toutes les rues et sur toutes les places de la Grande-Île. Organisée par les Vitrines de Strasbourg et les commerçants non-sédentaires, la braderie mobilise 400 commerçants.

Ce n’est pas la plus grande braderie de France mais presque : samedi 22 juillet de 7h30 à 19h30, 400 commerçants seront installés dans tout le centre-ville de Strasbourg, les étals des « non-sédentaires » s’ajoutant aux boutiques. Des vendeurs particuliers seront également présents place Broglie. L’événement attire chaque année autour de 100 000 visiteurs.

braderie (photo les vitrines de Strasbourg / cc)
Chaque année, la Grande braderie de Strasbourg attire environ 100 000 visiteurs Photo : Vitrines de Strasbourg / doc remis

Pour l’édition 2023, « pas de vedettes, le budget ne le permet pas », déclare Émilie Dufour, directrice des Vitrines de Strasbourg, l’association des commerçants du centre-ville, qui co-organise l’événement :

« La Ville de Strasbourg ne subventionne pas l’événement, contrairement aux années précédentes. En conséquence, nous devons prendre en charge entièrement le budget de la sécurité, qui s’élève à 50 000€. C’est dommage car l’événement profite à toute la ville, mais c’est un choix politique. »

Menaces sur l’édition 2024

Un changement qui en appelle d’autres puisqu’en 2024, la Grande braderie risque de ne pas avoir lieu. Les agents de sécurité, mobilisés par les Jeux olympiques, pourraient ne plus être disponibles. Ce serait l’occasion de « réfléchir et repenser l’évènement », selon Émilie Dufour afin de « diminuer la facture ».

Des concerts de l’orchestre folklorique Perle sont tout de même prévus samedi à partir de 11h place Gutenberg, à 14h30 place du Temple-Neuf et à 16h dans la rue du 22-Novembre.

Comme chaque année, le centre-ville ne sera pas desservi en transports en commun samedi 22 juillet jusqu’à 22h30. Certaines lignes de bus seront déviées de leurs itinéraires au centre-ville dès le vendredi 21 juillet à partir de 22h. En outre, les transports en commun ne seront pas gratuits ce jour-là, comme cela avait pu être le cas en 2022. De plus, les parkings Gutenberg, Kléber et Broglie seront fermés à partir de 4h30 le samedi 22 juillet et jusqu’à 1h le dimanche 23 juillet.

Plan des transports pour la journée de la Grande braderie ce samedi 22 juillet. Photo : Image CTS