112 jours après l’attaque du Hamas, le collectif Palestine 67 appelle à une manifestation à Strasbourg en faveur d’un cessez-le-feu à Gaza. Elle est prévue samedi 27 janvier 2024, dès 14 heures place Dauphine, devant le centre commercial Rivétoile.
La Bande de Gaza est bombardée par l’État d’Israël depuis près de quatre mois, suite aux attaques du Hamas contre des civils israéliens le 7 octobre 2023. Comme chaque samedi depuis le 28 octobre, la collectif Palestine 67 appelle à une mobilisation pour demander un cessez-le-feu.
Elle commencera à 14 heures devant le centre commercial Rivétoile pour se terminer place Kléber, en passant par la place de la Bourse, puis la Krutenau et le pont du Corbeau.
Les communistes rejoignent l’appel
Un appel auquel se joint le Parti communiste du Bas-Rhin, dans un communiqué diffusé le 25 janvier :
« Les communistes bas-rhinois manifesteront aux cotés des partisans de la paix, pour obtenir d’urgence le cessez-le-feu, l’ouverture d’un processus de paix juste et durable, l’arrêt des exactions de l’armée israélienne et de celles des colons en Cisjordanie, la levée du blocus, la suspension de l’accord UE – Israël, ainsi que la libération de tous les otages civils et des prisonniers politiques palestiniens. »
La militante strasbourgeoise Perrine Olff-Rastegar sera elle aussi présente, après avoir été interdite de manifestation depuis le 13 octobre 2023. Elle avait été poursuivie pour avoir organisé une manifestation de soutien à la Palestine, qui avait été interdite par la préfecture. Elle a été relaxée par le tribunal correctionnel lundi 22 janvier.
Jeudi 25 novembre, une cinquantaine de membres de Palestine 67 se sont rassemblés devant le consulat des États-Unis à Strasbourg, entre midi et deux. « Toujours pour demander un cessez-le-feu », explique Hervé Gourvitch, porte-parole du collectif.
Au niveau national, le gouvernement français a annoncé continuer de vendre des armes à l’État d’Israël malgré une alerte de différentes ONG appelant à cesser ces transactions. L’Organisation des nations unies, de son côté, a échoué à faire adopter par le Conseil de Sécurité une résolution appelant à un cessez-le-feu – les États-Unis ayant fait usage de leur veto.
La Collectivité européenne d’Alsace envisage la construction d’un nouveau stade de biathlon au Champ du Feu pour quatre millions d’euros. Un projet dispendieux, anachronique, et inopportun pour trois collectifs.
La Collectivité européenne d’Alsace (CeA) porte et soutient un « Projet de modernisation et de reconversion à l’année, du domaine nordique et pédestre du site du Champ du Feu », pour un montant d’environ huit millions d’euros de fonds publics, dont quatre millions seront consacrés à la création d’un stade moderne de biathlon.
Ce projet est présenté comme une modernisation du domaine vosgien, pour une attractivité touristique et sportive à l’année, avec une accentuation du développement des activités hivernales et de l’hébergement.
Nous, signataires de cette tribune, considérons ce projet comme anachronique et inopportun à plusieurs titres. Il perpétue un modèle socio-économique et touristique d’un autre temps au regard de l’évolution des conditions de la vie humaine sur notre planète, et de la pression dégradante qu’exercent les activités humaines sur l’ensemble du monde vivant.
Aucun besoin réel
Pour la construction d’un stade moderne de biathlon, avec une trentaine de postes de tir, nous n’avons pas connaissance d’études étayant l’utilité réelle énoncée. La CeA explique qu’il répond à des besoins, sans les avoir mesurés, évalués, ni justifiés.
Ce projet est démesuré au regard de la dimension confidentielle de cette discipline, qui n’a que 28 licenciés dans le Bas-Rhin (environ 800 en France), et impose des règles de pratique contraignantes (un encadrement sécurisé dans un cadre strictement associatif).
Par ailleurs, la discipline bénéficie déjà d’infrastructures, à La Bresse en zone sud-vosgienne, où elle est davantage implantée. Et pour sa pratique, l’élite sportive de la discipline s’éloigne davantage, vers des massifs français plus enneigés.
La pratique hivernale du biathlon nécessite un enneigement suffisant et régulier. Or celui-ci n’est plus au rendez-vous et le sera de moins en moins. De nombreuses stations de skis ferment ainsi régulièrement en France, et ce mouvement va s’accentuer dans les années à venir.
L’implantation supplémentaire de canons à neige dans la station n’est pas prévue, décision dont nous nous réjouissons bien sûr. Mais ce double handicap ne fait que révéler davantage l’aberration de la construction d’un tel ouvrage qui mettrait plusieurs hectares de forêts en péril.
La programmation de compétitions nationales ou internationales pour rentabiliser l’investissement est ainsi caduque, les conditions à garantir pour la bonne tenue de ces manifestations (la neige encore !) étant très contraignantes.
Cette activité ne pourra donc pas se pratiquer spontanément par le grand public hors du cadre associatif. C’est pourtant cette pratique tout public à vocation « 4 saisons » qui est espérée par les promoteurs du projet pour favoriser la découverte et l’initiation à la discipline et améliorer l’offre de loisir de la station.
Comment ? En pratiquant du ski à roulette « à sec » sur un tracé goudronné, qui s’imposerait dès lors après des tailles franches de la forêt et en artificialisant une importante surface de celle-ci.
L’offre « 4 saisons » en cause
Relevons aussi que la pratique du ski à roulette est compliquée et dangereuse sur des surfaces humides, verglacées, ou encombrées de débris apportés par le vent, les arbres du couvert du tracé, et les conditions météo tumultueuses d’altitude. Seuls les rares licenciés aguerris à la discipline, biathlètes comme skieurs de fond, seraient susceptibles d’en profiter.
Quelles sont par ailleurs les perspectives de développement du biathlon qui justifieraient cet investissement ? Quelles garanties le comité du Bas-Rhin de ski est-il en mesure de présenter ? Comment l’association compte-t-elle accroitre le nombre de ses licenciés et les cadres pour assurer une animation permanente du stade ?
Une offre « 4 saisons » nécessiterait en effet des animateurs sportifs qualifiés, pour louer les skis et les carabines, ainsi que pour encadrer à l’année les pratiquants novices s’initiant à la discipline. Qui financera ces charges ? Comment envisager l’accès, l’usage, et l’entretien de cette infrastructure à l’année ? Y aura-t-il des utilisateurs en dehors des vacances scolaires et des week-ends ? Peut-on espérer une fréquentation en journée sur le temps scolaire ? En soirée sans éclairage ? Sans canons à neige ? Hors période d’enneigement ?
Nos deux propositions alternatives
Nous proposons deux solutions alternatives à la construction d’un nouveau stade de biathlon :
Premièrement, la rénovation du stade actuel de biathlon nous semble être la solution à privilégier sur son terrain naturel actuel, sans y réaliser de pistes « en dur ». Puisqu’il existe, utilisons le pour les quelques licenciés bas-rhinois.
Deuxièmement, la construction d’une installation en basse altitude (plaine ou contrefort des Vosges) pourrait être une solution alternative ou complémentaire à la rénovation du stade existant ; elle pourrait s’envisager sur un espace en friche ou à réhabiliter, sans nouvelle artificialisation de terres.
Grande densité d’habitants et de communes dans le Bas Rhin ; temps de déplacements réduits (par rapport à la durée d’un déplacement vers le Champ du Feu), proximité géographique de nombreux clubs de ski et de tir dans le département… sont autant de conditions réunies qui pourraient favoriser la découverte et l’initiation à la discipline ; ainsi qu’une continuité d’entraînement pour les compétiteurs. L’accès des établissements scolaires à cette installation est une autre piste qui ne manquerait pas d’apporter des opportunités supplémentaires d’initiation et de découverte de ces sports. L’ouverture à d’autres disciplines sportives compléterait l’offre, tel le roller, démunies à ce jour d’installation permettant leur développement.
De telles conditions seraient propices à une « continuité quatre saisons » de la pratique de cette discipline, à la fidélisation de nouveaux pratiquants, ainsi qu’à un usage continu d’un nouveau stade plus en cohérence avec les moyens financiers que la Collectivité d’Alsace envisage d’investir aujourd’hui.
Nous appelons le président Frédéric Bierry et la collectivité alsacienne dans son ensemble à revenir sur les options actuellement à l’étude, en considérant nos observations et propositions. Ce projet, comme de nombreux autres, arrive trop tard dans sa phase de discussion, occultant tout débat sur son opportunité, ses caractéristiques et son coût.
La seule consultation des promoteurs et demandeurs d’aménagement, et des acteurs économiques qui voient dans le projet un intérêt personnel ou économique, ainsi que le format très publicitaire et valorisant des temps d’information de la CeA, ne sont pas satisfaisantes.
Pour un partenariat de qualité, où l’autorisation et l’acceptation du dissensus est le meilleur garant de la démocratie, nous déplorons la non reconnaissance de l’apport singulier et citoyen des associations et collectifs que nous représentons, des habitants des communes environnantes non consultés pour ce projet, des associations environnementales, des chercheurs en sciences sociales et environnementales, avec leurs idées, leurs dynamiques et initiatives et leurs compétences respectives.
En octobre 2023, la préfète du Bas-Rhin a interdit plusieurs rassemblements de soutien au peuple palestinien. Trois mois plus tard, elle autorise le blocage d’une autoroute pendant 24 heures. Mais Josiane Chevalier le jure : elle ne « fait pas de politique ». « Je rappelle que le droit de manifester est un droit constitutionnel et que nous faisons tout pour respecter ce droit. »Interrogée sur le blocage de la M35 pendant plus d’une journée par les agriculteurs à l’issue d’une conférence de presse mercredi 24 janvier, la préfète du Bas-Rhin s’est montrée particulièrement attachée aux libertés individuelles. Une déclaration surprenante quand on se souvient des trois rassemblements de soutien au peuple palestinien interditsau courant du mois d’octobre 2023. De quoi donner l’impression d’une inégalité de traitement dans l’attitude de la préfecture face aux déclarations de manifestation.
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Le blocage des agriculteurs sur la M35 a pris fin ce jeudi 25 janvier. La FDSEA et les Jeunes agriculteurs annoncent qu’ils appelleront à la mobilisation s’ils jugent les prochaines annonces du gouvernement insuffisantes.
Après une nuit passée dans le froid à dormir dans leurs tracteurs et des remorques aménagées, les agriculteurs remballent. Le blocage de l’autoroute M35, décidé par la Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles (FDSEA) du Bas-Rhin et les Jeunes Agriculteurs (JA), s’est terminé ce jeudi à 15h, mettant fin à 24 heures de barrage. La décision a été votée à main levée par les représentants syndicaux.
Dialogue positif niveau local
Après une rencontre avec le secrétaire général de la préfecture du Bas-Rhin, vers 13h, les représentants de la FDSEA et des JA sortent satisfaits, et annoncent dans la foulée qu’ils pourraient lever le barrage. La décision est votée, quelques heures plus tard. Le secrétaire général des Jeunes agriculteurs 67, Thomas Lux, revient sur la fin du blocage :
« On a décidé de lever le camp pour deux raisons. D’abord, on a eu des avancées au niveau local, pour des problèmes très précis, touchant certains agriculteurs individuellement. De manière plus globale, la préfète nous a assuré que le Bas-Rhin suivrait les règles nationales et qu’il n’y aurait pas de mesures plus dures appliquées localement.
À l’instar de la FDSEA, le représentant des JA prône une retraite prudente. « On attend quand même les annonces de Gabriel Attal, qui arriveront demain. Si celles-ci ne sont pas satisfaites, on se mobilisera de nouveau. »
Une hausse de 10% du volume d’irrigation
Les syndicats ont pu obtenir certaines avancées suite à un échange avec le secrétaire général de la préfecture du Bas-Rhin, Mathieu Duhamel. Gérard Lorber, secrétaire général de la FDSEA 67, revient sur cet accord :
« On a un volume d’irrigation théorique prévu pour tout le Bas-Rhin, qui est imposé par la préfecture. Si l’on puise dans les rivières, on est limité directement par ce volume alors même que la situation n’est pas critique pour le cours d’eau. On a réussi à obtenir une hausse d’environ 10% de ce volume d’irrigation. »
Les agriculteurs bas-rhinois ont aussi été satisfaits concernant la conversion des prairies naturelles en terres agricoles. Jusqu’à maintenant, pour chaque prairie transformée en champ, les agriculteurs devaient recréer une surface de prairie plus importante. Selon Gérard Lorber, ils sont désormais autorisés par la préfecture à mettre en place une prairie aux mêmes dimensions que celle détruite.
Départ des tracteurs devant la DDT
En parallèle, une soixantaine de membres de la Coordination rurale s’étaient rassemblés devant la Direction départementale du territoire (DDT) à Strasbourg, dès 10h30 ce jeudi. Pour marquer ses différences avec la FDSEA, le syndicat avait organisé sa propre mobilisation. Une quinzaine de tracteurs bloquait la rue Pierre-Montet. « Les fonctionnaires de la DDT connaissent le dossier et comprennent notre mécontentement, ils ont fait remonter nos revendications », résume Germain Krantz, trésorier de l’organisation. « Maintenant, on attend les mesures prises au niveau national pour décider d’une nouvelle mobilisation. »
Vers 15h15, la quinzaine de tracteurs rassemblée devant le bâtiment quitte la DDT et repart à coup de klaxon.
La Confédération paysanne organise sa manifestation
De son côté, la Confédération paysanne, un autre syndicat agricole représentatif, appelle à manifester mardi 30 janvier à 16h place de la gare à Sélestat. « Nous appelons les personnes qui souhaitent un autre modèle agricole à nous rejoindre », annonce Pierre-Luc Laemmel, éleveur de poules, maraîcher et porte parole du syndicat. Il considère important d’avoir d’autres revendications que celles de la FNSEA :
« Nous sommes d’accord avec les revendications sur la rémunération des agriculteurs. Même en circuit court c’est difficile aujourd’hui, à cause du coût de l’énergie. Mais pour nous l’agriculture productiviste, notamment portée par la FNSEA, piège les agriculteurs dans un modèle absurde où ils sont dépendants des prix du marché, d’investissements lourds pour adapter leur outil de production et de charges importantes, avec par exemple le prix des pesticides qui augmente. Nous défendons un tout autre modèle, avec une agriculture paysanne, ayant pour objectif la production d’aliments de bonne qualité et pas juste de répondre aux besoins de l’agro-industrie. »
Pour mettre fin à la crise, le Premier ministre Gabriel Attal devrait faire des annonces ce vendredi 26 janvier, lors d’un déplacement avec le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau.
En opposition à la loi immigration, adoptée le 19 décembre par le parlement et examinée par le Conseil Constitutionnel, une vingtaine d’étudiants et étudiantes bloquent le bâtiment de la faculté de droit de l’Université de Strasbourg.
« En tant qu’étudiante, c’est mon seul moyen d’action. » Jade est étudiante en troisième année de cinéma à l’Université de Strasbourg. Jeudi 25 janvier 2024, elle fait partie des militantes et militants mobilisés pour contester la loi immigration, votée le 19 décembre 2023 et examinée depuis par le Conseil Constitutionnel. C’est la deuxième fois que les étudiants de Strasbourg bloquent l’université pour contester la loi.
« On a choisi de bloquer la faculté de droit »
Le Conseil constitutionnel doit rendre aujourd’hui sa décision concernant la conformité de la loi à la Constitution française. Sa décision est attendue après 16h30. « C’est pour cela qu’il y a un appel national à la grève », explique Jade.
« On a choisi de bloquer la fac de droit, notamment car elle est prisée par le syndicat étudiant l’UNI, accusé de publier des communiqués islamophobes. »
Jade, étudiante en 3ème année de cinéma
À ses côtés, Lucile acquiesce. « Les mobilisations contre les lois racistes sont toujours compliquées », entame l’étudiante. Même si elle n’est pas concernée par les mesures de la loi, des personnes de son entourage pourraient l’être : « Je ne comprends pas qu’on ne soit pas plus largement mobilisés, sur le campus. »
Une caution dénoncée par le président Deneken
Une des mesures de la loi prévoit de soumettre la délivrance de certains titres de séjours étudiants au versement d’une caution. Cette dernière servirait à financer le renvoi de la personne dans son pays d’origine si elle tentait de se maintenir en France après la fin de validité de son titre de séjour. Le président de l’université de Strasbourg, Michel Deneken, a lui-même signé une tribune dénonçant cette mesure.
Bartu est étudiant étranger, originaire de Turquie. Pour lui aussi, ce blocage « est le seul moyen de résister ». Il dit avoir « suivi de près » les travaux autour de la loi immigration. « Je respecte les revendications de la droite, mais il faut garder à l’esprit l’importance de l’éducation supérieure dans le rayonnement international de la France », estime-t-il.
En tout début de semestre, il précise que bloquer un bâtiment « n’est pas un gros sacrifice ». D’autant plus que cette faculté est rarement bloquée, ce qu’il déplore : « À la fac de droit, on reste trop neutres sur ces questions qui intéressent tout le monde, on devrait être plus politiques ».
Dans les cortèges de tracteurs qui ont convergé vers Strasbourg pour bloquer la M35 mercredi 24 janvier, les agriculteurs se sont confiés sur leur baisse de revenus. Ils dénoncent des prix de vente qui diminuent, une concurrence avec des pays aux normes moins contraignantes et des augmentations de charges.
La main sur le volant de son tracteur Fendt 514, Steve Conrad avance doucement sur l’autoroute A4 à proximité de Bischheim. L’impressionnante machine arbore le drapeau de la FDSEA. Le syndicat majoritaire chez les exploitants agricoles a appelé à une mobilisation ce mercredi 24 janvier, avec les Jeunes Agriculteurs.
En milieu d’après-midi, Steve évoque l’avenir de sa fille, la gorge serrée. Elle veut reprendre l’exploitation familiale. Lui est partagé :
« Parfois, j’hésite à lui dire de trouver un autre métier. Aujourd’hui, je travaille 70 heures par semaine pour un Smic, avec tout le stress qu’il y a en plus pour que les récoltes fonctionnent et que les prix de vente ne baissent pas trop… »
Steve Conrad serait heureux de voir sa fille exercer le métier d’agricultrice dans de bonnes conditions.
De nombreux jeunes en formation ou en tout début de carrière participent à la mobilisation qui verra 500 personnes converger vers la capitale alsacienne depuis tout le Bas-Rhin pour bloquer la voie M35. Célia Henches, en BTS pour apprendre à conduire une exploitation, confie que « c’est effrayant de se lancer dans un métier sans savoir s’il sera possible de l’exercer dans de bonnes conditions et être payé à la hauteur des efforts fournis ». Son but : reprendre la ferme familiale et diversifier les cultures pour s’adapter au réchauffement climatique. Célia Henches est étudiante en BTS stratégie d’une exploitation agricole.
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À l’appel des syndicats d’exploitants agricoles FDSEA et Jeunes Agriculteurs, 500 personnes venues avec 400 tracteurs ont entamé un blocage de 24 heures de la M35 à Strasbourg. Ils dénoncent leurs faibles rémunérations et les normes qui les empêchent, selon eux, de rendre leurs exploitations rentables.
Ils comptent rester 24 heures, au moins. Plus de 500 agriculteurs, rassemblés par les syndicats FDSEA et les Jeunes Agriculteurs, bloquent une partie de la métropolitaine 35 derrière la gare de Strasbourg depuis le mercredi 24 janvier à 15h. Localement, ils dénoncent un accès de plus en plus restreint à l’eau pour irriguer leurs cultures, du fait des arrêtés préfectoraux pris pendant les périodes de sécheresse. Mais ils expriment aussi leur colère face à la concurrence « déloyale » de pays où les normes sociales et écologiques sont moins contraignantes. Les denrées alimentaires qui y sont produites sont ainsi vendues à des prix plus bas. En Alsace comme ailleurs en France, de nombreux exploitants agricoles se sentent incapables de faire face sur le marché mondial.
Rue89 Strasbourg a suivi leur premier jour de mobilisation en direct. Partis du Comptoir Agricole de Vendenheim à 14h, les manifestants de Brumath ont retrouvé leurs camarades du sud du département sur la M35 à Strasbourg peu avant 16h. Entamant l’acte 2 d’une mobilisation initiée en novembre 2023, les agriculteurs ont mis en place des tentes, des abris et des espaces de restauration sur la voie métropolitaine bloquée à la circulation. Retour, en photos, sur l’installation du blocage.
Cinq syndicats alsaciens participent à la journée de mobilisation pour défendre l’éducation publique « en danger » le jeudi 1er février. Tamar Bouissou, secrétaire départementale du syndicat enseignants de Force Ouvrière (SNFOLC), fait le point sur la mobilisation à venir.
Les syndicats SUD éducation, la Fédération Syndicale Unitaire (FSU), la CGT Éducation, le Syndicat National Force Ouvrière des Lycées et Collège (SNFOLC) et le Syndicat des Enseignants Unsa 67 appellent le personnel scolaire à se mobiliser le jeudi 1er février. En Alsace, une journée de grève et des manifestations sont prévues à Strasbourg et à Mulhouse. Tamar Bouissou est professeure de français dans un lycée. Elle est aussi secrétaire départementale du SNFOLC. Interview.
Rue89 Strasbourg : quelles sont vos revendications pour cette mobilisation ?
Tamar Boissou : Cela fait plusieurs années qu’il n’y a pas eu de mobilisation pour défendre spécifiquement l’éducation nationale. Nos revendications sont donc multiples. Tout d’abord, nous demandons une revalorisation des salaires. Cela passe par l’augmentation du point d’indice des fonctionnaires qui est actuellement gelé. Il y a eu des primes, mais ce n’est que temporaire et cela ne compte pas pour la retraite.
Nous demandons aussi des mesures salariales pour le personnel éducatif comme les assistants d’éducation (nouveau nom des surveillants, NDLR). Ils doivent avoir le même statut salarié que nous. Au sein de l’éducation nationale, ce sont eux les plus précaires.
Nous demandons aussi plus de personnel. La politique de division en groupes de niveau voulue par l’ancien ministre de l’éducation Gabriel Attal nous demande de faire plus d’heures mais avec les mêmes moyens humains. Avec le nombre réduit de places aux concours, il y a aussi moins en moins de professeurs remplaçants disponibles…
Des réformes contestées
Concernant les réformes, nous nous opposons à la fusion entre les assistants d’éducation et les accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH). Cela mènerait à une réduction de ces emplois spécialisés qui sont pourtant nécessaires.
Du côté des lycées professionnels, nous considérons que la réforme qui s’applique depuis la rentrée 2023 n’est pas la bonne. Les enseignements théoriques sont réduits au profit de la pratique professionnelle. Ce sont en majorité les enfants les plus pauvres qui sont dans ces établissements. Cette mesure va renforcer le déterminisme social en rendant plus difficile une réorientation et l’entrée à l’université. Elle supprime tout un pan de l’éducation qui permet aux élèves de s’ouvrir au monde et d’acquérir de la culture générale.
Que pensez-vous des annonces récentes concernant l’éducation, notamment l’expérimentation de l’uniforme dans 100 établissements ?
Il y a une dissonance entre les annonces publiques, où l’école est beaucoup évoquée, et la réalité. L’uniforme n’est pas une solution sinon ce serait une mesure que l’on défendrait. Cette décision est à mettre en lien avec le Service National Universel (SNU). Nous ne voulons pas que l’école devienne un théâtre de la militarisation du gouvernement. Ce ne sont pas les valeurs que nous défendons. Notre objectif est de permettre aux enfants de devenir des citoyens indépendants qui peuvent penser librement. Nous ne voulons pas les formater et les mettre au pas.
Avez-vous décidé de vous mobiliser suite à la nomination de la nouvelle Ministre de l’éducation ?
L’appel à manifester date d’avant le remaniement gouvernemental et la nomination d’Amélie Oudéa-Castéra. Pour nous, le sujet n’est pas une question de personne, mais de politique. La feuille de route pour l’éducation nationale, c’est Emmanuel Macron qui la décide. Et depuis l’arrivée de Jean-Michel Blanquer, il y a des problèmes structurels. On ne peut plus prétendre que le gouvernement défend l’école alors que nous voyons une toute autre réalité au quotidien : un processus de destruction de l’éducation nationale est en cours.
Les agriculteurs mobilisés par la FNSEA réclament moins de normes environnementales. Pour d’autres exploitants, comme Jérémy Ditner, le problème relève d’un trop faible accompagnement de la transition vers une agriculture écologique.
La mobilisation des agriculteurs s’amplifie ce mercredi 24 janvier en Alsace. Les syndicats agricoles productivistes, la FDSEA et les Jeunes Agriculteurs, appellent au blocage de l’autoroute A4 au niveau de Strasbourg à partir de midi (suivre notre direct ici). Ils dénoncent leurs faibles revenus et des contraintes administratives et environnementales excessives.
Pourtant, à l’heure où la nappe phréatique alsacienne est de plus en plus polluée par les pesticides, où la biodiversité s’effondre, où le climat ne cesse de se réchauffer et où la sécheresse touche de plus en plus durement les paysans, les enjeux écologiques doivent être pris en compte par l’agriculture selon Jérémy Ditner, producteur à Ammertzwiller dans le Haut-Rhin. Ce jeune exploitant de 35 ans produit sur plus de 130 hectares du maïs, du blé, du soja, des lentilles, des courges, des pommes de terre, des carottes ou encore des navets avec le label bio. Administrateur de l’Organisation professionnelle de l’agriculture biologique en Alsace (Opaba), il considère qu’une amélioration de la condition des agriculteurs doit passer par un accompagnement vers la transition agro-écologique.
Rue89 Strasbourg : Partagez-vous le constat de nombreux agriculteurs concernant les difficultés de rémunération dans le secteur ?
Jérémy Ditner : Oui, je me retrouve dans les revendications sur les revenus agricoles. Nous avons des charges qui augmentent pour le gasoil et l’énergie. Parallèlement, les prix ont chuté à cause d’une baisse de la consommation des produits locaux. On vendait une tonne de blé pour 400 euros lors de la récolte de 2022, contre 200 euros la tonne en 2023. Mon revenu sur l’année était plutôt correct il y a encore quelques temps. Mais cette année, il a bien baissé, même si je n’ai pas encore fait le calcul précis. Je travaille 50 heures par semaine. Je ne sais pas si je suis au smic horaire.
« Il y a des surmarges dans les circuits longs qui pénalisent les agriculteurs. On ne sait pas si c’est au niveau des industriels ou de la grande distribution. »
Jérémy Ditner, agriculteur
Heureusement, en bio nous avons moins de charges que les agriculteurs conventionnels puisque nous ne payons pas les intrants (engrais, pesticides, NDLR), dont les prix ont aussi augmenté. Dans mon exploitation nous sommes résilients parce que nous avons une quinzaine de productions différentes, donc on ne dépend pas du cours d’une marchandise. On a vendu moins cher nos céréales mais les légumes sont plus stables. Nous vendons une partie de notre production en circuit court à des magasins comme la Biocoop, Satoriz et Biomonde, donc nous avons plus de contrôle sur les prix.
Pour le bio, c’est justement très important de pouvoir mieux contrôler ses prix, car il y a des surmarges qui sont pratiquées dans les circuits longs et qui pénalisent les producteurs. Quelques années en arrière, on vendait une pomme de terre bio deux fois plus chère qu’une conventionnelle à une coopérative et elle était deux fois plus chère au supermarché. Aujourd’hui, on ne la vend plus que 10% plus chère mais elle coûte toujours le double en rayon. On ne sait pas où est faite la marge, si c’est au niveau de l’industriel ou de la grande distribution. Il faudrait plus de transparence et de régulation des prix.
Y a t-il des normes ou des contraintes administratives que vous considérez comme une entrave à votre activité ?
Nous sommes contraints de réaliser de nombreuses démarches administratives, qui augmentent notre charge de travail. Il faut toujours montrer patte blanche. Quand on déclare notre ferme pour les aides de la Politique agricole commune (PAC), on doit cartographier nos productions et justifier à chaque fois qu’elles sont bio. Et on doit recommencer à chaque changement d’activité sur une parcelle. C’est très lourd et il y a un risque d’erreur dans les dossiers. D’après moi, le simple fait d’avoir le label bio pourrait suffire car c’est déjà contraignant. En plus, nous avons de gros retards de paiements dans les aides pour le bio. Cette année, nous allons les recevoir au printemps 2024 alors que les autres aides de la PAC sont tombées en octobre 2023.
« Le blocage de certains agriculteurs sur les normes environnementales vient d’une transition agricole qui n’est pas assez accompagnée. »
Jérémy Ditner, agriculteur
Pensez-vous qu’il serait nécessaire de réduire les normes environnementales, comme le revendique certains syndicats agricoles ?
Je ne suis pas du tout concerné par cette question parce qu’en étant en bio, j’ai des normes environnementales bien plus importantes à respecter. La transition vers une agriculture plus respectueuse de l’environnement est essentielle face à la crise écologique et climatique. Pour moi, le blocage de certains exploitants sur cette question est surtout lié au fait que la transition agricole n’est pas assez accompagnée. Il ne faut pas moins de normes environnementales mais soutenir plus fortement la production bio. Avec l’Opaba, nous revendiquons par exemple une aide au maintien à l’agriculture bio, qui serait d’un montant de 145 euros par hectare et par an. Actuellement, on est seulement à 90 euros par hectare.
Une autre solution serait d’étendre les paiements pour services environnementaux (des rémunérations d’agriculteurs pour des actions qui contribuent à restaurer ou maintenir des écosystèmes, NDLR). Les exploitants pourraient recevoir une compensation lorsqu’ils n’utilisent pas de pesticides dans certains secteurs comme des zones humides.
« Le bio permet d’être moins exposé à la concurrence internationale : il y a moins d’importations de ce type de produits. »
Jérémy Ditner, agriculteur
La transition vers une agriculture plus respectueuse de l’environnement peut-elle être une solution selon vous ?
Oui, car il y a moins de charges. Aujourd’hui, beaucoup d’agriculteurs qui se lancent s’orientent stratégiquement vers le bio et les circuits courts pour être plus résilients et parce qu’il y a une demande. Je pense qu’aider davantage les producteurs à se convertir vers des modèles plus vertueux pourrait tirer une grosse partie des exploitants vers la transition.
Pour l’instant, il n’y a toujours pas de cap clair. On dit aux agriculteurs qu’ils doivent faire du bio, mais il n’y a pas de soutien de la force publique pour créer des filières qui leur assureraient des débouchés sécurisés. L’État pourrait notamment œuvrer à faire respecter la loi Egalim qui impose du bio dans les cantines scolaires. C’est toujours l’agriculture conventionnelle qui est la plus soutenue par la politique européenne. Nous sommes dans un flou total, qui fait perdre la boussole aux agriculteurs. C’est cela qui crée un agacement contre les normes environnementales, qui sont juste perçues comme pénalisantes.
Or le bio, c’est un outil pour être moins exposé à la concurrence internationale : il y a moins d’importations de ce type de produits. On doit également soutenir les nouvelles installations pour renouveler les générations d’agriculteurs. Il faut maintenir ce dynamisme qui est favorable à la transition, car beaucoup de jeunes veulent se lancer dans le bio avec des modèles plus résilients.
Pendant près de 24 heures, les syndicats FDSEA et Jeunes Agriculteurs ont bloqué les voies vers l’A4 et la M35 pour protester contre des mesures environnementales qui portent atteinte, selon eux, à la compétitivité de l’agriculture française. La Coordination Rurale, un autre syndicat, manifeste séparément devant la Direction départementale des territoires. La rédaction de Rue89 Strasbourg rend compte en direct de ces manifestations.
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25 janvier, 16h22
C’est la fin de ce direct, merci à vous de nous avoir suivi.
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25 janvier, 15h38
Fin de mobilisation. Une colonne de tracteurs de la Coordination rurale défile sur l’avenue des Vosges dans un concert de klaxons. Quelques policiers suivent le cortège.
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25 janvier, 15h29
Les agriculteurs bloquant la M35 ont voté à main levée la fin du barrage. « On est entrain de ranger, on va partir », annonce le secrétaire général de la FDSEA 67 Gérard Lorber au téléphone, en rangeant son matériel. « On attend les annonces nationales, demain », déclare le syndicaliste, en promettant d’autres mobilisations selon le contenu des annonces.
Thomas Lux, secrétaire général des Jeunes Agriculteurs du Bas-Rhin, résume la fin de la mobilisation :
« On a décidé de lever le camp pour deux raisons. D’abord, on a eu des avancées au niveau local, pour des problèmes très précis, touchant certains agriculteurs individuellement. De manière plus globale, la préfète nous a assuré que le Bas-Rhin suivrait les règles nationales et qu’il n’y aurait pas de mesures plus dures appliquées localement. On attend quand même les annonces de Gabriel Attal demain. Si celles-ci ne sont pas satisfaisantes, on se mobilisera de nouveau. »
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25 janvier, 15h21
La Confédération paysanne appelle à un rassemblement à Sélestat, ce mardi à 16h, place de la gare. Le porte-parole du syndicat, Pierre-Luc Laemmel, explique son souhait de se démarquer de la FNSEA :
« Pour nous, l’agriculture productiviste de la FNSEA piège les agriculteurs dans un modèle absurde où ils sont dépendants des prix du marché, d’investissements lourds et de charges importantes. Avec par exemple le prix des pesticides qui augmentent. On appelle les personnes qui aimeraient un autre modèle, basé sur une agriculture paysanne et nourricière, à venir à notre rassemblement. »
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25 janvier, 14h27
Germain Krantz est exploitant de céréales à Wasselone, et trésorier de la Coordination rurale 67. Il s’est mobilisé avec son syndicat devant la Direction départementale des territoires, sans se joindre à la FDSEA :
« Nous avons décidé de cette manifestation il y a trois jours, de notre côté. Nous ne sommes pas avec les autres syndicats parce que nous n’avons pas les mêmes revendications. Tout ce qui se passe, maintenant c’est à cause de leur politique. Ils voulaient s’ouvrir sur le marché mondial, pour exporter nos produits. Ces syndicats ne peuvent pas avoir un discours mondialiste à Bruxelles et se mobiliser contre l’importation par la suite. »
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25 janvier, 14h10
Dans le Haut-Rhin, près de 200 tracteurs roulent sur l’A35 pour organiser un blocage de l’autoroute, dans les deux sens. Le cortège se dirige vers Oberhergheim, et devrait se tenir jusqu’à 16h vendredi.
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25 janvier, 14h05
Le président de la FDSEA Franck Sander a été reçu par le secrétaire général de la préfecture en fin de matinée. En sortant de la préfecture, l’agriculteur ne fait aucune annonce sur la fin du blocage : « Même si vous avez une administration qui a envie d’avancer au niveau local, c’est les décisions de Paris qui bloquent l’ensemble des sujets. Pour moi la priorité, c’est les annonces de Gabriel Attal de demain. »
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25 janvier, 12h14
Ce compte-rendu en direct est mis en pause, en attendant de savoir comment les différentes institutions répondront aux revendications des syndicats. Deux cortèges sont installés, celui de la FDSEA sur les voies métropolitaines de Strasbourg, celui de la Coordination rurale dans la Krutenau, près de la DDT.
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25 janvier, 12h01
Éric Lachmann est apiculteur professionnel à Benfeld. Il est devant la DDT, dans le cortège de la Coordination Rurale, pour soutenir ses collègues agriculteurs, « car ce sont eux qui nous nourrissent ». Avec son gilet vert, il admet avoir, lui aussi, des revendications :
« Nous sommes concurrencés par du miel à bas coût, en supermarché. Je vends tout en direct, sinon on s’en sort pas. Les supermarchés nous payent un quart du prix qu’on aimerait. »
L’apiculteur a choisi de se joindre au cortège de la Coordination Rurale plutôt qu’à celle de la FDSEA et de Jeunes Agriculteurs. « En tant qu’apiculteur je suis contre les pesticides et ce n’est pas leur position », détaille-t-il.
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25 janvier, 11h54
Depuis 10h30, la Coordination Rurale est donc positionnée devant la DDT. Les manifestants sont désormais une soixantaine. Marie-Paul Boehler, secrétaire départementale de la Coordination Rurale : « Nous sommes venus ici parce que c’est là que tout se décide ».
« Nous ne sommes pas avec l’autre mobilisation car nous ne sommes pas le même syndicat. Nous avons des revendications distinctes : on demande juste à vivre de notre travail. Depuis quelques années c’est de pire en pire. »
Marie-Paul Boehler, secrétaire départementale de la Coordination Rurale et productrice d’épeautre
Le syndicat a rendez-vous avec le directeur de la DDT à 13h30 et compte manifester jusqu’à 17h environ. Pour les soutenir, quelques agriculteurs allemands ont fait le déplacement.
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25 janvier, 11h21
De son côté, la Coordination Rurale est place du Foin, dans le quartier de la Krutenau à Strasbourg. Avec leurs gilets verts, 16 tracteurs et leurs agriculteurs et agricultrices manifestent devant la Direction Départementale des Territoires du Bas-Rhin – une administration qui « veille au développement équilibré et durable des territoires, tant urbains que ruraux, par la mise en œuvre des politiques agricoles, d’environnement, d’aménagement et d’urbanisme, de logement et de construction, de prévention des risques, de transport ».
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25 janvier, 11h04
« La sécheresse, elle est où ? Y’a de l’eau stagnante partout dans les plaines d’Alsace. Mais on a eu des restrictions d’eau. On a dû moins irriguer. Alors que tout ce qu’on fait, c’est parce qu’on en a besoin. Ça coûte cher d’irriguer, on le fait parce qu’on n’a pas le choix. C’est pareil pour les produits phytosanitaires. »
Fabien, producteur de lait à Ergersheim
Fabien à gauche, Dominique à droite.Photo : Jade Lacroix / Rue89 Strasbourg
« Avec la guerre en Ukraine, les prix de nos céréales ont augmenté mais tout comme le prix de l’énergie. Là, nos prix sont revenus à ceux avant la guerre alors que l’énergie est au moins deux fois plus chère qu’avant la guerre. »
Dominique, producteur de céréales et betteraves sucrières
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25 janvier, 10h34
Gilles Hermann est en fin de carrière. Céréalier et éleveur de poules pondeuses à Benfeld, il avoue décourager sa fille de prendre sa relève.
« Il y a trop de contraintes. Je travaille entre dix et douze heures par jour et je prends moins de plaisir qu’avant. On nous dit que c’est notre choix, de faire ce métier. Certes, mais pas dans ces conditions. Même avec les habitants des villages, c’est devenu difficile : ils nous font des réflexions quand on travaille le dimanche, quand on fait de la poussière… »
Depuis 1996, Gilles travaille sur son exploitation et voit les contraintes et les charges financières augmenter. Il se souvient de la pandémie du Covid-19, où les consommateurs venaient dans son magasin de vente directe : « Tout le monde nous encensait, les gens étaient contents d’avoir de bons produits. Mais une fois les supermarchés ouverts, ils ne sont pas revenus »
Il n’hésite pas à prévoir de bloquer longtemps la M35 : « On reste jusqu’à avoir des annonces positives, s’il faut qu’on reste une deuxième nuit, on le fera ».
Gilles Hermann, jeudi 25 janvier au matin.Photo : Jade Lacroix / Rue89 Strasbourg
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25 janvier, 10h21
François Vix fait partie des Jeunes Agriculteurs venus du canton de Brumath : « La nuit a été courte, on s’est couché tard. On a fait des jeux de cartes et bu un coup tous ensemble. On était bien installés, donc ça allait pour dormir. »
À 32 ans, il est céréalier sur l’exploitation familiale de 200 hectares.
« La plus grande contrainte, ce sont les démarches administratives qui concernent l’eau. Quand on fait une demande de forage, on attend six mois pour avoir une réponse. À l’époque, nos grands parents creusaient un puit comme ça, sans plus de démarche. En Alsace nous avons une grande nappe phréatique, et des contraintes d’eau malgré tout. Ce n’est pas possible. »
François Vix, 32 ans
C’est avec la préfète du Bas-Rhin que la question de l’eau est en train d’être discutée. Pour les autres revendications des syndicats, des annonces nationales sont attendues.
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25 janvier, 10h09
Vers 10h, la Coordination Rurale, un autre syndicat agricole, a commencé sa manifestation en passant par l’avenue des Vosges. Entre quinze et 20 tracteurs font cortège.
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25 janvier, 9h59
Deuxième jour de direct auprès des agriculteurs et agricultrices mobilisées sur la voie métropolitaine 35 à Strasbourg. Sur place, les tracteurs sont toujours là.
« On a dormi dans nos tracteurs. Bon c’est vrai qu’on dort mieux dans un lit ! » rigole Laurent, agriculteur à Marmoutier.
« Ce n’est pas la première fois qu’on manifeste mais c’est toujours la même chose… Notre métier, ce n’est pas d’être sur une autoroute. Donc là on va rester jusqu’à avoir de vraies annonces du gouvernement », Cyril, agriculteur du côté de Saverne.
À 9h30, les représentants de la FDSEA et des Jeunes Agriculteurs sont allés à la rencontre de Josiane Chevalier, préfète du Bas-Rhin. Mercredi soir, cette dernière est passée sur le blocage rencontrer plusieurs manifestants.
De gauche à droite, Laurent, Cyril et Ludovic, qui ont passé la nuit sur le blocage.Photo : Jade Lacroix / Rue89 Strasbourg
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24 janvier, 18h48
Et c’est la fin pour aujourd’hui de ce compte-rendu en direct. Merci à toutes et à tous de l’avoir suivi !
Rendez-vous demain pour une reprise du compte-rendu en direct, notamment pour savoir si les agriculteurs lèvent ce blocage des voies métropolitaines ou s’ils restent sur place une journée de plus…
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24 janvier, 18h44
Franck Sander boucle la journée sur la question des pesticides : « pas de transformation à marche forcée ».
Franck Sander détaille :
« Vendredi, il y aura des annonces du Premier ministre. Soit il nous donne du concret et c’est bon. Soit il n’arrive pas à rassurer le monde agricole et on continuera à se battre, on ne cédera pas. Pour la question de l’accès à l’eau, on va discuter avec la préfète du Bas-Rhin. »
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24 janvier, 18h27
Franck Sander : « Ça fait tellement d’années qu’on dit les choses, qu’on revendique. On a essayé la méthode douce avec le retournement des panneaux. On nourrit la population. Vous pouvez en être fier. Tout ce que nous ne produirons pas viendra du Brésil, d’Inde, de Chine, des pays avec lesquels l’Europe fait du libre échange. »
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24 janvier, 18h20
Des bétaillères sont bâchées pour servir d’abris de fortune.
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24 janvier, 18h12
Des prises de parole sont prévues à 18h30. Nous rendrons compte ici même des annonces qui seront faites.
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24 janvier, 18h04
Gérard Lorber, président de la FDSEA du Bas-Rhin : « On est parti pour 24 heures, mais si la base veut rester plus, on restera plus. Cela dépendra aussi des annonces. »
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24 janvier, 17h43
Les quelques 500 agriculteurs mobilisés s’installent pour la nuit. Ils pourraient bloquer la circulation toute la journée de jeudi.
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24 janvier, 17h36
Les agriculteurs mobilisés craignent une concurrence faussée face aux producteurs d’autres régions du monde.
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24 janvier, 17h27
La nuit commence à tomber sur les files de tracteurs stoppés sur la M35. Les agriculteurs mobilisés s’apprêtent à y passer la nuit.
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24 janvier, 17h09
Arnaud Schneider s’occupe d’allumer un barbecue. Il est installé depuis trois ans en grande culture et maraîchage. Les agriculteurs s’installent pour rester…
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24 janvier, 17h01
Les agriculteurs s’installent pour bloquer les voies au moins une journée…
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24 janvier, 16h59
Bérénice Schwab, en formation au lycée de Pixérecourt près de NancyPhoto : Thibault Vetter / Rue89 Strasbourg / cc
Bérénice Schwab est apprentie au centre de formation de Pixérecourt, près de Nancy. Elle est venue avec le canton de Benfeld :
« C’est une cause qui touche mon avenir. Mon but est de reprendre une exploitation familiale à Boofzheim, qui fait de l’engraissement de taurillons, du fois gras, du canard, en vente directe. Mon frère est déjà installé dessus. Le fond du problème aujourd’hui, c’est les normes qui nous sont imposées : les restrictions d’eau, les normes sanitaires quand on fait de la transformation… On doit installer de nouveaux dispositifs régulièrement. Dernièrement on a dû installer un sas. C’est des coûts à chaque fois et beaucoup de paperasse. On nous promet des aides mais quand on voit les dossiers à remplir, on se dit qu’on peut s’en passer. Des fois, on fait des journées entières d’administration. Heureusement que nous sommes en vente directe, ce qui nous permet de fixer nos prix. »
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24 janvier, 16h46
Les agriculteurs commencent à s’installer. Ils ont l’intention de passer la nuit et de bloquer la voie métropolitaine encore jeudi si leurs revendications ne sont pas entendues. Photo : Thibault Vetter / Rue89 Strasbourg / cc
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24 janvier, 16h42
Les voies de la M35 sont désormais complètement bloquées
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24 janvier, 16h31
Les agriculteurs du nord de Strasbourg rencontrent ceux venus du sud.
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24 janvier, 16h25
Fabien Metz s’estime démuni face aux contraintes des marchés mondiaux. Photo : Thibault Vetter / Rue89 Strasbourg / cc
« La France a importé 8 millions de tonnes de maïs. On est en concurrence avec les producteurs au Brésil, où ils ont le droit d’utiliser 178 molécules phytosanitaires différentes. Parmi elles, 92 sont autorisées en Europe et 40 en France. Il faudrait davantage nous protéger ou alors qu’on ait les mêmes possibilités. Cette distorsion de concurrence est insupportable. La commission européenne devrait se doter de moyens pour maîtriser de ce qui rentre dans le territoire. »
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24 janvier, 16h17
Fabien Metz, agriculteur en polyculture. Photo : Thibault Vetter / Rue89 Strasbourg / cc
« Je suis dans une ferme de polyculture certifié HVE 3, je produis du maïs, du blé du blé dur du soja et de la moutarde. L’effet ciseau entre la hausse des charges et la baisse du prix de vente est marquant. Pour la moutarde, j’ai un contrat particulier : on se rencontre entre producteurs et la coopérative de Hochfelden, qui stocke et conditionne avant de revendre au moutardier. On parle prix ensemble. C’est stable. Sur le reste c’est difficile. J’achète les engrais super cher alors que le prix des céréales a baissé de 30% : je suis passé d’une tonne de maïs à 300 euros en 2022 à 200 euros en 2023. C’est ça l’effet ciseau qui est difficile. Niveau revenu, je n’ai pas encore fait les comptes mais je risque d’avoir une baisse de 30%, je serai tout juste… »
Quelques kilomètres plus loin, Fabien Metz poursuit :
« C’est un métier où ne coupe jamais. J’y pense le soir quand je rentre. À cause des normes de traçabilité qu’on nous impose depuis dix ans. Toute cette charge repose sur nous. Je dois noter la date de semis, la localisation du champ, la surface du champ, le nom de la semence. Les kilos de blé semé… Chaque travail sur une culture, il faut noter tout ces détails. Globalement, les charges administratives représentent un matin par semaine. C’est très conséquent. »
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24 janvier, 16h14
Les tracteurs en provenance du Kochersberg passent avant ceux venus du nord de l’Alsace.
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24 janvier, 15h42
Steve Conrad est obligé d’irriguer de plus en plus les sols. Photo : Thibault Vetter / Rue89 Strasbourg / cc
Durant le trajet, Steve Conrad, agriculteur céréalier, précise :
« On sent les effets de la sécheresse. Pour avoir un rendement suffisant, je dois irriguer 70% de la surface aujourd’hui, contre 10% il y a 30 ans. C’est pour ça que je fais aussi de la culture de tournesol qui demande moins d’eau. Peu être que je pourrais passer à davantage de tournesols mais le problème c’est que le marché de cette plante s’est effondré. Elle se vend 400€ la tonne, alors que c’était 800 il y a encore un an. Ça on ne le prévoit pas quand on plante… Ces prix qui varient à ce point, c’est vraiment ce qui nous plombe. »
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24 janvier, 15h31
Le cortège approche lentement du nord de Strasbourg. Photo : Thibault Vetter / Rue89 Strasbourg / cc
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24 janvier, 15h30
Steve Conrad a dû investir 150 000€ pour son tracteur de dernière génération. Photo : Thibault Vetter / Rue89 Strasbourg / cc
Steve Conrad, agriculteur céréalier, avoue qu’il manifeste aussi pour sa fille, qui aimerait reprendre l’exploitation :
« Parfois j’hésite à lui dire de ne pas reprendre et de trouver autre chose tellement ça devient dur. Je n’aurai pas envie qu’elle travaille autant avec si peu de rémunération… Mais en même temps, dans le fond, c’est ce que je préfèrerais qu’elle reprenne la ferme. »
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24 janvier, 15h13
Le cortège de Bischwiller est arrivé, les agriculteurs repartent.
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24 janvier, 15h04
Selon la police, le cortège en provenance du sud de Strasbourg est à Fegersheim en ce moment. Photo : Thibault Vetter / Rue89 Strasbourg / cc
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24 janvier, 15h00
Le cortège est déjà composé de plusieurs dizaines de tracteurs. Photo : Thibault Vetter / Rue89 Strasbourg Le cortège est arrêté à la sortie de Mundolsheim, en attendant le cortège de Bischwiller.
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24 janvier, 14h53
Steve Conrad, céréalier. Photo : Thibault Vetter / Rue89 Strasbourg / cc
Dans le tracteur vers Strasbourg avec Steve Conrad, céréalier à Geudertheim :
« Je fais du mais, du blé du Colza et du tournesol… Ces dernières années c’est de plus en plus délicat. Nos revenus baissent et les contraintes administratives augmentent. C’est un truc de fou. Si on veut irriguer, c’est six mois de boulot pour avoir l’autorisation de creuser un puit. Tout ce qui est Politique agricole commune (PAC), il y a de plus en plus de critères à respecter. Le dernier pilier : il faut accumuler le plus de points possible en faisant des rotations. Selon la culture ça donne des points. »
Quant aux charges, Steve Conrad note :
« Ils veulent arrêter de nous prendre en charge une partie du gasoil agricole (on consomme 25 000 litres par mois donc c’est énorme). L’azote c’est passé de 260 tonnes à 780 en un an. On ne peut pas répercuter sur le prix de vente. Le cours des céréales baisse. Mon revenu a baissé de 30%, grosso modo alors que je travaille 70 heures par semaine pour l’équivalent d’un Smic. »
Steve Conrad, agriculteur céréalier, détaille ses espoirs pour la mobilisation.
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24 janvier, 14h47
Célia Henches
Célia Henches est étudiante en BTS stratégie d’une exploitation agricole :
« J’aimerais reprendre l’exploitation familiale. Mon père cultive des céréales à Geudertheim, du maïs et du blé. L’optique serait de diversifier plus tard : se lancer dans d’autres cultures pour s’adapter au réchauffement climatique. C’est effrayant de vouloir faire un métier quand on ne sait pas ce qu’il y aura demain. Il faut qu’on puisse dégager un revenu. La passion ne paye pas les factures. Si on regarde l’agriculture française par rapport au Brésil, on peut être fiers de notre qualité environnementale, mais il faut nous protéger face à cette concurrence. »
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24 janvier, 14h38
Le cortège est parti de Vendenheim, objectif Strasbourg
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24 janvier, 14h34
Les tracteurs à Vendenheim attendent d’être rejoint par un autre cortège.
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24 janvier, 14h29
Point d’organisation avant de prendre la direction de Strasbourg.Photo : Camille Balzinger / Rue89 Strasbourg / cc
Point d’organisation tenu par Fabien Metz :
« On attend un autre cortège qui vient de Bischwiller pour partir vers Strasbourg. L’idée c’est de garder en tête l’aspect sécurité aussi. On a tous une pensée pour la famille qui a été renversée hier. Les tracteurs devront rester en rang serré. La police va nous encadrer. Restez bien dans le périmètre de sécurité. On essaye en même temps d’obtenir une réunion avec la préfète demain pour exposer nos revendications. »
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24 janvier, 14h27
Eliott Hirsch
Eliott Hirsch est étudiant en BTS agronomie production végétale :
« Pour l’instant, je file des coups de main sur une exploitation à La Wantzenau. Lancer une exploitation, ça me fait peur, quand on voit ce que c’est au niveau de la paperasse, des normes qu’il faut faire et des investissements, donc je ne sais pas si je pourrai. Je vais plutôt essayer de me faire embaucher dans une exploitation. »
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24 janvier, 14h22
Johan Vogel, du syndicat des Jeunes agriculteurs
Johan Vogel est le président des Jeunes agriculteurs pour le canton de Brumath. Il est producteur de pommes :
« On a deux gros soucis aujourd’hui : la loi Egalim non respectée dans les grandes surfaces. On devrait pouvoir discuter directement de nos prix. Là c’est eux qui fixent sinon ils vont voir ailleurs. Je fais partie d’une coopérative de production de pommes. On travaille avec toutes les enseignes de grandes surfaces, chaque enseigne veut être moins chère que l’autre. Quand on vend 1 kg de pommes à 1,40€ au magasin, derrière il est vendu 2,50€, ou 2,60€ et ça va encore mais ils nous imposent de plus en plus des promos, on passe sous la barre de 1€ le kg. Ou moins. Et pendant ce temps, les charges augmentent, une augmentation de 150% du prix de l’électricité… »
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24 janvier, 14h19
La circulation sur la M35 n’a pas encore été interrompue
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24 janvier, 14h10
Arnaud à gauche et Florent à droite sont prêts pour une journée de mobilisation.
Arnaud élève des vaches pour le lait :
« En ce moment je vend mon lait à Alsace Lait. Mois de décembre 480 euros pour mille litres. Ce n’est jamais suffisant. Avec toutes les charges qui augmentent les derniers temps, c’est difficile, le gasoil, l’énergie, les cotisations. Le revenu ne permet pas de me rémunérer moi et mon père donc je suis obligé de faire un mi temps à côté depuis que je suis sorti du BTS en 2019. Ça dépend des saisons mais je peux faire des semaines 40 heures sur l’exploitation en plus du mi-temps. Il faudrait une diminution des charges et réguler les prix pour qu’on s’en sorte. »
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24 janvier, 13h59
Les tracteurs sont parés de leurs atours revendicatifsPhoto : Camille Balzinger / Rue89 Strasbourg / cc
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24 janvier, 13h47
Au comptoir agricole de Vendenheim, les premiers tracteurs arrivent.
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24 janvier, 13h44
Une dizaine de tracteurs au départ de Sélestat. « Ça commence à prendre forme… », se félicite la FDSEA du Bas-Rhin sur sa page Facebook vers 13h30.
Une dizaine de tracteurs au départ de Sélestat le mercredi 24 janvier. Photo : FDSEA 67 / Document remis
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24 janvier, 13h40
En train de manger avant de rejoindre une vingtaine d’exploitants agricoles au départ de Vendenheim, Fabien Metz accepte de répondre à nos questions sur les revendications portées par le mouvement social en cours. Très vite, l’agriculteur et vice-président de la FDSEA du Bas-Rhin décrit une revendication concernant le prix des énergies :
« On attend une vraie garantie sur la défiscalisation du carburant. Aujourd’hui, pour que je puisse bénéficier de la défiscalisation sur le carburant GNR (Gaz Non Routier), je dois donner toutes les factures à la fin de l’année. On pourrait imaginer des taxes déduites du carburant dès l’achat du carburant GNR.
Concernant l’électricité, le ministre Bruno Le Maire a annoncé sans gêne une augmentation de 10% des tarifs. Nos activités agricoles sont très dépendantes des prix de l’électricité. Que ce soit pour le maraîchage, avec l’alimentation des chambres froides ou que ce soit pour l’élevage, avec les besoins de réfrigérer les tanks à lait. Nous attendons donc des annonces sur les charges liées à l’énergie. »
L’agriculteur de la Wantzenau, en polyculture labellisée à Haute Valeur Environnementale, réclame aussi des normes moins contraignantes. Il évoque par exemple les périodes d’épandage autorisées qui sont, selon lui, trop courtes : « La directive nitrate est clairement un texte que l’État devrait pouvoir adapter au contexte local. » De même, concernant la mise en jachère obligatoire de 4% des terres agricoles, Fabien Metz attend « un report de la mise en non production qui devait se faire en 2024. »
Fabien Metz espère enfin, à plus long terme, une réforme du système de fixation des prix des denrées agricoles : « Selon les productions, nous faisons face soit à des prix de vente fixés en toute opacité par les grandes surfaces, soit à un marché mondial dont on a cru trop longtemps qu’il suffisait de faire jouer la concurrence sur un marché libre. Il faut trouver un autre système de construction du prix des denrées agricoles. »
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24 janvier, 12h48
Interviewé sur France Bleu Alsace dans la matinée du mercredi 24 janvier, le président de la FDSEA du Bas-Rhin Franck Sander décrit une mobilisation qui durera jusqu’au jeudi 25 janvier dans la soirée. Interrogé sur l’explosion d’un bâtiment de l’administration publique par le Comité d’Action Viticole à Carcassone (Aude), le responsable syndical a réagi :
« Le mouvement de l’automne, avant Noël, c’était un mouvement de retournement des panneaux. C’était un mouvement tout doux pour dire : « On est là, on a un problème, écoutez-nous. On marche sur la tête. On retourne les panneaux. » Il y avait pas de casse. Ca n’embête personne. Toutes ces manifestations et ces actions sans casse de l’automne dernier, on voit bien que c’est pas utile. Donc le monde agricole et les agriculteurs en sont à un stade où ils se disent : « De toute façon, je n’ai plus rien à perdre. » C’est ça qui est en train de se dire. En tant que responsable agricole, je ne cautionne pas la casse. L’objectif aujourd’hui ce n’est pas de casser. Mais je peux comprendre qu’il y ait par endroits des dérapages au vu du désarroi qu’on connait aujourd’hui dans nos campagnes. »
Discours de Franck Sander, président de la FDSEA du Bas-Rhin, le 24 novembre 2023 à Strasbourg.Photo : Fantasio Guipont / Rue89 Strasbourg / cc
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24 janvier, 12h04
Selon le directeur du syndicat FDSEA 67, les premiers tracteurs partent de tout le département du Bas-Rhin à partir de midi. Yohann Lecoustey décrit des départs d’Ebersheim, Marmoutier, Roppenheim ou encore Mundolsheim. Il estime qu’environ 400 tracteurs arriveront à Strasbourg entre 14 et 15h. Le responsable syndical évoque une « organisation très intense » :
« On va monter des groupes électrogènes, des chapiteaux, des tables, des chaises, des barbecues pour passer la nuit sur la M35. Les cantons s’organisent pour les couches. Certains ramènent des vieux canapés et des bâches. Ça suffit pour faire un petit loft. »
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24 janvier, 6h05
Dans un communiqué diffusé hier soir, la préfecture du Bas-Rhin prévoit « de fortes perturbations de circulation dans l’agglomération strasbourgeoise ». Selon les services de l’État, « plusieurs convois agricoles se regrouperont sur la M35 au niveau de la nécropole de Cronenbourg à Strasbourg et bloqueront la M35 dans les deux sens de circulation à partir de ce mercredi 24 janvier 14h jusqu’à ce jeudi 25 janvier 23h59. »
En conséquence, des déviations obligatoires sont mises en place sur la M35 :
depuis le nord, dernière sortie au Marché-Gare (sortie 1)
depuis le sud, dernière sortie sur la M351 (sortie 3 « Porte blanche »)
#Manifestation | La M35 sera bloquée dans les deux sens de circulation à partir de ce mercredi 24 janvier 14h00 jusqu’à ce jeudi 25 janvier 23h59 🚫⚠️
🛣️ Des déviations obligatoires seront mises en place sur la M35 ⬇️
— Préfète de région Grand Est & du Bas-Rhin 🇫🇷🇪🇺 (@Prefet67) January 24, 2024
En raison de la manifestation des agriculteurs, la préfecture du Bas-Rhin conseille aux automobilistes « d’éviter ce secteur et, dans la mesure du possible, d’avancer ou de retarder leurs déplacements ».
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24 janvier, 6h00
Bienvenue sur ce compte-rendu du blocage de l’autoroute A4/A35 organisé par les syndicats d’exploitants agricoles FDSEA et Jeunes Agriculteurs. Annoncée dans la soirée du lundi 22 janvier, cette manifestation est présentée comme l’acte 2 d’une mobilisation initiée en novembre 2023. Les agriculteurs avaient alors retourné les panneaux de signalisation des communes et défilé à Strasbourg avec pour mot d’ordre « Pas de transition sous pression ». Par communiqué, la FDSEA du Bas-Rhin dénonçait alors « des sujets réglementaires qui s’accumulent depuis des mois, venant plomber la compétitivité et la productivité des exploitations agricoles. »
Deux mois plus tard, la colère reste intacte. Yohann Lecoustey, directeur de la FDSEA 67, s’insurge face à une « politique agricole qui marche sur la tête » : « On force les agriculteurs à prendre en compte des exigences environnementales. Ce ne serait pas un problème si les consommateurs répondaient aussi à cette exigences environnementales. Or force est de constater que les consommateurs se détournent des produits français et de l’agriculture biologique. » Les syndicats productivistes fustigaient également « l’obligation de mettre en place au moins 3% de jachères sur le territoire » alors « qu’une année sur deux, les éleveurs manquent de fourrage ».
Selon un communiqué de la FDSEA du Bas-Rhin, le blocage doit durer 24 heures minimum.
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Ce compte-rendu en direct est laissé gratuit pour lui permettre d’atteindre une large audience. Mais il nécessite le travail de plusieurs personnes : Camille Balzinger et Thibault Vetter seront sur le terrain, pour être au plus près des manifestants et recueillir leur paroles. Guillaume Krempp sera dans les locaux de la rédaction, afin de mettre à jour cet article. Notre journalisme a besoin de votre soutien direct pour exister. Soutenez un média indépendant, présent aux côtés des luttes et des personnes engagées :5€ seulement par mois, sans engagement.
Dans « Le Dernier des Juifs », Bellisha (Michael Zindel) vit toujours chez sa mère (Agnès Jaoui).
Noé Debré, créateur de la géniale série Parlement, réalise son premier long métrage : Le Dernier des Juifs, où l’on regarde vivre le duo attachant d’un fils de 26 ans et de sa mère en Seine-saint-Denis. Rencontre.
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À 26 ans, Bellisha (Michael Zindel) vit toujours chez sa mère (Agnès Jaoui). Il fait les courses comme un retraité, raconte ses cours de Krav-maga imaginaires, traîne – en espérant que rien ne bouge et que sa mère, malade, ne meurt pas. Pour lui faire plaisir, il va commencer à chercher du travail et à élaborer des plans pour tenter de quitter le quartier. Noé Debré parle de la fin d’une époque, où les Juifs séfarades pouvaient être nombreux dans certains quartiers populaires de France. Il aborde l’antisémitisme et le racisme sous un prisme différent, loin des clichés sur la banlieue. Mais le film dresse aussi le portrait d’un personnage totalement singulier, lunaire et poétique, touchant et drôle, interprété par un jeune inconnu : Michael Zindel, une révélation.
Rue89 Strasbourg : Souvent les premiers films sont autobiographiques, ce n’est pas le cas ici. Qu’est-ce qui vous a donné envie de traiter ce sujet ?
Noé Debré : Au festival de Court-métrages de Clermont-Ferrand où je montrais l’un de mes courts, j’ai vu une comédie qui racontait l’histoire d’un jeune Juif russe en Allemagne, avec cette image qui m’est restée d’un jeune qui se baladait entre des tours HLM. Je me suis dit que cette histoire des Juifs qui ont quitté ou quittent les quartiers populaires n’avait pas été racontée. Comme ce n’est pas mon monde – moi j’ai grandi aux Contades – je m’étais fixé une règle : tout ce qui serait dans le film devait être issu de témoignages.
Avec un ami, nous sommes allés à la rencontre des gens, dans le 93 (Seine-Saint-Denis, NDLR), à la sortie des synagogues et nous avons interviewé des personnes qui habitaient encore dans leur quartier mais beaucoup qui en étaient également partis. Nous avons parlé avec des personnes de tous les âges. Je ne suis pas sociologue, je ne cherchais pas à dresser un portrait exhaustif non plus mais à trouver des bonnes histoires.
Bellisha (Michael Zindel), invité à une cérémonie œcuménique parce que dernier Juif du quartier.
Vous apportez un regard doux sur la banlieue, loin des clichés, sans pour autant occulter le racisme et l’antisémitisme.
La douceur du film vient beaucoup du personnage de Bellisha, joué par Michael Zindel. Le film est une ode à Michael, qui a cette présence poétique au monde. Le film s’amuse beaucoup des préjugés racistes. Qu’est-ce que c’est que le racisme à part de la paresse intellectuelle ? C’est ridicule ! Et la bêtise est toujours assez drôle quand elle est racontée d’une certaine façon.
Le personnage de Bellisha est effectivement complètement atypique. Il flotte dans un univers très réaliste, complètement déconnecté. Comment vous êtes-vous posé la question de sa crédibilité ?
C’est l’obsession du réalisateur, de se demander si le public va y croire. C’est vrai qu’il est à côté, mais c’est ce qui le rend intéressant. Le jeu de Michael me touche, me fait rire. Dans beaucoup de réalisation, le jeu des comédiens est aplati, j’avais envie d’essayer autre chose.
Bellisha a une relation cachée avec une femme mariée, ils ont su créer un espace de liberté dans un environnement assez glauque… Cela sonne très juste, d’où vous est venue cette idée ?
Parmi les questions que nous avons posées lors de la phase de documentation, nous demandions s’il était possible qu’un Juif sorte avec une Arabe. Les réponses étaient parfois désarmantes, comme le jour où l’on m’a dit : « Mais personne ne sort avec personne, les gens ne sortent pas ensemble ! ». Pour des questions de réputation, cette modalité-là n’existe pas au sein du quartier. Il y avait une violence inouïe dans ce qu’ils nous disaient, sans forcément qu’ils s’en rendent compte.
J’ai donc inventé cette relation joyeuse, facétieuse, inspirée du cinéma italien. Les relations amoureuses sont souvent abordées de façon dramatique au cinéma et je voulais quelque chose de léger, tout en donnant une sexualité à Bellisha, pour ne pas qu’il soit trop enfantin, trop mignon… Au départ, sa maîtresse devait être une femme plus âgée que lui, mais j’ai découvert Eva Huault dans un court-métrage et j’ai changé le personnage.
Giselle (Agnès Jaoui) au bras de son fils Photo : Michael Zindel
Le film est drôle mais empreint d’une grande mélancolie. On est très loin de Parlement (série comique diffusée sur France.tv, créée par Noé Debré, sur la découverte du Parlement Européen par un jeune assistant parlementaire, NDLR).
Le sujet est mélancolique, crépusculaire puisqu’il raconte la fin d’une époque. Le film est né d’une inquiétude chez moi : est-ce que tout cela va perdurer, les Juifs et la France ? Il pose aussi la question de comment vivre sans sa mère. Mais on sent que le personnage a quelque chose de miraculeux, d’invulnérable. Je ne suis pas inquiet pour lui.
La qualité de l’image crée une ambiance un peu crade qui fonctionne très bien avec cette mélancolie. Comment avez-vous travaillé l’image ?
Avec le chef opérateur, Boris Lévy, nous voulions une image humble. D’habitude, les réalisateurs tournent en grande qualité puis utilisent des filtres numériques pour donner un style pellicule ou vintage : à mon sens, c’est factice et mortifère, ça se sent. On a tourné dans un format faible, déjà dégradé, avec le risque de ne pas pouvoir retravailler les images. Mais c’est cohérent avec le personnage et l’histoire, ça donne un côté vidéo assumé.
Pour protester contre les mesures environnementales qui atteignent la compétitivité de l’agriculture française, les syndicats FDSEA et Jeunes Agriculteurs bloqueront les autoroutes A4 et A35 à partir de midi le mercredi 24 janvier.
« Je dois vous laisser, j’ai 400 tracteurs à faire converger sur Strasbourg demain. » Directeur de la Fédération Départementale des Syndicats d’Exploitants Agricoles du Bas-Rhin (FDSEA67), Yohann Lecoustey n’a pas de temps à perdre ce matin. Demain, mercredi 24 janvier, son syndicat et celui des Jeunes Agriculteurs du Bas-Rhin bloquent les autoroutes A4 et A35. « Nous convergerons dans le secteur du cimetière (la nécropole nationale de Strasbourg-Cronenbourg, NDLR), près du poste de police d’autoroute, à 15 heures, donc les perturbations se feront ressentir dès midi », explique le responsable syndical. Le blocage doit durer 24 heures.
« C’est l’acte 2 de notre mobilisation de novembre 2023 pendant laquelle nous avons dénoncé une politique agricole qui marche sur la tête en renversant les panneaux de signalisation à l’entrée des communes », continue Yohann Lecoustey. Et le directeur de la FDSEA67 de dénoncer « la politique de transition sous pression », autrement dit « on force les agriculteurs à prendre en compte des exigences environnementales. Ce ne serait pas un problème si les consommateurs y répondaient. Or force est de constater que les consommateurs se détournent des produits français et de l’agriculture biologique. »
Abdelkarim Ramdane est l’élu référent de la MeinauPhoto : Thibault Vetter / Rue89 Strasbourg
Dès son arrivée au pouvoir, l’exécutif écologiste a opéré un changement radical du système des élus de quartiers. Terminé les baronnies d’adjoints sur de larges territoires ; la municipalité a misé sur « l’hyper-proximité ». Mais des habitants craignent d’avoir perdu au change.
Pause clope. À l’extérieur du centre socio-culturel de la Montagne Verte, alors que la nuit est déjà bien entamée, un agent de la direction des territoires savoure la fin d’une assemblée de quartier agitée. Après presque deux heures d’interpellations, de récriminations, de remontrances, après une débauche de pédagogie et de diplomatie, la première cigarette du soir semble avoir quelque chose d’exquis. Face aux habitants mécontents, les agents de la Ville de Strasbourg ont pu compter sur un allié : l’élu référent du quartier, Hamid Loubardi.
Pensé comme un porte-parole de la municipalité auprès des habitants, les élus référents doivent aussi porter la voix des habitants aux oreilles des élus et défendre leurs intérêts. Leur rôle est volontiers mis en avant par l’exécutif écologiste, qui a fait de l’équité territoriale un axe majeur de sa politique.
Du terrain vers l’administration
En arrivant aux commandes de la municipalité de Strasbourg en 2020, les écologistes ont réorganisé les périmètres des quartiers. Huit « adjoints de quartier » ont été remplacés par vingt « élus référents de quartier », sur des périmètres plus petits. Un maillage placé sous la supervision d’un triumvirat composant le « Pôle territoires » : l’adjoint à la maire en charge de l’équité territoriale, Benjamin Soulet, le « coordinateur des élus référents de quartier » Hervé Polesi et l’adjointe chargée de la démocratie locale, Carole Zielinski.
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Perrine Olff-Rastegar lundi matin avant son audiencePhoto : Camille Balzinger / Rue89 Strasbourg
Lundi 22 janvier, la militante strasbourgeoise Perrine Olff-Rastegar a été entendue par le tribunal correctionnel du tribunal judiciaire de Strasbourg. Après une heure d’audience, elle a été relaxée en fin de journée.
8 heures, devant le tribunal judiciaire de Strasbourg, une trentaine de militants et militantes se sont rassemblées sous une tente, aux côtés de grands drapeaux palestiniens. Tous sont là pour apporter leur soutien à la militante strasbourgeoise Perrine Olff-Rastegar, accusée d’avoir organisé une manifestation illégale et d’y avoir participé.
“Je n’aurais jamais cru me retrouver dans une telle situation. Être arrêtée, placée en garde à vue pendant 48 heures…. Ça n’avait jamais été quelque chose que je percevais comme une menace, alors que des manifestations de soutien à la Palestine, on en avait déjà organisé plein qui s’étaient très bien passées.”
Perrine Olff-Rastegar
Le 9 octobre 2023, soit deux jours après les attaques du Hamas en Israël, Perrine Olff-Rastegar a déposé une déclaration de manifestation pour le 13 octobre intitulée « Information sur la Palestine » avec deux autres personnes. Elle est l’une des porte parole du Collectif judéo-arabe et citoyen pour la paix (CJACP), qui existe depuis une vingtaine d’années et organise régulièrement des manifestations de soutien aux palestiniens et palestiniennes.
Après une rencontre avec les forces de l’ordre pour fixer le cadre de la manifestation, elle et son collectif ne soupçonnent pas l’arrêté d’interdiction qui sera diffusé par la préfecture du Bas-Rhin, jeudi 12 octobre vers 18h – soit moins de 24 heures avant le début prévu de la manifestation. Elle relaie cette interdiction le jour même, par mail, aux journalistes notamment.
Deux infractions retenues contre elle
Le jour de la manifestation, la retraitée de 70 ans est contrôlée aux abords de la manifestation, puis interpellée et placée en garde à vue, pendant 48 heures – deux jours, deux nuits. Elle refuse la comparution immédiate et est poursuivie pour « organisation d’une manifestation interdite sur la voie publique » et « participation sans arme à un attroupement après sommation de se disperser ».
“Depuis ma sortie de garde à vue, je n’ai pas eu le droit de participer aux autres manifestations. Le collectif en a organisé plus d’une dizaine, toutes se sont très bien passées.”
Perrine Olff-Rastegar
Lundi, le tribunal correctionnel de Strasbourg l’a convoquée à 8h30. Petit à petit, les militants s’amassent dans la salle d’audience, bientôt trop petite pour les soutiens qui se serrent sur les bancs de bois clair. Les têtes grisonnantes se sourient en silence, certaines tentent de s’assoir à même le sol, rapidement rappelées à l’ordre par l’huissière en charge du bon déroulement des audiences.
Dès 8h le matin, des militants se sont positionnés devant le tribunal. Ils ont démonté leur tente vers midi – leur déclaration de manifestation s’arrêtait alors – mais ont tout de même attendu toute la journée pour connaître la sentence de leur camarade accusée.
Olivier, 65 ans, est venu de Grenoble pour la soutenir. « Parce que c’est une vieille amie mais surtout, car on devrait toujours avoir le droit de soutenir la Palestine », explique le membre du collectif Boycott, Désinvestissement, Sanctions (BDS), qui milite pour que cessent les investissements qui profitent au régime israélien.
« On assiste à la criminalisation de beaucoup de moyens d’expression. C’est exactement ce qui se passe aujourd’hui avec Perrine. Elle est tombée dans le piège des interdictions de manifestation pour risque de trouble à l’ordre public mais preuve est faite que ces manifestations n’ont jamais troublé cet ordre public. »
Olivier Schultz, membre du collectif BDS
Parmi les militants mobilisés, beaucoup se battent pour les droits des Palestiniens et Palestiniennes depuis des années, comme Françoise, qui participait aux cercles de silence des Femmes en noir. Ou encore Micheline, 75 ans, qui y a fait son premier voyage en Israël en 2006 avec le Conseil de l’Europe et milite depuis 20 ans « contre l’apartheid et la la dépossession » des terres. Elle habite près de Sarreguemines et n’aurait manqué cette journée de lutte pour rien au monde. Tous disent avoir vécu la répression de leur lutte de manière continue, depuis le début de leurs engagements militants pour la Palestine.
Plus de deux heures après le début de l’audience, la présidente du tribunal correctionnel, Valentine Seyfritz, annonce l’affaire numéro sept, celle de Perrine Olff-Rastegar. Décrite comme « intègre et prudente » par Françoise, qui est venue la soutenir, l’accusée s’avance à la barre. Sa voix douce tranche avec celles des prévenus précédents, son pull saumon vif donne une touche de couleur à la salle 201.
« Le dossier est vide. »
Me Florence Dole
Après un rappel de son lieu et de sa date de naissance, Me Florence Dole, conseil de la militante, annonce soulever la nullité de l’interpellation de sa cliente, une notification trop tardive de son placement en garde à vue et l’irrégularité de l’arrêté d’interdiction de la préfecture du Bas-Rhin.
« Le dossier est vide. Il y a juste un procès verbal dressé par un officier de police basé uniquement sur les vidéosurveillances de la ville de Strasbourg. Il n’y a pas de fiche de mise à disposition, on ne sait pas où a été interpellée ma cliente ni par qui exactement, ni dans quel cadre. Il n’y a pas de vidéo, pas de photo, on ne sait pas pour quelle infraction constatée les agents ont décidé de l’interpeller. »
Me Florence Dole, avocate de Perrine Olff-Rastegar
Tout au long de l’audience, la défense, le tribunal et le ministère public tentent de savoir si Perrine Olff-Rastegar participait à la manifestation malgré son interdiction et surtout, si la militante avait effectivement communiqué que cette manifestation avait été interdite par les pouvoirs publics. « Ces deux infractions concernent la liberté de manifester », assène Me Dole. Il est fait note que la Strasbourgeoise de 70 ans n’a aucun antécédent judiciaire.
En trame de fond, une autre question s’impose : Perrine Olff-Rastegar a-t-elle été arrêtée et poursuivie pour en faire un exemple ? Le jour de l’interpellation de Perrine Olff-Rastegar, la préfecture du Bas-Rhin a annoncé sur X (ex-twitter) que « l’organisatrice » de la manifestation serait « présentée à la justice ».
Au cours des échanges, la présidente lit ce fameux procès verbal et retrace le déroulé de la manifestation. Quatorze personnes ont été interpellées. Ordre a notamment été donné, selon ce procès verbal, d’interpeller celles et ceux qui portaient des drapeaux palestiniens. Mais seule Perrine Olff-Rastegar a été finalement mise en examen.
« C’est sûr qu’ils voulaient en faire un exemple »
Me Alima Boumediene
Parmi ses soutiens, l’avocate Me Alima Boumediene a fait le déplacement depuis le Val d’Oise. « On assiste à un durcissement contre les droits liés à la liberté d’expression, qui sont de plus en plus bafoués », estime-t-elle, justifiant son voyage pour être aux côtés de la militante alsacienne. « C’est sur qu’ils voulaient en faire un exemple, Perrine a toujours respecté la loi », assène-t-elle.
Pour la première infraction reprochée, la retraitée doit convaincre le tribunal qu’elle n’était pas sur les lieux de la manifestation interdite. « J’étais à la terrasse du café Kléber, rue de la Grange », justifie t elle. À l’aide de schémas reproduisant les alentours de la rue du 22-Novembre et de la rue des Francs-Bourgeois, le tribunal débat : a-t-elle été interpellée sur les lieux, les policiers l’y ont-ils conduite, faisait-elle réellement partie de la manifestation interdite ? Et surtout, pourquoi était-elle aux alentours du rassemblement ?
« Je me suis dit que j’allais aller sur place au cas où certains et certaines n’avaient pas vu que la manifestation était annulée. Mais j’étais à la terrasse d’un café, pas sur place exactement. »
Perrine Olff-Rastegar
Annule ou annule pas ?
Pour la seconde infraction, il est question de l’annulation même de la manifestation. La militante a-t-elle bien transmis le message après l’arrêté d’interdiction ? Son mail, adressé aux journalistes et aux membres de son collectif explique trouver l’interdiction injustifiée et promet de tenir au courant les destinataires des futures actions du collectif. « N’est-ce pas là un message un peu ambigu, selon vous ? », soulève la procureure de la République adjointe, Agnès Robine. Selon ses termes, elle aurait préféré que l’organisatrice précise que se rendre malgré l’interdiction sur la place Kléber, vendredi 13 octobre 2023 à 17h, constituait une infraction.
« Peut-on accuser quelqu’un d’avoir organisé une manifestation qui a été par la suite interdite, c’est là toute la question. Et nous n’aurions pas ce débat si l’accusée était restée chez elle le jour même. Enfin madame, vous n’êtes pas une délinquante ! »
Agnès Robine, procureure de la République adjointe
« Je trouvais ça injuste que d’autres aient eu le droit de manifester et pas nous », concède la retraitée, faisant référence à d’autres manifestations à Strasbourg à la suite des attaques du Hamas. « Mais tout le monde a très bien compris que la manifestation que nous avions organisé était bien annulée », estime-t-elle.
Pour Me Dole, il appartient à la préfecture de faire la publicité de l’interdiction. « Les arrêtés de la préfecture du Bas-Rhin sont très compliqués à trouver sur le site web », constate-t-elle. « Ma cliente a communiqué par mail l’interdiction, il n’est pas écrit dans la loi qu’elle aurait dû appeler les participants un à un ! », poursuit-elle, estimant qu’une telle responsabilité ne devrait pas peser sur la militante.
Peu avant l’interruption de séance à midi, la représentante du ministère public requiert 1 000 euros d’amende dont 500 avec sursis. Elle ne demande pas d’interdiction de manifester mais estime que la militante, au vu des éléments qui lui sont présentés, doit être reconnue coupable des deux infractions.
« Tout ça pour ça », souffle Ihssane, 31 ans. Avec son grand drapeau palestinien et son keffieh rouge et blanc, elle aura attendu toute la journée que le délibéré soit prononcé. « Ça m’a choqué qu’il ait été dit que des slogans appelant à tuer les Israéliens ont été scandés, on dit “Israël assassin” mais jamais “mort aux Israéliens”, ça jamais », assure-t-elle. Elle dénonce un acharnement contre les militants pro palestiniens. « Je suis en colère », concède-t-elle.
Ihssane, 31 ans, a passé toute sa journée lundi 22 janvier 2024 à attendre le délibéré de l’audience visant Perrine Olff-Rastegar.Photo : Camille Balzinger / Rue89 Strasbourg
Relaxe totale pour la militante
Finalement, le jugement tombe peu après 18 heures : Perrine Olff-Rastegar est relaxée des deux chefs d’accusation. « La preuve n’a pas été rapportée que l’accusée est à l’origine de la manifestation qui s’est tenue malgré l’interdiction le 13 octobre », entame la juge. Quant à sa participation à un rassemblement interdit, la présidente Valentine Seyfritz estime que « la procédure était trop imprécise » et qu’il n’y a pas moyen « de savoir si les sommations ont été faites conformément au code de sécurité intérieure ». Comprendre : faute de preuve, la militante n’est pas condamnée.
Plus de dix heures après leur rassemblement matinal, les soutiens de Perrine Olff-Rastegar, inépuisables, semblent satisfaits et surtout, soulagés. « On te l’avait bien dit », « Ça valait la peine d’attendre depuis ce matin », « On va aller fêter ça »…
La militante se dit elle aussi soulagée et rassurée de ne plus être poursuivie. Elle sera parmi les participantes à la prochaine manifestation de soutien à la Palestine, affirme-t-elle en souriant.
Dans une salle du Patio, bâtiment de l’université de Strasbourg dédié aux langues et aux sciences sociales.Photo : Photo Guillaume Krempp / Rue89 Strasbourg / cc
Le 17 janvier 2024, l’Université de Strasbourg a annoncé se retirer du réseau social X (ex-Twitter) d’ici fin février. Une décision prise par le conseil de présidence de l’université en décembre 2023, un an après le rachat de la plateforme par Elon Musk.
« L’évolution prise par ce réseau motive cette décision : absence de respect du code de bonne conduite européen, certification payante, démultiplication de fausses informations et du complotisme. » Dans un communiqué de presse publié le mercredi 17 janvier, l’Université de Strasbourg (Unistra) a annoncé quitter le réseau social X, ex-Twitter.
Le compte @unistra, suivi par plus de 31 000 abonnés, restera actif jusqu’à fin février 2024. Il sera ensuite supprimé. Armelle Tanvez, directrice de la communication à l’Université de Strasbourg depuis plus de dix ans et administratrice de l’association Communication publique, revient sur la décision de l’institution.
Rue89 Strasbourg : D’où est venue l’initiative de l’Université de Strasbourg de se retirer de X (ex-Twitter) ?
Armelle Tanvez : Le sujet est en discussion depuis quatre ou cinq mois à l’Université. Des associations étudiantes ont fait remonter leurs interrogations à propos de la plateforme. Au service communication, nous sommes en première ligne mais nous n’avons pas pris seuls la décision. Cette dernière a été discutée plusieurs fois avant d’être actée en décembre 2023 par le conseil de présidence.
« Distinguer le vrai du faux devient extrêmement compliqué »
Le rachat du réseau social par Elon Musk a commencé à nous interroger fin 2022. Mais c’est après les attaques du Hamas en Israël le 7 octobre 2023 que nous avons réellement entamé les discussions pour se demander si oui ou non, être sur X correspondait aux valeurs de l’institution. Notamment lorsque le commissaire européen au marché intérieur, Thierry Breton, a annoncé qu’une enquête allait être menée par la Commission européenne (une procédure formelle a été ouverte le 18 décembre 2023, NDLR). Je pense que c’est cette procédure qui a été l’élément déclencheur.
Nous avons constaté que les contenus antisémites étaient de plus en plus présents sur X. De plus en plus de publications nous ont inquiétés. Tout et n’importe quoi y est dit. Distinguer le vrai du faux devient extrêmement compliqué pour les utilisateurs et utilisatrices. Nous nous sommes donc demandé si l’Université voulait participer à une telle plateforme.
Quel est l’impact, pour l’institution, de cesser de communiquer via X (ex-Twitter) ? Ce choix soulève-t-il des inquiétudes au sein des personnels enseignants-chercheurs ?
Dès que la question d’abandonner X a été abordée, elle a soulevé très peu de débat. La décision a été annoncée mardi 16 janvier aux directeurs des composantes. Et pour le moment, personne ne nous a dit qu’il trouvait que c’était trop rapide ou qu’il fallait revenir sur notre choix.
« On ne participe pas à une plateforme qui favorise la haine »
Collectivement, j’ai l’impression que de plus en plus de chercheurs quittent le réseau social et que dès lors, les inquiétudes restent très limitées. D’autant plus que les travaux universitaires sur les algorithmes et leurs fonctionnements opaques se multiplient. Je pense donc que la décision est comprise par le plus grand nombre.
Ceci dit, nous n’avons pas fait d’enquête formelle sur ce qu’en pensent les enseignants-chercheurs. Depuis que nous avons annoncé partir de X, je sens un certain soulagement, un contentement de se dire qu’on ne participe pas à une plateforme qui alimente la haine ou l’absence de fiabilité de l’information.
D’autant plus que les facultés et les laboratoires pourront décider s’ils restent ou non sur X, même si nous les incitons à en partir. Le compte de la présidence de Michel Deneken sera supprimé comme tous les comptes institutionnels, mais bien sur qu’individuellement, chacun est libre de faire ce qu’il préfère.
D’autres institutions entendent favoriser X pour faire passer leur communication. C’est le cas de la préfecture notamment, qui nous a invités à consulter ses publications pour être tenus informés de ses actualités. Pourquoi l’Unistra fait-elle le choix inverse ?
Notre parole existe dans la société à beaucoup d’autres endroits que sur X. Nous sommes sur plusieurs réseaux sociaux, sur Bluesky, Instagram, YouTube, Facebook et nous avons un site internet. Notre plus grosse communauté est celle qui nous suit sur Linkedin. Pour communiquer avec les étudiants, nous avons des canaux internes spécifiques. Ce qu’on publiait sur X, on le publiera sur Bluesky. À partir de là, je pense que nous n’avons pas besoin d’être présents sur X.
« Nous n’irons jamais sur TikTok »
Armelle Tanvez, directrice de la communication de l’Unistra
D’autant plus que nous sommes attachés à une éthique du débat public. Peut-on débattre sur X ? Je n’en suis pas certaine. Favorise-t-elle l’échange ? Pas forcément. Est-ce qu’utiliser ce réseau social pour communiquer est synonyme de transparence ? Je ne pense pas non plus. Pour les mêmes raisons qui nous font quitter X, je peux dire que nous n’irons jamais sur TikTok.
Nous ne sommes par ailleurs pas la seule université à avoir décidé de quitter X. Dans le réseau Udice, qui rassemble dix grandes universités de recherche en France, nous sommes les troisièmes à cesser de poster sur X, après Aix-Marseille (en octobre 2023, NDLR) et Bordeaux (en janvier 2024, NDLR).