Enquêtes et actualité à Strasbourg et Eurométropole

Stade de la Meinau, tram et TER du quotidien, au conseil de l’Eurométropole, des grandes dépenses et des impôts jusqu’en 2026

Stade de la Meinau, tram et TER du quotidien, au conseil de l’Eurométropole, des grandes dépenses et des impôts jusqu’en 2026

L’Eurométropole va présenter son Plan pluriannuel d’investissement qui implique une hausse de la taxe foncière de 64 euros en moyenne par propriétaire. Des dépenses et un recours à la fiscalité locale qui devraient occulter les choix de la majorité, notamment pour les transports en commun. À suivre ce vendredi 4 février en direct dès 9 heures.

Après la Ville, le 4 février, l’Eurométropole dévoile à son tour son Plan pluriannuel d’investissements (PPI), c’est-à-dire comment elle compte dépenser 1,5 milliard d’euros en travaux jusqu’en 2026. Comme à Strasbourg, ce PPI consiste à augmenter ces dépenses exceptionnelles par rapport au mandat précédent, de l’ordre de 200 millions d’euros (+15%).

En parlant projets, dépenses d’avenir et « transformation écologique du territoire », la majorité des maires et des écologistes espèrent un peu atténuer le débat budgétaire. Car l’opposition compte répéter à l’envie que pour réaliser ses objectifs, l’exécutif instaure un quadruplement du taux de taxe foncière (soit une hausse de 300% et non 400% comme l’a mal calculé l’opposition strasbourgeoise). Les maires d’opposition devraient rappeler à leurs homologues de la majorité que certains d’entre eux avaient fait campagne sur la stabilité des impôts dans leur commune. Or, ils vont avaliser un choix différent au sein de la métropole.

65 euros de taxe foncière en plus soit +300%

En effet, la part de l’Eurométropole passera en 2022 d’un taux de 1,15 à 4,6% sur la partie imposée. Soit un effort de 64 euros par an en moyenne pour les propriétaires dans les 33 communes selon les calculs de l’Eurométropole, auquel on peut ajouter la revalorisation des bases d’imposition décidées par le gouvernement. Un effort qui rapportera 25 millions d’euros de plus par an, financera une partie du fonctionnement et limitera la hausse de l’endettement.

Face aux critiques classiques sur le « matraquage fiscal », l’exécutif rétorquera qu’il met en place une « hausse des services inégalée » notamment le développement des transports en commun qui regroupent 43% des investissements. « Une famille avec deux enfants économise 500 euros par an avec la gratuité de l’abonnement CTS », défend par exemple le strasbourgeois Syamak Agha Babaei, vice-président en charge des Finances. « Les investissements représentent 600 euros par habitant et par an », ajoute la présidente Pia Imbs (sans étiquette). Le duo assure que seule une « portion congrue de la hausse des dépenses, la plus juste et modérée possible », est demandée au contribuable.

Pour les entreprises, la hausse représentera en moyenne 247€ pour les locaux commerciaux et 1 811€ pour les établissements industriels. Dans le détail, la fiche d’impôt n’augmentera « que » de 100€ ou moins pour 61% des entreprises et de 500€ maximum pour 90% des sociétés. Pia Imbs rappelle aussi que les entreprises avaient bénéficié de la baisse d’un tiers de la Cotisation foncière des entreprises (CFE) en 2020, en réponse au Covid.

Entre 2014 et 2016, la précédente coalition droite-gauche avait augmenté 3 années de suite ses impôts locaux (dont une fois de 150% la taxe foncière, puis de 1,5% et 3%). À la Ville, les écologistes souhaitent aussi ne plus augmenter le taux d’impôt, mais ont renvoyé la responsabilité aux choix financiers du futur gouvernement vis-à-vis des communes. À l’Eurométropole (EMS), Pia Imbs prend un engagement plus ferme :

« Nous faisons la promesse d’une seule hausse sur le mandat. »

Parmi les grandes dépenses jusqu’en 2026 figurent notamment :

    Les extensions tram à l’ouest, le nord et vers les institutions européennes (100 millions d’euros pour l’EMS). À ce sujet, les documents budgétaires mentionnent « un solde » de 20 millions d’euros en 2027, ce qui pourrait faire dire aux oppositions que les lignes se seront pas achevées pour 2026.Les autres extensions pour transports en commun (TSPO, prolongation du BHNS G jusqu’à Danube).La rénovation-extension du stade de la Meinau (70 millions pour l’EMS), dont le coût prévisionnel augmente de 20% (119,6 millions).Le nouveau Parc des expositions au Wacken (92 millions).120 kilomètres de pistes cyclables pour 100 millions et 50 millions pour les autres routes.190 millions pour l’habitat dont 72,5 millions pour les logements sociaux, 46,1 pour l’habitat privé et 35,4 pour la rénovation urbaine.43,3 millions pour des bâtiments pour l’Université (Paps-Pcpi ; Next-Med ; ISU ; ESPE à la Meinau).10 millions pour la 2è phase de la piscine de Hautepierre et des travaux à Schiltigheim et au Wacken.

« Un tiers des projets vient du mandat précédent », explique Pia Imbs. D’autres travaux lancés en cours de mandat devraient de la même manière déborder les années suivantes, par exemple l’achèvement du quartier des Deux-Rives (38 millions pour ce mandat). « On a beaucoup parlé de la végétalisation des cours d’école à Strasbourg, mais il y a aussi beaucoup de demandes dans les communes que nous allons aider. Ce sera aussi le cas pour l’acquisition de nouveaux véhicules moins polluants ou encore des gymnases et des cimetières », poursuit Pia Imbs, la maire de Holtzheim, qui met en avant « l’aide aux communes ».

Les train du REM pour commencer

Avant cette grande explication, le premier point devrait être plus consensuel avec le « Réseau express métropolitain » (REM) réalisé avec la Région Grand Est. Comme annoncé depuis quelques années, il s’agit d’avoir des trains toutes les demi-heure de 5h à 22h sur les lignes principales, et plus de passages le week-end. Le service commencera le 12 décembre 2022.

Dans le détail, les gagnants sont Molsheim (179 arrêts par jour ; +44%), Entzheim (177 arrêts/jour +61%), Geispolsheim (79 arrêts/jours ; +93%) Vendenheim (140 arrêts/jour ; +137%) ou la gare méconnue de Graffenstaden (68 arrêts/jour +209%) au milieu de la zone commerciale de la vigie.

Les dépenses de fonctionnement supplémentaires (14,5 millions/an) sont partagées à 50/50 avec la Région Grand Est. Idem pour les nouvelles recettes.

Schéma du réseau express métropolitain, qui compare les fréquences avec 2020. (document

Les communes extérieures appelées à participer et abonder

En revanche, le REM ne permet pas de meilleure desserte sur la ligne vers Lauterbourg au nord (qui passe par Schiltigheim-Bischheim) et Strasbourg-Offenbourg à l’est. L’Eurométropole espère une amélioration pour 2025. À cette date-là, la Région espère avoir ouvert à la concurrence les deux lignes « transfrontalières », dans un marché qui comprendra aussi les travaux d’entretien.

Enfin un syndicat mixte avec les communautés de communes sera fondé. Il devra veiller à améliorer les correspondances avec les autres services de transport et simplifier la tarification. Les intercommunalités pourront aussi abonder financièrement ce système de transport, financé uniquement par la Région et l’Eurométropole, pour améliorer l’offre à long terme.

L’ordre du jour compte 70 points. Il sera aussi question d’un lissage des prix pour les habitants de Hautepierre et Poteries reliés à la chaufferie de Hautepierre, non-concernée par le « bouclier tarifaire » du gouvernement, qui contient la hausse des prix du gaz à 30%.

« Arthur Rambo » de Laurent Cantet : comment Twitter m’a tué

« Arthur Rambo » de Laurent Cantet : comment Twitter m’a tué

Dixième long-métrage de Laurent Cantet, Arthur Rambo retrace, sans en être une copie conforme, l’affaire Medhi Meklat, jeune journaliste fauché en plein vol par des tweets haineux, rédigé… par lui-même. Un personnage complexe pour ce réalisateur qui aime sonder les méandres de l’esprit humain. Rencontre.

Pour son dixième film, Laurent Cantet se penche sur l’affaire Medhi Meklat, qui avait secoué la sphère médiatique en 2017. Medhi Meklat a 17 ans quand il est repéré par Pascale Clark pour animer une chronique sur France Inter, avec son coéquipier du Bondy Blog (média basé en Seine Saint-Denis), Badroudine Said Abdallah. Ensemble, ils réalisent des documentaires, écrivent un premier roman, deviennent des journalistes reconnus.

Jusqu’à ce qu’en 2017, une série de messages très dérangeants resurgissent du fil Twitter de Marcelin Deschamps, le pseudo ironique de Medhi Meklat, tweets écrits entre 2011 et 2015. Le long-métrage de Laurent Cantet commence ici : son personnage Karim D. est en pleine ascension sociale et médiatique, les messages de son alias sur Twitter, Arthur Rambo, font basculer cette réussite, qui va s’avérer fragile, dans un monde qui n’est pas le sien.

On n’est pas sérieux quand on a 17 ans ? Le réalisateur questionne notre rapport aux réseaux sociaux, mais aussi la possibilité d’un véritable changement de milieu social. Sans pour autant atténuer les propos réellement polémiques de son personnage, il tente des hypothèses d’explications.

Bande annonce d’Arthur Rambo

Rue89 Strasbourg : Qu’est-ce qui vous a interpellé dans l’affaire Medhi Meklat au point de vouloir en faire un film?

Laurent Cantet : Je voulais me pencher sur les réseaux sociaux, qui prennent de plus en plus de place dans nos vies privées et dans le champ politique, mais que nous utilisons sans les questionner assez. Dans mon précédent film, l’Atelier (2017, avec Marina Foïs et Matthieu Lucci, NDLR), déjà mon personnage principal était un jeune homme qui cherchait sur les réseaux des réponses faciles à ses troubles et à son désir d’extrémisme. Cette histoire m’a permis d’aller voir ce qu’il se passait sur les réseaux et de décrire le monde d’aujourd’hui.

De plus, cette affaire, je l’ai vécue en direct, je connaissais Medhi Meklat et Badroudine Said Abdallah à travers mes lectures du Bondy Blog et par leurs chroniques sur France Inter. Medhi Meklat avait 17 ans à l’époque, j’étais assez bluffé par ses sujets politiques et culturels et quand j’ai découvert ses tweets, j’ai eu du mal à recoller les morceaux. J’ai été saisi d’un vertige et j’ai voulu partager ces questions à l’aide du cinéma.

Est-ce que vous avez rencontré Medhi Meklat et son entourage pour tenter de comprendre le personnage ?

Je l’ai rencontré pour lui dire que j’allais m’inspirer de cette affaire mais que je n’allais pas raconter son histoire, plutôt faire une synthèse des questions soulevées par ce genre d’histoires. Lui-même était dans un moment de réflexion puisqu’il écrivait un livre qui revenait sur les événements de 2017, Autopsie. Je ne voulais surtout pas faire un biopic et j’ai trouvé la solution pour retranscrire mon vertige quand j’ai resserré le scénario sur les deux jours qui suivent la diffusion des tweets. Il s’agit de voir le résultat de la résurgence de ces messages, alors que le personnage est en pleine ascension : à partir de là, je tire des fils qui ne vont pas tout expliquer car il y a trop de complexité, mais qui permettent de formuler des hypothèses.

Le spectateur balance sans cesse entre la sympathie que nous inspire le personnage de Karim D. et l’horreur suscitée par les tweets d’Arthur Rambo, son alias sur Twitter. Cela nous place dans une situation très inconfortable.

C’est l’inconfort que j’ai pu éprouver face à la réalité de ce personnage. Cela a été le fruit d’un dosage millimétré, de l’écriture jusqu’au montage, notamment dans l’ordre d’apparition des tweets, pour que la violence des propos ne nous empêche pas de revenir vers lui. On a donc dosé cette bascule entre l’empathie pour un jeune homme qui est dans un état de sidération, et le rejet que l’on peut ressentir car je tenais à ne pas en faire une victime et qu’il endosse la responsabilité de ses messages.

La lumière et la part d’ombre de Karim D. alternent tout au long du film Photo : Céline Nieszawer / doc remis

Vous ne vouliez pas prendre position ?

Dans mes films, j’essaie de ne pas juger mes personnages, je les décris pour essayer de comprendre leurs fonctionnements. Avec mes co-scénaristes Fanny Burdino et Samuel Doux, le procédé que nous avons construit est une séries de « procès » où Karim se trouve, tour à tour, confronté à ses cercles privés et professionnels : il s’explique, se justifie de différentes façons et ainsi, par petites touches, on ne dresse pas un portrait mais on arrive à balayer un certain nombre d’hypothèses.

Comment réagissent les premiers spectateurs et notamment les adolescents ?

Ils comprennent les enjeux plus directement que, peut-être, un public plus âgé. ils ne sont pas dans la négation du problème, quelqu’un m’a dit : « Il faut supprimer les réseaux sociaux », mais dans un décodage. Ils connaissent bien mieux les règles du jeu que nous et accepte plus facilement ce troisième degré dont parle Karim. J’ai l’impression, grâce à l’éducation sur les réseaux dans le système scolaire ou ailleurs, qu’ils connaissent les dangers et l’emprise d’Internet.

Karim (Rabah Naït Oufella) a été dépassé par son personnage Photo : doc remis

Ils en ont conscience peut-être, mais ils sont aussi dépassés, comme nous tous d’ailleurs.

Bien sûr, Karim revendique le droit à la provocation mais il a été dépassé par son personnage. Quand son petit frère le renvoie à une colère, qui a dû être la sienne quelques années auparavant, il comprend qu’il est allé trop loin. Cette colère, il l’a domptée parce qu’il voulait être accepté dans un nouveau milieu social, mais je peux la comprendre. Et quand on a un outil comme Twitter pour exprimer si facilement cette colère, elle déborde…

La mise en scène des tweets est très forte, si Karim veut les minimiser par la parole, vous leur donnez un poids énorme, vous en avez fait un personnage à part entière.

Ils sont une excroissance de Karim, ils viennent parasiter l’histoire. Sur fond noir, ils sont de plus en plus présents et le rythme de défilement devient tel qu’on ne peut plus les suivre, comme sur un fil Twitter.

Pour finir, comment s’est fait le choix de Rabah Nait Oufella, avec qui vous aviez déjà travaillé pour Entre les murs en 2008 ?

C’est un acteur que j’ai vu grandir et je pensais à lui en écrivant. À un moment, je me suis même méfié de cet attachement mais je suis revenu vers lui et je le trouve très convaincant dans toutes les facettes du personnage. On sent à la fois le plaisir qu’il a d’en être et en même temps le fait qu’il n’est pas tout à fait à sa place. Au fur et à mesure de ses prises de conscience, il glisse vers quelque chose de plus intime. Il endosse ces différentes facettes avec une grande facilité, sans chercher à être plus malin que le personnage. Le seul travail que j’ai eu à faire avec lui c’est de gommer son regard charmeur et son sourire, il a dû se durcir un peu.

Fin de la grève à Kronenbourg, et quelques avancées pour les salariés

Fin de la grève à Kronenbourg, et quelques avancées pour les salariés

L’activité a repris normalement ce jeudi 3 février à l’usine Kronenbourg à Obernai. La direction a annoncé une augmentation de 4% et au moins 5 « équivalents temps plein » supplémentaires. C’est en-deçà des revendications de la CGT, qui demandait 5% d’augmentation, une prime de 1 000 euros et 15 à 20 embauches.

Les chaines de la brasserie Kronenbourg tournent à nouveau normalement depuis 14h ce 3 février. La décision a été prise en assemblée générale à midi. Pendant 10 jours, du 24 janvier au 2 février, environ 80% des employés de la production n’ont pas pointé. Entre sept et huit groupes d’embouteillages sur dix étaient à l’arrêt. L’effectif de l’usine à Obernai est de 450 personnes, dont 200 ouvriers.

Brigitte Perret, secrétaire générale de la CGT Kronenbourg, considère qu’il y aura « un avant et un après ». « Nous étions unis, et nous avons créé un vrai rapport de force avec la direction », dit-elle. La mobilisation avait commencé entre la deuxième et la troisième réunion de la négociation annuelle obligatoire. « Ils voulaient limiter l’augmentation à 3%. Nous demandions 5% », rappelle Brigitte Perret.

Finalement, la CFDT, qui n’a pas participé à la grève et continuait les négociations, s’est positionnée le 27 janvier en faveur d’un « accord à 4% avec une clause de rattrapage de l’inflation » selon Mohammed Gherairi, délégué central du syndicat. Puis, Force Ouvrière a suivi quatre jours plus tard, rendant l’accord majoritaire. Il a donc pu être signé le 1er février.

« Nous demandons 15 à 20 embauches pour relâcher la pression sur les salariés »

Kronenbourg a aussi annoncé l’embauche d’au moins 5 personnes à temps plein. Pour Brigitte Perret de la CGT, même s’il y a des avancées, le bilan de la grève reste mitigé :

« L’usine tourne en flux tendu, avec 35% de CDD et d’intérimaires. Souvent, pour remplacer les collègues malades, des ouvriers sont prévenus de leurs horaires la veille. Nous demandions entre 15 et 20 embauches de personnes à temps plein, pour relâcher la pression sur les salariés. Nous voulons aussi une transformation de tous les CDD en CDI. Enfin, nous revendiquions une prime de 1 000 euros, que nous n’avons pas obtenu. »

Le cas de Rabah, ouvrier qui a cumulé 161 contrats de mission en intérim et 16 CDD en 30 ans à Kronenbourg, illustre le recours régulier aux salariés précaires dans l’entreprise. Mohammed Gherairi de la CFDT estime que l’accord de 4% et les 5 embauches ont été acquis grâce à la négociation et non la grève. Pour Brigitte Perret, au contraire, c’est l’unité des salariés dans la grève qui a fait plier la direction. « Le succès de cette mobilisation est un bon présage pour les prochains mouvements sociaux », relève-t-elle.

Dans un communiqué envoyé en fin d’après midi le 3 février, la direction annonçait aussi le retour à la normale chez Kronenbourg, et la mise en place d’un dialogue « serein et constructif » sur les conditions de travail.

Un corps en décomposition avancée repêché près du pont Saint-Thomas dimanche 30 janvier

Un corps en décomposition avancée repêché près du pont Saint-Thomas dimanche 30 janvier

Le corps d’un homme a été repêché par les pompiers au niveau du pont Saint-Thomas en fin d’après-midi le dimanche 30 janvier. Une enquête a été ouverte mais la police n’a pas encore réussi à déterminer les circonstances du décès.

« J’ai vu dériver un cadavre hier soir à travers les canaux de la Petite-France. Le fait qu’il ait dérivé lentement sans que personne ne le remarque est une expérience étrange, » indique Vincent. Il était de sortie avec sa famille à Strasbourg dans l’après-midi du dimanche 30 janvier. Pendant que ses deux enfants jouent dans le square des Moulins, le père observe une forme étrange à la surface de l’Ill. Il pense d’abord à « un mannequin, parce que son visage était très gonflé et gris, comme une boule de scotch Gaffer et qu’il portait encore ses lunettes. »

La police finit par se rendre sur place et interroge le père de famille : « Je leur ai montré la vidéo, ils semblaient assez sûrs que c’était un corps qui était resté longtemps dans l’eau. »

Une enquête en cours

Personne ne prête attention au cadavre flottant. Heureusement les enfants sont trop occupés à jouer. Des touristes se prennent en selfie ou photographient les édifices pittoresques de la Petite-France. « Cette scène m’a fait prendre conscience du fait qu’on peut mourir dans l’Ill, estime Vincent, j’ai cherché sur Google ensuite, ce n’est pas la première fois qu’on trouve un cadavre dans l’Ill. »

Commercial de profession, Vincent s’étonne d’avoir été le seul spectateur de ce macabre spectacle : « Il y a des caméras partout, tout le monde filme avec son téléphone, mais plus personne ne voit avec ses yeux… »

Contactés, les pompiers confirment avoir repêché un corps d’une personne d’une soixantaine d’années aux alentours de 17 heures au niveau du pont Saint-Thomas. Dans un mail envoyé dans la matinée du mercredi 2 février, la police confirme qu’une enquête a été ouverte : « Pour l’heure celle-ci n’a pas permis de répondre aux questions que nous aussi nous posons à ce jour. »

Des obsèques plus drôles et plus écolos à Strasbourg ? Le chemin est encore long

Des obsèques plus drôles et plus écolos à Strasbourg ? Le chemin est encore long

L’association strasbourgeoise « Maintenant, l’après » milite pour proposer des obsèques plus éthiques et écolos mais la loi française n’est pas prête.

Le saviez-vous ? Le granit de nos pierres tombales vient de Chine et d’Inde. Saviez-vous aussi que rien, dans la loi, n’oblige à tenir une cérémonie religieuse pour la mort d’un proche, voire une cérémonie tout court ? « Il serait tout à fait possible de commémorer dans les bois, un peu comme un mariage », pointe Mélissa, présidente de l’association Maintenant, l’après.

Fondée en 2019 à Strasbourg, l’association veut tout chambouler dans le secteur funéraire, proposer une alternative plus éthique, plus écologique, d’après les mots de Valentine, une des cofondatrices.

La Coopé de la mort

Leur objectif est de créer une coopérative de service funéraire : des pompes funèbres dont la gouvernance serait partagée (un associé = une voix) afin de proposer d’autres choix aux proches d’une personne décédée, comme l’explique Melissa, une autre cofondatrice :

« Aujourd’hui, quand on doit réaliser des obsèques de proches, le choix est très restreint. On fait une célébration, souvent dans un lieu cultuel, et pour le corps, on enterre ou on incinère, voilà. »

La coopérative proposerait des célébrations en-dehors des lieux de cultes, « où on pourrait passer des larmes au rire », avance Valentine, avec de la musique, des propositions écologiques pour les matériaux (cercueils en carton, urne bio-dégradable), et pour les corps des solutions comme le « compost humain » ou la forêt sanctuaire. Valentine détaille :

« Les méthodes habituelles ont un impact écologique, entre les matériaux qui viennent de loin et l’énergie utilisée pour les fabriquer ou pour brûler le corps et le cercueil. Alors pour des personnes qui ont été vertueuses toute leur vie, être enterrées et entourées de plastique et de produits phyto-sanitaires, ce n’est pas forcément très cohérent ».

Il existe déjà cinq coopératives funéraires en France. À Nantes, par exemple, on peut choisir un cercueil en bois parisien Pirée et un capiton en coton naturel. Ajoutés à toute la prestation classique obsèques, la famille doit alors débourser 3 450 euros, soit bien moins que 4 300€, le prix moyen des obsèques selon la Confédération des professionnels du funéraire et de la marbrerie.

Valentine et Mélissa amènent toujours leur tête de mort mexicaine aux apéros mortels, pour alléger l’ambiance Photo : DL / Rue89 Strasbourg

La loi face aux méthodes radicalement écolos

Le projet strasbourgeois a germé dès 2018 dans l’esprit de personnes éloignées du milieu funéraire, réunies dans la « dynamique » Start-up de territoire. Près de 4 ans plus tard, la concrétisation de la mort écolo à Strasbourg est toujours lointaine, notamment à cause de la législation. La loi n’autorise pas les méthodes les plus écolos, comme le fait qu’un corps devienne du humus, le fameux « compost humain », expliqué par Valentine :

« Il n’y a pas de cercueil, juste un linceul. Le corps est posé sur du broyat et recouvert de copeaux, et se décompose à son rythme. Puis, les restes osseux sont réduits en cendres. C’est ce qu’il y a de plus vertueux et ce qui se rapproche le plus du retour à la terre. »

Valentine, co-fondatrice de Maintenant, l’après, à propos de l’humusation.

La méthode n’est autorisée qu’aux États-Unis, dans l’État de Washington et de l’Oregon. « Nous demandons des espaces dédiés, dans des cadres naturels, pour cette méthode déjà utilisée il y a des milliers d’années », explique Valentine. Mais elle constate que « la société française n’en est pas encore là », à en juger par les réticences autour des forêts cinéraires. Ces parcelles de forêt, dédiées à l’enfouissement d’urnes biodégradables sous un arbre, existent en Allemagne. Melissa en a visité une récemment à Schlingen, dans le Bade-Wurtemberg en Allemagne et vante ses avantages :

« Les arbres où des cendres ont été déposées ne peuvent être coupés, donc cela favorise la biodiversité. Ces bouts de forêt deviennent de fait sanctuarisés. »

Si l’association s’active auprès d’élus locaux pour rendre ces lieux possibles, elle constate des freins dans la réglementation et la culture des institutions :

« En France, les lieux d’inhumation, les jardins du souvenir etc., doivent être des lieux clos. Il n’existe même pas de concession pour une dispersion de cendres dans la forêt. »

Faire accepter le recyclage des dernières demeures

Pour Valentine et Mélissa, un changement des mentalités est nécessaire pour imaginer les obsèques du futur. Designer, Melissa entame une réflexion pour proposer de nouvelles stèles et s’est engagée dans l’association quand elle a réalisé qu’elle finirait « six pieds sous terre avec un bloc gris ou noir posé là ». Elle plaide pour des stèles personnalisées et recyclées. « Car, actuellement, on est en train de dépasser nos ressources en granit. Alors, pourquoi ne pas créer des pierres de synthèse à partir de déchets ? » « Ou tout simplement introduire le réemploi », ajoute Valentine :

« Les stèles dont la concession est terminée pourraient ne pas être jetées mais réutilisées en changeant juste le nom, tout simplement. Mais même ça, c’est encore assez gênant pour la majorité des gens. »

Si elle pointe que certaines communes françaises proposent un catalogue d’objets funéraires d’occasion, elle n’en connaît pas en Alsace. En fait, pour elle, la difficulté de faire émerger des offres alternatives réside dans le monopole de grands groupes de pompes funèbres et de pratiques totalement standardisées sur toute la filière :

« La réglementation funéraire est une chape de plomb pesant sur la créativité. La loi impose une disparition du corps en 6 jours. Les familles pourraient faire la célébration dans les trois semaines suivantes, sans le corps, mais elles le font en général dans ces 6 jours. Avec la sidération, pas facile de faire preuve de créativité. Alors les familles acceptent les propositions basiques. Aussi parce qu’il y a beaucoup de croyances limitantes, les gens ne savent pas ce qui est possible… »

L’association souhaite aussi revaloriser les cimetières et en faire des lieux de vie, qui accueilleraient des visites guidées Photo : Rue89 Strasbourg

Un circuit court du funéraire à bâtir de zéro

D’où leur solution « clé en main » de coopérative, qui pourrait proposer tout un réseau de prestataires locaux. Les fondatrices espéraient débuter leur entreprise en 2021 mais l’irruption du covid a mis un coup d’arrêt aux rencontres. En 2022, l’objectif est de « monter un circuit court du funéraire » explique Valentine :

« Au lieu de venir de Chine, les linceuls pourraient être fabriqués dans les Vosges, par une couturière qu’on a identifiée, ou être remplacés par du linge de maison de la famille. Pour les urnes, nous allons travailler avec une artiste de Benfeld. L’objectif est aussi de proposer des fleurs de saison, qui viennent de France et non des Pays-Bas… »

Elles cherchent aussi des partenaires musiciens et des maîtres de cérémonie, afin d’assurer les célébrations, ainsi que des « doulas de fin de vie », sorte d’accompagnatrices des derniers moments, pour partir sereinement.

Enfin, la coopérative veut proposer des prix « justes, équitables et transparents », intégrer les futurs salariés dans la gouvernance et réinvestir les bénéfices dans le développement des alternatives funéraires.

Jeunes fans de stèles recherchent recrues mortelles

À ce jour cependant, « Maintenant, l’après » ne compte qu’une dizaine de bénévoles, dont plusieurs conseillers funéraires diplômés, mais aussi des retraités, des infirmières et des assistantes sociales… Mélissa glisse que le projet a « cruellement besoin de bénévoles supplémentaires ».

Les jardins du souvenir sont des lieux clos où les cendres peuvent être dispersées. « Maintenant, l’après » milite pour l’ouverture de forêts cinéraires en France. Photo : wikimedia commons

Les deux bénévoles pointent que les autres activités de l’association leur demandent beaucoup de temps et d’énergie : c’est que « Maintenant, l’après » souhaite, plus généralement, ouvrir les débats autour du décès et des obsèques et « briser le tabou sur la mort ».

Depuis 2019, elles organisent les « Rendez-vous mortels » avec des conférences, des visites de cimetières et de forêts sanctuaires en Allemagne. Tous les mois, les « Apéros mortels » réunissent toutes les personnes intéressées pour parler d’un sujet dédié, comme les soins palliatifs ou l’humusation…

Adoptant volontairement un ton et des graphismes plutôt joyeux, les deux bénévoles sont d’avis qu’il faut prendre le temps de réfléchir à ses « obsèques de rêve », et d’en parler en famille. En multipliant ces actions, l’association retarde la création de la coopérative, mais estime qu’elle contribue à faire connaître ses idées, une étape nécessaire pour changer la législation. Mélissa n’a que 27 ans et elle est confiante dans le fait que le sujet peut toucher tout le monde :

« Le grand public n’y pense pas forcément tous les jours, mais quand on parle autour de nous des absurdités du marché et des alternatives possibles, les gens se sentent concernés. Je pense qu’ils sont prêts. »

À la manif du secteur social : « Personne ne veut bosser dans ces conditions »

À la manif du secteur social : « Personne ne veut bosser dans ces conditions »

Les employés du secteur social ont manifesté mardi 1er février à Strasbourg comme ailleurs en France. Dans le cortège, des éducateurs et assistants sociaux ont dénoncé une grande souffrance au travail, liée à un sous-effectif chronique dans les structures et à une « gestion industrielle » de l’accompagnement social.

« Moi je vais bientôt quitter mon poste », annonce Loick (prénom modifié), délégué du personnel à Horizon Amitié : « Je n’en peux plus de récupérer les collègues à la petite cuillère parce qu’ils ont été accusés de mal faire leur travail par la direction ou licenciés », souffle-t-il. Mardi 1er février à Strasbourg, il répond à l’appel à manifester des syndicats CGT, FO et Sud des secteurs social et médico social :

« La plupart des services d’Horizon Amitié sont en sous-effectif. À certains moments, des travailleurs sociaux peuvent être un ou deux pour encadrer un foyer avec 170 personnes. Cela les expose à des risques. Il y a des agressions. Le manque de personnel rend parfois impossible l’accompagnement social que nous sommes censés porter. Et pour ne rien arranger, notre direction est ultra verticale et pratique un management violent. En 2020, on a eu un turn-over de plus d’un tiers des effectifs en CDI. »

Pendant une heure et demie, 800 salariés des secteurs social et médico-social ont manifesté à Strasbourg. Photo : TV / Rue89 Strasbourg

« La moitié des collègues veulent partir »

Malgré le froid et la pluie, environ 800 personnes affluent au rassemblement. Le rendez-vous est symboliquement fixé devant le siège de la Collectivité européenne d’Alsace (CEA), le département finance la protection de l’enfance. Rue89 Strasbourg a publié une enquête début janvier sur le foyer de l’enfance, où les salariés souffrent de conditions de travail particulièrement difficiles. Gwen, auxiliaire de puériculture au foyer Marie-Madeleine, raconte :

« En théorie on est une auxiliaire pour trois enfants. Mais dans les faits, on est une pour cinq. En décembre, un garçon de trois ans a voulu porter un nourrisson et l’a laissé tomber parce qu’on ne peut pas gérer toutes les situations. Cela aurait pu être très grave. On est sur les nerfs, fatigués. La moitié des collègues veulent partir. »

Selon Gwen, à cause du manque de personnel, les enfants peuvent se mettre en danger dans sa structure. Photo : TV / Rue89 Strasbourg

Une batucada anime l’avant du cortège. À quelques mètres, Thomas, travailleur social dans une association d’aide aux demandeurs d’asile, relate qu’il est censé accompagner 35 personnes. Dans sa structure, les salariés à ce poste en accompagnent plus de 50 en réalité :

« On est obligés de prioriser nos actions en fonction de l’urgence. Par exemple, on privilégie les aides pour l’accès aux soins, comme le renouvellement de la complémentaire santé solidaire (ex-CMU), et on ne fait pas certaines inscriptions d’enfants à l’école. C’est très frustrant de ne pas pouvoir faire notre travail. Faute de temps, on voit des situations se dégrader. »

Mot d’ordre : une revalorisation de 183 euros nets

Toutes les personnes interrogées insistent sur la nécessité de « revaloriser les salaires des métiers du social ». Jérôme Bardot, porte parole de la CGT, observe un manque d’attrait pour ces professions qu’il impute notamment aux faibles rémunérations :

« Nos métiers sont de plus en plus difficiles, on est face à des problématiques dures, on travaille le week-end et la nuit. Les jeunes commencent à 1 300 euros nets voir moins, après trois ans d’études minimum. Si les structures sont en sous-effectif, c’est parce qu’elles ont des restrictions budgétaires mais aussi parce qu’elles n’arrivent plus à recruter. Il y a de nombreux postes vacants. Mais personne ne veut bosser dans ces conditions. »

Ainsi, les syndicats demandent une revalorisation de 183 euros nets par mois, alignée sur l’augmentation obtenue par les soignants dans le cadre des accords du Ségur de la santé. Morgan, éducateur spécialisé au foyer pour adultes handicapés Saint-Joseph de Lutterbach, dénonce :

« Dans notre structure comme dans celles de toute la France, les éducs, les personnels administratifs et logistiques n’ont pas la revalorisation que touchent les aide soignantes et les infirmières. C’est très bien pour elles. C’est une injustice pour nous. Les jeunes travailleurs sociaux commencent à 1 200 euros nets. Résultat : plus personne ne veut de ces postes. »

Morgan estime que lui et ses collègues sont sous payés. Photo : TV / Rue89 Strasbourg

« Nos métiers ne font plus sens »

Enfin, Géraldine, assistante sociale, alerte sur l’aspect « industriel » de l’accompagnement. Salariée dans une association d’aide aux sans-abris, elle devait suivre 20 dossiers de familles ou de personnes isolées. « Cela implique d’expédier les cas », dit-elle :

« De nombreuses associations, comme la mienne, ont un fonctionnement extrêmement vertical et répressif. On nous demande des chiffres, un nombre de personnes suivies, pour que l’État puisse mettre ça en avant. Mais concrètement, souvent, l’accompagnement n’est pas suffisant. Si une personne consomme de la drogue ou ne paye pas le loyer, on doit l’expulser. Il n’y a plus de places dans les structures d’hébergement d’urgence. On perd le sens de notre travail, qui est de nous adapter aux bénéficiaires.

Aussi, le contexte général n’aide pas. Avec la dématérialisation des procédures, on est censés apprendre à utiliser France Connect à des personnes sans-abris depuis 30 ans qui ne savent pas comment fonctionne une souris… Il y a plein de choses comme ça, complètement absurdes. »

Pour l’intersyndicale, les travailleurs sociaux doivent aussi voir leurs salaires revalorisés de 183 euros net, comme les soignants. Photo : TV / Rue89 Strasbourg

La CGT porte la banderole de tête, sur laquelle est inscrit : « Non à la logique de rentabilité dans le secteur de la santé et du social. » Le parcours prend fin devant l’opéra, place Broglie, où les représentants syndicaux prennent la parole et sont copieusement applaudis par la foule. Michel Poulet, de Force Ouvrière, indique qu’une délégation a été reçue le matin même par le directeur de cabinet de Josiane Chevalier, la préfète du Bas-Rhin. Il précise :

« On a livré nos revendications pour qu’il les relayent au gouvernement. C’est principalement à l’État de débloquer des fonds car c’est lui qui mandate et finance les associations de solidarité. Sans une revalorisation des métiers du travail social, par le salaire et par les conditions d’exercice, cette crise ne finira pas. Elle a des conséquences graves et concrètes pour les salariés et les usagers. »

« Collège mort » à Ostwald vendredi contre le manque de moyens

« Collège mort » à Ostwald vendredi contre le manque de moyens

Fuites d’eau et cafards dans le gymnase, manque de remplaçants, cantine fermée, promiscuité dans les classes… Des parents d’élèves du collège Martin Schongauer n’enverront pas leurs enfants en classe vendredi 4 février. Avec une partie des professeurs, ils demandent plus de moyens à l’Académie pour cet établissement de banlieue.

« Les conditions d’enseignement sont très mauvaises », constate Émilie (prénom modifié), enseignante du collège Martin Schongauer, lequel accueille un peu plus de 560 élèves à Ostwald. Elle est solidaire d’une mobilisation orchestrée par des parents d’élèves vendredi 4 février. Dans un tract destiné aux collégiens et à leurs familles, ces parents appellent les élèves à ne pas venir en cours ce jour là. Avec cette journée « collège mort », ils entendent demander plus de moyens à l’Académie de Strasbourg.

Des banderoles ont été accrochées devant le collège Martin Schongauer. Photo : remise

« Des cafards et des fuites d’eau dans le gymnase »

Émilie détaille :

« Depuis les vacances de la Toussaint, l’un des deux profs de techno est absent. Il n’y a toujours pas de remplaçant depuis trois mois. En attendant, 11 classes dans le collège dont toutes celles de quatrième et de troisième n’ont pas de cours de cette matière alors qu’elle peut-être demandée au brevet. Des classes comptent plus de 30 collégiens, qui sont les uns sur les autres en raison d’un nombre de tables insuffisant.

Dans le gymnase, il y a des cafards et des fuites d’eau qui coule du plafond sur le terrain et le long des fils électriques. Le chauffage ne fonctionne pas. La cantine n’est plus aux normes et a dû être fermée. Les demi-pensionnaires sont amenés en bus dans un restaurant scolaire à Lingolsheim et n’ont que 25 minutes pour manger. Nous n’avions pas d’infirmière scolaire depuis septembre, on nous en promet une après les vacances de février mais deux jours par semaine seulement. »

Des membres du personnel assureront une présence devant l’établissement

Dans leur tract, les parents d’élèves demandent en outre deux postes supplémentaires d’assistants d’éducation, un deuxième poste de secrétaire, un poste de principal adjoint et un deuxième poste de conseiller pédagogique d’éducation.

Émilie annonce qu’elle sera présente avec ses collègues pour accueillir les élèves qui voudront tout de même venir en classe. Devant l’établissement, des membres du personnel se relayeront pour « crier quelques slogans et communiquer avec les passants », indique-t-elle. De 7h30 à 8h et de 12h à 13h, ils proposeront du café.

#collège Martin Schongauer

Mobilisation étudiante jeudi « contre les attaques du gouvernement »

Mobilisation étudiante jeudi « contre les attaques du gouvernement »

Un collectif de syndicats appelle les étudiants à une mobilisation jeudi 3 février, contre la politique du gouvernement vis à vis de l’université. La sélection via Parcoursup et les propos d’Emmanuel Macron pour des frais d’inscriptions élevés sont dénoncés par ce collectif.

Solidaires, Alternative Étudiante, le NPA et la CGT appellent les étudiants à une mobilisation nationale jeudi 3 février pour dénoncer un « quinquennat de mépris ». À Strasbourg, un rassemblement est prévu à partir de midi devant le bâtiment du Patio, sur le campus de l’Esplanade. Ce rassemblement sera suivi d’une assemblée générale dans l’amphi 5 de l’Institut Lebel, toujours sur le campus de l’Esplanade, afin de décider des suites à donner au mouvement.

Cette mobilisation fait suite à un appel des « étudiants sans fac » de Nanterre, selon Paulina, étudiante syndicaliste de Solidaires à Strasbourg. Elle vise à dénoncer la politique générale vis à vis de l’enseignement supérieur tout au long du quinquennat d’Emmanuel Macron, dont une « baisse des places en licence et en master, l’augmentation de la précarité chez les étudiants et surtout une volonté d’augmenter les frais d’inscription. »

En 2018, les étudiants s’étaient déjà mobilisés contre Parcoursup Photo : archives Rue89 Strasbourg / cc

Après avoir considérablement augmenté les frais d’inscription aux universités françaises pour les étudiants étrangers, dans un dispositif cyniquement appelé « Bienvenue en France », le gouvernement pourrait augmenter ces frais pour les étudiants français. Lors de son discours devant les présidentes et présidents d’universités le 14 janvier, Emmanuel Macron s’est élevé contre la « quasi-gratuité » dont bénéficient les étudiants en France.

Les prud’hommes de Saverne refusent la requalification en CDI des 177 contrats de Rabah chez Kronenbourg

Les prud’hommes de Saverne refusent la requalification en CDI des 177 contrats de Rabah chez Kronenbourg

Mardi 1er février 2022, le conseil des prud’hommes de Saverne a débouté Rabah. L’ouvrier aux 161 missions d’intérim et 16 CDD chez Kronenbourg s’estime victime de discrimination à l’embauche. Son avocate annonce qu’il fera appel de la décision.

« C’est de la violence ajoutée à la violence subie par Rabah. » Nicole Radius pense à son client lorsqu’elle entend la décision du conseil des prud’hommes de Saverne mardi 1er février. Rabah, 62 ans, est débouté de toutes ses demandes. Pour les conseillers, Kronenbourg exerce une activité saisonnière qui dispense l’entreprise d’une obligation d’embauche après trois contrats courts. De même, le conseil des prud’hommes de Saverne estime qu’aucune preuve n’est apportée pour caractériser le volet discrimination du dossier. Une issue « surréaliste » pour l’avocate de l’ouvrier aux 177 contrats chez Kronenbourg, dont 161 missions d’intérim et 16 CDD.

Rabah s’est usé sur les chaînes de Kronenbourg, sans jamais disposer de vacances ou d’un revenu suffisant pour épargner Photo : GK / Rue89 Strasbourg / cc

« Rabah ne peut se prévaloir de droits correspondants à un CDD »

Dans les motivations de sa décision, le conseil des prud’hommes reprend l’argumentaire de l’entreprise Kronenbourg : « la grande majorité des contrats étaient des contrats de remplacement pour des salariés absents (…) le nombre d’heures et la nature des contrats de Rabah ne permettent pas pas de conclure à l’occupation de sa part d’un emploi pérenne au sein de la société Kronenbourg (…) qui justifie par la production de documents comptables et économiques du caractère saisonnier de son activité. » Conclusion : « le recours à des contrats de mise à disposition pour le remplacement de salariés absents et pour les activités saisonnières n’est pas critiquable et Rabah ne peut se prévaloir de droits correspondants à un contrat de travail à durée déterminée. »

De même, concernant le volet discrimination, le conseil des prud’hommes estime que le plaignant « n’apporte aucun élément tendant à démontrer qu’il a été victime de discriminations ». Les membres du conseil des prud’hommes rappellent que des « délégués syndicaux et membres élus du personnel confirment que la discrimination n’a pas sa place au sein de la société Kronenbourg ».

Jugement du 1er février 2022 par le conseil de prud’hommes de Saverne dans l’affaire Rabah contre Kronenbourg. (Document remis)

Kronenbourg se félicite, l’avocate de Rabah fait appel

Me Nicole Radius ne désespère pas pour autant. Auprès de Rue89 Strasbourg, elle a annoncé que son client avait l’intention de faire appel de cette décision. « Les juges de la chambre sociale de la cour d’appel seront sans doute plus attentifs à la jurisprudence de la Cour de cassation sur ce sujet », indique l’avocate, avant de rappeler que « la chambre sociale est constituée de magistrats professionnels et qu’elle a déjà condamné Kronenbourg pour excès de recours aux contrats de CDD et d’intérim ».

Dans un communiqué, l’entreprise Kronenbourg se félicite de cette décision. Le brasseur « tient à rappeler le caractère saisonnier de son activité de brasseur, conforté par la convention collective qui permet le recours à des contrats de saison durant une partie de l’année. » Le producteur de bière « réfute totalement les allégations de discrimination et de racisme, à l’instar de ses représentants du personnel, et réaffirme qu’elle n’a pas été, et ne sera jamais, à l’origine de tels faits à l’intérieur comme à l’extérieur de l’entreprise. »

Sans-abris : Les écologistes détournent un droit qu’ils avaient inventé pour l’opposition

Sans-abris : Les écologistes détournent un droit qu’ils avaient inventé pour l’opposition

Le conseil municipal s’est terminé lundi soir sur un débat tendu autour de la question des sans-abris à Strasbourg. Entre les Socialistes qui ont subitement demandé d’héberger tous les sans-abris et la droite qui estime que « ce n’est pas possible », les écologistes ont modifié un texte à leur guise, pour continuer de demander à l’État de remplir ses obligations.

Ce sont deux petits mots qui changent tout. En séance du conseil municipal lundi 31 janvier, les écologistes ont modifié un texte qui venait de leur opposition socialiste et occasionné un gros clash. Ces chamailleries pourraient paraître routinières s’il ne s’agissait pas de la question des sans-abris à Strasbourg.

Que s’est-il passé ? Retour sur le déroulé des faits. En l’absence de la maire Jeanne Barseghian (EELV), isolée pour cause de Covid, c’est son premier adjoint Syamak Agha Babaei (Labo citoyen) qui préside le conseil municipal. La séance tire en longueur mais les débats sont bien maîtrisés. Toutes les délibérations ont été votées sans accroc. Dans la soirée, c’est l’heure des résolutions pour terminer la séance.

Les résolutions, une nouveauté prisée

Les résolutions n’existaient pas sous l’ancien maire Roland Ries (ex-PS). Il s’agit d’une nouveauté avec l’arrivée de Jeanne Barseghian. Elles permettent à n’importe quel élu, et en particulier de l’opposition, de pouvoir proposer une idée aux voix de l’assemblée municipale. À la différence des motions et autres prises de position symboliques, une résolution votée engage la municipalité à la mettre en œuvre par des actions. Par exemple, lorsque trois versions de la définition controversée de l’antisémitisme ont été adoptées, un « plan d’actions » avait ensuite élaboré. Les résolutions sont « une avancée démocratique », plusieurs fois saluées par les oppositions. Depuis un peu plus d’un an, elles relèvent parfois de mesures consensuelles, d’autres fois, l’opposition tente de mettre la majorité face à ses contradictions avec des textes piégeux.

Ce lundi 31 janvier, une première résolution proposée par Pierre Jakubowicz (Horizons, apparenté LREM) vient d’ailleurs d’être adoptée dans un climat apaisé. Il s’agit de tenter de collecter et d’amorcer une filière de recyclage pour les masques jetables.

La deuxième résolution vient de Céline Geissmann (PS). Depuis son éviction de la majorité, l’élue socialiste est devenue une opposante très active en séance et critique. L’ex-adjointe au numérique se saisit du conflit entre la préfecture et la municipalité sur le manque d’hébergement pour les personnes sans-abri à Strasbourg. Un sujet qui fatigue les associations et a occasionné la création d’un collectif de parents et d’enseignants qui interpelle la municipalité.

Céline Geissmann lors du conseil municipal Photo : capture d’écran

Une mise à l’abri « immédiate » exigée

Le texte de la jeune élue propose que la municipalité organise « une mise à l’abri immédiate et inconditionnelle correspondant au nombre de demandes ». Une forme de « quoiqu’il en coûte » appliquée à la question des sans-abris.

En face, la municipalité tient sa ligne actuelle : d’accord pour faire davantage, mais pas tout seul. Elle rappelle que selon le code de l’action sociale, la mise à l’abri « inconditionnelle » relève de l’État et donc de la préfecture du Bas-Rhin à Strasbourg. Elle veut donc faire propositions de logements vides, que la préfecture doit ensuite occuper et donc co-financer. Un système que l’adjointe aux Solidarité, Floriane Varieras, juge moins onéreux et plus efficace que les chambres d’hôtels.

Syamak Agha Babaei pointe aussi « un effort sans précédent » de 400 places ouvertes ou en cours d’ouverture par la Ville et l’Eurométropole depuis 2020. Lors de la campagne électorale, le programme des écologistes tablait sur 500 places et 50 pour femmes victimes de violences, une mesure chiffrée et jugée soutenable financièrement sur la durée du mandat. Le premier adjoint rappelle que quelques heures plus tôt, sa majorité a été critiquée pour la hausse des dépenses. Or dans ce débat, il n’est pas question du financement d’une telle mesure. Lors de son intervention, Céline Geissmann propose le « réquisitionnement massif de foncier vide ». Nouvelle élue depuis 2020, la conseillère municipale n’est pas directement comptable du bilan des Socialistes lors des mandats précédents et qui n’ont jamais porté une telle position. En fin de mandat, Roland Ries avait consenti à l’ouverture de 100 places, sur proposition de Syamak Agha Babaei et des écologistes.

Des amendents à l’oral

Pour les écologistes, la situation est délicate. Voter « contre », c’est risquer de voir le nom de la résolution « Faire ensemble de Strasbourg une ville où personne ne dort à la rue » s’afficher sur l’écran et les noms des élus écologistes à côté d’un vote « contre ». Et que la capture d’écran circule ensuite massivement pour susciter l’indignation. Voter « pour », c’est au contraire s’engager dans un engrenage périlleux puisque la résolution engage la Ville. Au-delà de la question juridique, cette position pourrait se retourner contre la municipalité d’un point de vue politique, dès que la municipalité n’aura pas d’hébergement à proposer à chaque refus du 115 de répondre.

Les écologistes proposent alors un « amendement », c’est-à-dire une modification du texte. Peuvent-ils procéder de la sorte ? Majorité et oppositions se plongent dans le règlement intérieur. Plusieurs suspensions de séance s’enchainent pour comparer les versions des textes. Mais le nouveau règlement ne prévoit rien pour les amendements aux résolutions. Pour les autres textes soumis au vote, les amendements peuvent être déposés par écrit, ce qui n’a pas été le cas. Autre possibilité : « À titre dérogatoire, et avec l’assentiment de la majorité du conseil, la maire dispose d’un droit oral de proposition d’amendement ». Pour la majorité, c’est facile ! Comme elle dispose d’une large majorité, elle peut donc donner « l’assentiment » et modifier ce qu’elle veut.

La droite savoure le spectacle

Du côté de la droite, on se délecte du spectacle et du déchirement entre anciens alliés. Le président du groupe Les Républicains, Jean-Philippe Vetter, voit un intérêt à la résolution : « Elle vous met devant vos responsabilités », lance-t-il à la majorité et voit poindre « un recul » par rapport aux déclarations des élus écologistes. Il se garde bien de dire si son groupe votera « pour » ou « contre » la mise à l’abri systématique proposée par les Socialistes. Mais on le devine à sa déclaration : « Ce n’est pas possible de pouvoir accueillir de manière inconditionnelle tout le monde ».

Le groupe « La République en Marche » reste planqué et ne donne pas de position sur le fond dans ce débat. Jusque-là, ses élus et élues ont voté les créations de places. Mais lors d’un vote à l’Eurométropole en septembre pour des places supplémentaires, aucun de ses 4 représentant n’a pris par au scrutin. Lors du même vote les élus « Les Républicains » s’étaient abstenus et avaient formulé des critiques en séance.

Finalement, une nouvelle version du texte propose une « demande de mise à l’abri […] auprès des autorités compétentes » (voir en fin d’article les deux versions). Ce qui amoindrit la portée et revient plus ou moins au statu quo actuel. Mais ce n’est pas sur ça que le débat rebondit une demi-heure supplémentaire.

Cette fois-ci, les élus LREM s’impliquent dans la discussion. Pour Pierre Jakubowicz, qui détient le record de résolutions déposées, c’est « un détournement de l’outil » et modifier la substance d’une résolution « contre l’avis du porteur du texte » est contraire « à l’esprit de Jeanne Barseghian », qui avait par le passé arbitré une situation similaire autrement. Idem pour l’ancien candidat Alain Fontanel (LREM) pour qui l’amendement au forceps serait « une négation de votre engagement démocratique ».

« Mascarade » et « précédent » pour les oppositions

« Mascarade », « Entre vous » ! Cette fois-ci les trois groupes d’opposition sont au diapason sur cette question de procédure. Ce qui occulte le débat de fond. Ainsi, malgré ses demandes, Céline Geissmann ne peut pas soumettre aux voix la version initiale. En février 2021, lorsque Pierre Jakubowicz avait proposé un texte sur le débat public qui ne convenait pas à la majorité, il avait pu présenter sa version, quitte à ce que les écologistes votent « contre » et rejettent la proposition. Les Socialistes estiment donc qu’ils sont moins bien traités que le groupe LREM d’opposition.

Les écologistes n’entendent pas les alertes des différents groupes sur « un précédent » qu’ils s’apprêtent à créer. Celui de pouvoir modifier à leur guise les textes qui leur sont proposés pour adopter une version qui leur convient mieux. Ils voient-là au contraire une « convergence » entre Socialistes et « Les Républicains » ou LREM. Le type de remarque qui a toujours le don d’énerver les Socialistes. Dominique Mastelli relève que la droite n’a pas toujours voté les ouvertures de places, contrairement au PS.

Le groupe écologiste fait bloc. Le texte amendé est voté par 45 voix sur les 47 élus de la majorité. Les autres groupes ne prennent pas part au scrutin. Ainsi, ils n’ont pas à aller au bout de leur positionnement via un vote mais peuvent critiquer la façon de faire des écologistes.

Très vite des communiqués partent pour diffuer leur lecture des faits. La municipalité salue un texte « pour prendre en compte la réalité des compétences des différents acteurs impliqués » et « travailler collectivement à des solutions pérennes ». Les Socialistes répliquent quelques minutes plus tard pour dénoncer un « recul démocratique » et un « acte de censure », sans mentionner le sujet de départ, la question des sans-abris.

Alors que le texte visait à rétablir « un dialogue constructif et apaisé avec l’État », la préfecture a de son côté pu noter que les quatre groupes du conseil municipal sont divisés sur cette question.

Diffamation sur Facebook : un militant nationaliste condamné à payer 5 000€

Diffamation sur Facebook : un militant nationaliste condamné à payer 5 000€

Laurent Husser, militant nationaliste strasbourgeois, a été condamné mardi matin par le tribunal correctionnel de Strasbourg à une amende de 2 000€ et à payer des intérêts civils de 3 000€ pour avoir publiquement diffamé sur Facebook le psychiatre strasbourgeois et militant antiraciste Georges Federmann.

Présenté comme un passeur sur le profil Facebook du militant nationaliste Laurent Husser, le psychiatre strasbourgeois Georges Federmann avait porté plainte pour diffamation. Le tribunal correctionnel de Strasbourg lui a reconnu mardi 1er février avoir été diffamé par Laurent Husser et a condamné ce dernier à 2 000€ d’amende, suivant en cela les réquisitions du procureur de la République, ainsi qu’à 3 000€ de dommages et intérêts. Laurent Husser, qui dispose de 10 jours pour faire appel du jugement, devra en outre payer les frais d’avocat du Dr Federmann, d’environ 2 500€.

Le tribunal a rejeté les exceptions de nullité qui avaient été formulées à l’audience par la défense de Laurent Husser. Le collaborateur du groupe des eurodéputés nationalistes a régulièrement été mis en examen et le délai de prescription n’est pas arrivé à son terme selon la présidente du tribunal, Isabelle Karolak.

Mardi matin, elle a rappelé les fondements de sa décision :

« Sur la culpabilité, il y a bien une diffamation publique en raison du petit globe sur la publication Facebook, le réseau de M. Husser est en outre constitué de plus d’une centaine de personnes. Présenter le Dr Federmann comme un passeur et une crapule est bien une atteinte à son honneur et à sa considération. M. Husser a manqué de prudence et d’objectivité en publiant des éléments qu’il n’avait pas vérifiés. »

Les dangers d’une publication un peu rapide…

Laurent Husser avait relayé sur son profil un article des DNA évoquant des ordonnances de complaisance par « un psychiatre strasbourgeois de 64 ans ». Le militant nationaliste en avait immédiatement conclu qu’il s’agissait du Dr Federmann, qui est également membre du Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (MRAP), sauf qu’il ne s’agissait pas de lui.

Facebook Photo : Lucas Sammaro / Pexels / cc

Contacté mardi matin, Laurent Husser dénonce « une sentence politique » :

« On a voulu donner une orientation politique à ce procès, on a fait venir des militants du MRAP pour témoigner contre moi et le résultat, c’est un jugement au maximum de ce que demandait le procureur… C’est totalement disproportionné et je pense faire appel de cette décision. »

De son côté, le Dr Georges Federmann dit son « soulagement et sa tristesse » :

« Je prends note avec une certaine satisfaction du jugement qui rétablit mon honneur et ma réputation bafoués depuis deux ans. Je poursuis mon travail auprès des patients et des usagers les plus fragiles et m’y consacrerai jusqu’à ma mort. »

Un arrêté préfectoral relance les travaux pour l’enfouissement définitif à Stocamine

Un arrêté préfectoral relance les travaux pour l’enfouissement définitif à Stocamine

Vendredi 28 janvier, le préfet du Haut-Rhin a signé un nouvel arrêté mettant en demeure les Mines de Potasse d’Alsace (anciennement Stocamine) de lancer les travaux pour le confinement de certaines galeries. L’entreprise est aussi sommée de produire une nouvelle demande d’autorisation pour l’enfouissement illimité des déchets.

L’État n’attend pas le Conseil d’État. Vendredi 28 janvier, à la demande de la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili, la préfecture du Haut-Rhin a pris un arrêté mettant en demeure la société des Mines de Potasse D’Alsace (MDPA). Anciennement dénommée Stocamine, l’entreprise est sommée de fournir une nouvelle demande d’autorisation pour l’enfouissement définitif des plus de 40 000 tonnes de déchets ultimes à Wittelsheim dans le Haut-Rhin.

Pour rappel, la cour administrative d’appel de Nancy avait annulé l’arrêté préfectoral du 23 mars 2017 qui entérinait le stockage illimité des déchets à 500 mètres sous terre. La société MPDA doit donc entamer de premiers travaux « sans compromettre la réversibilité potentielle du stockage ». En effet, à l’heure d’écrire ces lignes, l’entreprise n’est pas autorisée à confiner définitivement tous les déchets stockés.

Un arrêté justifié par « la dégradation continue des galeries »

Pour justifier le lancement des travaux malgré la procédure en cours devant le Conseil d’État, l’arrêt préfectoral invoque « la dégradation continue et la fermeture progressive et irrésistible des galeries » ainsi que « l’impossibilité de maintenir des conditions de sécurité maîtrisées pour réaliser des travaux au fond au-delà de 2027 ». La société des Mines et Potasses d’Alsace est donc mise en demeure de préparer des barrières de confinement et de créer une « zone drainante ». Cette dernière permettra de sonder la pollution « en cas d’augmentation des teneurs en polluants venant du stockage » après fermeture des puits.

La préfecture considère aussi que les « 1 629 tonnes de déchets présentes dans le bloc 15 (…) ne sont plus réversibles ». L’arrêté autorise donc « le remblayage des blocs vides (…) ainsi que celui du bloc 15 incendié. »

Sur cette partie de l’arrêté préfectoral, le député de la circonscription de Wittelsheim, Raphaël Schellenberger (LR) décrit une mesure consensuelle. Mais le co-rapporteur de la mission parlementaire sur Stocamine, partisan d’un déstockage à 25%, déplore la demande de l’État de déposer un nouveau dossier d’enfouissement définitif :

« L’avis des collectivités locales n’a pas été pris en compte, alors qu’un geste de l’État pour poursuivre le déstockage pourrait permettre un terrain d’entente. »

François Zind : « On a vu mieux comme communication »

Avocat spécialisé en droit de l’environnement, François Zind est un spécialiste du dossier Stocamine. Il a notamment préparé la plainte contre X d’Alsace Nature déposée fin juin 2021 suite à des révélations de Rue89 Strasbourg et de la Badische Zeitung. La procédure initiée devant le pôle régional environnement de Strasbourg est notamment basée sur « les informations inexactes sur l’origine, la nature, les caractéristiques et les quantités de déchets stockés » à Stocamine.

Me Zind s’étonne avant tout de la communication choisie par le gouvernement :

« Les opposants à l’enfouissement définitif des déchets à Stocamine sont entendus lundi 31 janvier par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat. Quelques jours plus tôt, l’État produit un nouvel arrêté qui va clairement dans le sens de l’enfouissement définitif… On a vu mieux comme communication. »

La piste du déstockage : les déchets illégaux

Porte-parole du collectif Destocamine, Yann Flory espère justement de cette audition sénatoriale qu’elle permette « une grande alliance de toutes les forces vives rhénanes contre l’enfouissement définitif des déchets ultimes à Stocamine ».

Autre opposant à l’enfouissement définitif, Marcos Buser est géologue et ancien expert d’un comité de pilotage sur la gestion des déchets de Stocamine. Il continue d’approfondir la piste des déchets non-déclarés au fond de la mine :

« C’est notre principal levier d’action, prouver que des déchets qui n’auraient jamais dû être stockés chez Stocamine se trouvent dans le sous-sol de Wittelsheim aujourd’hui. »

La société MDPA a quatre mois pour constituer une nouvelle demande d’autorisation pour l’enfouissement définitif des déchets. Concernant les « mesures conservatoires », l’entreprise pourrait lancer les premiers travaux dans un délai d’un mois.

À Altorf, les haies disparaissent des champs et les oiseaux avec

À Altorf, les haies disparaissent des champs et les oiseaux avec

Alsace Nature dénonce le défrichage par les agriculteurs, en 20 ans, de 4 kilomètres de haies autour d’Altorf et Dachstein. Elles constituent le seul habitat restant aux oiseaux et aux insectes dans les zones de culture. Et pourtant, rien n’oblige les paysans à les conserver. Reportage.

« Voilà la toute dernière haie champêtre entre Altorf, Dachstein et Duppigheim », constate Christophe Klein, du groupe local Bruche-Aval d’Alsace Nature. En cet après midi ensoleillé de janvier, il pointe du doigt une bande d’arbustes, des pruneliers, des églantiers ou des aubépines, qui s’étend sur environ 200 mètres de long. « C’est là que niche le dernier couple de traquet pâtre des environs. La pie grièche écorcheur trouve aussi refuge ici », assure-t-il.

Christophe Klein, natif d’Altorf, réalise des films naturalistes en plus de son engagement dans une association écologiste. « Cet environnement, je le connais par cœur », confie-t-il. En 20 ans, il estime que « 4 kilomètres de haies sur les bancs d’Altorf et Dachstein ont été rasés par des agriculteurs ». Jacques Detemple, directeur de l’association Haies Vives d’Alsace, explique en quoi c’est problématique :

« Les haies sont des écosystèmes artificiels. C’est ce qui délimite les champs. Si elles sont si importantes, c’est parce que les zones agricoles représentent une très grande partie de ce territoire, où elles forment le dernier réservoir de biodiversité. De nombreuses espèces d’oiseaux et d’insectes en ont besoin pour s’y installer et s’y reproduire. Les chevreuils et les sangliers peuvent s’y cacher. Avec la destruction des haies, les animaux disparaissent. Sans elles, la plaine d’Alsace devient un désert. »

Les haies, conservées ou rasées au bon vouloir des agriculteurs

Ces lignes d’arbustes se trouvent, la plupart du temps, dans l’emprise de propriétés agricoles, quand les exploitants les laissent se développer. Ils ont le droit de les couper, sauf entre le 15 mars et le 31 juillet. « Notre but est d’inciter le monde de l’agriculture à conserver et à planter des haies. C’est incontournable pour enrayer le déclin de la biodiversité dans les campagnes », précise Jacques Detemple. Plus généralement, depuis 1950, 70% des haies ont disparu en France.

La grande haie de Dachstein se trouve en bordure d’une prairie, protégée dans le cadre d’une mesure compensatoire du GCO. À part elle, quelques ensembles de petits arbustes se dressent de manière éparse dans les alentours. « Petit à petit ils sont grignotés », remarque Christophe Klein. Il se souvient que « dans les années 70, il y avait 30 couples de courlis cendré » dans le secteur. Aujourd’hui, cette espèce a complètement déserté l’endroit. Idem pour le vanneau huppé. » D’après lui, le traquet pâtre, la pie grièche écorcheur, le bruant jaune et l’alouette des champs disparaitront aussi, si les haies continuent à être détruites.

Le traquet pâtre peut faire son nid dans les branchages des haies. Photo : remise / Nicolas Buhrel, LPO

En plus de la disparition des haies, des écosystèmes « pris en étau »

Depuis des chemins agricoles à une vingtaine de kilomètres de Strasbourg, il observe les champs qui s’étendent jusqu’à la zone industrielle de Duppigheim. « Plus généralement, l’artificialisation gagne du terrain d’année en année », abonde Anne Vonesch, responsable des questions liées à l’agriculture pour Alsace Nature :

« Avec l’agrandissement des villages, des zones industrielles et des surfaces de culture, les écosystèmes sont pris en étau. Heureusement, il y a une petite forêt qui persiste dans la zone. »

À quelques mètres, l’entreprise Graf, qui fabrique des citernes, entrepose sa marchandise sur un terrain qui accueillait encore une prairie en mars 2020, d’après les images satellites de Google Earth.

La destruction des habitats naturels est la première cause du déclin de la biodiversité. Photo : TV / Rue89 Strasbourg

« Personne n’assume couper les haies »

Selon Frédéric Wilt, agriculteur à Altorf, il n’y a jamais eu de haies dans la zone. Les dernières auraient disparues lors d’un réaménagement agricole en 1984, visant à augmenter la taille des parcelles. Cyriac Eyder, également exploitant dans le village, balaye : « On ne défriche rien à Altorf. » En contradiction totale donc avec le discours du groupe local d’Alsace Nature.

Bruno Eyder, le maire d’Altorf et frère de Cyriac, n’a pas connaissance de défrichage de haies, mais il reconnait que  »si les agriculteurs le font, ils ne le lui disent pas et n’ont aucune raison de le faire ». Il est aussi président de l’association foncière et annonce que les exploitants ont accepté, lors d’une réunion le 27 janvier, de dédier des espaces aux plantations de haies. « Il reste à trouver les parcelles », dit-il.

Un autre paysan de la commune, qui souhaite rester anonyme, témoigne voir régulièrement les agriculteurs de la commune défricher les extrémités de leurs terrains, afin qu’aucune haie ne pousse. Il commente :

« C’est facile de dire qu’ils ne défrichent pas directement les haies, ils ne laissent rien pousser et grapillent chaque mètre qu’ils peuvent pour leurs cultures. »

Des défrichages indéniables

Déjà en avril 2000, un article des DNA intitulé « Adieu, jolies haies… » relatait leur destruction massive dans ce secteur, aussi liée à l’aménagement d’une piste cyclable. Christophe Klein montre trois lignes d’arbustes récemment rasées ou amoindries entre Altorf et Dachstein :

« Quand on connait le terrain, ces pratiques de défrichage systématique sont indéniables. Même si c’est tout à fait légal, c’est quand même un tabou, personne n’assume faire ça. »

Au passage, il désigne « la mauvaise gestion de mesures compensatoires du GCO », où des plantes ont aussi été fauchées.

Le baron Robert de Turckheim, grand propriétaire dans le secteur, loue ses terrains à Frédéric Wilt et à Sébastien Eyder justement. Il considère que « la mode des haies émane des bobos citadins et ne tient pas compte des difficultés des paysans ». D’après lui, les haies qui empiètent sur les terres cultivées empêchent le passage des tracteurs et représentent une charge de travail en plus.

« Cette haie a été rognée récemment, elle allait presque jusqu’au chemin », soutient Christophe Klein. Photo : TV / Rue89 Strasbourg

« C’est culturel, pour les agriculteurs, les haies dérangent, ce sont des obstacles et elles empiètent »

Laurent Vetter, également agriculteur à Altorf, a planté ou laissé se développer environ 1 000 mètres de haies. Selon lui, cela ne provoque pas de manque à gagner :

« Il faut juste prendre le temps d’entretenir un peu, mais franchement, il ne faut pas considérer cela comme une immense charge de travail. Malheureusement, quasiment tous les agriculteurs autour de moi défrichent massivement. C’est aussi du travail au final. Mais c’est culturel pour les agriculteurs : les haies dérangent. Il faut avoir de grandes parcelles, des chemins au milieu et surtout pas d’obstacles. »

Un ligne à haute tension transperce le paysage. Sous les pylônes électriques, posés au milieu des champs, des ronces s’épanouissent. « C’est ironique, mais au moins, grâce à ça, quelques insectes peuvent s’installer », observe Christophe Klein.

Sous les pylônes, des ronces s’installent, à l’abri des broyeuses. Photo : TV / Rue89 Strasbourg

« Nos plantations, c’est une goutte d’eau »

Dans le cadre du plan de relance, l’État investi 5,5 millions d’euros pour créer 7 000 km de haies en 2021 et 2022. La chambre d’agriculture et Haies Vives d’Alsace utilisent ces fonds pour porter des projets de plantation sur des terrains communaux ou agricoles.

Mathilde Aresi coordonne des actions de protection de la biodiversité à la chambre d’agriculture d’Alsace. Elle indique qu’une équipe de 5 conseillers en agroforesterie organise régulièrement des réunions avec les paysans pour les inciter à planter ou à conserver des haies, en insistant notamment sur les aspects positifs économiquement : le bois obtenu suite aux élagages peut ensuite servir à faire de la litière d’élevage. Cette dernière distingue trois groupes d’agriculteurs :

« Certains sont réticents d’office car ils considèrent les haies comme une perte de temps. D’autres ne ferment pas tout de suite la porte mais s’interrogent sur le temps et l’argent que l’entretien peut leur coûter. Et enfin, il y a ceux qui sont déjà convaincus et très volontaires. En 2021, nous avons réussi à porter 4 projets de plantation de haies, soit 11 kilomètres. En 2022, nous comptons accompagner 60 projets. »

Christophe Klein note des traces d’élagage sur les branches. Photo : TV / Rue89 Strasbourg

« Il faudrait des incitations financières pour valoriser l’entretien des haies »

Même Christiane Lambert, présidente de la FNSEA, le syndicat majoritaire des agriculteurs, a « lancé le défi » aux céréaliers de planter des haies, lors du congrès des producteurs de blé, le 1er juin 2021. « On ne perdra pas en production, c’est en bord de champs. Nous gagnerons en popularité dans les communes », disait-elle. « Il y a une impulsion qui va dans le bon sens », reconnait Jacques Detemple, de Haies Vives d’Alsace. Mais il relativise :

« Avec notre association, on plante 15 à 20 km de haies par an dans toute l’Alsace. C’est une goutte d’eau. Parallèlement, il nous est impossible de déterminer combien de haies sont détruites. C’est absurde que de l’argent public serve à planter des haies à un endroit, si à côté, d’autres haies sont toujours détruites plus rapidement. Globalement, la biodiversité continue à décliner en Alsace. »

Christophe Klein participe parfois, en tant que bénévole, aux plantations de haies : « On n’est pas certain que les haies poussent bien là où on sème, d’où l’importance de conserver celles qui existent déjà. » Selon Mathile Aresi, vu les retours que perçoit la chambre d’agriculture, des incitations financières pour valoriser l’entretien des haies « permettrait certainement de les protéger davantage ».

#Altorf

Au conseil municipal, Deux-Rives, égalité de genre et menaces sur la taxe foncière

Au conseil municipal, Deux-Rives, égalité de genre et menaces sur la taxe foncière

Les écologistes s’attaquent à leur deuxième budget et ne prévoient plus de hausses d’impôts pour 2022, voire jusqu’à la fin du mandat. Lors de la séance du lundi 31 janvier, il sera aussi question de l’avenir du secteur des Deux-Rives et d’égalité femme-homme. À suivre en direct et avec nos commentaires à partir de 12h30.

Les écologistes ont terminé leurs principaux arbitrages financiers jusqu’en 2026. Ils ont voté des hausses d’effectifs (180 emplois nets en plus à la Ville, dont 75 pour arriver à une Atsem par classe d’école maternelle) et des investissements supplémentaires, à raison de 135 millions d’euros par an. Chaque année, les budgets successifs vont désormais mettre en œuvre ces choix. Les marges se situeront donc au niveau des autres dépenses de fonctionnement (45% des 378 millions d’euros) ou du niveau d’endettement.

Après l’augmentation de 5% de la taxe foncière en 2021, justifiée par la réponse à la crise sanitaire et économique, la majorité ne table plus sur des augmentations de ce taux d’impôt local « pour les prochaines années ». Appelé à préciser cet objectif, le premier adjoint en charge des Finances, Syamak Agha Babaei, reste prudent :

« Si les éléments extérieurs ne bougent pas, nous pourrions tenir le mandat sans hausses d’impôts. »

« On craint un retour de bâton »

Pour la municipalité, cette incertitude est conditionnée aux choix budgétaires du futur gouvernement, après les élections de 2022. « On craint un peu que si la crise sanitaire devait se calmer, ce qui serait une bonne chose, il y ait un retour de bâton vers les collectivités locales », met en garde la maire Jeanne Barseghian (EELV).

La majorité se rappelle par exemple du « Pacte de Cahors » de 2018 qui empêchait les collectivités locales d’augmenter leurs dépenses de plus de 1,2%, mais finalement jamais appliqué. Autre défi à laquelle la municipalité va être confrontée : la hausse des prix de l’énergie.

Précisons qu’une stabilité des taux d’impôts communaux ne provoque pas automatiquement une taxe foncière identique à l’année précédente. L’Assemblée nationale peut revaloriser les bases d’imposition, elle l’a fait de 3,4% pour 2022 alors qu’elle n’était « que » de 0,2% en 2021. Le gouvernement justifie cette augmentation par l’inflation. En outre, l’Eurométropole peut augmenter sa part de la taxe foncière.

Quelles critiques pour les Deux-Rives « réorientées »?

L’autre gros point de l’ordre du jour est l’aménagement du secteur des Deux-Rives (point 2, voir notre article dédié). Dans le mandat précédent ou actuel, les écologistes ont souvent été accusés de « bétonner » la ville. Alors qu’ils ont choisi de diminuer l’objectif de logements neufs, quelles seront les critiques des oppositions ?

Comme souvent, le débat pourrait tourner sur la manière dont la municipalité présente les choses : moins de logements par rapport à ce qui était programmé (3 700 contre 4 400), mais qui n’était pas définitivement acté. Il aurait donc été possible de construire encore moins. Le maintien de tours le long du Rhin ou le fait de construire en grande partie sur la presqu’île Citadelle, malgré la présence d’un parc sur la partie nord et ouest, pourraient occasionner des débats.

Droit des femmes : nouveau plan d’action

Autre sujet majeur au programme de lundi : la Ville va adopter son troisième plan d’action « Droits des femmes et égalité de genre » pour 2022-2024 (points 5 et 6). Un sujet sur lequel les écologistes sont attendus par leur électorat. Pour les opposants et opposantes, difficile d’être contre le principe, tout comme il serait délicat de ne pas se positionner sur ce thème sensible, qui dépasse les clivages. Le budget annuel de la mission des droits des femmes a été triplé de 115 000 à 415 000 euros, ce qui permet des participations au budget de fonctionnement d’associations féministes pour environ 200 000 euros. Cela inclut des structures historiques comme le CIDFF, le Planning familial, le Nid, SOS Femmes solidarité, ou d’autres plus récentes comme Plurielles, Ru’elles ou Osez le féminisme 67.

Le plan d’actions d’une centaine de pages liste beaucoup de principes généraux (« l’égalité professionnelle dans l’administration » ; « irriguer la Ville d’une culture d’égalité » ; « prise en compte de l’égalité dans les politiques ») et la majorité pourrait donc être questionnée sur les manières d’atteindre ces objectifs consensuels, et ne pas tomber dans une forme « d’entre-soi ». L’adjointe en charge des droits des Femmes, Christelle Wieder, semble anticiper ces constats et promet une « plaquette synthétique » des actions concrètes pour la journée du 8 mars. Elle cite par exemple un projet « d’artistes féministes à l’Esplanade » ou des « ateliers d’auto-défense au Port-du-Rhin ».

En charge et vice-présidente de la commission des Finances, Christelle Wieder devrait intervenir à plusieurs reprises lors de la séance. Photo : Abdesslam Mirdass / Rue89 Strasbourg

Un autre projet de la municipalité est de présenter un budget « sensible au genre », comme à Rennes ou Lyon, dans le but de corriger des inégalités. Ce ne sera pas pour 2022, mais un travail expérimental a débuté à l’automne avec les services des Sports et ceux de la participation citoyenne. Le but est « d’identifier les lignes budgétaires sensibles au genre ». Les premiers éléments ressortis de ces analyses seront indiqués lors du budget final qui sera adopté le 21 mars.

Deux quartiers au programme des interpellations

La fin de séance, à l’ordre du jour assez léger avec 32 points, fera place aux interpellations de l’opposition. Comme à chaque séance ou presque, il sera question de la Robertsau. Plus rare, l’avenir de la place d’Islande, où rien ne bouge depuis 2017 et la destruction du tribunal provisoire, sera aussi questionné.

À suivre en direct avec nos commentaires à partir de 12h30 !

« Les Jeunes Amants » : mélodrame émouvant sur l’amour fou

« Les Jeunes Amants » : mélodrame émouvant sur l’amour fou

Carine Tardieu s’empare du dernier projet de la regrettée Solveig Anspach pour exalter un amour fou, éloigné des conventions sociales. Retrouvant la grande veine des mélodrames hollywoodiens, le film est porté par Fanny Ardant et Melvil Poupaud qui forment un duo au sommet de leur art.

Shauna (Fanny Ardant), 70 ans, tombe sous le charme d’un médecin marié (Melvil Poupaud) bien plus jeune qu’elle. Malgré l’incompréhension de leur entourage, les deux amants vont vivre une histoire d’amour fou et destructeur. Peut-on aimer « une vieille dame » quand on est marié et père de famille ? Est-il acceptable de vivre une grande histoire d’amour quand la vieillesse et les premiers signes de la maladie de Parkinson s’invitent au chevet des amants ?

Votre film multiplie les références aux grands mélodrames, de Sirk à Fassbinder en passant par David Lean. Quelle force peut-on tirer du mélodrame pour raconter une histoire d’amour fou ?

Carine Tardieu : Le mélodrame suit une courbe, on monte très haut, on descend très bas, mais jamais aussi bas qu’on ne puisse remonter. Pour donner plus d’intensité à l’histoire que je voulais raconter, j’ai utilisé les codes mélodramatiques par l’image, la musique et la narration. Dans les recherches sur la photographie du film menées avec la chef opératrice Elin Kirschfin, une des références était David Lean et plus précisément son mélodrame La Fille de Ryan qui se déroule en Irlande.

Nous avons beaucoup travaillé la lumière dans ce film car la romance naît d’une lumière particulière obtenue en réalisant une nuit américaine (une scène nocturne tournée en plein jour puis obscurcie en postproduction, NDLR). J’ai voulu également me servir de la musique pour accompagner l’histoire, lui donner une dimension supplémentaire, mais je ne voulais pas qu’elle prenne trop de place ou qu’elle anticipe une émotion qu’elle risquerait de tuer dans l’œuf. Pour autant, je n’avais pas peur du romantisme, je voulais jouer la carte de la passion. Il ne faut pas avoir peur du cinéma ! Mais malgré les artifices nombreux, c’est un film avec un seul travelling véritable à la fin du film. C’est un film de champ contre champ, très simple en matière de mise en scène.

Bande annonce (vidéo Allociné / Youtube)

Melvil Poupaud : De nombreux codes mélodramatiques sont respectés : les amants main dans la main en gros plan, le choix du format Scope, la course dans la rue des amants en fuite, la pluie comme reflet de leur état d’âme. Et bien sûr Fanny Ardant qui rajoute une couche de glamour, de passion avec son côté flamboyant et son côté tragédienne aussi !

C.T : Fanny Ardant et Melvil Poupaud ont cette dimension mélodramatique, leur couple dégage du glamour, quelque chose de possiblement grand chez eux, comme ces stars américaines des années 50…

La magie de Fanny Ardant est éternelle Photo : Ex Nihilo Kare

Les mélodrames hollywoodiens comportent un fond chrétien. La catastrophe qui s’abat sur la victime est comme l’expiation d’une faute dont ils ne sont pas responsables, je pense à la chute de Ron dans Tout ce que le ciel permet de Sirk ou encore à la crise cardiaque de l’immigré marocain dans Tous les autres s’appellent Ali de Fassinder. Dans Les Jeunes Amants, Shauna tombe malade. Quel sens symbolique revêt cette maladie ? Est-ce une punition ?

C.T : La maladie était déjà là dans le scénario de Solveig Anspach. Shauna est déjà malade quand elle rencontre son jeune amant, ce n’est donc pas une punition. Mais leur amour les réveille dans leur vie et libère le meilleur comme le pire. L’amour fou rend tout plus intense, même la maladie. D’un point de vue narratif, la maladie permet que le drame arrive comme dans les mélodrames que vous citez, mais c’est aussi un accélérateur qui symbolise la vieillesse. Même si la maladie de Parkinson peut frapper des plus jeunes, elle est associée à l’âge et c’est une manière d’incarner la vieillesse de Shauna qui a sûrement moins de temps à vivre que David.

L’amour fou peut aussi conduire à la mort, Shauna le dit à son amant « Tu vas me tuer »

C.T : Mais Shauna croit-elle à ce qu’elle dit ? Cette histoire d’amour l’épuise, mais quand elle prononce ces paroles, elle ne s’adresse pas à David son amant, mais plutôt à David médecin. Au lieu de me sauver, tu risques de me tuer. C’est le plus dur qu’il puisse entendre.

Frappée par la détresse de sa mère qui s’est consumée de désir et meurt à petit feu de l’impossibilité de vivre cet amour fou, la fille de Shauna demande à David : « Est-ce que ça valait le coup ? » Il ne répond pas à cette question. Que répondriez-vous ?

Fanny Ardant : Évidemment que ça valait le coup. La vie n’est pas une caisse d’épargne. Faut-il durer le plus longtemps et vivre comme des abrutis ? On ne fait pas de films sur ces gens là…

C.T : Elle se demande à elle-même « Est-ce que ça vaut le coup d’avoir peur ? » Mais ce n’est pas donné à tout le monde de se donner à corps perdu dans un amour fou ! Beaucoup ne vivent jamais une histoire d’amour dans leur vie, ce qui ne les empêche pas d’avoir des histoires, de rencontrer des gens et de se marier. Mais peu de gens l’avouent car c’est comme honteux de ne pas ressentir si profondément. J’avais été ému pour Un Coeur en hiver de Claude Sautet. Daniel Auteuil dit à Emmanuelle Béart qu’il ne ressent rien et qu’il est incapable de vivre une histoire mais c’est une manière de mettre à distance car il est perturbé. Cette idée me bouleverse.

Mais Shauna au contraire accepte le désir qu’elle ressent et celui qu’elle suscite

F.A : Elle est lucide et intelligente, mais ce n’est pas une Diane chasseresse, une cougar venue d’Amérique ! Elle est peut-être désirable, mais elle ne le sait pas. Elle s’habille avec simplicité et n’est pas dans la séduction. À 70 ans, elle sait son corps, elle connaît son visage. Quand elle se sait désirée, elle se dit « Mais tu es tombée sur la tête ma pauvre fille ! » Malgré tout, dès lors que leur histoire s’enclenche, elle y va. J’ai joué le personnage en pensant qu’elle n’avait pas peur.

Melvil Poupaud Photo : Ex Nihilo Kare / Allociné

Et pourtant, nous ne voyons pas le corps de Shauna

C.T : Solveig Anspach voulait filmer Shauna nue, elle ne voulait pas éluder sa nudité car ne pas la montrer aurait été hypocrite, comme si son corps nu était une honte. Mais Fanny ne voulait pas être nue avec un homme, c’est la pudeur de Fanny de toujours. Alors comment faire une ellipse de ces moments de nudité tout en étant fidèle à l’esprit de Solveig ? Je regardais beaucoup de films de Bergman qui filme les visages comme des paysages. Il joue avec toute l’expressivité de ses acteurs, ce que leurs visages racontent de la peur et du désir. Sur les scènes d’amour, en étant au plus près du visage, je pouvais raconter le désir, le trouble, le plaisir charnel de manière peut être même plus impudique que si je filmais un corps nu.

Mais on devine ce corps nu dans les troublantes séquences de douches à la piscine municipale

C.T : Oui, on voit des corps de femmes âgées, nues, des corps de toutes sortes qui sont magnifiés et vus dans le regard de Shauna. Ces corps, c’est aussi son corps regardé par d’autres. Plusieurs fois, une actrice ou un acteur m’ont ainsi poussé dans mes retranchements en terme de mise en scène à cause de la peur ou de la gêne.

F.A : Je n’avais pas l’intention de faire ce scénario quand je l’ai lu, même si j’aimais l’histoire. Carine m’a promis qu’elle trouverait des solutions alors je lui ai fait confiance.

Parmi ces solutions, les plans insistent sur les mains ridées. Sont-ils cruels pour vous ?

F.A : Oui. Les gens m’ont dit « On ne t’a pas épargnée par la photographie ! » La caméra est cruelle pour une actrice comme moi qu’on a l’habitude de rendre plus jolie qu’elle n’est.

C.T : Je ne suis pas d’accord, la caméra n’est pas cruelle ! Je montre les rides, le visage sous tous les angles, les mains, mais il ne s’agissait pas de l’enlaidir, mais de la magnifier. J’ai beaucoup pensé à Charlotte (Ingrid Bergman) dans Sonate d’automne de Bergman, je la trouve vraiment belle à l’âge qu’elle a.

F.A : Je préfère montrer mes rides que montrer un visage refait. La lumière d’un film doit magnifier un visage. Les actrices que j’admire n’étaient pas refaites. Anna Magnani et Simone Signoret par exemple ne faisaient pas de chirurgie. C’était des vrais visages avec toute la vie qui y est passée.

M.P : Et quand on est amoureux de quelqu’un, on regarde les défauts et on les trouve beaux, on est touché, on est amoureux des petits trucs qui n’iraient pas si on n’était pas amoureux. Le regard de Carine est amoureux, il est touché par une rondeur ou une ride.

L’équipe de tournage est essentiellement féminine, Solveig Anspach avait explicitement demandé avant sa mort que le film soit réalisé par une femme. Ce regard amoureux de Carine Tardieu, est-il un regard féminin ?

C.T : Female gaze ! Je n’ai pas un avis tranché sur la question. Je suis une femme d’origine juive, allemande, marocaine, élevée par un père autoritaire et une mère dépressive, je porte une identité faite de tout cela et on ne peut me résumer à être une femme. Solveig voulait un regard féminin car c’est une histoire qui doit être racontée par une femme. Mais elle douterait peut-être aujourd’hui. Qui a mieux filmé les femmes que Claude Sautet dans leur intimité la plus profonde ?

M.P : Cassavetes ?

F.A : En tout cas, un homme qui aime les femmes les connaît mieux car il les a pratiquées !

Financé par l’Europe, Marco Rocca à la recherche des travailleurs migrants, oubliés du droit

Financé par l’Europe, Marco Rocca à la recherche des travailleurs migrants, oubliés du droit

Juriste au CNRS à Strasbourg, Marco Rocca a obtenu une bourse européenne de 1,4 million d’euros, lui permettant de développer ses recherches sur les migrations liées au travail en Europe.

Le Conseil européen de la recherche n’octroie pas facilement ses bourses : sur 4 016 candidatures en 2021, 397 jeunes scientifiques ont été retenus en Europe, dont 53 en France et deux à Strasbourg. Marco Rocca, chercheur en droit du travail au CNRS, basé au laboratoire Dres (Droit, religion, entreprise et société) avec l’Université de Strasbourg, en fait partie. Il va recevoir 1,4 million d’euros pour étoffer ses recherches dans le domaine des migrations liées au travail.

Marco Rocca, chercheur en droit du travail au CNRS Photo : PF / Rue89 Strasbourg / cc

Rue89 Strasbourg : Comment avez-vous convaincu le jury de financer ces recherches ?

Marco Rocca : Au départ, je n’avais pas beaucoup d’espoir. Il faut savoir que les bourses financent beaucoup plus les sciences dures, qui ont souvent besoin d’équipements importants, que les sciences sociales. Le CNRS obtient régulièrement des financements pour les projets techniques, beaucoup moins dans mon domaine. Mais j’étais dans ma septième année après mon doctorat, la dernière année pour présenter cette bourse destinée aux jeunes chercheurs donc je me suis dégagé de tout engagement pendant un mois afin de présenter un dossier.

Cinq minutes pour cinq ans

Je suis spécialisé sur les droits attachés aux travailleurs détachés, donc j’ai présenté une extension d’un domaine que je connais bien, avec un volet transdisciplinaire et mon cursus international… Lorsque j’ai passé la première sélection, j’ai à nouveau tout laissé pendant un mois pour préparer l’entretien, qui est très calibré : cinq minutes de présentation et deux diapositives seulement… pour un projet qui doit durer cinq ans.

Comment occuperez-vous dès lors vos prochaines années ?

Je travaille sur l’hypothèse qu’il y a une décorrélation entre les droits prévus pour les travailleurs temporaires, qu’ils soient détachés ou migrants, et la réalité de leurs situations administratives et sociales. Pour le dire simplement, les travailleurs migrants doivent vivre avec des droits précaires, alors qu’ils remplissent parfois tous les critères d’une installation durable. Dans certains pays et certains secteurs (comme la construction ou l’agriculture) il peut y avoir jusqu’à 20% des travailleurs qui n’accèderaient pas au marché du travail d’un pays déterminé…

« Les réalités ne conviennent pas toujours aux gouvernements »

La difficulté dans ce domaine vient surtout des données, qui sont souvent parcellaires, cachées ou inexistantes car les réalités qu’elles décrivent ne conviennent pas forcément aux gouvernements en place. La bourse européenne va me permettre d’embaucher des chercheuses et des chercheurs (2 doctorants et 2 post-doc) pour trouver ou produire ces données. Nous allons produire du droit « empirique », à partir de recherches statistiques et économiques.Ce sera une entreprise pluridisciplinaire, ce qui n’a jamais été faite auparavant.

Quels sont les impacts attendus de ces recherches ?

En tant que chercheur, on espère toujours avoir un impact, c’est l’objectif des recherches en sciences humaines et sociales. Je ne suis pas là pour imposer ma vision de la société, je dois me conformer aux données. Mais on a pu constater, lors des premiers temps du Covid, que des dérogations avaient été accordées aux igrations temporaires liées au travail, alors que toutes les frontières s’étaient refermées pour limiter la propagation du virus. On aurait pu penser que ce serait l’inverse, mais c’était bien la preuve que ces travailleurs temporaires sont structurels aux marchés européens du travail… et que malgré les tensions politiques sur les frontières, les justifications liées aux besoins en main d’œuvre prennent le dessus. Le problème, c’est que ça produit des droits différenciés, moins bons pour être clair, et c’est ce qu’on va étudier. Il y a une propension à créer des migrants temporaires, sans pour autant vouloir les identifier. Mon objectif est de produire des publications, et en particulier un livre, qui démontrera l’ampleur du déni d’existence auquel sont confrontées ces personnes… J’espère donc que ces recherches permettront d’éclairer les décideurs sur cette question.