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Une soirée avec les sorcières modernes de Rouffach

Une soirée avec les sorcières modernes de Rouffach

« Fêtes d’Alsace », épisode 6 – Pour rendre hommage au passé de la ville et à ses mythes, 10 000 personnes se sont côtoyées à la Fête des sorcières samedi 16 juillet à Rouffach autour de stands thématiques, attirant aussi certaines « sorcières modernes ». Reportage au cœur d’un fourre-tout festif d’histoire, de légendes et de croyances.

Une tour fortifiée protège Rouffach du soleil cuisant de cette fin d’après-midi du samedi 16 juillet. Les musiques folk du groupe alsacien Quatr’Quart embrasent l’air de la place principale de ce village au sud de Colmar. La foule est monstre à 19h, composée majoritairement de gens en tee-shirts, mais aussi d’elfes et de sorcières. Au moyen-âge, l’édifice qui fait face à l’église servait de prison pour y éloigner des femmes accusées de fréquenter le diable.

Depuis 1993, l’association de la fête de la sorcière de Rouffach s’appuie sur l’histoire de ces quinze femmes exécutées pour sorcellerie entre 1585 et 1627 pour organiser un évènement autour des mythes et légendes. Didier Basse, secrétaire de l’association et bénévole depuis 26 ans, est posté à côté de l’église où les bénévoles se restaurent :

« L’événement a beaucoup évolué au fil des ans, il n’y a plus de thème précis. Si l’on voulait faire une fête tout médiéval par exemple, cela coûterait très cher en infrastructures. On choisit des animations et des stands originaux et très différents entre eux. »

En 27 années, la fête est devenue colossale pour ce village de 4 500 âmes : plus de 10 000 personnes ont été accueillies et 200 bénévoles s’activent depuis 14h autour des stands et animations pour adultes et enfants.

Légendes anciennes, pratiques nouvelles

Une vingtaine de stands de charcuterie, de vin d’Alsace, mais aussi de « potions magiques » et de tenues féériques se mélangent entre les rues de la place de la République et de la place Clémenceau. Les gnomes géants de la compagnie des voyageurs du Bord des Mondes, une troupe de spectacle du Loiret, coupent le passage et les plus petits s’émerveillent.

Stéphanie, 42 ans, accompagnée de son mari Nicolas, parle d’une fascination d’enfant pour les légendes :

« Mon oncle a vécu à Zugarramurdi, une commune au nord de l’Espagne connue pour son mythe de la grotte où se seraient déroulés des sabbats (une assemblée nocturne associée à des rituels démoniaques, NDLR). »

Ce mythe s’est construit sur l’histoire réelle : en 1610, le tribunal de l’Inquisition de Logroño, une ville du nord de l’Espagne, a condamné onze femmes au bûcher pour sorcellerie. Employée de pompes funèbres, elle affirme avoir vu le film Les sorcières de Zugarramurdi « une dizaine de fois » et posséder quelques livres sur le sujet à la maison.

Stéphanie, 42 ans, se dit fascinée par les histoires de sorcières depuis petite. Photo : Mathilde Cybulski / Rue89 Strasbourg

Sur la grande scène, l’ensemble Convivencia joue sa musique médiévale acoustique. Sophie a ramené les enfants de sa voisine pour tester les jeux d’agilité, de mémoire et l’initiation à la calligraphie dans l’après-midi. Cette fan de « tout ce qui touche à la sorcellerie » regrette que cette figure ne soit ramenée qu’au folklore : « Cela va bien plus loin que cela de nos jours, il y a la voyance, la spiritualité, le rapport à la nature, tout cela vient des sorcières », développe celle qui est secrétaire-comptable dans le civil.

Lithothérapie, aromathérapie et consorts

Sur la place Clémenceau, le DJ entonne des musiques du duo pop LMFAO, projetant l’ambiance assez loin de l’univers médiéval. Julie est toute en noir, une lune renversée sur le front. Son ami Mathieu, balafré de peinture noire, l’introduit gaiement : « Cet événement, c’est comme la Fête nationale pour elle ! » La 27e édition de la Fête de la sorcière est pourtant une première pour cette ingénieure de 26 ans. L’occasion d’être « elle-même » en public : « Dans mon travail dans une usine chimique à Mulhouse, je ne peux pas m’habiller comme ça », avoue-t-elle.

Julie, une ingénieure de 26 ans, dit profiter de la fête de la sorcière pour être « elle-même ». Photo : Mathilde Cybulski / Rue89 Strasbourg

Elle dit s’identifier aux sorcières des temps anciens : « Ce sont des femmes qui ont été brûlées car elles osaient sortir du moule, faire les choses différemment », raconte la jeune femme. Il y a six ans, elle a commencé à pratiquer des « rituels » pour le bien-être :

« Mes études ont été difficiles, j’ai pris une année de césure où j’ai travaillé en tant qu’animatrice. Cela m’a permis de me reconnecter à la nature et de m’intéresser à l’astrologie, à la thérapie par les plantes et aux soins naturels. Même si cela n’a pas d’influence réelle, cela m’aide à organiser ma vie ».

Louna, qui fait la queue au stand de saucisses sur l’autre place du village avec son groupe d’amis, raconte aussi utiliser certains remèdes. Elle liste plusieurs pratiques, comme l’herboristerie, qui consiste en la préparation de plantes médicinales, l’aromathérapie, qui est l’utilisation des huiles essentielles de plantes à des fins médicinales, et la lithothérapie, l’utilisation de pierres pour du soin physique et mental.

Certaines plantes et huiles essentielles sont bien utilisée dans la préparation de certains médicaments à base de plante, comme substance active ou comme excipient, selon l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). En revanche, aucune étude scientifique n’a encore démontré un quelconque effet des pierres sur le corps humain. « Ce n’est pas forcément effectif, mais c’est fait avec la volonté de soigner », précise la jeune femme.

Arthur, Louna, Margot et Barbara viennent de Soultz pour la Fête de la sorcière. Photo : Mathilde Cybulski / Rue89 Strasbourg

Une émancipation féministe

Longtemps refourguée à l’imaginaire de la dame à verrues et au nez crochu, la sorcière veut reconquérir une dimension moderne positive de son « pouvoir ». La jeune étudiante en prépa lettres convertit ses amis à une lecture féministe de ces pratiques :

« Le machisme a fait que l’on a condamné les sorcières alors qu’elles étaient souvent des connaisseuses qui savaient se servir des plantes. Ces rituels, c’est plus pour se guérir en tant que femme. »

« Il y a dans la littérature des discours plus modernes qui mettent en lumière l’Inquisition contre les sorcières comme des féminicides », précise Sarah, 20 ans. Affublée de tresses et de symboles celtiques, elle attend avec sa mère Murielle dans la file d’attente où se tient le sentier de l’étrange, une sorte de maison hantée en extérieur, montée dans les anciennes fortifications de la ville.

Au fil d’une discussion de fond, interrompue par les gesticulations d’un bénévole déguisé en bourreau, elle raconte que sa sœur pratique le wicca, la « religion des sorcières ». Ce mouvement religieux apparu au XXe siècle a été repris par certains mouvements féministes : « Le plus important chez les sorcières c’est la sororité« , affirme Sarah. Elle a même essayé d’intégrer un coven (un groupe de sorcières) à Strasbourg, mais sans succès : « C’est un milieu très fermé, il faut quelqu’un de l’intérieur qui nous fasse rentrer. »

Mélange des genres

Sur la scène principale, à 22h15, des percussions méditatives et des chants clairs résonnent. Les anneaux de feux jaillissent des mains des danseurs de l’Arche en Sel, en même temps que les cris du public. La troupe de danseurs venue de Charente-Maritime impressionne avec ses dessins de feu millimétrés.

Tard dans la nuit, les spectateurs se rejoignent sous les tentes pour se restaurer. Pascal, avec sa femme Marianne, sont tous les deux intéressés par les histoires de sorcières. Pascal de manière un peu plus dévouée : « J’ai créé mon propre cercle de paroles dans mon salon. On fait des chants de chamanes et des soins. Maintenant nous sommes 72 personnes à se retrouver tous les vendredis », assure-t-il en tendant une carte de visite. Il dit « ressentir les énergies » et notamment pouvoir deviner les « traumatismes intimes des gens ».

Même s’il y a des dévoués, la plupart ne s’intéressent pas tellement au thème de la fête, à l’image de Hervé, 40 ans, venu avec sa bande de cinq amis :

« On a regardé sur Wikipédia avant de venir parce qu’on se demandait pourquoi la fête ne s’appelait pas foire aux vins. C’est vrai qu’il y a rarement un lancer de haches dans une foire aux vins… »

Elena, Théo et Romain, tous la vingtaine, sont arrivés de Normandie il y a un an et s’attendaient à une « petite guinguette » : « Chez nous, on n’a pas trop ce genre de fête. C’est plus dans l’est de la France qu’on a des thèmes comme ça, c’est surprenant », dit Théo.

Romain, Elena et Théo viennent de Normandie et sont impressionnés par l’ambiance de la fête. Photo : MC / Rue89 Strasbourg

Près de la fin, les participants se concentrent sur la place Clémenceau pour continuer à danser comme dans une boîte de nuit. Mélodie Weber, la créatrice de « Fée moi rêver » remballe avec précaution ses nains miniatures et ses stylos champignons faits en matériaux recyclés. Il ne reste presque plus rien : « Les gens étaient très attendris par l’univers. Après deux ans de Covid-19, je pense que tout le monde avait besoin de ça », raconte la créatrice.

#Rouffach

Ammonitrates : deux rapports pointent une réglementation et des contrôles insuffisants au port de Strasbourg

Ammonitrates : deux rapports pointent une réglementation et des contrôles insuffisants au port de Strasbourg

Deux rapports pointent les « lacunes règlementaires » dans l’encadrement de la manutention des ammonitrates, ces engrais potentiellement explosifs, dans les ports fluviaux. Le Port autonome de Strasbourg est le deuxième plus gros port fluvial de France.

L’explosion, le 4 août 2020, d’un stock de nitrate d’ammonium technique (dédié à la fabrication d’explosifs) dans le port de Beyrouth, causant la mort de 215 personnes, a fait l’effet d’un électrochoc. Le 30 septembre 2020, le ministère de la Transition écologique missionne le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) et le Conseil général de l’économie (CGE) pour dresser un état des lieux de « la gestion du risque lié à la présence d’ammonitrates, (des engrais azotés fabriqués à partir de nitrate d’ammonium, ndlr), dans les ports maritimes et fluviaux en France. » La France est la première consommatrice d’ammonitrates en Europe de l’Ouest. Ces engrais sont principalement utilisés à des fins agricoles.

« Lacunes règlementaires »

Dans leurs conclusions, rendues le 21 mai 2021, les experts du CGEDD qualifient la situation dans les ports fluviaux « d’artisanale » et pointent des « lacunes règlementaires » qui laissent le champ libre à des pratiques potentiellement dangereuses. Les auteurs rappellent :

« Si la probabilité d’occurrence d’un accident est faible, le danger (importance des dégâts en cas d’accident) est élevé. Une explosion d’un stock même limité d’ammonitrates haut dosage peut provoquer des dégâts considérables. »

Quatre sénateurs, se basant en partie sur les données et analyses du CGEDD, ont eux aussi publié un rapport d’information sur le sujet le 6 juillet 2022. Ils confirment la légèreté du cadre règlementaire encadrant le trafic d’ammonitrates dans les ports fluviaux et appellent à un renforcement de celui-ci. La situation dans les ports maritimes est « satisfaisante », selon les rapporteurs.

Des données parcellaires

Selon les estimations du CGEDD, basées sur les chiffres partiels de l’importation, 50 000 tonnes d’ammonitrates haut dosage importés transiteraient chaque année par la voie fluviale en France, ce qui représente une part minoritaire du trafic global. Il n’existe pas de données précises, ni à l’échelle nationale ni au niveau local, sur la nature et les quantités d’ammonitrates qui circulent par voie fluviale.

« En 2021, les matières dangereuses représentent moins de 2% de la totalité des marchandises qui transitent par le Port de Strasbourg », indique Pauline Jacquet, responsable de la promotion portuaire du Port autonome de Strasbourg (PAS), deuxième plus gros port fluvial de France. Aucune distinction n’est faite entre les « matières dangereuses ».

Des ammonitrates haut dosage transitent par le Port autonome de Strasbourg Photo : d’illustration/Rue89 Strasbourg/cc

La « faiblesse » du cadre règlementaire

Les ammonitrates sont soumis à différentes règlementations. Sur la voie fluviale, c’est le règlement international ADN qui s’applique. Quand ces engrais sont stockés sur des sites fixes, au-dessus d’une certaine quantité – 250 tonnes en vrac et 500 tonnes en sacs appelés « big bags » – ils rentrent dans le cadre du régime des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), qui prévoit des mesures de précaution en matière de stockage et de défense incendie notamment. Ces stocks doivent faire l’objet de déclaration auprès de la Direction régionale de l’environnement (Dreal) et peuvent être contrôlés.

Mais entre le transport et le stockage, les ammonitrates sont chargés, déchargés, parfois posés à terre temporairement en attendant de passer d’un véhicule à un autre. Cette manutention s’effectue dans une « situation floue intermédiaire », selon le CGEDD, et n’est que peu encadrée. Dans les ports fluviaux, les ammonitrates peuvent être déposés à même le sol, parfois en vrac. Ces pratiques augmentent le risque de contamination qui accroît leur réactivité, et donc, leur potentiel explosif. Elles sont interdites dans les ports maritimes. Selon les rapporteurs sénatoriaux :

« La faiblesse du cadre réglementaire concernant la manutention de matières dangereuses dans les ports fluviaux ne permet pas un contrôle effectif de ces opérations dans ces infrastructures. »

Des ammonitrates qui circulent incognito

« Sur les terminaux nord et sud, détenus à 100% par le port, des règles strictes de sécurité s’appliquent. Un plan de prévention des risques encadre la manière dont on traite et gère les marchandises, les lieux de stockages et les dispositifs de défense incendie qui y sont rattachés », indique Pauline Jacquet.

Cinq-cents entreprises sont implantées dans le Port autonome de Strasbourg. Des cargaisons d’ammonitrates transitent directement sur ces sites, et ne sont pas soumises aux même règles que sur les terminaux. La règlementation prévoit que le préfet définit les lieux où l’on a le droit de charger et décharger des matières dangereuses dans le port.

Un évènement relaté dans le rapport du CGEDD démontre toutefois que des cargaisons d’ammonitrates peuvent passer entre les mailles du filet :

« Il a également été rapporté que les pompiers avaient découvert la présence de près de 480 t de big bags d’ammonitrates haut dosage, sur le site d’une coopérative exploitant des silos de céréales sur le port de Strasbourg en se rendant sur place pour éteindre l’incendie d’un silo. Cette utilisation d’un appontement portuaire pour décharger des matières dangereuses était inconnue aussi bien de la direction du port de Strasbourg, que de l’ensemble des services de l’État. »

De sources concordantes, cette situation fait référence à l’explosion du silo à céréales Silorins, appartenant au Comptoir agricole Strasbourg, survenu le 6 juin 2018. Contacté, le Comptoir agricole Strasbourg n’a pas répondu à nos demandes d’interview.

Lors de l’incendie du silo à céréales Silostra Silorins, survenu le 6 juin 2018, les pompiers ont découvert la présence de près de 480 tonnnes de big bags d’ammonitrates haut dosage, sur le site d’une coopérative exploitant des silos de céréales du port de Strasbourg. » Photo : Document préfecture Bas-Rhin

Des contrôles insuffisants ?

Le contrôle des ammonitrates sur les voies fluviales s’articulent entre plusieurs acteurs. D’abord, quand une péniche navigue sur le Rhin avec des matières dangereuses, elle a l’obligation d’annoncer la nature et la quantité de sa cargaison auprès du centre d’alerte rhénan d’informations nautiques de Gambsheim (Caring) et géré par Voie navigables de France (VNF). Ce dispositif est prévu par un règlement de police de la navigation local spécifique au Rhin, induit par son statut international. Cette obligation d’annonce n’est pas effective sur tous les fleuves, précise le CGEDD dans son rapport.

Les bateaux transportant des ammonitrates peuvent également faire l’objet de contrôles inopinés menés par la gendarmerie fluviale ou la Direction régionale de l’environnement (Dreal). Geneviève Lang, membre de la brigade de Gambsheim de la gendarmerie fluviale et formatrice nationale pour le contrôle des matières dangereuses, détaille sa mission :

« Lors d’un contrôle sur l’eau, on demande aux équipes de nous fournir tous les documents obligatoires relatifs aux transports de matière dangereuse. On regarde si les systèmes d’extinction incendie sont prêts à fonctionner, si des équipements comme des masques faciaux sont bien présents etc. Quand on est à quai, on prend plus de temps pour réaliser un contrôle complet. Les cargaisons d’ammonitrates ne sont pas traitées différemment d’une autre matière dangereuse. Nous travaillons étroitement avec les services de la Dreal et faisons parfois des contrôles ensemble. »

Un manque de contrôles dans les ports fluviaux

Lors de leur audition par le Sénat, le 1er décembre 2021, retranscrite en annexe du rapport sénatorial, deux auteurs du rapport du CGEDD, Michel Pascal et Jérôme Goellner, tous deux ingénieur général des Mines estiment que les contrôles effectués par la Dreal dans les ports fluviaux sont insuffisants. Michel Pascal précise :

« Le problème de Strasbourg et d’Elbeuf n’est pas une question de moyens humains. Une visite une fois par an prend peu de temps. La DREAL pourrait s’en occuper. Or elle ne le fait pas. »

Et Jérôme Goellner de renchérir :

« Des contrôleurs des transports terrestres contrôlent le transport des matières dangereuses. Ils dépendent des DREAL. Leur priorité, c’est la route. Ils contrôlent beaucoup de camions, quelques lignes de chemin de fer et très peu de voies fluviales, les ports relevant des capitaineries. Il ne serait pas très compliqué de faire quelques contrôles dans les ports, et cela ne nécessiterait pas beaucoup de monde. »

Contactée à ce sujet, la préfecture n’a pas répondu à nos demandes d’entretien.

Pas d’évolution règlementaire pour le moment

Le CGEDD émet des recommandations pour améliorer la situation, en particulier dans les ports fluviaux. Elles visent d’une part à renforcer la surveillance et le contrôle des matières dangereuses, et d’autre part à aligner la règlementation des ports fluviaux en la matière sur celle, plus stricte, qui s’applique aux ports maritimes.

Depuis mai 2021, date de publication du rapport du CGEDD, il n’y a eu aucune évolution règlementaire encadrant davantage le trafic d’ammonitrates haut dosage sur les voies fluviales et dans les ports fluviaux. Un arrêté gouvernemental a bien été pris le 7 février 2022. Il renforce l’encadrement de la manutention des matières dangereuses dans les ports… maritimes.

La question de se passer des ammonitrates, en raison des risques pour la sécurité que cette matière fait peser sur la population, s’est posée pour de nombreux pays. L’Allemagne, la Belgique, l’Irlande, l’Australie, la Turquie, la Chine et l’Inde, ont interdit les ammonitrates haut dosage sur leurs sols, ou ont assujettis leur usage à des « règles draconiennes », notent les experts du CGEDD.

Dans le Grand Est, un médecin de la police sourd aux souffrances des policiers

Dans le Grand Est, un médecin de la police sourd aux souffrances des policiers

Dans une enquête de FranceInfo, une ancienne policière et un policier d’origine alsacienne témoignent des ratés d’un médecin de la police qui a remis en cause des arrêts de travail au détriment de la santé des agents.

L’enquête de FranceInfo commence par le témoignage anonyme d’une ancienne policière. L’Alsacienne raconte ce vendredi 4 novembre 2016 où il lui est tout à coup impossible de bouger en sortant du supermarché. Diagnostic à l’hôpital : une hernie discale. L’officier de police judiciaire est arrêtée plus de trois semaines. Mais à l’été 2017, la policière souffre à nouveau des mêmes douleurs. Elle est opérée une seconde fois en août.

Deux mois plus tard, en octobre 2017, le docteur Christian Frey la reçoit pour une visite de contrôle. Le médecin inspecteur décrète qu’elle peut reprendre le travail. Mais le jour de la reprise, Alice (le prénom a été modifié) se retrouve à nouveau paralysée. « Un IRM a malheureusement objectivé une récidive précoce de la hernie discale, ce qui a nécessité une nouvelle intervention », écrit son médecin traitant dans un rapport que FranceInfo a pu consulter. Elle sera arrêtée jusqu’en mars 2018.

Policiers lors d’un contrôle routier dans le quartier du Port du Rhin en juillet 2019. Photo : Rue89 Strasbourg

Un médecin chef déjà condamné

Ce n’est pas la première fois que ce médecin de la police du Grand Est fait des ravages. Pour rappel, le tribunal correctionnel de Metz a condamné en 2019 l’ancien médecin chef à 18 mois de prison avec sursis pour des agressions sexuelles sur huit policières et un policier, tous issus de la police nationale dans le Grand Est. En janvier 2022, la cour d’appel de Reims a condamné Christian Frey à un an de prison avec sursis. Il est désormais interdit d’exercer la médecine.

Un second témoignage de policier alsacien pointe la même défaillance d’un médecin de la police. Pour Pascal (le prénom a été modifié), la pathologie est psychologique puisqu’il est victime d’un stress post-traumatique. L’enquête de FranceInfo détaille l’origine de son traumatisme ainsi qu’un premier rendez-vous avec Christian Frey puis un second, avec l’expert psychiatre strasbourgeois, le docteur Henri Brunner. Ce dernier a déjà fait l’objet d’une plainte de plusieurs psychiatres pour des expertises baclées et des comportements humiliants vis-à-vis des personnes expertisées, comme l’avait révélé Rue89 Strasbourg.

Dr Brunner : « Qu’il y ait quelques mécontents, c’est inévitable »

Le Dr Brunner n’avait pas donné suite à notre demande d’interview en janvier 2021. Il a néanmoins répondu à notre consœur de FranceInfo indiquant n’avoir « jamais eu de problèmes » devant la justice. L’expert psychiatre a aussi indiqué qu’il réalise « environ 700 expertises par an (…) Donc qu’il y ait quelques mécontents là-dedans, c’est inévitable. »

Quelques heures après la publication de l’article, le policier Pascal a reçu un mail lui indiquant qu’une de ses revendications est enfin satisfaite : à partir du mois d’août, un demi-traitement lui sera versé. « C’est la moitié du salaire réglementairement maintenue tant que le conseil médical ne s’est pas prononcé, indique Pascal auprès de Rue89 Strasbourg, dans mon cas, l’administration volontairement a omis de le verser… »

#arrêt de travail

Anxiété, dépression, phobies… À Strasbourg, structures d’accueil et services hospitaliers débordés par le mal-être croissant des jeunes

Anxiété, dépression, phobies… À Strasbourg, structures d’accueil et services hospitaliers débordés par le mal-être croissant des jeunes

Les troubles psychiques, gestes ou idées suicidaires explosent chez les adolescents et les étudiants. Face à l’ampleur inédite du problème, les services hospitaliers et les structures d’accueil et de prévention frôlent le point de rupture.

Au Centre d’accueil médico-psychologique pour adolescents (Campa) des Hôpitaux universitaires de Strasbourg (HUS), quatre-vingt noms figurent sur la liste d’attente. « C’est inédit », pose Julie Rolling, pédopsychiatre au service psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent des HUS. « Du matin au soir », des jeunes de 12 à 18 ans affluent pour consulter. Ils sont atteints d’anxiété, de dépression, de phobies. Des troubles qui, parfois, aboutissent à des gestes suicidaires. Selon le docteur Rolling, face à cette « vague », les services de soins sont « sursaturés ».

Peintures réalisées par des adolescents accueillis au sein du service psychothérapique pour enfants et adolescents des Hôpitaux Universitaires de Strasbourg. Photo : Guillaume Krempp / Rue89 Strasbourg / cc

Mis en lumière pendant deux années de pandémie, le mal-être d’une génération toute entière – enfants, adolescents, étudiants – enfle. « En psychiatrie, les conséquences arrivent toujours dans un deuxième temps. Là, on est dans une phase de plateaux, qui ne redescend pas », constate Julie Rolling.

La défenseure des droits, Claire Hédon, s’est saisie de cette situation, en appelant la Première ministre, le 2 juin 2022, à mettre en place un « plan d’urgence pour la santé mentale des jeunes ». La tendance, nationale, se confirme localement. Tous les indicateurs sont au rouge.

Des indicateurs en hausse

Les données locales les plus récentes proviennent de l’analyse épidémiologique bimestrielle de la santé mentale réalisée par Santé Publique France (SPF) en région Grand-Est, publiée en décembre 2021. Sur la période de janvier à novembre 2021, le nombre mensuel moyen de passages aux urgences pour troubles psychiques de l’enfant (0 – 18 ans) est en augmentation de 43% par rapport à 2020. Les troubles psychiques recouvrent différentes formes de mal-être tels que l’anxiété, les phobies, la dépression, les addictions ou les troubles alimentaires.

Page 5 of Rapport bimestrielle 2021 - SPF - Santé mentale
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Ces troubles psychiques peuvent mener à des gestes suicidaires, dont le nombre de passage aux urgences des adolescents de 11 à 17 ans a augmenté de 47% entre janvier et novembre 2021 comparé à la même période en 2020, note SPF.

Le service de pédopsychiatrie des Hôpitaux Universitaires de Strasbourg se situe dans le quartier de l’Elsau. Photo : Guillaume Krempp / Rue89 Strasbourg / cc

Santé Publique France observe enfin « une augmentation des passages aux urgences pour idées suicidaires en région Grand Est en 2021 pour l’ensemble des classes d’âges à partir de 11 ans ». 40% des jeunes concernés sont des adolescents de 11 à 17 ans.

Page 3 of Rapport bimestrielle 2021 - SPF - Santé mentale
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« Le Covid a ajouté de la fragilité à la fragilité »

La vulnérabilité psychique est inhérente à la période de l’adolescence et du passage à l’âge adulte. « C’est un moment d’entrée potentielle dans des pathologies : la schizophrénie ou la bipolarité par exemple. On observe aussi à cette période une forte symptomatologie de troubles de la conduite, de l’addiction, de l’alimentation », précise Myriam Riegert, psychiatre et directrice médicale du Centre d’accueil médico-psychologique universitaire de Strasbourg (Camus), un lieu d’écoute et de prévention des troubles psychiques où chaque étudiant strasbourgeois peut consulter des psychologues, psychiatres ou une assistante sociale.

Christelle Eby est psychologue et coordinatrice des Points d’accueil écoute jeunes (Paej). Ces lieux sont dédiés à la prévention des troubles psychiques et des gestes suicidaires dans le Bas-Rhin. Elle liste les causes chroniques des troubles rencontrées chez les jeunes accueillis dans ses structures :

« La majorité des problématiques observées ont rapport avec le contexte intrafamiliale, des cas de violences par exemple, la précarité financière, la pression scolaire. La pandémie de Covid est venue ajouter de la fragilité à la fragilité. »

Dans son rapport d’activité 2021, l’association Alt, qui gère les 39 Paej implantés dans le Bas-Rhin, estime que « des jeunes déjà fragiles avant la crise sanitaire, sont encore plus vulnérables, laissant apparaitre différentes expressions de mal être : repli sur soi, angoisse de séparation, absentéisme scolaire, signes dépressifs, pensées suicidaires, scarifications, insomnie, troubles alimentaires… »

La crise sanitaire : un simple « catalyseur » ?

La pandémie liée au virus du Covid-19 a fait office de déclencheur. Mais les causes du mal-être semblent plus profondes. Julie Rolling explique :

« Les adolescents sont particulièrement perméable à leur environnement. En consultation, certains font état de la crise climatique, de la guerre en Ukraine, s’inquiètent de manquer un jour d’eau. Globalement, les jeunes générations précédentes associaient l’avenir à quelque chose de l’ordre du progrès, de positif. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. »

Cette tendance est confirmée par Myriam Riegert : « Le contexte globalement anxiogène fait le lit de leur pessimisme. » L’association Alt constate également, dans son rapport d’activité 2021, une « difficulté de projection dans l’avenir, du fait de la crise sanitaire et des prédictions parfois douteuses quant au futur. »

Des jeunes en détresse sous les radars

Si les besoins ne cessent ce croître, les moyens pour y répondre, eux, ne suivent pas. Ce qui pourrait avoir des répercussions sur la détection de potentielles situations critiques, comme le relate Julie Rolling :

« Actuellement, les unités fonctionnent à leur maximum. On est dans une situation d’ultra-optimisation. La liste d’attente s’allonge. On doit prioriser. On a tous les jours conscience que des jeunes attendent. Mon inquiétude, c’est qu’un jour, un parent appelle et me dise : mon enfant s’est suicidé, j’avais appelé il y a quinze jours, et je n’ai pas eu de rendez-vous. Ce que l’on dit est simple : il faut des ressources, il faut des gens. On est capable de recruter et de faire notre travail si on nous en donne les moyens. « 

Cette pression a des conséquences sur toute la chaîne de prise en charge des jeunes atteints de troubles psychiques. Comme en atteste Christelle Eby :

« L’un de nos rôles est d’orienter des jeunes vers des professionnels, mais les temps d’attente s’allongent et atteignent parfois douze mois. À part s’il y a urgence vitale, les délais de prise en charge sont trop long et ce n’est pas satisfaisant. Les Points d’accueil écoute jeunes font un peu la salle d’attente. Notre mission première, c’est la prévention, mais on se retrouve à faire un peu plus quand même. »

Myriam Riegert s’alarme elle aussi d’une « offre de soins sous-dimensionnée ». En 2021, le Camus a accueilli 1917 étudiants, ce qui représente 3% de la population étudiante, contre 1382 l’année précédente. Mais la psychiatre doute de pouvoir maintenir cette capacité d’accueil si les moyens exceptionnels mis en place pendant la pandémie ne sont pas maintenus :

« Le nombre de personnes accueillies augmente car nos moyens augmentent. Mais la pérennité des renforts d’urgence n’est pas garantie. Nous avons reçu l’appui de trois équivalent temps plein psychologue en 2021. Ils sont maintenus pour 2022-2023. Mais nous n’avons pas de visibilité pour deux de ces postes après cette échéance. »

Une réévaluation des moyens financiers à attendre

Interrogée sur les moyens, notamment financiers, mis en place pour répondre au problème de la dégradation de la santé mentale chez les jeunes, l’Agence régionale de santé Grand Est s’est contenté de répondre qu’une « révision nationale du financement de la psychiatrie est actuellement en cours (…) Nous attendons les résultats. »

Un numéro national de prévention du suicide, gratuit, accessible 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24, a par ailleurs été mis en place, depuis le 1er octobre 2021 : le 3114. Il a pour objectif la « prise en charge des personnes ayant des idées suicidaires et de leur entourage, depuis les premières idées de mort jusqu’à la crise suicidaire. »

Stocamine : la justice maintient la suspension des travaux de confinement des 42 000 tonnes de déchets toxiques

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Lundi 1er août, la justice a rejeté la requête soutenue par l’entreprise Mines et Potasse d’Alsace et l’Etat. Le tribunal administratif a maintenu la suspension des travaux de confinement des 42 000 tonnes de déchets ultimes stockés par Stocamine.

Nouveau revers pour la préfecture du Haut-Rhin et l’entreprise Mines et Potasse d’Alsace (MDPA). Lundi 1er août, le tribunal administratif a maintenu la suspension des travaux de confinement des 42 000 tonnes de déchets ultimes enfouis sous la nappe phréatique. Dans une décision du 25 mai faisant suite à un recours de la Collectivité européenne d’Alsace (CeA) et des associations Alsace Nature et Consommation Logement Cadre de vie (CLCV), les juges avaient alors considéré que la préparation des barrières de confinement en béton avaient bien un aspect définitif et irréversible. Or, de tels travaux de confinement des déchets toxiques ne sont pas autorisés pour le moment.

Un « risque de propagation des fissurations » selon la MDPA

Les avocats de l’entreprise MDPA et de l’Etat ont soutenu qu’il y avait urgence à reprendre les travaux pour « sécuriser le site et prévenir toute pollution de la nappe phréatique d’Alsace ». Me Le Roy-Gleizes, avocate de la société MDPA, a soulevé « le fait que la roche se fracture, si bien que la tenue mécanique du pilier et du toit est dégradée, aggravant les surfaces endommagées (EDZ) et le risque de propagation de ces fissurations, nécessitant la réalisation de boulonnage de soutènement pour sécuriser la mine ».

Mais le tribunal administratif n’a pas retenu les arguments de MDPA et de la préfecture, préférant reprendre l’un des points soulevés par la CeA et les associations CLCV et Alsace Nature :

« Les nouveaux éléments produits par la société MDPA ne permettent pas non plus de caractériser une urgence à poursuivre, dans les plus brefs délais, les travaux de réalisation des barrages de confinement numéros 1 et 2, ni à entamer, dans les mêmes conditions, les travaux relatifs au barrage n° 3. »

Un énième revers pour MDPA et le gouvernement

C’est un énième défaite pour l’entreprise MDPA et le gouvernement, dont l’entêtement confine à l’absurde. En octobre 2021, la cour administrative d’appel de Nancy avait cassé l’arrêté de l’État qui visait à laisser indéfiniment les déchets toxiques à Stocamine. La préfecture du Haut-Rhin a ensuite pris un arrêté qui mettait en demeure MDPA de procéder à des travaux présentés comme seulement « préparatoires au confinement. »

Les associations Alsace Nature et la CLCV avaient alors attaqué l’arrêté préfectoral en estimant que ces travaux seraient irréversibles et qu’il était donc urgent de suspendre toute opération dans les anciennes mines de sel. Leur requête avait d’abord été rejetée. Suite au début des travaux le 10 mai 2022, une nouvelle procédure de suspension initiée par la CeA et Alsace Nature a fini par convaincre le tribunal administratif de Strasbourg.

Les galeries de Stocamine stockent aujourd’hui 42 000 tonnes de déchets dits « ultimes ». Ce sont des « big bags » pleins de produits chimiques que les techniques de traitement des années 90 ne permettent pas de dépolluer. Dans l’enquête publique relative à la demande de stockage définitif, il est bien spécifié que la composition exacte des déchets « ultimes » entreposés n’est pas connue.

Une enquête pénale en cours sur la nature des déchets

D’autres substances hautement toxiques sont présentes comme de l’arsenic, du cyanure ou encore de l’amiante, mais dans des quantités inconnues. Certains composants comme le cyanure pourraient être plus présents qu’initialement estimé. En 2017, 24,16 des 25,70 tonnes de mercure, soit 94% des barils présents, ont été déstockées. Au total environ 2 000 des 44 000 tonnes sont remontées à la surface.

En avril 2021, Rue89 Strasbourg démontrait que les informations transmises par Stocamine sur les 42 000 tonnes de déchets toxiques stockés sont probablement inexactes. Deux mois plus tad, Alsace Nature portait plainte contre X et espèrait « enfin » obtenir un inventaire complet des substances chimiques stockés sous la nappe phréatique. En mars 2022, le pôle environnement du parquet de Strasbourg a annoncé avoir saisi l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (Oclaesp) dans le cadre de l’enquête pénale en cours sur la nature des déchets enfouis.

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Cinq spécificités du droit alsacien-mosellan dont on pourrait se passer

Cinq spécificités du droit alsacien-mosellan dont on pourrait se passer

Le droit local en vigueur en Alsace – Moselle offre quelques jours fériés supplémentaires et permet plus de solidarité mais certaines dispositions de ce corpus de textes ont mal vieilli et mériteraient d’être actualisées, voire abrogées. Voici une sélection.

Les associations alsaciennes et mosellanes sont introuvables sur le registre national des associations. Une absence due au droit local alsacien-mosellan. De 1871 à 1918, ces trois départements étaient allemands, à un moment où plusieurs lois importantes ont été votées en France dont le droit d’association.

Les trois sources du droit local

En 1918, pour faciliter le retour à la France, un certain nombre de textes juridiques allemands et anciens ont été conservés, une partie est encore en vigueur à ce jour. Le corpus législatif propre à l’Alsace-Moselle est issu de trois sources : des lois françaises d’avant 1870 abrogées en France, des textes allemands de 1871 à 1918 et des textes français postérieurs à 1918, mais dont l’application est limitée à l’Alsace-Moselle.

En 2014, Rue89 Strasbourg s’était penché sur les dispositions du droit local à sauvegarder, comme deux jours fériés supplémentaires ou une assurance maladie mieux répartie et plus avantageuse. Voici une nouvelle plongée dans les livres de droit, avec cette fois-ci, des dispositions qui mériteraient de disparaître.

1. L’inégalité de traitement entre les religions dans un pays laïc

Dans le reste de la France, le Concordat signé en 1801 entre Napoléon et le Pape Pie VII a été abrogé en 1905 par la loi de séparation des Églises et de l’État. En Alsace-Moselle, il s’applique toujours. De ce régime des cultes découle la rémunération des prêtres, des pasteurs et des rabbins par l’État. Seuls les cultes dits « reconnus » en bénéficient : culte catholique, culte protestant (luthérien et calviniste), culte israélite. En Alsace-Moselle, 1 397 ministres des cultes sont ainsi rémunérés sur le budget du ministère de l’Intérieur, pour un montant annuel de 58 millions d’euros. Ce budget est donc payé par l’ensemble des contribuables français, y compris les non-croyants, et les habitants hors Alsace-Moselle.

Le code du droit local alsacien-mosellan conçu par l’Institut du droit local, édition 2020. Photo : Lucie Lefebvre / Rue89 Strasbourg

En contrepartie de ce financement, l’État dispose d’un droit de regard sur la nomination des ministres des cultes. Dans la religion catholique par exemple, les évêques sont nommés par décret du président de la République, sur proposition du Pape. Ce sont aussi uniquement ces cultes dits « reconnus » qui peuvent être enseignés dans les établissements scolaires publics.

Pour Benoit Vaillot, historien spécialiste de l’histoire de l’Alsace, le maintien du Concordat est inacceptable dans un pays laïc :

« Si on est attaché au principe de laïcité, c’est une exception scandaleuse. L’État n’a pas à mettre son nez dans les affaires de religion. L’application de la loi de 1905 à l’Alsace Moselle serait un gain de liberté dans l’exercice des cultes « reconnus » avec la suppression du droit de regard, mais représenterait pour eux une perte économique, surtout pour les cultes catholiques, qui bénéficient des subventions les plus élevées. D’un point de vue républicain, le régime cultuel alsacien-mosellan est à la limite de la légalité. Il y a en tout cas une rupture d’égalité entre les citoyens. »

Tous les autres cultes dits « non reconnus » n’entrent pas dans le Concordat : l’islam, la communauté juive libérale, les églises évangéliques, le bouddhisme… Ce régime place l’Église catholique en position dominante, comme l’explique Michel Seelig dans son ouvrage « Vous avez dit Concordat ? » publié en 2015 :

« Le Concordat établit un système discriminatoire à l’intérieur des confessions protestante et juive, il exclut complètement l’islam, pourtant bien représenté dans ces territoires. »

Grâce à ce régime spécial, les communes peuvent accorder des subventions et financer certains projets découlant des cultes, sous condition d’un intérêt public, au même titre qu’à une association classique. En 2004, la Ville de Strasbourg et les autres collectivités alsaciennes avaient étendu ce subventionnement à l’islam, lors de la construction de la Grande mosquée de Strasbourg au Heyritz. Ce précédent avait ressurgi à l’occasion d’une subvention pour une autre mosquée, celle du Millî Görus à la Meinau. À cette occasion, l’Ifop avait réalisé un sondage pour le Grand orient de France : 52% des habitants d’Alsace-Moselle et 78% des Français seraient favorables à l’abrogation du Concordat.

L’historien Benoit Vaillot analyse :

« C’est la première fois qu’une majorité des Alsaciens-Mosellans est favorable à l’abolition du régime des cultes. Il y a 50 ans, même moins, une très grande majorité de la région défendait encore son maintien, il semblait donc anti-démocratique de le supprimer. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas et cela engendre un problème de légitimité. Il ne faut pas oublier que le maintien de ce régime était transitoire après la Première guerre mondiale, il avait vocation à s’éteindre. Actuellement, cette question est davantage devenue politique que religieuse. Le Concordat est devenu un totem de l’identité régionale, défendu par les mouvements ethno-régionalistes alsaciens. Je pense qu’il faudrait faire preuve de courage et appliquer la loi de 1905 partout, en supprimant le droit de regard de l’Etat et le financement des cultes. Grâce à la laïcité, l’Etat ne reconnaît aucune religion, et applique pleinement la liberté de conscience. »

2. Le casse-tête de l’articulation des droits

Les règles du droit local datent d’il y a plus d’un siècle. Depuis, tout un arsenal juridique s’est développé et notamment le droit européen et international. Lorsqu’un litige traverse les frontières et provoque un conflit de lois, il faut pouvoir définir le tribunal compétent et la loi applicable. Un arbitrage possible grâce aux règlements européens, qui définissent des critères de rattachement, par exemple le lieu de conclusion du contrat. Mais les règles de conflit du droit local vont parfois définir des critères différents. Ces règles de conflits entraînent de nombreuses difficultés dans la pratique.

Nicolas Nord, spécialiste en droit international privé et en droit comparé à l’Université de Strasbourg, met en avant la difficile articulation des règles locales, nationales et internationales :

« Certaines règles de droit local ne correspondent plus vraiment à la société, et apparaissent inadaptées aux nécessités actuelles. Par exemple en matière contractuelle, on ne sait jamais quel est le texte applicable. Les règles de conflit destinées à identifier le champ d’application du droit local sont pour la plupart obscures, voire inapplicables, car supplantées par des textes internationaux et des règlements de l’Union européenne. À plus long terme, l’existence de règles de droit spécifiques à l’Alsace-Moselle apparaît menacée, faute pour elles d’être dotées d’un champ d’application clair. La plupart du temps, la justice ignore le problème et utilise le règlement européen. Il y a un côté très anachronique de ces dispositions et une absence totale d’adaptation. En pratique, ces règles locales sont donc largement méconnues et les juges français ne les appliquent que rarement. »

3. L’accès difficile aux prix des biens immobiliers alsaciens-mosellans

La base DVF (demande de valeurs foncières) donne accès aux prix des biens immobiliers en France… sauf en Alsace et en Moselle. Cette base de données, a été rendue accessible à tous par un décret du 28 décembre 2018. Elle permet à chaque particulier de consulter les prix de vente des biens immobiliers, sur les cinq dernières années.

Pour Henry Buzy-Cazaux, président de l’Institut du management des services immobiliers, cette base de donnée ouverte constitue un outil essentiel pour la transparence des propriétés immobilières et l’accès à l’information :

« Le grand public et les professionnels se servent de cette plateforme pour consulter l’ensemble des données du marché sur les transactions immobilières réalisées sur le territoire. C’est un gain précieux pour connaître le niveau des transactions pratiquées dans une même zone, notamment pour maîtriser les abus et avoir des références. »

Certaines de ces données sont disponibles en Alsace – Moselle dans le Livre foncier, qui est régi par le droit local. Le citoyen peut les consulter en demandant la délivrance d’une copie. Le juge du Livre foncier est responsable de cette publicité, ainsi que du contrôle de la forme des actes authentiques.

Pendant plus d’un siècle, le Livre foncier a été tenu de façon manuscrite dans des registres papier. Il a finalement été numérisé et rendu accessible le 1er juillet 2008 par l’établissement public d’exploitation du livre foncier informatisé d’Alsace-Moselle (Epelfi).

Cédric Lavaud, agent immobilier à Metz, précise :

« D’une manière générale, cette différence ne pose pas de contraintes particulières pour les professionnels alsaciens-mosellans, nos bases de données sont multiples et mises à jour rapidement. Mais dans le reste de la France, les professionnels ont plus de mal à comprendre comment fonctionne la publicité foncière dans nos zones et il serait bien pratique que la base DVF soit accessible partout. »

Pour Henry Buzy-Cazaux, cette exception juridique pose un problème de transparence :

« La connaissance d’un marché ne doit pas avoir de frontière territoriale, culturelle ou historique. Le besoin de transparence est le même partout. On pourrait très bien imaginer des passerelles statistiques et une communication entre les bases de données nationales et locales… La question avait été posée au moment de la mise en service de DVF mais rien n’a été fait. »

4. Un cadre rigide pour créer, modifier et obtenir les informations d’une association 

En Alsace-Moselle, la création d’une association de droit local relève de la loi de 1908 et non de celle de 1901. Conséquence, il faut se déplacer au tribunal judiciaire du siège de l’association et l’inscrire sur un registre. Le juge va alors vérifier « l’absence d’atteinte à l’ordre public et aux bonnes mœurs » et s’assurer que la constitution est portée par sept membres au moins. En cas de modification, il est nécessaire de faire une demande écrite au greffe de ce même tribunal. Et pour consulter ce registre, par exemple lorsqu’il s’agit de vérifier l’objet social ou les membres du bureau d’une association, il faut aussi se déplacer ! Depuis 2021, il est même nécessaire de prendre rendez-vous.

Cette spécificité avait engendré des discriminations pour les associations alsaciennes-mosellanes, qui ne pouvaient accéder aux dons des utilisateurs de Facebook. Le réseau social réclame le numéro de ce registre pour pouvoir activer cette fonctionnalité. Les difficultés d’une association, Assiettes végétales, sur Facebook en 2020 avait fait réagir des députés.

Depuis la loi du 23 mars 2019, la mission d’informatisation de deux registres, un pour les associations de droit local, et un pour les associations coopératives de droit local, a été confiée à l’Epelfi. Son directeur général, Julien Millet, précise :

« Cela fait plus de deux ans que nous préparons un logiciel adapté pour fusionner les données et mettre en place un téléservice. Une première version sera disponible à partir du 1er janvier 2023. Les associations qui le souhaitent pourront demander un numéro RNA. »

Pour une mise en relation entre le registre national et ces registres locaux, voici la réponse du ministre de la Justice en 2020 : « Il s’agit d’une question qui devra donner lieu à expertise interministérielle, et notamment à des échanges avec le ministère de l’Intérieur. »

Six ouvrages consacrés au droit local alsacien-mosellan. Photo : Lucie Lefebvre / Rue89 Strasbourg

5. La lente et complexe informatisation du Registre du commerce et des sociétés (RCS)

L’extrait Kbis permet de vérifier les données comptables d’une entreprise immatriculée au Registre du commerce et des sociétés (RCS). Ce document est incontournable pour les entreprises, notamment pour faire des démarches auprès de l’administration ou des tiers.

Dans le reste de la France, ces extraits sont accessibles via Internet depuis 2001 grâce au site Infogreffe, une plateforme alimentée par l’ensemble des greffes des tribunaux de commerce de France. Mais en Alsace-Moselle, les tribunaux de commerce ont été supprimés par une loi d’Empire de 1877. Les affaires commerciales relèvent de chambres spécialisées des tribunaux, en vertu de l’article L731-2 du Code de commerce.

Le Palais de Justice, où se situe le tribunal judiciaire de Strasbourg. Photo : Evan Lemoine / Rue89 Strasbourg

Jusqu’en 2020, il fallait se déplacer jusqu’au tribunal pour obtenir l’extrait Kbis en mains propres quand ailleurs, quelques clics suffisaient. Ces territoires se confrontaient à un retard matériel et administratif pour la délivrance de ces documents. Dans un article publié en 2017, Rue89 Strasbourg racontait le casse-tête du « labyrinthe administratif de la justice alsacienne ». 

Face à cette complexité, le ministère de la Justice a entamé une informatisation progressive des démarches et depuis 2019, les entrepreneurs strasbourgeois peuvent enfin effectuer cette démarche en ligne.

Gérald Darmanin, avez-vous déjà rencontré ces « étrangers délinquants » que vous souhaitez expulser ? Moi oui

Gérald Darmanin, avez-vous déjà rencontré ces « étrangers délinquants » que vous souhaitez expulser ? Moi oui

Présidente de la section strasbourgeoise de la Ligue des droits de l’Homme et bénévole de l’association d’aide aux réfugiés et migrants La Cimade, Ingrid Boury a découvert avec stupeur le projet de loi qui vise à faciliter l’expulsion des « étranger délinquants ». Elle a écrit cette lettre ouverte destinée à son auteur, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.

Monsieur Darmanin,  

En me réveillant ce matin, j’ai découvert votre projet de loi « Étrangers délinquants ». Il a suscité en moi des sentiments de colère et d’incompréhension. Pourquoi ? Hier, j’ai passé mon après-midi à la maison d’arrêt de Strasbourg pour une permanence juridique en droit des étrangers. Je vous écris aujourd’hui du fait de mon expérience de bénévole au sein de La Cimade depuis plus de cinq ans. Par ce biais, j’ai rencontré des centaines d’ « étrangers délinquants » comme vous les qualifiez. Mais est-ce que vous vous les avez simplement rencontrés avant d’avoir l’idée de votre future loi ?

Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin rencontre souvent des policiers. Mais a-t-il rencontré ces « étrangers délinquants » qu’il veut expulser ? Photo : Jacques Paquier / Flickr / cc

Avez-vous rencontré Monsieur Y ? Moi oui.

M. Y est arrivé à l’âge de 13 ans en France, seul, du Sahara occidental. Il n’a jamais été déclaré à la naissance. Il a été pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance (ASE) et a fait un apprentissage dans un restaurant strasbourgeois réputé.

« Vous dites que la France est généreuse »

Mais sans papier d’identité, impossible de le régulariser. M. Y s’est retrouvé majeur, sans emploi, à vivre dans la rue. M. Y est un « ni ni » comme vous dites, « ni expulsable ni régularisable ». Il est dans un « cercle vicieux », comme il l’a compris lui-même. La préfecture envisage, encore une fois, de lui notifier une obligation de quitter le territoire français. M. Y aimerait bien avoir un papier d’identité pour faire des demandes de régularisation. Il aimerait pouvoir travailler avec sa formation, pour laquelle l’État français a investi. Il aimerait pouvoir s’occuper de son enfant français alors qu’il n’a pas eu de parents.  

Vous dites que la France est généreuse. Vous trouvez cela généreux de former un jeune mineur puis de le laisser à la rue à sa majorité ? Vous trouvez cela généreux de le mettre dans une situation où il risque de devenir un « étranger délinquant » alors qu’il pourrait simplement travailler ?  

Je vous invite à faire des recherches sur l’homosexualité en Biélorussie

Avez-vous vu les cicatrices de Monsieur U ? Moi oui.

M. U est biélorusse. Il a fait partie d’associations qui luttent contre le pouvoir en place. Il a été frappé par la police biélorusse. Il a des cicatrices sur le corps, les avez-vous vues ? Moi oui.

Il a été en prison en Biélorussie. Il a des séquelles qui nécessitent des soins réguliers. M. U est rejeté par sa famille car il est  homosexuel. Je vous invite à faire des recherches sur l’homosexualité en Biélorussie. 

Vous dites que la France est généreuse. Vous trouvez cela généreux de vouloir expulser une personne dans un pays où il  trouvera des conditions de prison inhumaines pour des crimes qu’il aurait commis pour défendre la démocratie et  les droits de l’Homme ?  

S’ils retournent au Sénégal, leur fille risque l’excision

Avez-vous rencontré Monsieur N ? Moi oui.

M. N est sénégalais, il est arrivé en France avec sa femme et sa fille. Leur fils est né ici. M. et Mme N se sont mariés au Maroc, après avoir fui le Sénégal. Ils n’avaient pas le droit de se marier dans leur pays car ils viennent de deux ethnies différentes. Ils sont menacés par leurs propres familles et sont ici car ils parlent français et voulaient vivre leur amour librement.

S’ils retournent au Sénégal, leur fille risque de subir l’excision. M. N travaille « au noir » et sous-loue un logement pour sa famille.  

Vous trouvez cela généreux de séparer une famille ?

Vous dites que la France est généreuse. Vous trouvez cela généreux de séparer une famille et de risquer l’excision de leur petite fille ? Vous trouvez cela généreux de ne pas régulariser une famille qui travaille et vit sans aucune aide de l’État ?  

Avez-vous vu une personne de 20 ans être expulsée dans un pays qui lui était inconnu alors qu’elle était arrivée en France à l’âge de sept ans et que son père s’engageait à s’occuper d’elle ? Avez-vous vu des personnes en prison car elles s’étaient rebellées contre les forces de l’ordre pour ne pas monter dans un avion tellement elles avaient peur de retourner dans leur pays d’origine ? Avez-vous vu une mère, désemparée, face à son obligation de quitter le territoire alors que sa fille est en France ?

Moi oui.

Avez-vous quitté votre maison pour fuir la guerre ? 

Êtes-vous partis de l’Iran, en traversant la Turquie, la Grèce, l’Italie pour arriver en France deux ans plus tard, en manquant de mourir chaque jour dans la rue ou en passant les frontières ? Avez-vous quitté votre maison et laissé votre vie derrière vous pour fuir des guerres ? 

Moi non. Vous non plus. Eux si. Ils ne le font pas par plaisir.  

Il serait difficile d’être exhaustive. Ce ne sont que des exemples qui représentent des milliers de situations.

Je vous souhaite de ne jamais être un « ni ni »

Je suis sortie de la maison d’arrêt de Strasbourg hier, outrée par la violence psychologique que cela engendre quand une personne sort de prison et qu’en 24 heures elle se retrouve au Kosovo. Je me suis réveillée ce matin encore plus outrée par votre projet de loi alors que je pensais à ce que j’allais faire pour aider M. Y.  

Il y a quelques semaines, nous avons perdu M. S. Ce fut un choc, à Strasbourg. M. S a été retrouvé mort, victime de ce système, après des années et des années dans le cercle vicieux de la rue et de la prison, malgré toutes les personnes et associations qui se sont démenées pour l’aider. Le système avait fait de lui un « ni ni ». Je vous souhaite de ne jamais être un « ni ni ».  

Je ne parlerai des violations des droits de l’Homme

Je suis juriste, vous aussi, mais je ne ferai pas de droit ici. Je ne parlerai pas des violations des droits de l’Homme, de la convention européenne, des traités internationaux, que provoque cette future loi. Je ne parlerai pas de toutes les entraves juridiques que nous rencontrons déjà et de tous les moyens abusifs que vous employez, de tout ce qui pourrait être mis en place pour améliorer plutôt la réinsertion, du système carcéral qui va mal…

Je vous parlerai seulement d’humains. Et je vous demanderai seulement d’arrêter de parler d’eux avec des statistiques dans les médias, et d’arrêter de chercher les responsables là où ils ne sont pas.  

Je vous invite à venir rencontrer les « étrangers délinquants » pour connaître les parcours de ces personnes avant de juger de leur sort.

Je vous prie d’agréer, Monsieur Darmanin, mes sincères salutations.

Ingrid Boury

À la Nepomukfest à Neuenburg, la bratwurst rassemble la France et l’Allemagne

À la Nepomukfest à Neuenburg, la bratwurst rassemble la France et l’Allemagne

La « Nepomuk » est une des plus vieilles fêtes du Bade-Wurtemberg. À deux pas de la frontière française, elle attire de nombreux Alsaciens à Neuenbourg, qui y cherchent convivialité, loisirs et bonne chère. Tant mieux, c’est l’objectif de ses promoteurs qui font de cette institution un pont festif entre la France et l’Allemagne.

L’entrée est la même depuis des années : dimanche 10 juillet, au-delà de l’artère principale de Neuenburg-am-Rhein, après les restaurants, les kebabs et les glaciers de la place de la mairie, le badaud tombe nez-à-nez avec une sorte de portail à l’allure médiévale, à l’effigie de celui qui a donné son nom à la fête : Saint Jean Népomucène, un prêtre du XIVe siècle.

Des buvettes et terrasses sont entourées de faux « remparts » et d’étendards qui rappellent les tournois de chevaliers. Cette année, seules deux rues de cette ville de 12 000 habitants située en face d’Ottmarsheim sont dédiées à la Nepomukfest.

La Nepomukfest est revenue après 2 années blanches dans les rues de Neuenburg-am-Rhein Photo : Abdesslam Mirdass / Rue89 Strasbourg

Fondée en 1968, cette fête s’étend d’habitude sur quatre jours au début de l’été et occupe plusieurs allées. Street-food, échoppes foraines, scène musicale et dance-floor se partagent d’ordinaire la voirie, ainsi que des manèges et une grande roue. Ces derniers sont absents de cette édition… par manque de place.

La Rathausplatz, la place principale, accueille des auto-tamponneuses. D’ordinaire, une grande roue est installée non loin. Mais pas cette année. Photo : AM/Rue 89 Strasbourg

Des panneaux « 10€ les 10 shots » semblent être comme des vestiges des soirées précédentes. « Il y a beaucoup plus de monde en soirée, les gens viennent pour les concerts et pour boire un verre », explique Hannah, bénévole au bar du stand de l’association Klosterkopfhexen, dédiée au carnaval. Ce dimanche, le programme consiste surtout en une succession de fanfares sur la scène au milieu de l’allée. Le matin même, la traditionnelle messe œcuménique a rassemblé des croyants catholiques et protestants.

Hannah a de quoi comparer les éditions, elle qui a fait plus de 20 ans de Nepomuk. La jeune trentenaire a commencé petite fille en servant des gaufres au stand, et maintenant, elle sert des bières ! Elle est fière de participer à cet événement très important pour son association, qui « tire presque toute sa trésorerie » de ces quatre jours de fête.

Gregor, Ela et Hannah, bénévoles de la Klosterkopfhexen, association du carnaval Photo : AM / Rue89 Strasbourg

À y regarder de plus près, il est vrai que tous ceux qui servent des frites et des saucisses, qui slaloment entre les tables, qui suent devant leurs fourneaux, sont des bénévoles de clubs sportifs. Le TV Neuenburg 1926 propose des grillades, le FC Neuenburg, tout en couleur jaune criarde, sert des « Gyros box » (box kebab) et des « Schupfnudeln » (sortes de gnocchi allemands)… On déguste des bières sur des tables hautes, grâce au FC Auggen, un club de foot voisin.

La Nepomuk constitue les réserves de trésorerie pour les associations sportives. Donc les bénévoles mouillent le maillot ! Photo : AM / Rue89 Strasbourg

Parmi le public, il y a Brigitte, suissesse exilée dans le pays de Bade, Ecki, et leurs fils Adrian et Roman. Il y a aussi Anna, la petite amie de Roman, et Cecilia, Milena et Amy, les petites-filles. Brigitte vient toujours à la Nepomukfest parce qu’elle aime y « croiser des connaissances » qu’elle n’a « pas l’occasion de voir par ailleurs ». Granités en main, toute la petite famille défend l’événement quand on s’étonne de l’absence de grande roue : « il y a quand même les stands forains, le tir à la carabine, les fléchettes… », pointe Brigitte.

Ecki (aux lunettes de soleil), Brigitte (au sac à main) et leur fière descendance perpétuent la tradition du tour en famille à la Nepomuk. Adrian, en chemise à carreaux, est venu la veille avec des amis. Photo : AM / Rue89 Strasbourg

Aux côtés d’Adrian, qui glisse être déjà venu la veille pour boire quelques bières avec des amis, Ecki raconte à quel point la fête est un rituel pour les habitants du coin :

« Le lundi, les gens ont l’habitude de venir entre collègues en sortant du travail pour partager une Bratwurst. Ensuite, tous les habitants se retrouvent pour le traditionnel feu d’artifice. »

Qui n’aura pas lieu cette année. Le maire, Joachim Schuster a expliqué dans la Badische Zeitung que la ville accueille une centaine de réfugiés ukrainiens, et qu’il ne serait « pas judicieux de réveiller des souvenirs de guerre avec des pétards et autres éclats lumineux ».

Des Français ravis, entre fidèles et nouveaux venus

Arnaud, sa femme et ses enfants, viennent chaque année de Morschwiller-le-Bas, une commune attenante à Mulhouse. Il est 13h et la petite famille se presse vers l’entrée pour déguster une saucisse-frites :

« On aime beaucoup l’Allemagne, l’ambiance qui y règne, la gastronomie… On n’a pas trop l’habitude de faire des fêtes de village, mais celle-ci on ne la rate jamais ! »

Giuseppe, un autre français, fait visiter le coin à sa dulcinée, Magali, venue de Besançon pour l’occasion. Lui, il aime les fêtes de villages, « surtout quand cela met en avant le folklore, la culture, quel que soit le pays ! » Pourtant, il ne savait pas qu’il y avait une fête à Neuenburg ce week-end, il passait surtout pour acheter des clopes… Tant mieux pour Magali, qui a découvert un univers « très différent » de chez elle. Avant de repartir, Giuseppe veut continuer à faire un tour de la ville pour débusquer l’influence italienne chez les Allemands, dont on lui a vanté un intérêt pour les transalpins. Ce ne sont pas les deux glaciers de la place principale, où servent des Italiens qui vont contredire la rumeur.

Giuseppe fait visiter sa région (transfrontalière) à Magali, en visite depuis la Franche-Comté Photo : AM / Rue89 Strasbourg

Plus loin, au milieu de la foule, une petite famille en tenue de cycliste floquée « Caisse d’Épargne » respire le « cocorico ». Bingo, ce sont des Parisiens, ou plutôt des Franciliens, en goguette. Ludovic, Anne et leurs enfants Sarah et Simon ont atterri là par hasard : « nous rallions Constance à vélo à partir de Colmar », explique le papa, la quarantaine. « Aujourd’hui, nous allons jusqu’à Bad Bellingen (une petite commune thermale) et Neuenburg était sur le chemin ». Ils en prennent plein les oreilles, les yeux et les papilles :

« C’est charmant, ça nous dépayse, écoutez la fanfare, on est bien en Allemagne ! On vient de déjeuner dans un restaurant traditionnel avec des serveuses en Dirndl. On a beaucoup aimé les escalopes ! »

La région de Neuenburg attire même des Parisiens en vadrouille ! La petite famille ira jusqu’à Constance Photo : AM / Rue89 Strasbourg

Il est vrai que les « Harmonika Freunde » de Müllheim, une commune voisine, emportés par une version schlager de « Mon manège à moi » d’Edith Piaf, rendent la conversation difficile. Mais heureusement qu’ils sont là, ces musiciens de tous âges, pour animer la rue qui ne résonnerait sinon que de verres qui trinquent (« Prost ! », entend-on un peu partout). Au pied de la scène, Helga et Raimund sont absolument enchantés de danser sur « la Môme ».

Un symbole de l’amitié franco-allemande

Ces touristes bavarois racontent leur « amour de la France » : « j’adore la chanson “Sous le ciel de Paris” », explique Raimund :

« J’ai essayé de l’apprendre à l’accordéon mais je n’ai jamais réussi. Alors, quand on est en France, je demande aux musiciens de rue de la jouer. À chaque fois, on danse ».

Avec sa femme, il fait un petit tour de l’Alsace et du Bade-Wurtemberg. Ils ont fait le musée de l’auto à Mulhouse, la route des vins (« Riquewihr, c’était super », pointe Helga), et s’apprêtent à aller au « musée de la moto » (en fait la « Grange à bécanes » à Bantzenheim, un village à proximité de Chalampé et Ottmarsheim). Raimund ne tarit plus d’éloges sur la France, dont il connaissait surtout le sud, ayant travaillé avec Airbus. Les Alsaciens le font marrer selon ses propres mots : « ce ne sont pas les mêmes Français que dans le sud, ce sont des Français “allemands” ».

Passionné de véhicules, Raimund avait sur sa liste le musée de l’auto et celui de la moto. Neuenburg n’est qu’une étape au milieu de ces lieux culturels haut-rhinois, mais Helga a « adoré » Photo : AM / Rue89 Strasbourg

Sans le savoir, Raimund et Helga symbolisent avec leur enthousiasme et leur fan-attitude tricolore tout ce que la Nepomuk voulait être à l’origine : un pont entre les peuples et un événement dédié à l’amitié franco-allemande. Le choix du deuxième week-end de juillet se veut proche du 14, pour côtoyer la fête nationale française. Et puis, Saint Jean Nepomucène, c’est le saint patron des ponts et des bateliers, alors…

La fête de rue se veut symbole de pont avec la France et entre les peuples. Photo : AM / Rue89 Strasbourg

Accoudé à une table en hauteur, chacun une bière en main, Ty, Lexes et Joey viennent tout droit de l’Indiana (« en plein milieu des États-Unis », précise Joey pour nous situer). Ty blague sur sa présence ici : « Je suis venu il y a trois ans, et quand j’ai entendu que la Nepomuk revenait en 2022, j’ai sauté dans un avion pour y retourner ! ». Ce grand gaillard barbu aux verres solaires dit à moitié vrai : il avait vraiment apprécié la fête en 2019, mais il est revenu pour le travail.

Entre Phil (à gauche) et ses collègues (Ty, Lexes et Joey, de gauche à droite), l’amitié germano-américaine tient à quelques bières et à la saucisse sous toutes ses formes Photo : AM / Rue89 Strasbourg

Avec ses camarades, ils logent à Weil-am-Rhein (ville allemande frontalière à Bâle) pour un « work trip » de quelques semaines. Leur entreprise y a son siège européen. Aujourd’hui, ils sont venus à Neuenburg pour retrouver Phil, un collègue allemand qu’ils connaissent depuis une dizaine d’années. Pour eux, cette fête de rue est le parfait prétexte pour prendre un bain de folklore allemand : « ça ressemble un peu aux « county fairs » (foires locales) qu’on peut avoir chez nous, sauf qu’aux USA, on ne mange que des choses frites », note Joey. « Ici, on apprécie beaucoup la currywurst, les Spätzle, les merguez… ».

Ty se lance dans une diatribe contre la choucroute en boîte, « seule spécialité allemande (sic) qu’on trouve chez [nous] » : « ce n’est vraiment pas bon. Ici, on sent que c’est le vrai goût de la vraie choucroute ». Que dire du jour où il goûtera celle d’Alsace !

#Neuenburg-am-Rhein

Retour de la Grande braderie ce samedi : transports gratuits et sécurité renforcée

Retour de la Grande braderie ce samedi : transports gratuits et sécurité renforcée

La Grande braderie marque son retour ce samedi 30 juillet, après deux ans d’absence. Au programme : des étalages, des animations, un dispositif de sécurité renforcé, une interdiction de circuler en voiture et la gratuité des transports sur l’ensemble de la journée.

Il faut se préparer à un centre-ville bondé à Strasbourg ce samedi 30 juillet. La Grande braderie est de retour entre 7h30 et 19h30, jusqu’à 100 000 visiteurs sont attendus. Pierre Bardet, directeur général des Vitrines de Strasbourg, en charge de l’organisation de l’évènement, se réjouit : « Après deux ans d’absence, c’est une date attendue par beaucoup de monde. Je suis très content que la vie reprenne enfin. » En 2019, l’évènement avait réunit 120 000 personnes tout au long de la journée.

La Grande braderie n’avait pas pu se tenir à cause du Covid en 2020 et 2021. Photo : remise / Vitrines de Strasbourg

« Les commerçants sédentaires seront devant leurs magasins dans tout l’hyper centre », précise Pierre Bardet. Entre 550 et 600 commerçants professionnels seront présents pour cette nouvelle édition, y compris des brocanteurs et des itinérants. « On souhaite de très bonnes affaires aux commerçants et aux consommateurs », glisse l’organisateur de l’évènement.

Musique et humour place Gutenberg

Des animations sont prévues tout au long de la journée. Un quatuor de danseurs, chanteurs et comédiens inaugureront la Grande braderie à partir de 12h, place Gutenberg. L’orchestre traditionnel Perle y commencera son concert avant de déambuler dans la ville tout au long de l’après-midi. Il sera au Temple-Neuf à 14h30 et rue du 22 novembre à 16h. Un spectacle d’humour débutera à la même heure, avec la participation de Patricia Weller et Marlyse Riegenstiehl.

L’inauguration se tiendra place Gutenberg. Photo : remise / Vitrines de Strasbourg

Une réception suivra ces deux animations, toujours place Gutenberg. La Grande braderie occupera toute la Grande Île de Strasbourg, où la circulation des voitures sera interrompue du vendredi 29 juillet à 22h au dimanche 31 juillet à 1h. Les parkings Gutenberg, Tanneurs, Kléber et Broglie seront également fermés.

Transports gratuits et interruption des lignes au centre-ville

Pour soutenir les commerçants, l’Eurométropole de Strasbourg a décidé de la gratuité du réseau CTS et de ses parkings relais P-R toute la journée de samedi.

Mais attention, samedi jusqu’à 22h00, le centre-ville ne sera pas accessible pour les bus et trams. Certaines lignes de bus seront déviées de leurs itinéraires dès le vendredi 29 juillet à partir de 22h00. Toutes les informations sont détaillées sur le site de la CTS.

Plan des transports pour la journée de la Grande braderie ce samedi 30 juillet. Photo : Image CTS

Un dispositif de sécurité renforcé

Comme lors des éditions précédentes, un dispositif de sécurité encadrera l’évènement. Pierre Bardet précise que les « entrées du centre-ville seront contrôlées ce samedi, avec des agents de société de sécurité mobilisés à tous les ponts et passerelles pour entrer sur la Grand Île ». Il faudra alors se soumettre à un contrôle visuel des sacs, comme au marché de Noël. Des policiers municipaux seront également postés aux entrées de la ville pour repérer les comportements suspects. Dans la Grand Île, des patrouilles de police en uniforme et en civil seront déployées.

À Strasbourg, ces « lieux alternatifs » ouverts au prix de la précarité de leurs créateurs

À Strasbourg, ces « lieux alternatifs » ouverts au prix de la précarité de leurs créateurs

Des lieux culturels alternatifs essaiment à Strasbourg et trouvent leur public. Mais pour leurs fondatrices et fondateurs, les conditions sociales sont souvent très difficiles. Les gérants de la Grenze, du Phare citadelle et de l’Orée 85 décrivent des semaines de 70 ou 80 heures sans pouvoir se payer pendant des mois, voire des années, après l’initiation de leurs projets.

« On voulait ouvrir un lieu comme ça depuis dix ans. C’est un projet dans lequel on croit et qui fait sens pour nous donc on le fait, mais c’est clair qu’on en a chié », résume Thibaut, l’un des quatre fondateurs de la Grenze, un tiers lieu culturel et associatif composé d’un grand bar extérieur et d’une salle de concert derrière la gare de Strasbourg. Comme les créateurs de l’Orée 85 et du Phare citadelle, deux autres structures du même type, il décrit une démarche engagée avant tout :

« On a des activités sociales, des petits déjeuners pour les sans-abris par exemple, des ateliers et une programmation culturelle pas chère (souvent une dizaine d’euros la soirée concert, NDLR) pour faire profiter du monde. »

Strasbourg compte de plus en plus de lieux alternatifs qui s’imposent dans le paysage. Pendant les beaux jours, des centaines de personnes s’y rendent, surtout les week-ends. Mais ces lieux tournent grâce à l’énorme investissement de leurs créateurs, souvent très mal payés, voire pas du tout. Au bout de quatre saisons d’activité, Thibaut travaille entre 35 et 70 heures selon les semaines et se verse « quelques centaines d’euros certains mois ». Sinon, il « se débrouille » avec son intermittence et d’autres missions culturelles.

« C’est devenu notre seul sujet de conversation »

Manon, Lola et Maxime sont à l’origine de l’Orée 85. Ouverte au public en mai, cette ancienne maison d’éclusier à la plaine des Bouchers a été transformée en restaurant, avec des espaces dédiés à des événements culturels, des activités sociales, militantes et de jardinage. Au milieu de l’été, en pleine période faste, les trois cofondateurs se disent éprouvés. Lola raconte :

« On est mal physiquement, on fait des nuits courtes. Il n’y a plus que ça, du réveil au coucher, de 9h à minuit quand ce n’est pas encore pire. On enchaîne les semaines de 70 ou 80 heures depuis huit mois. Je me sentais extrêmement stressée avant l’ouverture. J’étais clairement en burnout. Il y a des moments où je me suis dis que j’allais arrêter. »

Lola, une des fondatrices de l’Orée 85. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

Maxime ajoute :

« Ce qui me rend le plus triste, c’est de renoncer à tout le reste. Plus le temps de sortir, de voir mes amis, d’avoir d’autres activités. Et c’est devenu notre seul sujet de conversation si on croise quelqu’un. »

Comme Lola et Manon, il est au RSA depuis janvier 2021 lorsqu’il a débuté ce projet. L’équipe prévoit de rester à ce niveau de rémunération jusqu’en 2023, ensuite de se verser 900 euros par mois pendant un an, puis 1 100 euros par mois à partir de janvier 2024 et jusqu’à la fin du bail de cinq ans. « On risque de continuer à 70 – 80 heures par semaine encore quelques temps, puis on aimerait baisser à 50 heures au bout d’un moment », souffle Maxime.

4 000 heures de bénévolat pour initier le Phare Citadelle

Simon est co-fondateur du Phare citadelle, un bar extérieur et un lieu culturel sur la presqu’île entre les quartiers Neudorf, Esplanade et Port du Rhin, porté par une coopérative. Il fait aussi « 75 heures facile », avec des journées de 8h à 23h sur les périodes d’ouverture du site entre juin et octobre. « Des travaux sont encore en cours, ça devrait aller mieux quand ils seront finis », espère Simon.

C’est la Ville qui a publié un appel à manifestations d’intérêt via une société, la SPL Deux-Rives. L’équipe du Phare citadelle l’a remporté en avril 2021. Elle était composée de dix associés aux compétences diverses : des architectes, des professionnels de la culture, de la restauration, de la communication… Avec « l’aide de quelques potes », ils ont aménagé la friche industrielle en deux mois, pour un début d’exploitation en juin, mais sans se payer.

« En tout, on a fait 4 000 heures de bénévolat pendant ces deux mois », a compté Simon. Lui était au RSA à ce moment. Ensuite, cinq des dix associés ont pu se salarier un peu au dessus du Smic jusqu’en octobre 2021, moment où le site ferme pour la période hivernale. Les autres continuent à s’investir gratuitement depuis le départ. Pendant le temps de fermeture du lieu, de octobre 2021 à juin 2022, Simon a reçu des allocations chômage, puis le RSA, tout en travaillant pour le Phare citadelle « 20 à 35 heures par semaine ».

Chefs de chantier, programmateurs culturel, gérants de bar, accueil social…

L’ouverture de ces lieux alternatifs, qui rassemblent plusieurs activités, provoque une énorme charge de travail. Les lauréats des appels à projets doivent investir des bâtiments vides et inutilisés pour les mettre aux normes d’accès au public, parfois en un temps record. L’équipe du Phare citadelle a su qu’elle avait été sélectionnée en avril 2021 pour un début d’exploitation en juin…

Outre les travaux, il faut communiquer, planifier des évènements, répondre aux démarches administratives. Les porteurs de projet sont chefs de chantier, programmateurs culturels, gestionnaires de bar-restaurant et, parfois, font une forme de travail social. Mais la quasi-intégralité de leurs revenus sont tirés du bar et de la restauration. « Il faut que les gens viennent boire des coups chez nous, on a besoin de ce soutien », insiste Thibaut, de la Grenze.

Des emprunts conséquents

Au lancement, les investissements sont conséquents malgré le recours à des armées de bénévoles dans les chantiers participatifs (dont certains organisés par l’Atelier NA, un collectif d’architectes), et un maximum de bricolages « faits maison ». Après avoir remporté l’appel à projets, Maxime, Lola et Manon de l’Orée 85 ont dû débourser 180 000 euros pour transformer leur ruine de maison d’éclusier en un lieu public et cosy. Belle affaire pour Voies navigables de France (VNF), propriétaire des lieux, qui ne débourse pas un centime et empoche même un loyer de 650 euros par mois.

La façade de la maison d’éclusier de l’Orée 85 en juin 2021, avant la construction de l’extension avec la véranda. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

À l’ouverture, l’équipe a embauché un cuisinier et deux serveurs. « Pour l’instant, on n’a reçu que deux subventions : 9 000 euros de la Région Grand Est et 5 000 euros de la Ville de Strasbourg, et c’était au bout de plusieurs mois », indique Maxime. « On candidate pour obtenir une nouvelle subvention de la Région qui pourrait monter jusqu’à 50 000 euros, ça nous aiderait beaucoup. » Un financement participatif leur a rapporté 18 000 euros. En grande majorité, les dépenses ont été couvertes par des emprunts : 130 000 euros à la Nef, 25 000 à Alsace active, 15 000 à Initiative Strasbourg. Lola, Maxime et Manon ont aussi engagé 30 000 euros personnellement.

Un réseau et des ressources financières

« C’est clair que si on n’avait pas des parents et un gros réseau qui nous aident, ça aurait été impossible. L’ouverture d’un lieu comme ça n’est pas accessible à tout le monde », remarque Lola. Maxime se méfie tout de même de cet hiver :

« Cet été, nos chiffres sont meilleurs que ce qu’on projetait. En moyenne, on attendait 350 euros par jour et on fait 1 500. On espère que les gens continueront à venir quand il fera froid, même si notre bar correspond plutôt aux attentes des beaux jours, avec beaucoup d’espace à l’extérieur, de la verdure… Comme il est un peu reculé, c’est un saut dans le vide. »

De son côté, la Grenze a pu financer 100 000 euros de travaux et son ouverture grâce à une subvention de 15 000 euros de la Ville, un prêt bancaire et un versement de 35 000 euros de Meteor. Ce montant correspond aux remises qui auraient été pratiquées par la brasserie alsacienne au bout de plusieurs années d’exploitation de la Grenze, qui paie ses bières au plein tarif en contrepartie.

Le premier étage de l’Orée 85. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

« C’est profitable pour la Ville »

Même principe pour le Phare citadelle qui a bénéficié d’une remise anticipée de 21 600 euros de Meteor, en plus de 35 000 euros de la Ville en 2021, 23 000 euros du Centre national de la musique et 16 000 euros de financement participatif en 2022. Léa, aussi fondatrice du Phare Citadelle et en charge de la communication, explique :

« Nous avons emprunté 230 000 euros en tout à la Nef, au Crédit coopératif et à Alsace active. Les sommes engagées sont énormes et la part des subventions est minime. Cela crée forcément une grande pression sur le résultat du bar et de la restauration. »

Thibaut, de la Grenze, analyse :

« Beaucoup de personnes qui créent une entreprise ne se payent pas non plus pendant plusieurs années. Mais c’est vrai que les tiers lieu ont une autre dimension, ce sont des outils pour créer des liens sociaux. C’est profitable pour la Ville parce qu’on redynamise une zone, on propose des événements culturels accessibles… Un soutien financier est donc justifié, mais on sait que les budgets de la Ville ne sont pas extensibles. »

« On rend un service à la société, ce n’est pas un business comme les autres », surenchérit Maxime de l’Orée 85 : « Surtout, on n’est pas dans une logique de rentabilité, ce qui rend notre situation plus précaire. Il y a toute une partie de ce qu’on fait qui ne rapporte rien », ajoute t-il. La Grenze et l’Orée 85 font appel à des équipes de bénévoles pour accueillir le public lorsqu’il y a beaucoup d’affluence.

La salle de concert de la Grenze. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

« Avec l’appel à projets, on a gagné le droit de payer un loyer »

Les gérants de l’Orée 85 comme ceux du Phare citadelle estiment que le démarrage de leurs tiers-lieux aurait été beaucoup plus simple si les appels à projets auxquels ils ont répondu incluaient une subvention de départ, disponible immédiatement. Maxime est amer :

« Les demandes de subventions sont extrêmement chronophages. Même si l’appel à projets a été initié par le propriétaire, VNF, on avait déjà tout expliqué à la Ville qui faisait partie du jury. Il fallait quand même lancer cette longe démarche en répétant tout dans les demandes de subvention à la municipalité. Pourtant, on relève clairement de l’économie sociale et solidaire, on met en pratique ce que souhaite la Ville… On aurait attendu des coups de pouces des pouvoirs publics. Là c’est un peu décevant : on a gagné le droit de payer un loyer, en gros. »

Hugo, le cuisinier salarié de l’Orée 85. Photo : TV / Rue89 Strasbourg / cc

Thibaut de la Grenze considère que son équipe était moins légitime pour demander de l’argent au lancement du projet :

« C’est nous qui sommes allés voir la SNCF pour leur demander s’ils avaient un site disponible et ils nous en ont loué un. On n’allait pas leur demander un chèque en plus. Quand on monte une activité sociale, on demande des subventions fléchées et elles nous sont octroyées. »

« C’est déjà une bonne chose que des lieux soient mis à disposition »

Guillaume Libsig, adjoint à la maire en charge de la vie associative, se dit conscient qu’il est « très difficile de monter un lieu alternatif ». Selon lui, l’aide de la Ville doit être plus organisationnel que financier, faute de budget :

« Verser une subvention comprise dans l’appel à projet et disponible immédiatement, c’est compliqué parce qu’on doit toujours savoir exactement pourquoi une subvention est allouée. Cependant, nous souhaitons être de plus en plus en lien avec ces porteurs de projet, pour faciliter les différents processus administratifs, réduire les délais, notamment en matière d’urbanisme, les conseiller, être un appui logistique. »

Léa du Phare citadelle voit une bonne volonté des élus :

« C’est déjà une très bonne chose que des lieux soient mis à disposition. Comme le Phare a été initié par la Ville, nous avons été accompagnés et les élus étaient à notre écoute. Ils nous ont donné des contacts et ont mis en place un éclairage public et des aménagements pour sécuriser le chemin d’accès vers le site. Le principal problème était le timing de la subvention. On en aurait vraiment eu besoin dés le départ, mais on en est au début de l’accompagnement des lieux alternatifs. Je pense que les bons ajustements seront mis en place. »

Un avenir incertain

D’ici cinq ans, le bail de l’Orée 85 sera terminé. Le prêt de la parcelle à l’usage du Phare citadelle court jusqu’en octobre 2025. La Grenze vient de signer une reconduction de son bail. Aucune des trois structures n’a la certitude de disposer de son site indéfiniment. « C’est vrai que c’est stressant, cela ajoute à notre sentiment de précarité. Nous avons engagé énormément d’argent et d’investissement personnel. Si on ne pouvait pas récupérer le lieu ensuite, cela serait une immense perte financière pour nous », constate Lola de l’Orée 85.

À Hoerdt et alentours, des pesticides au-dessus des seuils réglementaires dans l’eau du robinet

À Hoerdt et alentours, des pesticides au-dessus des seuils réglementaires dans l’eau du robinet

L’eau consommée par les habitants de la communauté de communes de la Basse-Zorn est contaminée par des produits liés aux pesticides agricoles. Un arrêté autorise la collectivité à poursuivre la distribution de l’eau en attendant un retour à la normale.

De l’eau avec plus de pesticides qu’autorisé coule des robinets des 14 584 habitants de Hoerdt, Bietlenheim, Geudertheim, Gries, Kurtzenhouse et Weyersheim. Cette eau provient de quatre forages situés à Bietlenheim, exploités par le Syndicat des eaux et de l’assainissement d’Alsace Moselle (SDEA).

Tous ces forages présentent des taux de concentration en pesticides et métabolites – des composants nés de la dégradation des pesticides dans l’environnement – supérieurs à la réglementation. La communauté de communes de la Basse-Zorn (CCBZ), qui regroupe ces villages situés au nord de Strasbourg, a ainsi obtenu de la préfecture du Bas-Rhin et de l’Agence régionale de santé (ARS) Grand-Est, un arrêté dérogatoire, jeudi 21 juillet (voir ci-dessous), afin de continuer à distribuer cette eau non-conforme, et ce pour une durée de trois ans, en l’absence « d’autres moyens raisonnables immédiats ».

Entre mars 2020 et mars 2022, l’ARS Grand Est a réalisé une série de prélèvements et d’analyses dans les quatre forages qui alimentent les foyers de la CCBZ, visant à déterminer la présence et la quantité de certains pesticides et métabolites. Les résultats sont joints en annexe de l’arrêté dérogatoire du 21 juillet, en page 9 du document : les métabolites métolachlore ESA, le métolachlore NOA, et le chloridazone desphényl, sont retrouvés dans des proportions qui dépassent la limite règlementaire en vigueur, soit 0,1 microgrammes par litre (µg/l).

C’est un arrêté daté du 11 janvier 2007, qui fixe les limites de qualité de l’eau à destination de la consommation humaine en France. Ces trois produits pourraient « engendrer un risque sanitaire inacceptable pour le consommateur » selon l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses).

Des taux jusqu’à neuf fois le seuil règlementaire

Selon les analyses de l’ARS Grand Est, sur la base des données collectées à différents moments et endroits entre mars 2020 et mars 2022, les eaux souterraines de Bietlenheim, distribuées sur le territoire de la CCBZ, comprennent en moyenne 0,39 µg/l de métolachlore ESA, et 0,27 µg/l de métolachlore NOA, soit des taux entre trois et quatre fois supérieurs à la norme de 0,1 µg/l. Des pics à près de neuf fois la valeur du seuil règlementaire de qualité sont détectés en février 2021 pour le premier et mars 2021 pour le second.

En ce qui concerne le chloridazone desphényl, sa concentration reste inférieure à la limite, à l’exception d’un prélèvement, entre juin et novembre 2021 (la date précise est illisible sur l’arrêté), où il est mesuré à 0,11 µg/l. Les scientifiques de l’ARS ont aussi additionné la concentration de ces métabolites. Selon la réglementation, elle ne doit pas dépasser 0,5 µg/l. La moyenne de concentration s’établit à 0,66 µg/l et atteint un sommet en mars 2021, avec une mesure à 1,69 µg/l !

La préfecture et l’ARS estiment que cette eau peut néanmoins être consommée sans risque pour la santé. De nouveaux seuils ont été fixés : 1 µg/l pour le metolachlore ESA et NOA, dix fois le seuil règlementaire initial. Pour le chloridazone desphényl, le nouveau seuil est fixé à 0,5 µg/l, cinq fois plus que la limite. La concentration totale ne doit pas excéder 2 µg/l, la limite est d’ordinaire à 0,5 µg/l. L’État enjoint la collectivité à remédier à cette situation dans un délai de trois ans. Si cette dernière n’y arrive pas, elle peut bénéficier d’un délai supplémentaire de trois ans, en déposant à nouveau un dossier motivé.

La communauté de communes de la Basse-Zorn a obtenu un arrêté dérogatoire pour continuer à distribuer de l’eau non-conforme au regard de la réglementation. Photo : Flickr / Jean-Baptiste / cc

Des substances aux conséquences méconnues

Sur son site, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses), compétente pour rendre des avis de référence sur ces sujets de contamination des eaux potables, rappelle :

« La valeur réglementaire de 0,1 µg/L n’étant pas basée sur une analyse toxicologique ni sur des études épidémiologiques, celle-ci ne permet pas d’évaluer le risque pour la santé en cas de dépassement. »

La limite à partir de laquelle la consommation devient dangereuse pour la santé est appelée « valeur maximale sanitaire », ou Vmax. Ces Vmax sont établies par l’Anses. Selon l’arrêté du 21 juillet, la valeur maximale sanitaire en vigueur pour le métolachlore ESA est de 510 µg/l, soit plus de 500 fois la valeur du nouveau seuil déterminé par la préfecture. C’est une substance connue et qui a fait l’objet d’études solides.

En mai 2018, Rue89 Strasbourg a publié une enquête sur les incertitudes quant à l’impact des produits phytosanitaires sur la santé, notamment à cause de leurs effets inconnus lorsqu’ils sont combinés.

Le métolachlore NOA et le chloridazone desphényl n’ont pas été suffisamment étudiés pour définir une Vmax. C’est le préfet, sous recommandation de l’ARS qui fixe une « valeur sanitaire provisoire ». Dans le Bas-Rhin, elle est de 3 µg/l pour le métolachlore NOA et le chloridazone desphényl. Un avis de l’Anses du 23 avril 2020 explique qu’il n’y a jamais eu d’étude solide sur ces molécules qui permette d’établir une Vmax.

Un plan d’actions à mettre en œuvre

L’arrêté préfectoral ne pointe pas comme cause de cette pollution l’épandage de pesticides dans les champs alentours. Pourtant, les trois composants problématiques sont des composés dérivés de pesticides. Par ailleurs, un quart de la zone de captage, étendue sur 2 041 hectares, est occupée en surface par des terres agricoles (521 hectares), toujours selon l’arrêté préfectoral.

Dans les annexes de l’arrêté, le SDEA fixe un plan d’actions à la CCBZ pour que l’eau retrouve des concentrations en pesticides en dessous des seuils réglementaires. Une partie des mesures portent sur l’agriculture et visent à effectuer une transition vers des pratiques agricoles utilisant moins de pesticides.

Des mesures d’urgence seront mises en place, comme poser des filtres à charbon actif qui fixent les pesticides sur les puits de captage d’eau, et créer « une connexion d’urgence » avec le réseau de l’Eurométropole de Strasbourg. Un budget prévisionnel pour financer de nouvelles études et installations est estimé de deux à trois millions d’euros.

« On assume l’histoire »

Contacté, le président de la communauté de communes de la Basse Zorn (CCBZ) et vice-président du SDEA Alsace Moselle, Denis Riedinger, explique :

« C’est un travail collectif qu’on doit mener. Le SDEA est très vigilant sur ces sujets. Ces produits ont été utilisés pendant des décennies et maintenant on doit mettre en place des solutions qui permettent de revenir en dessous du seuil. Je ne jette pas la pierre aux agriculteurs. Ces produits ont longtemps été autorisés et encouragés. On assume l’histoire. »

La CCBZ n’est pas le seul établissement public à avoir bénéficié de cet arrêté dérogatoire. Deux autres arrêtés concernant l’eau distribué par le Syndicat d’eau et d’assainissement (SDEA) d’Alsace Moselle, sur les secteurs de Sélestat et Benfeld / Erstein, ont également été pris. Dans ces deux cas, la dérogation ne concerne que le métolachlore ESA.

Dans la plaine du Grand Ried, la nappe phréatique s’assèche au profit de l’irrigation du maïs

Dans la plaine du Grand Ried, la nappe phréatique s’assèche au profit de l’irrigation du maïs

Reporterre s’alarme pour les niveaux de la nappe phréatique rhénane, alors que les pompages agricoles se poursuivent, notamment dans la plaine du Grand Ried, malgré la sécheresse.

Mardi 26 juillet, Reporterre alerte sur la nappe phréatique rhénane, qui risque d’atteindre des niveaux historiquement bas en 2022, selon un rapport de l’Aprona publié le 18 juillet. Le nord et l’ouest du Bas-Rhin ont été placés en vigilance sécheresse depuis mi-juillet et des arrêtés préfectoraux limitent certains usages de l’eau. Ces restrictions ne concernent pas la plaine du Grand Ried, située entre Strasbourg et Colmar. Les pompages d’eau pour l’irrigation des céréales, notamment du maïs, se poursuivent.

De nombreux cours d’eau du Grand Ried prennent leur source à un mètre au-dessus de la nappe. Selon l’Observatoire national des étiages (Onde), trois rivières sans eau ont été identifiées dans le secteur le 12 juillet. Or, « une seule journée d’assèchement d’une rivière anéantit des années d’efforts pour restaurer sa biodiversité », s’inquiète auprès de Reporterre Daniel Reininger, responsable du réseau eau d’Alsace Nature.

Les champs agricoles du Kochersberg. Photo : Abdesslam Mirdass / Rue89 Strasbourg

Les associations dénoncent dans Reporterre un « système figé » qui ne prend pas en compte les particularités locales. Le porte-parole de l’association cite une étude de 2020 menée par le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) sur la gestion quantitative des eaux souterraines du Grand Ried, qui définit des limites au-delà desquelles il faut arrêter les pompages agricoles dans la nappe pour éviter l’assèchement des ruisseaux phréatiques. « Nous avons aujourd’hui des données qui nous permettent d’anticiper ces situations, d’imaginer un changement des pratiques : pourquoi ne sont-elles pas prises en compte ? », s’interroge-t-il auprès de Reporterre.

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#Michel Habig