La terre a de nouveau tremblé au nord de Strasbourg, près du puits de géothermie entre Reichstett et Vendenheim. Plus intenses que les 27 et 28 octobre, les vibrations ont cette fois été ressenties à Strasbourg ce vendredi 4 décembre vers 7h puis vers 11h10.
Fin de ce compte-rendu en direct des événements et des développements de cette journée sismique. Retrouvez dès demain une synthèse actualisée.
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Jean Schmittbuhl est directeur de recherche en sismologie au CNRS. Il travaille pour l’École et Observatoire des Sciences de la Terre (EOST), qui héberge le Réseau National de Surveillance sismique.
Selon lui, au vu de la pression avec laquelle l’eau est injectée ces derniers temps sur le site de Fonroche, l’événement de ce matin n’est « pas surprenant » :
« À la centrale de géothermie de Soultz, qui est en rythme de croisière, l’eau est envoyée à 20 bars. Du côté de Vendenheim, le site est censé être en sous-activité, mais l’eau est envoyée à 60 bars. Nous avons appris cela ce matin. Si la pression ne baisse pas, il faut s’attendre à d’autres séismes similaires, et on ne peut pas exclure une secousse plus importante. C’est la pratique de Fonroche qui est en cause. »
Les explications en direct de Fonroche
Le député Bruno Studer demande au gouvernement l’arrêt définitif
Le député du Bas-Rhin Bruno Studer (LREM) a écrit à la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, pour lui demander de prononcer l’arrêt définitif des activités de géothermie à Vendenheim :
« L’inquiétude des riverains et des élus grandit à chaque nouvel événement. Cette inquiétude je la partage. Les conditions d’une poursuite de l’activité du site de Vendenheim-Reichstett ne sont plus réunies et l’activité sismique de ces dernières semaines n’est nullement compatible avec les exigences de sécurité légitimes des habitants. »
Pia Imbs, présidente de l’Eurométropole, veut un débat public sur la géothermie
La présidente de l’Eurométropole, Pia Imbs, « prend acte » dans un communiqué de « l’arrêt total du puit par Fonroche dans le cadre d’un protocole gradué » :
« C’est une décision sage de nature à rassurer les habitants légitimement inquiets. J’exige, au nom de la collectivité et de ses habitants, une analyse précise des causes et des effets constatés sur notre territoire et demande un arrêt définitif du projet porté par Fonroche à Vendenheim. »
L’Eurométropole rappelle qu’un débat public est en cours sur la géothermie, débat qui devrait prendre une toute nouvelle tournure… Une réunion publique est organisée vendredi 11 décembre à 19h avec Fonroche, des services de l’État et des experts indépendants.
Pia Imbs proposera également au conseil de l’Eurométropole la création d’un « conseil scientifique et citoyen, » associant des experts indépendants qui travaillera avec une mission d’information et d’évaluation.
La préfecture demande l’arrêt de l’activité sur le site de Vendenheim
Dans un communiqué envoyé vers 15h, la préfecture du Bas-Rhin rejoint le concert de ceux qui demandent l’arrêt des activités de géothermie à Vendenheim, « en accord avec les maires concernés et la présidente de l’Eurométropole. »
La préfecture confirme que les services de la Direction régionale de l’environnement (Dreal) ont été envoyés dès vendredi matin sur le site pour une inspection. Une enquête administrative a été ordonnée et un point détaillé sera présenté aux maires des communes du nord de l’agglomération la semaine prochaine.
Suite à un premier séisme, la préfecture avait autorisé une reprise des opérations, afin de tester les hypothèses d’écoulement. Mais, indique le communiqué, « l’événement survenu aujourd’hui remet en cause certaines conditions de conduites des opérations et de fonctionnement du projet Géoven. »
La préfecture prévient que désormais, la société Fonroche à Vendenheim fera l’objet d’un suivi quotidien de la part des services de l’État et que son protocole d’arrêt « sera réadapté au vu des événements sismiques induits, même minimes. » Un nouveau réseau de capteurs sismiques a été installé autour du site, l’État promet d’en communiquer toutes les données.
Fin de la conférence de presse de Fonroche. Retrouvez bientôt ici-même le directeur de Fonroche en direct vidéo, les premiers avis des sismologues du CNRS et de l’Université de Strasbourg ainsi que d’autres réactions.
Le directeur rappelle que le groupe Fonroche dispose des moyens financiers pour faire face à ce type de revers et qu’il serait « dommage de renoncer à cette énergie naturelle et renouvelable » en raison de ces incidents au démarrage.
Jean-Philippe Soulé admet que ces incidents sismiques à répétition et ressentis par la population risquent de produire un avis public négatif sur la géothermie :
« Il nous faudra beaucoup communiquer… La géothermie, ça marche et c’est fiable mais il y a une phase de démarrage qui peut être compliquée. Et là, on est dans une exploitation compliquée. »
Jean-Philippe Soulé confirme que d’autres secousses sont à craindre, au moins pendant une à deux semaines, en raison de l’abaissement progressif de la pression dans le réservoir souterrain et de l’arrêt de toute l’installation.
Jean-Philippe Soulé confirme que la procédure des tests de traçage, qui était en vigueur depuis le 18 novembre, est suspendue suite à l’événement sismique de ce matin.
Jean-Philippe Soulé précise que toute activité de géothermie produit une micro-sismicité, normalement inférieure à une magnitude de 2 et donc non ressenties par les êtres humains. Il y a parfois des plaintes, qui sont recueillies par l’entreprise et lorsqu’il y a des dégâts, l’assurance de Fonroche peut être engagée.
Jean-Philippe Soulé demande du temps « pour analyser les données » :
« Ce ne sont pas des calculs sur un coin de table, ce sont des modélisations très complexes à partir des données disponibles et à récupérer. »
Pour Jean-Philippe Soulé, la cause la plus probable est l’existence d’une faille mal identifiée et qui perturberait le retour de l’eau injectée dans le sous-sol. « Il peut exister une faille entre les deux puits, qui fait que l’eau ne reprend pas le chemin naturel pour remonter dans le puits de captation. »
Une fois l’arrêt complet atteint, Jean-Philippe Soulé pense qu’il faudra plusieurs études et « beaucoup de travail technique » pour voir s’il faut déplacer les puits ou puiser ailleurs. Le directeur de Fonroche pense qu’une remise en question de l’installation, ou de l’exploitation géothermique à cet endroit, n’est pas d’actualité.
Jean-Philippe Soulé confirme que, « suite à cet événement, » l’entreprise n’a pas d’autre choix que de cesser les tests qui étaient en cours. L’arrêt complet pourrait prendre 3 ou 4 semaines, afin d’accompagner le changement de pression à l’intérieur du réservoir souterrain.
Lors d’une conférence de presse en visioconférence, Jean-Philippe Soulé, directeur de l’entreprise Fonroche Géothermie, se dit « très surpris » par l’événement sismique de ce matin, qui est survenu juste sous un des puits de la centrale de Vendenheim.
Dans un communiqué publié sur Facebook, le maire d’Illkirch-Graffenstaden Thibault Philipps (LR) demande qu’une « enquête soit ouverte sur l’incidence de la géothermie profonde et plus particulièrement sur la centrale géothermique Fonroche de Vendenheim. » Délégué à la gestion des risques pour l’Eurométropole, Thibault Philipps se demande par ailleurs comment il peut y avoir de telles secousses alors que la centrale de géothermie est censée être à l’arrêt.
Maire de Reichstett, Georges Schuler (LR) demande également l’arrêt de la géothermie dans un communiqué de presse publié sur le site de la commune :
« Suite aux derniers événements des séismes de ce matin 3,5 et 2,6 et dans la continuité de notre position lors des derniers événements nous demandons l’arrêt total et définitif du site de Fonroche de Vendenheim, la sécurité de nos habitants ne pouvant plus être garantie. »
Joint par téléphone, Georges Schuler a indiqué qu’il devait faire face à un flot d’appels à la mairie, « les premiers plutôt inquiets, les suivants nettement plus insultants. C’est fini maintenant, la préfecture doit prendre ses responsabilités. »
L’entreprise Fonroche Géothermie a prévu de s’exprimer devant la presse à 14h30. Nous rendrons compte ici-même des propos qui seront tenus lors de ce rendez-vous, par Jean-Philippe Soulé, directeur de Fonroche Géothermie.
Alain Fontanel, Christine Graef-Eckert et Jean-Philippe Vetter, conseillers eurométropolitains d’opposition demandent à l’Eurométropole de renoncer à leur option d’achat de chaleur produite par Fonroche à Vendenheim.
Les trois élus demandent « l’abandon de tout projet de géothermie au sein de l’Eurométropole, y compris celui d’Illkirch-Graffenstaden.
Vers 11h10, un troisième séisme a été ressenti, de magnitude 2,7 cette fois et avec un épicentre situé dans la même zone.
Colère chez des maires du nord
« Cela ne correspond pas du tout avec les engagements de Fonroche lors de la réunion qui précisaient qu’un séisme d’une telle importance ne pouvait pas arriver », a indiqué le maire de Kilstett Francis Laas sur Facebook. La mairie de la Wantzenau a ouvert « une cellule de crise » et tient une permanence pour ses habitants à partir de 10 heures, y compris pour recueillir des réclamations. « Je suis déçue et inquiète pour la suite, ça ne peut pas continuer comme ça », a déclaré la maire Michèle Kannengieser à France Bleu Alsace.
Reprises des secousses en 2020 depuis la fin des tests
Des tests avaient repris le 1er octobre pour déterminer l’origine des deux séismes de novembre 2019. Ces nouveaux tests de traçage se sont arrêtés le 27 octobre. Selon l’exploitant Fonroche, ce serait leur arrêt « trop rapide » qui a produit les nombreuses secousses depuis. Une deuxième phase est sensée reprendre en fin d’année ou début 2021.
Les différentes réunions avec la Préfecture et les élus locaux début novembre 2020 avaient acté qu’il fallait des explications plus rapides de l’État et de la société en cas de nouveau tremblement. Plus de deux heures après les séismes, aucun communiqué n’a été diffusé. Premier à réagir, le conseiller municipal d’opposition Jean-Philippe Vetter (LR) demande l’organisation « d’une vraie « Conférence citoyenne » sur la géothermie profonde » avec des moyens équivalents à ceux déployés pour l’actuel débat sur la 5G promu par la Ville et l’Eurométropole de Strasbourg.
La principale secousse s’est produite à 6h59’02 » avec une magnitude de 3,5 sur l’échelle de Richter, soit plus puissante encore que la plus forte ressentie en novembre 2019 (3,3), qui avait suspendu l’activité de l’exploitation. Elle a été suivie d’une deuxième secousse de magnitude 2,6, moins d’une minute plus tard, à 6h59’59 » selon le Réseau national de surveillance Sismique (Renass). Les deux événements ont été classés comme « induits », c’est-à-dire d’origine humaine.
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