Personne ne sait ce que deviendront les résultats de ce dimanche 15 mars 2020. Plus le temps passe, plus la tenue d’un second tour des élections municipales semble hypothétique. En pleine épidémie du coronavirus, la participation à Strasbourg s’est soldée à 34,37%, loin des 49,68% de 2014. Par ailleurs, une campagne d’entre-deux tours semble infaisable.
Faudra-t-il tout de même voter dans 6 jours, redéposer de nouvelles listes dans plusieurs mois, repartir avec les mêmes, ou simplement jouer le second tour bien plus tard ? Le député de Strasbourg-sud Sylvain Waserman (Modem) a indiqué qu’une loi tenterait de faire reconnaître les résultats du premier tour, mais décaler le deuxième à dans plusieurs mois. Reste à savoir si cela est juridiquement possible. Une fois l’urgence sanitaire passée, cela aurait au moins le mérite de pouvoir travailler de vrais accords programmatiques entre candidats, et non des compromis signés en 36 heures.
Pas de date butoir
Après avoir eu des pensées pour la situation pour la Santé, les candidats ont tous déploré qu’aucune date butoir ne soit donnée avant de nouvelles mesures de confinement et le sort du second tour. S’il se tient, il faut déposer les listes avant mardi 18h. Un accord doit donc se sceller mardi à la mi-journée au plus tard. Mais annoncer un pacte serait se dévoiler pour l’avenir si les élections devaient être ajournées.
Toutes ces circonstances feraient presque oublier que Jeanne Barseghian (EELV) termine en tête à Srasbourg. La conseillère municipale de la majorité est dans la fourchette haute par rapport aux sondages avec ses 27,87%.
En plus de très bons scores attendus dans le centre-ville, Neudorf, la Krutenau ou le quartier gare (51,78% au gymnase Sainte-Aurélie), elle a aussi su élargir les bastions habituels verts. « Strasbourg écologiste et citoyenne » remporte des bureaux de vote de quartiers plus populaires à l’ouest (Cronebourg, Koenigshoffen) ou du sud (entrée de la Meinau).
La candidate se satisfait de ce score :
« Il faut rester humble de ces résultats dans des conditions exceptionnelles et vue la participation. C’est un bon score pour l’écologie, que l’on retrouve aussi dans d’autres communes de l’Eurométropole comme Schiltigheim, Bischheim ou Ostwald, qui est une confirmation des résultats des européennes. Il y a une prise de conscience plus forte de ces enjeux. Cette position appelle aussi à une grande responsabilité. »
D’un duel serré à une course à distance
Alors qu’un match serré avec Alain Fontanel semblait se dessiner, la conseillère municipale a finalement distancé de plus de 8 points ses autres rivaux. Sous les 20%, un trio Fontanel-Trautmann-Vetter se tient en moins de 2 points.
Deuxième avec 19,86%, Alain Fontanel a convenu que « ce n’est pas le résultat [qu’il] espérait ». Mais compte tenu de la faible participation, il n’a « que » 4 000 voix à aller chercher. « Une alternative claire se dessine », a-t-il commenté. « On va discuter bien sûr », au sujet des alliance. Il a cité plusieurs fois le développement économique, le domaine de compétence de Catherine Trautmann (PS) à la métropole, mais aussi un axe de campagne majeur de Jean-Philippe Vetter (LR), 4è et dont les 8 868 voix pourraient s’avérer utiles pour remonter.
Un nouveau rapport de force à droite
Dans les résultats, les deux hommes se disputent notamment les bureaux de vote à la Robertsau et au Wacken. Ce bastion de centre-droit d’ordinaire très mobilisé a un peu plus participé que la moyenne strasbourgeoise, mais moins qu’à l’accoutumée.
Quant à Jean-Philippe Vetter, il a notamment remporté de nombreux bureaux de vote du sud, à la Meinau et au Neuhof. Il s’agit du secteur de prédilection ses deux conseillers départementaux Pascale Jurdant-Pfeiffer et Jean-Philippe Maurer, bien placés sur sa liste.
Le conseiller municipal d’opposition est satisfait de ce nouveau rapport de force :
« Avec 7,3% aux européennes, on nous a expliqué que l’on n’aurait pas d’espace à Strasbourg. Ce résultat montre que nos valeurs comptent et qu’il est possible de porter l’alternance. Toutes nos thématiques, la sécurité, la bétonisation ou les entreprises, ont porté dans cette campagne. »
Avant d’entamer des discussions, il dit vouloir réunir ses colistiers. Annoncer vite des négociations pour un second tour qui n’aura pas lieu pourrait démobiliser une partie de la base militante pour les échéances futures.
Catherine Trautmann n’exclut rien
Entre les deux hommes, s’est intercalée Catherine Trautmann. L’ancienne maire, émarge à 19,77%, soit 41 voix derrière Alain Fontanel. Elle réalise des scores assez homogènes et remporte plusieurs quartiers populaires à l’ouest, à l’est et la Cité de l’Ill, mais où l’abstention est très élevée.
« À ce stade, il n’y a aucun candidat exclu des négociations », fait savoir la candidate de « Faire Ensemble Strasbourg » :
« Il y a des discussions qui dépendent aussi des élections des autres maires de l’Eurométropole entre la ville d’un côté et l’Eurométropole. Je dirais d’abord qu’il faut se mettre d’accord sur un projet. Il serait plus naturel de discuter avec les Verts, mais discuter ne veut pas dire trouver un accord. »
Côté écologistes une entente avec Jean-Philippe Vetter ou Alain Fontanel a été exclue dès février, donc Catherine Trautmann devient la seule interlocutrice. D’éventuelles négociations s’annoncent cruciales sur la question du calendrier de la zone à faible émissions (ZFE) ou l’accès au port par la ré-ouverture d’une route par le nord, le long de la forêt de la Robertsau auquel les écologistes sont opposés.
RN et Insoumis éjectés du 2è tour
Aucune autre liste n’est en mesure de se maintenir. Contrairement à 2014, le Rassemblement national (6,27%) repasse sous les 10%. « Les bureaux qui votent habituellement pour nous ont très peu participé », a noté sa candidate Hombeline du Parc sur le plateau de France 3 Alsace. Elle avait été dépêchée à la hâte à Strasbourg où elle ne vote pas. Le parti y a fait une campagne minimaliste. C’est le pire score, toutes élections confondues, pour l’ex-Front national depuis les élections municipales de 2008.
Sans élu sortant et avec peu de moyens, « Strasbourg en commun » (France insoumise et alliés) a eu du mal à affirmer ses thèmes pendant la campagne. Et la résurgence de Catherine Trautmann a probablement empiété sur un électorat des quartiers populaires que la formation visait à remobiliser. Avec 2,99%, Kévin Loquais finit loin des espérances initiales. Les deux listes citoyennes de l’adjointe Chantal Cutajar (2,17%) et Patrick Arbogast (1,2%) terminent derrière les partis et mouvements politiques identifiés. En queue de classement, les trois listes anticapitalistes totalisent 1,3% des voix.
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