Depuis la rentrée scolaire, une ou plusieurs personnes ne supportent pas qu’un principal de collège de Strasbourg soit né en Algérie. Plusieurs lettres ont été envoyées au rectorat ou à l’académie de Strasbourg, faisant référence à son patronyme, sa religion ou à ses origines maghrébines. Dans ces lettres, le principal est calomnié sur sa capacité à encadrer des enseignants et à s’occuper d’enfants, avec des références à l’islamisme et au terrorisme. Une autre lettre de calomnies a été envoyée à la directrice d’une école du secteur, l’enjoignant elle aussi à se méfier du principal de collège.
Bien que ces lettres anonymes faisaient référence à l’issue de l’élection présidentielle, avec une phrase comme « tu vas voir après le 7 mai » par exemple, elles étaient signées d’un mystérieux « conseil des parents » du collège.
Directement au domicile
Mais mercredi, plusieurs étapes ont été franchies. D’abord, la lettre de menace a cette fois été directement envoyée au domicile du principal. Ensuite, elle est signée « FN » et reprend le slogan utilisé par le FLN à l’adresse des Pieds-Noirs après l’indépendance de l’Algérie : « la valise ou le cercueil. » La menace de mort est claire. Elle est également ornée d’une croix gammée, symbole du parti nazi, même si les branches ont été dessinées à l’envers.
Pour les lettres précédentes, le principal de collège a laissé le rectorat de l’académie de Strasbourg porter plainte pour lui auprès du procureur de la République. Pour cette dernière, il est allé lui-même au commissariat de Strasbourg.
Invoquant son devoir de réserve, en cette période de campagne électorale, le principal de collège de 55 ans n’a pas pu répondre à nos questions et a demandé à ce que son identité et son établissement n’apparaissent pas dans cet article. Dans un communiqué publié vendredi après-midi, le rectorat de l’académie a indiqué que l’institution avait « saisi le procureur de la République et qu’une enquête était en cours. »
En outre, le rectorat a proposé au principal la mise en œuvre d’une aide juridique et Sophie Béjean, rectrice de l’académie de Strasbourg, a « apporté personnellement dès le premier courrier, et depuis lors, son soutien plein et entier au principal. » Le communiqué précise qu’afin « d’accompagner le collège, les équipes mobiles de sécurité du rectorat de Strasbourg ont été déployées et le resteront aussi longtemps que nécessaire dans et aux abords de l’établissement. »
« Contexte délétère »
Ces menaces de mort à l’encontre d’une personne en raison de ses origines interviennent dans un contexte électoral tendu, qui a vu l’extrême-droite arriver en deuxième position au premier tour de l’élection présidentielle, le tout dans une relative banalisation de son discours et de ses idées. Pour Maurice Untereiner, de la section chefs d’établissements du SGEN-CFDT, une telle menace est une première :
« Les chefs d’établissements sont confrontés à des revendications, qui peuvent parfois s’exprimer avec véhémence voire violemment, des remises en cause ou des dénonciations. Mais en plus de 20 ans, je n’ai jamais vu un chef d’établissement menacé de mort, en tout cas en Alsace. Le contexte est délétère. »
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