De sa traversée du désert parmi les amateurs, on a retenu les records d’affluence décrochés par le Racing, respectivement face à Schiltigheim en CFA 2 (10 883 spectateurs), Mulhouse en CFA (20 044) et Colomiers en National (26 723). Le retour en deuxième division aurait logiquement dû emprunter la même trame, encore motivé par l’émulation avec le grand manitou des affluences, le RC Lens. Mais les journées passent, les buts s’enfilent comme des perles et on attend toujours le Grand soir.
Élément révélateur : l’affluence moyenne à la Meinau était jusqu’à la rencontre face au Havre, le 28 avril, inférieure à celle de la saison dernière.
Certes les dernières rencontres ont enfin attiré du monde rue de l’Extenwoerth et c’est comme si l’imminence de la fin de saison réveillait les soutiens de la vingt-cinquième heure. L’équarrissage début mars du leader brestois a donné le ton et certainement convaincu les 17 514 présents et de nombreux sceptiques devant leur télévision. Suivront le simili derby contre Sochaux et la réception d’Ajaccio, devant enfin plus de 20 000 personnes.
La montée en première division ayant cessé d’apparaître comme une vaine utopie, on assiste ces derniers jours au même ballet qu’il y a un ou deux ans, à la recherche de billets quel qu’en soient le prix ou à la mise en place de files d’attente sur la billetterie en ligne. On paiera 25 ou 30€, mais qu’importe, pourvu qu’on vienne au secours de la victoire.
Les deux derniers rendez-vous mobilisent une foule qui semble enfin prendre le temps de s’intéresser à nouveau au Racing : après les 25 000 et quelques spectateurs attirés face au Havre, il est acquis que le match contre Bourg-en-Bresse se disputera dans un stade comble.
Marques de désaffection
Dans la foulée du déplacement emblématique de Belfort fin mai et de la célébration du titre sous un crachin dunkerquois, on aurait pu s’attendre à ce que la ferveur survive à un été sans Racing. Il n’en a rien été, ou si peu.
Seulement 16 009 spectateurs pour la première contre Amiens, un samedi après-midi ensoleillé. Normal, les gens sont en vacances. 16 522 dans les sièges deux semaines plus tard contre Nîmes, ils ne sont toujours pas rentrés. Suivent deux rencontres disputées un lundi soir dans un stade à moitié vide.
Certes, la tribune Ouest fait désormais partie du paysage, le succès est indéniable mais ailleurs, l’œil est contraint de s’habituer à ces quarts-de-virage désespérément vides, à cette populaire sud cernée de barrières et interdite d’accès, à cette tribune Familles clairsemée.
L’hiver arrive. Même Gilbert Gress perdait ses pouvoirs de démiurge à l’arrivée du froid. Entre octobre et mars – période durant laquelle le port de collant de ski est indispensable –, la Meinau se transforme en glaçon et on se résout difficilement à quitter son foyer douillet pour passer deux heures dans le froid. On redécouvre même les joies du match reporté, à 20h05 ce soir de janvier contre Tours.
Un calendrier incohérent
Seule éclaircie, au propre comme au figuré, au mois de décembre contre Lens : 22 062 personnes assistent à la démonstration de réalisme strasbourgeois dans une atmosphère festive et chamarrée. Mais le soufflé retombe aussi sec, puisque 8 500 personnes font défection la semaine d’après contre Niort.
Passé ce constat, y a-t-il des éléments d’explication à cette relative désaffection populaire ?
Le calendrier a brillé par son incohérence. On a ainsi disputé autant de rencontres (quatre) aux mois d’août et de septembre cumulés qu’au cours du seul mois de février. Autre point : maintes rencontres ont été décalées au samedi après-midi ou au lundi soir, contraignant les supporters aux agendas les moins flexibles à renoncer au match.
On a déjà mentionné l’hiver alsacien, ajoutons une grille des tarifs ressentie comme largement inadaptée. Evidemment, il fallait s’attendre à la disparition des prix open bar des années amateurs : fini le temps du billet offert pour chaque billet acheté – et revendu par certains supporters peu scrupuleux – ou du zonage approximatif permettant de débourser une dizaine d’euros pour se retrouver à proximité des tribunes présidentielles.
Des tarifs éloignés des cibles populaires
Mais le club n’y est pas allé de main morte. Impossible de prendre un abonnement en populaire debout, traditionnel « produit d’appel », ni en quart-de-virage. L’abonnement le moins cher correspond au nouveau Kop, comme si le club avait craint que cette grande tribune Ouest ne sonne creux. Il n’y a pas de tarif intermédiaire : le deuxième tarif le plus accessible, pour ceux qui souhaiteraient vivre les matchs assis et au calme, dépasse déjà les 200€. Et encore, on est expédié en tribune Familles non-fumeur à l’autre bout du stade.
En dépit de ces tarifs franchement dissuasifs, la campagne d’abonnements sera plutôt fructueuse avec 7 573 cartes vendues à la fin du mois d’août. Deuxième volet du coup de massue, les prix à l’unité sont également prohibitifs, à hauteur de 16€ en quart-de-virage, avec un supplément en caisse du soir. De quoi refroidir les achats impulsifs.
A y regarder de plus près, il semble que la direction commerciale du Racing se soit laissée emballer par les affluences irrationnelles des printemps 2015 et 2016, qui virent une foule toujours plus nombreuse se masser dans l’espoir de grimper sur le podium puis l’année d’après dans l’attente de l’officialisation de la montée.
Elle a omis de considérer l’impact psychologique du prix, le facteur météo, l’indécrottable versatilité du public, ce qui l’a conduit à quasiment brader les billets au travers de packs, faisant presque regretter aux abonnés d’avoir payé bonbon en août pour manquer la moitié des matchs décalés au samedi ou au lundi.
Alors que la première division fait tourner bien des têtes, il est souhaitable que le Racing tire les conclusions de cet exercice mitigé d’un point de vue affluence. Il reste à espérer que le public alsacien ne se détournera pas aussi vite de son club qu’il est revenu vers lui ce printemps.
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