« Moi aussi, mon mari me battait. » Patricia, 51 ans, est venue rendre hommage à Sylvia Auchter, victime du 131e féminicide en France depuis le début de l’année 2019. Mais Patricia veut aussi témoigner de son calvaire : « J’ai déposé plusieurs plaintes qui sont restées sans effet. Il me menaçait de mort et m’a même suivi jusqu’au travail. J’ai dû partir vivre 6 mois chez mes parents… » À Oberhoffen-sur-Moder, dans une marche blanche teintée de rose, la couleur préférée de Sylvia, la parole des victimes de violences conjugales s’est libérée.
« J’espère qu’ils vont fouiller à la gendarmerie de Bischwiller »
« On est déjà passé à côté d’un féminicide chez nous. » Dans la rue où Sylvia Auchter est morte poignardée, Manon (le prénom a été modifié) raconte les violences conjugales subies par sa mère. Elle a déjà passé 4 heures à la gendarmerie de Bischwiller sans pouvoir porter plainte. « À 18 heures, un gendarme a fini par me dire qu’il allait fermer, raconte Julie, j’espère que les enquêteurs vont fouiller dans les dossiers de la gendarmerie de Bischwiller (l’inspection générale de la gendarmerie nationale a été saisie, ndlr). »
Aujourd’hui, Julie ne vit plus avec son mari violent. Malgré le divorce, « on vit encore dans la peur. Il peut toujours nous retrouver », craint Manon, un dossard rose sur le dos. Ce témoignage fait réagir une jeune femme juste à côté. Cette mère célibataire de 24 ans a peur depuis que son ex-compagnon est sorti de prison : « Il continue de me menacer… »
Manque de moyens dans la formation et l’accompagnement
Coprésidente de l’association Osez le féminisme 67, Barbara Rimlinger dénonce un manque de moyens « dans la formation des forces de l’ordre à l’accueil des victimes de violences conjugales. » La militante féministe demande aussi des financements supplémentaires pour l’hébergement et la protection des femmes battues.
Une vie pour les autres
Jacqueline, 58 ans, a tenu à venir soutenir la fille de Sylvia Auchter : « Stella a toujours été là pour nous lorsque ma fille a eu un cancer. » De même, Sylvia Auchter a travaillé toute sa vie pour les autres. Ces quinze dernières années, elle nettoyait les chambres et préparait les repas de personnes âgées ou handicapées à l’hôpital de Bischwiller.
« Il faudrait une révolution »
Sur le portail, devant la maison de Sylvia Auchter, une rose est attachée par un ruban : « Ne pas ouvrir. Pièces à conviction. » Mardi 12 novembre, le mari de Sylvia Auchter a été mis en examen pour meurtre sur conjoint. Il a été placé en détention provisoire. Le collectif Nous Toutes appelle à une mobilisation nationale à Paris samedi 23 novembre à 14h. Dans le cortège, une femme victime de violences conjugales conclut son témoignage : « Il faudrait une révolution là-dessus. »
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