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À la manif de rentrée, des ouvriers demandent à la gauche de voter avec le RN pour les retraites

Plus de 1 000 personnes ont défilé à l’appel des syndicats mardi 1er octobre à Strasbourg pour la rentrée sociale. Parmi les manifestants, certains se sont fortement mobilisés en 2023 contre la réforme des retraites et estiment qu’il est entendable que la gauche vote son abrogation à l’Assemblée avec le Rassemblement national.

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À la manif de rentrée, des ouvriers demandent à la gauche de voter avec le RN pour les retraites
Plusieurs centaines de personnes se sont mobilisées à Strasbourg « pour la défense des services publics »

Le Rassemblement national (RN) a déposé mercredi 18 septembre un projet de loi pour abroger la réforme des retraites menée par le gouvernement d’Élisabeth Borne. Une mesure que le parti d’extrême droite avait pourtant retirée à la hâte de son programme lorsqu’il pensait pouvoir remporter les élections législatives.

Mais cette proposition n’est pas passée inaperçue parmi les 1 500 à 2 000 manifestants présents mardi 1er octobre à Strasbourg, venus à l’appel des syndicats pour « la défense des services publics, les retraites et les salaires ». Une bonne partie d’entre elles et eux se sont déjà mobilisés en 2023, pour obtenir le retrait de la réforme des retraites. Le mouvement d’ampleur inédit s’était cependant soldé sur un constat d’échec, face à un gouvernement inflexible. Voir une abrogation de cette réforme revenir par la voie parlementaire ne laisse pas indifférent les personnes rencontrées.

Numériquement, cela ne peut que passer en alliant les votes du Nouveau front populaire (NFP) et du RN, les autres députés du centre et de droite étant majoritairement favorables au report de l’âge de départ à 64 ans. Ce dilemme risque d’ailleurs de réapparaitre car un tel rapport de force pourrait enfin permettre des avancées concrètes sur des mesures sociales précises.

« 40 ans, c’est largement suffisant »

Christophe est ouvrier chez Dumarey Powerglide, l’usine de boites de vitesses du Port du Rhin, en grande difficulté après avoir perdu son principal client. À 58 ans, il s’avoue usé :

« C’est inadmissible qu’on garde des gens esquintés à des postes qui pourraient être occupés par des jeunes. Moi, j’ai une lombaire décalée à cause d’un accident du travail, ma hanche me fait mal parce que je marche entre 15 et 20 km par jour pour aller chercher les pièces… J’ai débuté à 18 ans, cotisé 40 ans, c’est largement suffisant. »

Christophe est ouvrier depuis 37 ans chez Dumarey Powerglide. Photo : Pierre France / Rue89 Strasbourg / cc

Pour Christophe, la « Macronie s’est arrangée avec les élections pour rester au pouvoir » mais une abrogation de la réforme des retraites venant de l’extrême droite ne le dérangerait pas :

« J’espère que la gauche suivra le RN s’il va jusqu’au bout de l’abrogation, j’en suis sûr même. Ce qui compte, c’est le résultat pour les ouvriers, les travailleurs. Le contraire serait très décevant. »

Géraldine était de toutes les manifestations contre la réforme des retraites.Photo : Pierre France / Rue89 Strasbourg / cc

Alors que la manifestation s’apprête à prendre la direction de la rue des Francs-Bourgeois, Géraldine, professeure des écoles de 59 ans, a participé à « toutes les manifestations contre la réforme des retraites ». Mais elle ne partage pas l’avis de Christophe :

« On sait très bien qu’il n’y a rien à attendre de l’extrême droite. Cette proposition de loi du RN, c’est de l’affichage sur l’âge de départ à la retraite mais ce n’est pas ça le problème. C’est la durée de cotisation qui a été allongée de deux ans. »

Débat prévu le 31 octobre

Le projet de loi du Rassemblement national prévoit bien le retour à 42 années de cotisations mais pour Géraldine, « c’est à la gauche d’amener ce combat à l’Assemblée nationale, avec l’ensemble des dispositions qui font partie du programme du Nouveau front populaire ».

Christophe, cheminot, espère que la gauche saisira l’opportunité d’abroger la réforme des retraites. Photo : Pierre France / Rue89 Strasbourg / cc

Christophe, cheminot Sud-Rail de 47 ans, s’est « mobilisé pendant cinq semaines » contre la réforme des retraites. Lui non plus ne voit pas le Rassemblement national aller au bout de sa démarche :

« L’extrême droite, ce sont des girouettes, ils vont dans le sens du vent car il y a quelques mois, leur programme prônait un âge de départ à la retraite de 64 ans. C’est du populisme comme d’habitude. »

Mais si cette abrogation devait tout de même se concrétiser, Christophe appelle la gauche à utiliser ce moyen :

« Après toutes ces années à se mobiliser, on est un peu fatigués de se battre pour si peu de résultats… Donc si une abrogation peut passer, la gauche doit soutenir l’initiative même si on sait très bien que si l’extrême droite arrivait au pouvoir, elle serait la première à revenir sur les retraites et pas dans l’intérêt des salariés. »

Si le Rassemblement national poursuit cette proposition, le débat parlementaire est programmé le 31 octobre. Quoiqu’il en soit, une absence de résultat concret créerait un ressentiment des électeurs contre la gauche et le RN pourrait tenter de l’exploiter en pointant le NFP comme responsable.


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