« Qui n’a pas été augmenté depuis 2009 ? Qui se déplace pour 2,5€ ? Qui travaille 365 jours ? », « Nous ! », répondent les infirmiers libéraux. Voilà les slogans scandés lors de la manifestation de vendredi 12 mai à Strasbourg par ces professionnels de santé. Dans un tumulte de sifflets, de sons de cloches et de musique, les manifestants ont démarré leur marche place de la République vers 13h30 pour atteindre la Caisse primaire d’assurance maladie.
Revalorisation des actes
Parmi leurs revendications, une revalorisation de leurs rémunérations. « Cela fait des années que l’État n’a pas augmenté nos tarifications », dénonce une infirmière libérale présente dans le cortège mais qui préfère rester anonyme. La dernière hausse de l’IFD (Indemnité forfaitaire de déplacement) date de fin 2011 où elle était passée de 2,30€ à 2,50€. Un tarif qui reste inférieur à celui d’autres professionnels de santé. « C’est cinq euros pour les kinés et dix pour les médecins. Nous, ce qu’on réclame c’est cinq euros », rappelle l’infirmière. L’ID (Indemnité kilométrique), elle, n’a pas augmenté depuis 2009.
Or, avec l’inflation, « pour avoir le même salaire qu’il y a dix ans, je suis obligé de travailler cinq jours de plus par mois », explique Luc Keller, infirmier libéral depuis 17 ans et représentant du collectif « Infirmiers libéraux en colère » pour le département du Bas-Rhin, à l’initiative de ce rassemblement. Luc Keller indique que le collectif organise « d’autres actions », présentées comme « silencieuses » :
« On a beaucoup de rencontres et de réunions avec des élus. Mais le dialogue est totalement fermé avec le ministère de la Santé. »
Pour Noël Soldati, infirmier libéral de 61 ans toujours en exercice, certains de ses collègues délaissent le « nursing » (ensemble des soins d’hygiène et de confort) pour se concentrer sur des actes techniques plus rémunérateurs car mieux cotés. « La santé commence d’abord par l’hygiène », souligne-t-il.
« Une profession à bout de souffle »
Collée au dos d’une manifestante, le portrait de la Joconde, sur lequel on peut lire « Pour que notre métier ne finisse pas dans un musée ». Car selon Luc Keller, c’est l’existence même du métier qui est en péril :
« Notre profession est à bout de souffle. Le but du jeu est de nous faire disparaître et de tout filer à des organismes de santé privés. »
Ces organismes, Francine Valance, sage-femme, et sa fille Bérangère, infirmière libérale depuis 16 ans, les dénoncent aussi. « C’est par exemple HAD (Hospitalisation à domicile) qui pour l’instant fait de la sous-traitance » mais selon elles, le risque est qu’ils prennent bientôt une place du marché. En cause : une proposition de loi sur les prestataires de santé à domicile qui les autoriserait à réaliser les actes aujourd’hui pratiqués uniquement par des infirmiers diplômés. « Dans quel but le gouvernement fait ça ? À qui profite le crime ? », s’interroge Francine.
Le glissement des tâches (le fait qu’un aide-soignant ou un infirmier travaille en dehors de son cadre de compétences défini par la loi) est également critiqué par ces professionnels, surtout lorsqu’il est « à sens unique » comme l’explique Luc Keller, c’est à dire des actes pensés pour les infirmiers mais réalisés par des auxiliaires de vie par exemple, alors que les médecins ne délèguent pas d’acte aux infirmiers.
Arrivés devant la CPAM, des manifestants se sont allongés au sol et ont déposé un cercueil devant les portes de l’établissement.
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