« À 13 heures, on aura cours à 38 dans une petite salle. On sera obligé d’être collés. » Iliès (le prénom a été modifié) prend l’air à la pause de 10 heures ce lundi 25 janvier. Depuis le mois de novembre 2020, cet élève de terminale du lycée suivait des demi-journées de cours, en demi-classe, comme cela se fait partout en France.
Mais ce rythme a pris fin lundi 25 janvier au lycée Pasteur. La semaine précédente, le proviseur a annoncé le retour des classes entières pour les élèves de terminale pour tous les enseignements. « Ce n’est pas normal », souffle le jeune homme. À ses côtés, un camarade de classe se dit « inquiet pour ses parents à risque ». Ils ont 73 ans.
Une injonction ministérielle… sans concertation avec l’équipe pédagogique
Début novembre 2020, lors du deuxième confinement, le ministère de l’Éducation nationale permettait aux établissements de « développer le recours à l’enseignement à distance afin de limiter le nombre d’élèves accueillis simultanément ». Les lycées ont ainsi adopté des organisations différentes selon le nombre d’élèves, de professeurs et d’espace disponible.
Mais à la mi-janvier 2021, le ministre de l’Éducation nationale Jean-Michel Blanquer a choisi d’inciter les lycées à reprendre les cours en classes entières. Une circulaire parue au Bulletin officiel de l’Éducation nationale le 21 janvier propose de « prioriser la scolarisation en présentiel des élèves relevant de classes à examen et tout particulièrement des élèves des classes de terminales générale et technologique, notamment dans les enseignements de spécialité. » Selon nos informations, le Rectorat de l’Académie de Strasbourg a par exemple proposé au lycée Louis Pasteur de suivre cette circulaire suite à une visite de l’établissement dans la semaine du 18 janvier.
Mais l’injonction ministérielle est assortie de plusieurs conditions qui ne semblent pas respectées : « Les propositions d’évolution relèvent des chefs d’établissement, en concertation avec les équipes pédagogiques, en fonction de la situation locale et des besoins des élèves. » Or enseignants, élèves et parents s’interrogent sur le bien-fondé ce retour en classes entières.
Dans l’après-midi du lundi 25 janvier, Iliès se rend en cours. Comme pour toutes les matières du tronc commun (histoire, français, langues…), la classe est remplie : « On était serré comme des sardines, décrit le lycéen, la professeure était inquiète face à une classe qui ne pouvait pas respecter les distances sanitaires. »
« Les effectifs des classes n’ont jamais été aussi lourds »
Professeur au lycée Pasteur, Serge (le prénom a été modifié) dénonce une décision unilatérale de la part du proviseur :
« Dès vendredi 22 janvier, des professeurs ont demandé des explications sur cette décision, sans jamais recevoir de réponse. La grande majorité des enseignants sont favorables aux cours en demi-classe. Les effectifs des classes n’ont jamais été aussi lourds, en règle générale, 36, jusqu’à 37. Ce qui rend la distanciation physique impossible. Si l’on compte une salle de 6 mètres sur 8, soit 48 m2, cela fait tout juste 1,3 m2 par personne. »
Élève de terminale, Claire (le prénom a été modifié) regrette aussi la fin des demi-classes pour des raisons pédagogiques. En groupe d’une quinzaine d’élèves, les lycéens peuvent beaucoup plus participer. « Vu qu’on nous envoyait les cours en avance, on avait plus de temps pour corriger les exercices et poser des questions de compréhension », explique-t-elle.
« Nous aimerions garder le système en classe hybride »
L’élève de terminale ne comprend pas ce retour en classe entière, d’autant que les épreuves de spécialité du bac prévues en mars sont finalement annulées : « Nous étions prêts à reprendre en classe entière pour préparer les examens de spécialité, donc maintenant je ne comprends pas les raisons de ce retour à 100% en présentiel. »
Claire fait partie des élèves élus du Conseil des délégués pour la vie lycéenne (CVL). En fin de semaine dernière, la lycéenne a aussi écrit au proviseur, un mail resté lettre morte :
« Nous avons beaucoup discuté avec les élèves de terminales et nous aimerions émettre l’idée de garder le système en classe hybride pour les matières du tronc commun (dont les examens sont en juin, ndlr). Ceci afin de minimiser la propagation du virus. »
Classe pleine et sentiment d’oppression
Lors de son dernier cours d’histoire, à plus de 35 élèves, Claire s’est sentie « oppressée ». Elle s’est installée tout au fond de la classe avec des amies pour limiter les risques de contamination :
« Vu ce qu’on nous dit en ce moment sur un possible reconfinement et l’augmentation de la distance physique à 2 mètres, ce retour en classe entière me fait peur. On a à peine 50 centimètres à côté des voisins de devant, derrière et sur les côtés. »
Responsable des parents d’élèves FCPE au conseil d’administration du lycée, Claude Finel a aussi écrit au proviseur. Il demande notamment des précisions sur la façon dont la sécurité sanitaire sera assurée avec des classes pleines. Si ce représentant des parents d’élèves ne conteste pas le retard pris sur les programmes suite au passage en demi-classe, Claude Finel n’en regrette pas moins l’absence de concertation :
« Dans sa réponse, le proviseur nous a répondu que les modalités seraient discutées lors d’une réunion ultérieure… »
Contactée, l’administration du lycée Louis Pasteur nous a renvoyés vers le Rectorat. Ce dernier doit nous transmettre un communiqué écrit qui sera publié ci-dessous dès réception.
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