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Après un lancement quasi-parfait, le Réseau express métropolitain déraille déjà

Lancé la veille, le Réseau express métropolitain a d’abord fonctionné correctement lundi 12 décembre. Mais le manque de personnel et surtout le manque de matériel ont provoqué des retards et des suppressions de trains en début de soirée.

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Après un lancement quasi-parfait, le Réseau express métropolitain déraille déjà

« Si on vous pose une question, vous ne vous arrêtez pas. Vous continuez d’avancer. » La consigne est donnée à trois jeunes employés de la SNCF dans le hall central de la gare de Strasbourg en soirée du lundi 12 décembre. Le Réseau express métropolitain européen (REME) fonctionne pour la deuxième journée mais après un lancement sans grande difficulté, dès lundi soir, le REME rame.

Des dizaines de personnes ont les yeux rivés sur un tableau d’affichage ponctué de plusieurs retards et de suppressions de trains. La foule commence à s’impatienter. Un petit groupe d’agents de la société ferroviaire doit traverser le hall central pour rejoindre le quai numéro 1. À peine ils s’élancent qu’une voyageuse alpague un des jeunes en gilet rouge sans manche : « Excusez-moi monsieur, mon train pour Colmar a été supprimé. Comment est-ce que je fais ? » Un des cheminots s’arrête. Une erreur de débutant sans doute.

Des dizaines de voyageurs, les yeux rivés sur les panneaux d’affichage. Photo : Guillaume Krempp / Rue89 Strasbourg / cc

« Dans 70% des cas, c’était un problème matériel »

Au total, 67 Trains express régionaux (TER) sur 750 prévus en Alsace dans la journée du lundi 12 décembre ont été supprimés selon un comptage interne à la SNCF. La communication de la direction régionale TER Grand Est n’a répondu à notre question sur ce sujet. Secrétaire adjoint du syndicat Unsa ferroviaire Alsace, Ludovic Wintenberger résume :

« Le matin, ça allait au lancement, mais au fur et à mesure, un train en retard en a entrainé d’autres… Dans 70% des cas, c’était un problème matériel, avec des trains au mauvais endroit et un manque de matériel roulant pour remplacer les trains en retard ou supprimés. On se doutait que ça n’allait pas rouler parfaitement le jour même mais on ne s’attendait pas à de telles perturbations. »

Tout avait pourtant bien commencé, ce premier lundi du REME. Sur le trajet vers Molsheim, Valérie n’avait rien à déplorer, à part cinq minutes de retard au départ le matin et le même délai supplémentaire pour son retour à 14h14. La conseillère en assurance a l’habitude : « depuis la rentrée, c’est compliqué, surtout le soir. Il m’est déjà arrivé de voir deux trains de suite supprimés… Je me demandais comment ils allaient faire pour assurer un train toutes les dix minutes chaque soir. »

En gare de Molsheim, pas de perturbation à signaler en début d’après-midi du lundi 12 décembre. Photo : Guillaume Krempp / Rue89 Strasbourg / cc

« La SNCF est allée chercher des rames ailleurs »

Une réponse est donnée au guichet de la gare de Molsheim : « La SNCF est allée chercher des rames ailleurs (en Champagne-Ardenne notamment, NDLR) et j’ai entendu parler de conducteurs à la retraite qui ont été rappelés. »

Côté personnel, la communication de la direction régionale TER Grand Est avance que le lancement du REME a nécessité « une augmentation de nos effectifs de 86 agents dont une majorité de conducteurs et de contrôleurs ». « 22 agents de maintenance ont été recrutés pour renforcer le technicentre de Strasbourg qui fonctionne désormais en 24 heures sur 24 le week-end », indique la SNCF aux Dernières Nouvelles d’Alsace. Elle assure de même que la SNCF dispose « aujourd’hui les ressources suffisantes pour assurer le démarrage de la première phase du REME. » Concernant le matériel roulant, la SNCF a transmis les informations de la Région Grand Est qui affirme avoir injecté neuf nouvelles rames Regiolis dans le REME autour de Strasbourg. « En parallèle, il y a des prêts de matériels de l’Ile de France », indique la communication de la société ferroviaire.

Des trains d’autres régions ont été amenés en Alsace pour réduire le manque de matériel roulant. Photo : Guillaume Krempp / Rue89 Strasbourg / cc

« Le service est pour l’instant quasi-parfait », indiquait lundi en début d’après-midi André Lott, président de Bruche-Piémont Rail. Tout juste arrivé à Molsheim depuis Bischoffsheim, ce militant « pour un transport public de qualité » soulève une difficulté nouvelle pour les habitants de la vallée de la Bruche et du Piémont :

« Dans ces zones, le REME n’offre pas de train supplémentaire. Tandis que les horaires du service ont été complètement réorganisés. Certains habitants, notamment les lycéens, sont pénalisés. Les nouveaux horaires les font arriver en retard en cours… »

À Strasbourg, la gare gronde

En fin d’après-midi, les retards commencent à s’accumuler sur le panneau de la gare de Vendenheim. Sortant du train pour rentrer chez lui, un professeur des écoles se dit « sceptique » sur la capacité de la SNCF à offrir le service REME : « Depuis le covid, ils ont du mal à stabiliser l’offre… » Sur le quai pour rentrer à Strasbourg, Christophe se plaint aussi d’annulations récurrentes. Il attendra une demi-heure dans le froid puisque le train pour Sélestat et passant par Strasbourg a été supprimé.

De retour à Strasbourg, la gare gronde des voyageurs en colère. Les annonces se suivent et se ressemblent : « Le train de 17h58 en direction de Bâle est supprimé en raison de la réutilisation d’un train. » Sur les panneaux des départs et des arrivées, le train pour Niederbronn de 17h57 affiche d’abord cinq minutes de retard, puis il est supprimé. Les trains pour Wissembourg, Bâle et Metz sont aussi affichés avec du retard.

C’est en début de soirée que les difficultés ont commencé… Photo : Guillaume Krempp / Rue89 Strasbourg / cc

« Le REME, j’y crois pas »

Fabienne, qui habite désormais Colmar, se félicite de ne plus prendre le train tous les jours :

« Pour moi, c’est devenu une banalité les trains supprimés. Alors pour l’instant, le REME, moi je n’y crois pas. »

Un petit groupe de quatre voyageurs de Charente-Maritime, venus pour le marché de Noël, attend depuis 50 minutes qu’un train daigne partir pour Colmar. Un peu plus loin, des lycéens appellent leurs parents pour qu’ils viennent les chercher :

« On vient de nous annoncer qu’il y aurait pas de train pour Haguenau avant une demi-heure, voire une heure. Ça nous arrive deux à trois fois par mois, dans ces cas-là on essaye de se débrouiller… »

Sur toute la Région Grand Est, 394 trains supprimés

Président de la Fédération des usagers de transports du Grand Est, François Giordani résume :

« Pour la journée du lundi, sur le REME, nous comptons 20 trains supprimés, essentiellement sur la ligne vers Haguenau, et 15 retards de plus d’une demi-heure. Mais sur toute la Région Grand Est, ce sont 394 trains qui ont été supprimés, essentiellement avec un motif farfelu de grève SNCF inopinée. »

Cette situation « correspond à l’inquiétude qu’on avait : ils ont mis le paquet sur le REME et ont enlevé des moyens sur d’autres lignes… » Selon nos informations, seuls 30% des trains entre Strasbourg et Nancy sont arrivés à l’heure dans la journée du lundi 12 décembre.

Photo : Guillaume Krempp / Rue89 Strasbourg / cc

Dans la matinée du mardi 13 décembre, de nouvelles difficultés se sont ajoutées pour la SNCF, qui blâme le givre. Aux alentours de 7h, comme l’a constaté la députée haut-rhinoise Brigitte Klinkert (Renaissance), aucun train ne partait de la gare de Strasbourg. Selon François Giordani, à 8h, une dizaine de trains du REME avaient déjà été supprimés :

« C’est le double par rapport à hier, donc nous allons rester attentifs, d’autant que les mardis et vendredis sont les jours de plus forte fréquentation. »


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