« J’ai eu plus peur de me faire taper que d’aller en garde à vue. » Aux alentours de 14h30, samedi 12 janvier, deux policiers arrêtent Geoffrey Guiot à quelques mètres de la place Kléber à Strasbourg. Ce père de famille, primo-manifestant, et ses quelques amis viennent d’enlever leurs gilets jaunes. Leur objectif : rejoindre la place Kléber où les manifestants se sont donnés rendez-vous. Sans comprendre ce qui lui est reproché, le manifestant est contraint de présenter ses papiers d’identité avant d’entrer dans un véhicule de police. Il sera relâché 20 minutes plus tard.
Insultes, menaces et violence
Pour le manifestant, l’arrestation a mal tourné dans la fourgonnette. Un certificat médical atteste d’une « douleur et une impotence fonctionnelle partielle de l’épaule gauche (…) qui serait consécutive à une torsion du bras. » Le Strasbourgeois reçoit deux jours d’Interruption temporaire du travail (ITT). Il dénonce aussi des violences verbales de la part des policiers :
« Dans le camion, les trois policiers m’ont insulté et menacé. Ils disaient que j’étais “un petit enculé de casseur” et que je devais “faire attention quand je me promène au Neuhof” parce que c’est le secteur d’un des policiers. Finalement, un type plus âgé est rentré et il m’a laissé sortir à condition que je laisse mon gilet jaune… »
Geoffrey Guiot a porté plainte contre X pour « injure non publique » et « violence par une personne dépositaire de l’autorité publique suivie d’incapacité n’excédant pas huit jours. »
« C’est une arrestation arbitraire »
La scène a été visionnée plus de 200 000 fois sur Facebook. Elle provoque de nombreuses réactions d’indignation : « C’est grave ! », « L’arbitraire à Strasbourg » quand d’autres n’hésitent pas à parler de « dictature ». Car Geoffrey Guiot n’a pas été placé en garde à vue. Ce réparateur de palettes affirme n’avoir rien à se reprocher. Avec ses amis, ils étaient venus « juste pour les revendications » :
« J’ai des enfants, un travail, je suis pas là pour être violent. Pour moi, cette arrestation est une injustice. C’est une arrestation arbitraire juste à cause d’un gilet jaune. »
Une simple « vérification d’identité »
Selon Christophe Rouyer, du syndicat de police Alliance Grand Est, Geoffrey Guiot n’a pas été arrêté à cause du gilet jaune : « Il a simplement fait l’objet d’une vérification d’identité. » Pour Me Éric Braun, avocat spécialisé dans le droit pénal, deux procédures peuvent justifier un tel contrôle d’identité. L’une est régie par l’article 78-2 du Code de procédure pénale :
« Sur réquisitions écrites du procureur de la République aux fins de recherche et de poursuite d’infractions qu’il précise, l’identité de toute personne peut être également contrôlée, selon les mêmes modalités, dans les lieux et pour une période de temps déterminés par ce magistrat. »
De même, cette scène peut relever du contrôle de police administrative ayant pour but « de prévenir les atteintes à l’ordre public ». Dans ce cadre, l’arrestation « peut avoir lieu dans une rue ou une gare et concerner toute personne, quel que soit son comportement. »
Pour rappel, la manifestation du samedi 12 janvier n’avait pas été déclarée auprès de la Préfecture et les forces de l’ordre ont empêché les manifestants d’accéder à la Grande-Île de Strasbourg. Le contrôle a ainsi pu s’inscrire dans une mission de maintien de l’ordre dans un centre-ville très fréquenté.
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