Samedi 26 octobre 2024, une vingtaine de personnes se sont réunies lors d’une assemblée générale « décisive » pour Le Stück. Neuf ans et un mois après la mise en circulation de la monnaie locale, l’association du même nom a dû réfléchir à sa propre suite. « Depuis la loi de 2014, qui autorise les monnaies locales, le contexte a changé et certains membres fondateurs veulent passer la main », explique Tom Baumert, co-coordinateur du Stück. Pour résumer : soit la transition se passe bien, soit le Stück s’arrête.
Changer de prisme
Cette réorganisation de l’association implique une nouvelle équipe de bénévoles pour prendre la main, et passe par une redéfinition de son projet. Désormais, Le Stück ne se définit plus simplement comme une alternative à l’euro, mais comme un réseau d’acteurs et de consommateurs de l’économie sociale et solidaire (ESS).
Car sur le terrain, Tom Baumert constate qu’il est difficile de convaincre les professionnels qui pourraient utiliser le Stück uniquement sur l’argument d’un mode de paiement alternatif. « Les commerces de proximité prennent cher avec l’inflation et l’augmentation du coût de l’énergie. Quand on est occupé à survivre, c’est compliqué de s’investir dans un nouveau projet », estime le coordinateur, qui observe notamment les fermetures de commerces axés sur l’alimentation végétale :
« Dans la pratique, on va dire aux commerçants qu’en rejoignant le Stück, ils s’insèrent dans un réseau qui va prendre en compte leurs besoins, et créer une coopération économique entre eux et d’autres acteurs engagés pour la transition écologique. »
En plus de voir ces initiatives se heurter à des difficultés financières, Tom Baumert note que les professionnels ont surtout besoin de temps pour échanger entre eux sur leurs enjeux propres, par secteur. « On a créé quatre guildes, des groupes de spécialité pour créer un sentiment d’appartenance ».
Un groupe est dédié au vélo, un autre à l’alimentation végétale, un autre encore à l’agriculture et un dernier à la formation en entreprise. « En juin 2024 on a coordonné une journée appelée Festin du turfu, avec les membres de la guilde alimentation végétale. C’était un vrai succès, avec 600 participants et participantes, une association a été créée à l’issue de l’événement », raconte Tom.
Une monnaie qui peine à décoller
En tout, 150 000 Stücks sont en circulation (contre 75 000 en 2021). L’association emploie deux personnes, 24 heures par semaine. Elle a aussi besoin de bénévoles pour gérer l’aspect technique et comptable de la monnaie locale. Selon Tom, l’association compte une cinquantaine de commerces et de partenaires, collectivités inclues, et une centaine d’adhérents. Depuis décembre 2022, Le Stück existe aussi en version numérique et est presque autant utilisé que son homologue papier. « Mais nous avons décidé de garder les deux versions », précise Tom.
Alors qu’en 2025, le Stück aura dix ans, le co-coordinateur défend sa pertinence pour les années à venir :
« On veut continuer de fédérer autour des enjeux de l’économie locale, faire des liens, créer des questionnements politiques sur le système capitaliste. Le Stück est une réponse crédible à ces problématiques, il matérialise le soutien à l’ESS, payer en Stück est un acte qui fait sens. »
Membre du mouvement Sol, qui fédère les monnaies locales en France, Le Stück vieux de dix ans souffre finalement des mêmes maux que ses homologues. « La seule monnaie qui marche super bien est celle du Pays Basque, Eusko, qui a près de cinq millions d’unité en circulation », détaille Tom, qui attribue ce succès à la tendance indépendantiste du territoire et à la force de l’identité locale.
En attendant de changer les statuts de l’association lors d’une AG extraordinaire en février 2025, le co-coordinateur espère attirer de nouveaux bénévoles : « La poursuite du Stück, ça ne se fera pas tout seul ».
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