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Huit psychiatres et psychologues alsaciens dénoncent un accueil des réfugiés indigne

Dans une tribune parue dans le journal « Le Monde » le 4 avril, huit psychiatres et psychologues alsaciens s’indignent des dégâts psychiques causés par l’accueil des réfugiés par la France. Ils dénoncent la présomption de mensonge lors de la délibération pour donner ou non le droit d’asile aux migrants et réfugiés.

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Avant d'obtenir le statut de réfugié, un long parcours attend les migrants. Pour les aider, associations et bénévoles sont à leurs côtés.

Mercredi 4 avril, une tribune signée par huit psychiatres et psychologues alsaciens a été publiée dans le journal « Le Monde ». Selon ces praticiens, le traitement des réfugiés lors de leur accueil en France provoque des dommages psychologiques importants. Les modalités de traitements des dossiers sont vivement critiquées :

« Cet accueil reste indigne en raison d’un paradigme qui domine, influence et conditionne toute la politique d’accueil : la présomption de mensonge, qui repose sur tout demandeur d’asile et le place d’emblée dans une position d’imposteur et non de victime potentielle. »

Suite aux épreuves qu’ils ont vécus, les demandeurs d’asile mériteraient une attitude d’écoute. Ils trouvent à la place, selon les auteurs de la tribune, « un accueil qui n’est pas respectueux de la dignité humaine. »

Avant d'obtenir le statut de réfugié, un long parcours attend les migrants. Pour les aider, associations et bénévoles sont à leurs côtés.
Avant d’obtenir le statut de réfugié, un long parcours attend les migrants. (Martin Leveneur / Flickr / cc)

Des troubles cognitifs occasionnés chez les demandeurs d’asile

Le « cheminement juridico-administratif » du demandeur d’asile aggraverait les troubles cognitifs occasionnés par l’épreuve de la migration. Par conséquent, le réfugié éprouve plus de difficultés à se défendre lors des auditions qui ponctuent la demande d’asile.

En annexe de la tribune, les professionnels de la santé ont joint des « extraits de rejets [de demandes d’asile qui ont été jugées en Alsace, ndlr] concernant une patiente victime d’un viol en réunion, dans des circonstances particulièrement difficiles à évoquer pour elle » :

« Les déclarations orales de l’intéressée, dans leur ensemble, sont apparues convenues et très peu spontanées, l’intéressée débitant un récit de manière mécanique, évoquant les différents événements à l’origine de son départ de manière détachée et impersonnelle […]. »

Selon les signataires, la subjectivité du juge prendrait le pas sur le droit. Ceux-ci auraient « un rôle exceptionnel dans ces décisions. » Les psychiatres et psychologues expliquent ces incohérences de discours par des mécanismes naturels liés aux épreuves vécues :

« Certains développent des mécanismes de défense pour « tenir le coup » : tension anxieuse continue avec pour conséquences des troubles cognitifs comme des troubles de l’attention, la concentration et la mémoire, un clivage avec distance affective, oublis des faits, confusion… Cette situation impacte fortement l’instruction de leur dossier. Elle contribue très souvent à l’échec de leur audition. »

Un projet de loi qui aggraverait la situation

Le projet de loi « Asile et immigration », présenté au conseil des ministres le 21 février, est vivement critiqué dans la tribune. Le texte serait « une catastrophe car [il] rendrait le parcours du combattant encore plus inhumain qu’il ne l’est déjà. »

Si la loi devait être adoptée, les délais pour faire une demande d’asile et pour déposer des recours seraient réduits. Le risque d’expulsion pour les personnes venant de pays dits sûrs serait plus grand. Enfin, l’acquisition ou non du droit à l’asile serait encore plus basée sur la présomption de mensonge… et sur la subjectivité du juge.


#Demandeurs d'asile

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