Jeudi soir, à table, le petit A., 7 ans, était abattu. Questionné par sa mère, il lui dit ne plus vouloir aller à la cantine. Elle raconte :
« Cela faisait déjà quelques temps qu’il se plaignait de la cantine, mais jeudi, il était vraiment triste. Il a fini par me dire qu’une dame leur avait montré deux photos d’enfants qui mourraient de faim, qu’elle avait téléchargées exprès sur son téléphone portable. En me racontant ça, il s’est mis à pleurer. J’ai essayé de lui expliquer que l’état de ces enfants n’avait rien à voir avec lui ou ce qui restait dans leurs assiettes.
J’étais très fâchée. J’ai donc écrit un mail dans la foulée aux parents de la classe pour les informer de cette histoire. Dès le lendemain, mon portable n’a plus arrêté de sonner. On m’a raconté plusieurs histoires, notamment celle d’une petite fille qui ne mange jamais de crudités – sa mère est allée en personne à la cantine pour l’expliquer au personnel – et qu’on force à en manger. Des gamins qui ont des nausées avant d’aller déjeuner, un autre qui a vomi après le repas ! »
Maux de ventre et punitions
Un échange de mails s’ensuit entre plusieurs parents. Extraits (les prénoms ont été floutés à la demande des parents qui craignent des représailles sur leurs enfants) :
« Cela ne se reproduira plus »
Dès vendredi 17, Olivier Vossan, parent de deux enfants qui déjeunent à la cantine des Tonneliers, sur un autre site que celui du Foyer Soleil, et coordinateur de la commission cantines qui fait le lien entre parents et Ville de Schiltigheim, est averti. Il rencontre à la mi-journée la responsable Christine Waldert, et envoie cette réponse aux parents concernés :
Il ajoute à notre intention :
« Cette histoire a été montée en épingle. Le Foyer Soleil est habituellement la plus petite cantine, la plus calme. Les parents peuvent être rassurés, la personne qui a commis cette erreur s’est fait remonter les bretelles. Elle était désolée et n’a pas pris conscience qu’elle pouvait choquer les enfants [avec ces photos] ou les empêcher de dormir. Il y a eu plusieurs problèmes sur ce site cette année, ce n’est pas de chance, mais les plaintes ont été entendues.
Dans une charte qui a été rédigée avec le conseil municipal des enfants, ils seront informés qu’ils ont le devoir de goûter et le droit de ne pas aimer. Aux Tonneliers, où déjeunent mes enfants, on les sensibilise au gaspillage en mettant les restes dans un seau. La table qui a le seau le moins rempli a gagné. »
Concours du seau de restes le moins rempli
Une pratique qui scandalise certains parents, dont une maman qui s’inquiète :
« Mon fils ne mange pas grand-chose, alors ses copains râlent quand il se met à leur table parce qu’avec lui, ils savent qu’ils vont perdre [au concours du seau le moins rempli] ! De même, qu’on lui demande de goûter une fois, c’est une chose, mais qu’on lui impose de goûter toutes les semaines le même aliment qu’il n’aime pas, c’est n’importe quoi ! Du coup, il développe des stratégies, crache dans sa serviette…
Cette histoire de photos est anecdotique, mais elle révèle le manque de cadre institutionnel autour de l’accueil de midi. Il n’y a aucun garde-fou pour protéger les enfants de personnes qui ne sont pas formées pour les accompagner. C’est symptomatique d’un dysfonctionnement qu’on dénonce depuis plusieurs années. C’est bien de proposer du bio et une alimentation variée, mais si les repas se passent dans le stress, les enfants n’avalent rien et assimilent l’école à la cantine. Tant qu’il n’y aura pas de bienveillance envers eux et que l’on considérera qu’ils sont à l’origine des problèmes et pas l’inverse, on n’avancera pas. »
Cantines de Schilick, le top de la restauration scolaire en Alsace
Les parents relèvent par ailleurs un amusant hasard du calendrier : en mai 2013, la revue éditée par la Ville, Schilick Info, relaie la distinction accordée à la restauration scolaire de Schiltigheim par l’UFC-Que Choisir, qui place la commune en tête en Alsace pour « l’équilibre nutritionnel des repas » et la qualité de l’encadrement de la pause méridienne à l’école. Interrogée sur les suites qui seront données à cette affaire, la mairie de Schiltigheim n’a pas donné suite à nos demandes d’entretien mardi.
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