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À un forum de recrutement de la SNCF : une réforme ? Quelle réforme ?

Un forum de recrutement s’est tenu en gare de Strasbourg, mardi 20 mars. SNCF-Réseau cherche à embaucher des aiguilleurs du rail et des techniciens de signalisation… Des cheminots. Mais les recruteurs de la SNCF n’évoque guère les changements qui pourraient changer l’attractivité de ces métiers. L’idée qu’un emploi à la SNCF est un emploi à vie est encore bien ancrée.

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À un forum de recrutement de la SNCF : une réforme ? Quelle réforme ?

Sur le quai numéro 1 de la gare de Strasbourg, deux publics se croisent ce mardi 20 mars. En fin de matinée, le TGV en provenance de Paris vient d’ouvrir ses portes. Des gens pressés en sortent. Plus loin, là où les « grands voyageurs » ne passent pas, se tient un forum de recrutement. Des chercheurs d’emploi s’y rendent, CV à la main. Une dizaine de recruteurs se trouvent dans la salle. Ils sont plus nombreux que les candidats.

Kévin cherche la « sécurité de l’emploi »

Kévin, 25 ans, veut travailler à la SNCF. Il vient de déposer sa candidature pour devenir technicien de la voie ferrée. Son BTS Bâtiment fait partie des qualifications recherchées. Et le jeune a de l’expérience. Pendant deux ans, il a travaillé en tant que conducteur de travaux… jusqu’à la faillite de l’entreprise. Sans emploi, il explique sa démarche auprès de l’entreprise ferroviaire :

« A l’heure actuelle, j’ai envie de stabilité. Je veux entrer dans une boîte et être sûr de pouvoir garder mon travail. Avec la SNCF, en plus, je peux monter en grade dans l’entreprise. Je suis prêt à travailler de nuit, et le salaire, entre 1 500 et 2 000 euros, n’est pas ce qui m’intéresse le plus. C’est la sécurité de l’emploi qui compte pour moi. »

Kévin, 25 ans, cherche à la SNCF un « emploi stable » (Photo GK / Rue89 Strasbourg / cc)

Le jeune candidat sait que le statut de cheminot pourrait bientôt disparaître. Car le Premier ministre Edouard Philippe a été clair sur le sujet lors d’un discours tenu le 26 février :

« Aux nouvelles générations, aux apprentis, à tous ceux qui veulent s’engager dans la SNCF, nous disons qu’ils bénéficieront des conditions de travail de tous les Français, celles du Code du travail. A l’avenir, à une date qui sera soumise à la concertation, il n’y aura plus de recrutement au statut. »

Des recrutements difficiles

Inquiétée par la présence non-annoncée d’un journaliste, l’équipe de la communication de la SNCF se met en branle. Le directeur territorial adjoint de la SNCF-Réseau Grand Est déboule. Il est bientôt suivi de la directrice de la communication. Christophe Chartrain explique les difficultés liées au recrutement :

« Nous recherchons des profils techniques pour des postes à responsabilité. Les candidats doivent être aptes à assurer des missions de sécurité. Les techniciens de voie ou les aiguilleurs, par exemple, doivent faire preuve d’une vigilance de tous les instants. Et puis il y a les contraintes liées au travail de nuit… »

Christophe Chartrain, directeur territorial adjoint de la SNCF-Réseau Grand Est : « Je ne pense pas que l’attractivité de SNCF-Réseau soit liée au statut de cheminot. »

L’objectif actuel de SNCF-Réseau : recruter 60 personnes dans toute la région Grand Est. Mais Christophe Chartrain observe une baisse des candidatures dans son secteur. « Nous sommes confiants, nous allons y arriver », affirme le responsable. La réforme en cours de la SNCF, qui pourrait supprimer le statut de cheminot, ne l’inquiète pas :

« Je ne pense pas que l’attractivité de SNCF-Réseau soit liée au statut des cheminots. La preuve : nous embauchons d’ores et déjà des personnes en tant que contractuels. C’est une obligation lorsque les candidats ont plus de trente ans. Et ils sont nombreux. »

« Moins de CV cette année »

Au fond de la salle, devant un kakémono plein de logos SNCF-Réseau, Roger Rodriguez accueille les candidats au poste d’aiguilleur et de technicien supérieur de la voie ferrée. Depuis septembre 2017, il sait qu’il doit pourvoir 48 postes. Aujourd’hui, il reste 22 candidats à sélectionner. L’homme de 56 ans, cheveux gris et chemise noire, admet « avoir reçu moins de CV cette année ». Ancien aiguilleur, puis technicien supérieur, il connait les contraintes du poste :

« On travaille en trois tranches de huit heures, donc parfois de nuit. Et puis 65% des aiguilleurs travaillent seuls. Ça ne convient pas forcément à tout le monde. Ce qui rebute aussi, c’est la mobilité imposée. Suite à leurs formations, les candidats peuvent avoir un poste éloigné de leur domicile. »

La réforme ? « ce n’est pas le sujet »

Pendant ses échanges avec les candidats, la réforme du statut des cheminots n’est pas évoquée une seule fois. « Ce n’est pas le sujet aujourd’hui », approuve un chargé de communication, qui accompagne chacune des interviews. Côté comm’ et côté ressources humaines, le refrain est le même : « On ne sait pas encore exactement en quoi consiste la réforme ». Alors en attendant, on continue de recruter, comme si de rien n’était.

Casquette américaine sur la tête, Jérôme est sur le point de quitter la salle. Cet ancien soudeur de 32 ans espère intégrer la SNCF. Pourquoi ?

« Ici, il y a une grosse protection de l’emploi. À la SNCF, t’as un vrai CDI grâce au statut [un emploi garanti à vie, ndlr]. Ce n’est pas la même chose que dans les autres entreprises. Avec mes anciens collègues, j’ai vu à quel point on peut être rapidement viré. »

Mais pour Jérôme, la réforme ne changera rien. Âgé de plus de trente ans, il sera recruté comme agent contractuel, donc non-cheminot. Les recruteurs ont omis d’en informer le candidat.


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