Yves Bur, maire (UMP) de Lingolsheim, peut être fier de lui. Selon ses propres mots, il a réussi à « changer la manière dont les Socialistes voient la gestion d’une collectivité ». Lorsqu’en novembre 2014, une première ébauche du budget de l’agglomération a été présentée aux présidents des groupes d’élus qui gèrent l’Eurométropole, une coalition composée depuis mars 2014 de socialistes, écologistes et de quelques maires de droite, le désengagement de l’État, l’évolution des dépenses et les choix d’investissements faisaient apparaître un besoin de financement accru de 18% !
« Inacceptable », se souvient Yves Bur, qui a mis la participation de son groupe à la coalition dans la balance et a exigé que des économies soient réalisées dans tous les secteurs. Le président (PS) de l’Eurométropole, Robert Herrmann, a cédé. D’une part, pour garder intacte cette coalition dont il est si fier et, d’autre part, parce qu’il n’était pas pensable d’augmenter d’autant les impôts locaux. Au final, le budget de fonctionnement s’établit à 684,2 M€ et l’agglomération prévoit de dépenser 212,5 M€ d’investissements, un chiffre en baisse de 36% ! Mais l’endettement progresse considérablement (+27%) et les prélèvements sur les taxes locales ont été relevés. Avec les quatre budgets annexes (ordures, eau, transports, assainissement), le budget total atteint 1,3 milliard d’euros.
« La CUS était en surchauffe »
Pour Yves Bur, « ce budget d’austérité est le premier d’une série à venir » :
« On doit boucler le budget avec une dotation de l’État en baisse de 70 millions d’euros, ce qui représente une saignée sévère. Mais on a dénoncé depuis longtemps que la CUS était en surchauffe : en deux mandats, les effectifs de l’administration ont augmenté de 1 120 agents ! Et il y a dans les tiroirs pour plus d’un milliard et demi de projets ! Donc ça suffit, à un moment il faut payer la facture. Nous revendiquons ce tournant, ces efforts dans la diminution de la dépense publique et la limitation du prélèvement fiscal qui en résulte. »
Évidemment, à l’autre côté de l’espace politique, on tique un peu. Alain Jund (EELV) rappelle :
« C’est un budget de lucidité, de sobriété. La fiscalité, quand on vit dans une grande agglomération comme la nôtre, elle est normale. Avoir comme but le gel ou la diminution des impôts est démagogique. Les augmentations à venir concernent surtout la taxe foncière, que paient les propriétaires. C’est un rattrapage par rapport à la taxe d’habitation, c’est de la justice fiscale. »
Elles doivent avoir de la saveur ces réunions de présidents de groupes ! L’exécutif a confirmé la hausse de la fiscalité locale annoncée début février par l’opposition : le taux intercommunalité de la taxe d’habitation passe à 10,6 à 10,76% et surtout le taux de la taxe foncière passe de 0,44 à 1,10%. En moyenne selon les élus, cette hausse se traduira par 4€ supplémentaires sur la taxe d’habitation et 22€ sur la taxe foncière. Des hausses modiques, mais qui s’ajouteront à celles votées par la Ville de Strasbourg sur les mêmes taxes…
Les dépenses de fonctionnement en légère hausse
Chasse aux millions à tous les étages
C’est Caroline Barrière, vice-présidente en charge du budget, avec Katell Parent, directrice des finances, qui se sont attelées à trouver des millions à économiser. Chaque ligne budgétaire a été passée au crible et au final, 16 millions d’euros ne seront pas dépensés en 2015, comme l’explique Caroline Barrière :
« On a renégocié les contrats de gaz et de carburant, on économisera au final plus d’un million d’euros sur les moyens généraux. Et la CTS fera de gros efforts, puisque la contribution de l’Eurométropole est réduite de 3,3 M€. On a suivi de multiples pistes pour se rendre compte parfois qu’aucune économie n’était réalisable, comme avec les vêtements de travail, par exemple. Au final, on a une prise que sur 40% de notre budget de fonctionnement. Le reste est quasiment figé. »
Le gros de l’effort reposera donc sur le personnel, dont le poste budgétaire n’augmente que de 0,9%, ce qui équivaut à une baisse du nombre de postes. Cette application de l’austérité à tous les étages de l’Eurométropole continuera, assure Caroline Barrière, au sein d’une « commission d’optimisation », qu’Yves Bur a renommée « commission hache ». Mais « rien n’a été supprimé, aucun service ne cesse de fonctionner, aucune subvention n’a été retirée », précise Caroline Barrière :
« Il s’agit d’efforts partagés par tous les services, mais la répartition des dépenses reste à peu près identique. Sur les investissements évidemment, seuls les projets engagés ont été financés. Le reste a été remis à plus tard. »
Chute drastique des dépenses d’investissement
On retrouve donc la rénovation du Palais de la musique et des congrès (PMC), la ZAC Danube, le projet TechMed, l’extension du tram D vers Kehl, du tram E vers la Robertsau, etc.
Une situation déjà tendue, qui s’est compliquée avec la mise à l’arrêt suivie des travaux de désamiantage de l’usine d’incinération du Rohrschollen, confiée à Sénerval. Plus de 37 millions d’euros seront engloutis dans cette opération, qui comprend la remise en service des installations, le transport des déchets de l’agglomération dans d’autres usines et l’indemnisation du groupe Séché. Une facture dont le contribuable retrouvera les effets dans la hausse de la taxe sur les ordures ménagères, dont le taux passe de 10,98 à 11,42% à Strasbourg et de 5,81 à 6,04% dans le reste de l’agglomération, ce qui représente une augmentation d’environ 11€ par an.
Les élus ont promis de baisser les taux une fois que les travaux de désamiantage seront terminés et l’usine à nouveau opérationnelle.
Aller plus loin
Sur Rue89 Strasbourg : suivre le conseil de l’Eurométropole en direct
Sur Rue89 Strasbourg : les 5 enseignements de la distribution des postes à la CUS
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