« Grâce à la mobilisation des étudiants et des étudiantes, la séance a été levée et la motion rétablissant le partenariat avec une université sioniste ne sera pas votée aujourd’hui. » Le message, publié sur la page Instagram de SciencesPro_Palestine, est accompagnée d’une vidéo où les étudiants et étudiantes apparaissent floutées. Mardi 3 décembre, peu après 17h, le conseil d’administration de Sciences Po Strasbourg est interrompu par une quarantaine de personnes. Une jeune femme lit un discours qui revendique cette perturbation de la réunion. En voici un extrait :
« Étudiants de Sciences Po Strasbourg, nous nous exprimons aujourd’hui pour nous opposer à la motion déposée par Jean-Philippe Heurtin (le directeur de Sciences Po Strasbourg, NDLR) visant à rétablir le partenariat avec l’Université Reichman. La motion de suspension de ce partenariat a été votée démocratiquement au sein même de cette assemblée. Par ce vote, vous avez affirmé nos valeurs, notre attachement au respect du droit international et de la dignité humaine. Notre institution ne peut pas fermer les yeux sur les atrocités commises à Gaza, d’autant qu’elle ne les a pas fermés face à celles commises en Ukraine. »
« Un climat délétère s’est installé »
Fin juin 2024, le conseil d’administration de l’Institut d’études politiques de Strasbourg avait voté la suspension de son partenariat avec l’Université Reichman. Les débats avaient alors été tendus. Les soutiens de cette motion dénonçaient les « positions de l’université, profondément bellicistes et dénuées de toute perspective humaniste, pacifiste et critique au regard de la guerre en cours à Gaza ». Ce vote avait eu lieu malgré l’opposition du directeur de Sciences Po Strasbourg, Jean-Philippe Heurtin, qui s’opposait à « toute forme de boycott académique d’une université d’un pays démocratique ».
La médiatisation de cette décision, fin octobre, a tendu un peu plus les débats au sein de Sciences Po Strasbourg. Au sein du conseil d’administration, des enseignants décrivent des pressions pour obtenir un vote favorable au rétablissement du partenariat avec l’Université Reichman. Auprès de Rue89 Strasbourg, le directeur Jean-Philippe Heurtin dénonçait la motion votée tout en affirmant qu’elle n’avait aucun impact réel. Une position qui a été perçue comme un déni de démocratie pour les étudiants et étudiantes mobilisées pour la Palestine. Ces derniers ont subi la violence des réseaux sociaux, comme le rappelle un communiqué transmis peu avant l’envahissement du conseil d’administration de l’IEP : « Aucune prise de parole de la direction n’a dénoncé le harcèlement des professeurs mais aussi des étudiant·es sur les réseaux sociaux ou dans les médias. Au sein de l’établissement, un climat délétère s’est installé. »
Une « atteinte à la démocratie universitaire »
Mardi 3 décembre, le conseil d’administration de l’IEP de Strasbourg devait voter un texte « à l’appui d’un avis de maintien du partenariat avec l’Université Reichman ». La motion contient un dossier documentaire d’une quarantaine de pages donnant des exemples d’expression critique du gouvernement israélien au sein même de l’établissement d’enseignement supérieur. Des articles de presse sont ainsi cités comme des preuves que des enseignants de l’Université Reichman ont pu critiquer la réforme de la cour suprême voulue par le Premier ministre Benjamin Netanyahou ou l’effort de guerre israélien.
Un participant à ce conseil d’administration a confirmé à Rue89 Strasbourg la levée de la séance par le directeur de Sciences Po Strasbourg, Jean-Philippe Heurtin, après la perturbation de la réunion.
Dans un communiqué diffusé dans la soirée, Sciences Po Strasbourg a déploré cette intervention qui « a empêché le vote du budget de Sciences Po Strasbourg. Le président du conseil d’administration et le directeur de Sciences Po Strasbourg déplorent cette atteinte à la démocratie universitaire. Un nouveau conseil d’administration sera très prochainement organisé afin que les débats puissent se
poursuivre dans un climat plus serein. »
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