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Étudiants étrangers : l’État subitement inflexible

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Étudiants étrangers : l’État subitement inflexible

Une des richesses de l'UdS, sa diversité: 21% des étudiants sont étrangers. (Photo MMo)
20% des étudiants à Strasbourg sont étrangers, 47% en doctorat. (Photo MMo)

Chaque année, la « cellule de veille » autour des étudiants étrangers, composée des syndicats de l’Université de Strasbourg, d’associations d’étudiants et d’un représentant de la présidence, a un petit rendez-vous à la préfecture du Bas-Rhin dans le but de déminer des dossiers d’étudiants en passe d’être expulsés du territoire pour de bêtes histoires de papiers mal tamponnés.

L’an dernier, cette réunion avait permis de régulariser la situation de cinq étudiants étrangers, dont le statut administratif ou les papiers ne permettaient pas leur maintien en France. Mais cette année, changement de discours : tout le monde dehors. Pascal Maillard, secrétaire académique du Snesup, un syndicat d’enseignants-chercheurs, résume la rencontre avec le secrétaire général de la préfecture :

« On a eu droit à un discours particulièrement rigide. Tout s’est déroulé comme si des consignes beaucoup plus strictes avaient été données aux préfets quant aux situations des étrangers résidents en France. On a eu l’impression qu’il n’y avait aucune marge de négociation et que les principes sur lesquels nous étions tombés d’accord avec la préfecture à la suite de longues négociations ont volés en éclats. »

Des principes acquis de haute lutte envolés

Après un bras de fer en mars 2012 entre l’Université de Strasbourg et les services de l’État, ces derniers avaient plus ou moins accepté trois principes dans la gestion des situations administratives des étudiants étrangers à Strasbourg : tenir compte du parcours scolaire, ne pas interrompre un cursus entamé et respecter le droit au redoublement. Fort de ces considérations, les représentants de la « cellule de veille » ont présenté au secrétaire général de la préfecture cinq dossiers d’étudiants scolarisés, dont les résultats sont corrects : deux jeunes d’Algérie, une de Serbie et deux de Turquie.

Trois d’entre eux font l’objet d’une « obligation de quitter le territoire français » (OQTF) et les visas des deux autres expirent en septembre. Parmi ces derniers, l’un doit continuer ses études, l’autre aimerait pouvoir faire son stage de fin d’études en France. La présidence de l’Université a apporté son soutien écrit à deux étudiants. Pour Pascal Maillard, ces dossiers sont « bétons » :

« Les cas de ces cinq étudiants rentrent dans les critères de résolution dans le cadre du pouvoir discrétionnaire du Préfet. On aurait pu comprendre que la préfecture se montre inflexible sur un ou deux cas, mais là on passe de cinq dossiers acceptés en 2012, refusés en 2013 alors qu’ils sont similaires. On est de nouveau dans l’arbitraire, ce qui est inacceptable, surtout quand on connait les difficultés insurmontables auxquelles font face les étudiants étrangers dans leur pays d’origine lorsqu’ils veulent étudier en France. »

Car un « filtre » est effectué par les consulats français dans les pays d’Afrique, d’Europe de l’est et d’Asie où des visas sont nécessaires pour venir étudier en France. L’Université de Strasbourg se singularise par son refus d’adhérer à Campus France, un organisme qui sous-traite la gestion des dossiers des étudiants pour la vaste majorité des universités françaises.

Une bataille d’influence à l’international

L’UdS tient à garder la maîtrise du recrutement de ses étudiants étrangers, dont dépend son rayonnement international. Sur 43 000 étudiants à Strasbourg, 19,8% sont étrangers en 2013 (32% UE, 8% Europe hors-UE, 29% Afrique, 23% Asie) et cette proportion monte à 47% en doctorat.

Pour Sandra Boehringer, maîtresse de conférence en Histoire, on assiste là à une guerre d’influence entre l’État français et l’Université de Strasbourg :

« L’Université va recruter ses étudiants sur des critères académiques, des performances, des projets d’études… Les consulats font une autre sélection. On s’aperçoit qu’ils ont tendance à privilégier les élèves qui ont suivi les cursus des écoles françaises à l’étranger, c’est à dire les fils et filles des bonnes familles plus ou moins proches des pouvoirs locaux, et qui ont pu payer ces études à leurs enfants… Donc au final, qui décide de qui a le droit de venir étudier en France ? »

De son côté, la préfecture du Bas-Rhin a refusé de répondre à nos questions, étant entrée en période de « réserve électorale ». Elle indique cependant que les dossiers des étudiants sont « toujours en cours d’instruction ».

Aller plus loin

Sur Rue89 Strasbourg : Strasbourg aime ses étudiants étrangers, la préfecture un peu moins (mars 2012)


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