Estelle avait 15 ans, elle vivait dans un village d’Alsace et était en troisième professionnelle. Elle aimait dessiner, lire, s’occuper de son chien et de ses chats et passer des heures à faire des peluches et des crop tops en crochet. « Enfin ça, c’était avant. Avant l’agression. Après tout a dérapé, ce n’était plus la même enfant », dit sa mère – qui a souhaité rester anonyme.
Estelle s’est suicidée le 11 juin, un an et demi après s’être rendue à la gendarmerie de Bouxwiller pour déposer plainte contre un membre de sa famille pour des faits d’agression sexuelle. Elle avait alors 13 ans, lui 14. Sur la feuille de papier qu’elle a laissée à ses proches, au milieu de mots juxtaposés comme des cris de souffrance et de solitude, elle a écrit plusieurs fois le prénom de celui qu’elle accusait.
Noël 2021. La famille élargie se réunit pour les fêtes de fin d’année. Dans les semaines qui suivent, les parents de l’adolescente, divorcés, s’inquiètent chacun·e de leur côté : Estelle oscille entre colère et tristesse, pleure beaucoup, reste enfermée dans sa chambre, ne mange plus, ne se lave plus. « Si quelqu’un t’a fait du mal, tu dois nous le dire. Même si c’est quelqu’un de la famille », intime la mère à sa fille après l’avoir entendue dire entre deux sanglots, seule dans sa chambre : « Je ne peux pas lui dire. Si je lui dis, cela va détruire la famille. »
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