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À l’Elsau, l’asso des habitants s’exclut des débats sur la rénovation du quartier

Jusqu’à la fin du mois de novembre, les habitants de l’Elsau peuvent proposer des projets pour la rénovation du quartier. Problème : les Elsauviens sont mal informés de cette concertation publique. L’association des résidents (l’Arel) estime qu’elle ne doit rien demander, par peur de tout faire capoter et renvoie ses adhérents les plus motivés.

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À l’Elsau, l’asso des habitants s’exclut des débats sur la rénovation du quartier

La petite église de la paroisse protestante de l’Elsau est pleine à craquer, au soir du vendredi 9 novembre. Nombre de ses paroissiens sont présents, mais ils sont réunis ce soir devant une grande croix pour participer à l’assemblée générale de l’Association des résidents de l’Elsau (Arel), forte d’environ 250 membres. Dans la salle, que des têtes chenues pour écouter Daniel Vidot, le président de l’Arel, qui se démène contre une sono au larsen menaçant. L’Elsau a beau être un quartier cosmopolite, les habitants de la cité sont rares.

Pas de débat sur la rénovation du quartier

La concertation publique, ou « co-construction » selon la Ville de Strasbourg, a commencé début octobre et se termine « fin novembre ». Pourtant, l’intense et très important chantier de rénovation du quartier, qui s’est décanté au printemps, n’est guère discuté pendant cette réunion. Les démolitions et réaménagements en cours ne concernent que très peu les résidents présents. Ils habitent majoritairement des pavillons qui ne seront pas impactés par cette rénovation.
Lors de l’Assemblée Général du 9 novembre, les membres de l’AREL débattent peu du projet de rénovation de l’Elsau (Photo Pierre France / Rue89 Strasbourg / cc)
Le sujet fait néanmoins une incursion lorsque Marc Ferrante et Michel Witasse veulent interroger le président de l’Arel : pourquoi l’association est-elle absente de la concertation publique sur la rénovation du quartier ? Daniel Vidot ne leur répondra pas, estimant que les deux membres souhaitent « régler des comptes personnels. » L’assemblée soutient majoritairement le président et empêche les deux impétrants de prendre la parole… pour la redonner aux élus présents, le député Thierry Michels (LREM), son prédécesseur Éric Elkouby (PS), toujours conseiller départemental du secteur, Alain Fontanel (LREM) et Luc Gillmann (PS), l’adjoint au maire en charge du quartier..

Évictions de deux membres trop actifs

Fin octobre, Michel Witasse a été démis de ses fonctions de vice-président de l’Arel. Le retraité, très impliqué dans la vie du quartier, ne représente plus l’Arel au sein du conseil citoyen, une organisation de représentation des habitants, obligatoire dans tout « quartier prioritaire de la ville. » Son tort ? Dans une synthèse rédigée par ses soins, il propose la construction d’une « maison de la République » sur la place Nicolas Poussin. Il espère ainsi « réunir différents services publics dans un seul bâtiment où les habitants de l’Elsau pourraient à nouveau se rencontrer. »

Contacté, le président de l’Arel critique cette idée : « Nos adhérents ne sont absolument pas d’accord avec le remplacement de l’espace vert de la place Nicolas Poussin (par un bâtiment, ndlr) ». Et concernant l’éviction de deux adhérents, il se refuse à tout commentaire.

Marc Ferrante a fait une expérience tout aussi amère. L’artiste-plasticien a été écarté de l’association au début du mois d’octobre, alors qu’il était en phase de cooptation. « Je pensais que cela faisait partie des missions de base de l’Arel que d’informer les Elsauviens autour de la rénovation de leur quartier », lâche-t-il. Daniel Vidot lui reproche d’avoir utilisé la liste des e-mails de l’association pour informer de la tenue d’une réunion d’information mi-octobre organisée par l’urbaniste Laurent Garczynski, habitant d’un quartier voisin et très intéressé par le projet. Le but était de compiler des idées d’habitants pour les faire remonter ensuite aux décideurs.

Le président de l’Arel craint au contraire que formaliser des revendications complique les plans des décideurs :

« Nous soutenons tous les acteurs de la rénovation urbaine […] mais dans toute la réflexion qui est menée, il ne doit y avoir aucun frein à la rénovation urbaine. Par frein, j’entends tout ce qui pourrait retarder la rénovation, comme des études complémentaires et onéreuses, et qui diminueraient le budget par ailleurs. L’intérêt, c’est d’aller à l’essentiel, en prenant en compte l’écologie mais en restant pragmatique. »

Des opérations « en-dessous des ambitions »

Dans son avis daté du 24 octobre, le conseil citoyen de l’Elsau dresse un constat critique sur la rénovation : « Les opérations envisagées restent dans le flou et (sont) bien en-dessous de ce que laissaient espérer les ambitions premières. » Les membres de cet organe de démocratie locale se posent la question de leur rôle et de leur pouvoir réel. Depuis un mois, la concertation publique est ouverte autour de la rénovation de l’Elsau, sans pour autant figurer sur le site « Participer » de la Ville et de l’Eurométropole. Peu d’habitants connaissent les intentions de la Ville et de l’Eurométropole de Strasbourg. Ils sont encore moins nombreux à savoir qu’ils pouvaient participer à l’élaboration du projet… Les trois réunions publiques sont maintenant passées.

En parallèle, Laurent Garczynski continue de se démener pour intégrer des projets concrets dans le plan de rénovation :

« La ville ne dit rien sur des axes fondamentaux comme l’écologie et la jeunesse. Cet avant-projet doit être complété pour répondre aux attentes des habitants. Face au fort taux de chômage chez les jeunes, la communauté que j’ai réunie a un projet de centre de formation pour les nouvelles techniques de construction écologique. D’autres habitants ont proposé de mettre en place un atelier de réparation de vélos, des jardins partagés, un groupe multiconfessionnel de scouts, etc. »

Sur le site internet du conseil citoyen, cet architecte de formation est hyperactif. Il a publié des analyses des besoins de l’Elsau, le projet de rénovation de l’Eurométropole et des dates de réunions qu’il a organisées lui-même pour une réflexion collective. Jeudi 15 novembre, ils étaient une trentaine au Centre socioculturel du quartier. Après deux heures de discussions, aucune création de groupes de travail, comme l’espérait Laurent Garczynski. À 22h, le meneur du projet « Elsau idéale » range la salle. L’air inquiet, il se demande comment continuer le combat pour un plan urbanistique plus en phase avec les besoins réels des habitants.


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