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Éliane Romani : « Les écologistes peuvent gagner aux régionales »

La candidate écologiste aux élections régionales, Éliane Romani, pense qu’une victoire de la gauche et des écologistes est possible. Elle la conditionne à un large rassemblement, avec comme objectif de revoir la politique d’aide aux entreprises.

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Éliane Romani : « Les écologistes peuvent gagner aux régionales »

Investie tête de liste « l’Écologie il est temps » dès octobre, la mosellane Éliane Romani doit conduire les écologistes aux élections régionales, programmées les 13 et 20 juin. En campagne à Strasbourg lundi 8 mars, elle reste prudente sur ses premiers éléments de programme. Et pour cause, dans le week-end, les partis écologistes mais aussi le Parti socialiste et le Parti communiste ont posé les bases d’un futur accord appelé « Pacte écologiste, citoyen et solidaire ». « Ce pacte d’union doit encore être validé par un processus démocratique auprès des militants dans chacun des partis », précise-t-elle d’emblée.

Si cette stratégie est acceptée, les principaux points du programme en découleront. En parallèle, un autre appel au rassemblement subsiste, celui de « l’Appel inédit » lancé en décembre par l’ancienne ministre Aurélie Filippetti (ex-PS), la première secrétaire PS du Bas-Rhin et conseillère régionale, Pernelle Richardot et la députée France insoumise, Caroline Fiat.

Éliane Romani est tête de liste écologiste pour les élections régionales (Photo JFG / Rue89 Strasbourg / cc).

Rue89 Strasbourg : Les Alsaciens vous connaissent peu, qui êtes-vous ?

Éliane Romani  : Je suis orthophoniste en Moselle. Je travaille dans mon cabinet libéral et à l’hôpital. Je milite chez Les Verts puis Europe Ecologie depuis vingt ans. J’ai été secrétaire régionale en Lorraine, ainsi que conseillère fédérale. À Thionville, j’ai exercé deux mandats successifs entre 2001 et 2014, d’abord conseillère municipale, puis, quand on a gagné, adjointe à l’urbanisme. Je ne me suis pas représentée, car je pense qu’il faut savoir passer la main.

Qu’est-ce qui vous a poussé à vous engager dans les élections régionales ?

Le contexte a changé. Avec les marches pour le Climat, les grèves lycéennes, le recours gagné contre l’inaction climatique… La conscience de l’urgence écologique est bien partagée. Elle est devenue une exigence pour la jeunesse et les générations futures. Trois électeurs sur quatre disent que l’urgence écologique sera déterminante pour leur vote.

Des débats préhistoriques

On voit que l’écolo-bashing progresse, avec dernièrement la polémique sur les repas dans les cantines à Lyon, que même la ministre de l’Environnement a qualifiée de débat préhistorique. On tente par tous les moyens de ridiculiser les écologistes, parce qu’on sait bien qu’ils pourraient réaliser de bons scores aux prochaines élections…

Il y a aussi les demandes sociales, exprimées notamment depuis 2017 par les Gilets jaunes. Et puis la pandémie, qui est une conséquence à notre rapport à la nature, puisque les zoonoses sont des effets collatéraux de la déforestation. Elle a mis en avant les invisibles qui ont fait tenir la société lors du premier confinement. Ils sont certes retournés à cette situation d’avant, mais leur mise en évidence a au moins provoqué des prises de conscience.

Et puis il y a les scores électoraux aux élections européennes et municipales. La victoire de Jeanne Barseghian à Strasbourg m’a beaucoup inspirée. Elle n’était pas forcément extrêmement connue, mais elle est dynamique et positive. On est à un moment possible de basculement.

Même dans le Grand Est ?

Le contexte politique est plus difficile qu’ailleurs certes, mais les habitants sont les mêmes. Ils ont bien vu les trois étés de sécheresse, les canicules, les jonquilles qui fleurissent un mois en avance ou les cours d’eau qui s’assèchent puis qui débordent… Je vois la détresse, notamment chez les jeunes, mais aussi des initiatives. La transition écologique avance dans la tête des gens, mais il manque l’échelon politique.

À l’été, les partis écologistes se sont rassemblés en se disant « on arrête nos bisbilles. » On peut gagner.

Votre programme n’est pas encore connu, mais pouvez-vous donner des exemples de vos premières décisions ?

En cette journée internationale des droits de la femme, on annonce la mise à disposition de protections menstruelles gratuites dans les lycées et d’autres lieux publics de la région. Devant l’ampleur des violences faites aux femmes, il faut aussi davantage accompagner celles qui subissent ces actes. Les Régions emploient 61% de femmes mais le Conseil régional doit devenir exemplaire sur l’égalité salariale.

Conditionner les aides aux engagements écologistes

Autre point, l’éco-conditionnalité des aides aux entreprises sera très importante. La Région a une forte compétence économique. Nous la conditionnerons aux acteurs qui s’engagent dans la transition écologique. On ne peut plus aider les pollueurs. Près de chez moi à Illange, une industrie qui se fournit en charbon vient d’ouvrir. On croit rêver ! On va aider ceux qui ont envie de changer, aider les salariés via la formation, une autre compétence de la Région.

Huaweï n’a pas pu s’installer en région parisienne suite à une levée de bouclier des services de renseignement. En Alsace, l’armée alerte mais seuls les écologistes ont posé des questions sur la sécurité intérieure et la Région a versé 800 000 euros d’aides. C’est scandaleux.

Il y a aussi eu les implantations d’Amazon. On annonce les emplois créés à grands renforts de communication, mais pas ceux détruits, ni les hectares de terres agricoles supprimés.

Il y a un autre appel au rassemblement, avec « l’appel inédit », une démarche en dehors des partis politiques. Comment vous placez-vous vis-à-vis de cela ?

Avant le Pacte écologiste, citoyen et solidaire, nous étions déjà en discussion avec tous les partis de gauche. On va continuer à discuter, car il y a une possibilité de gagner et plus on sera rassemblés, plus il y aura de chances de continuer. On l’a écrit, on est ouverts aux initiatives, il reste de la place. Je souhaite favoriser une liste ouverte, avec des personnes non-encartées.

En étant rassemblés et ouverts, on peut faire basculer la Région dans quelque chose de complètement différent. On serait d’ailleurs politiquement plus en phase avec le Luxembourg, la Sarre, le Bade-Wurtemberg, la Belgique ou la Suisse, où l’on retrouve des écologistes dans les majorités.

L’existence même du Grand Est est contestée, notamment en Alsace. Même si ce ne sont pas les élus régionaux qui décident du découpage, est-ce que ce sera un thème de campagne pour vous ?

Les écologistes sont des régionalistes, qui pensent qu’il s’agit d’un bon échelon. Nous sommes aussi pour le principe de subsidiarité, c’est-à-dire une décision prise au plus près des habitants. Nous aimerions que la Région soit une véritable puissance publique et pas seulement une machine à redistribuer l’argent que l’État veut bien lui donner. Cela nous permettrait de parler d’égal à égal avec nos voisins. Nous porterons une vision moins jacobine de l’organisation de l’État, contre l’empilement des collectivités locales.

Ce serait, il est vrai, mieux d’avoir une région avec une vraie identité. Cette région est un peu grande et disparate car décidée un peu n’importe comment et sans consultation. On comprend que les gens ne s’y retrouvent pas. Il y aura d’ailleurs un parti régionaliste sur la liste, Alternative alsacienne.


#élections régionales 2021

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