Valentin Mihai avait 28 ans. Rom né en Roumanie, il avait fui la misère pour devenir agent d’entretien à Strasbourg. Grâce à un contrat d’insertion, il faisait chichement vivre sa famille, sa femme Brindisa et ses deux enfants Daniel, 11 ans, et Amir, 7 ans, hébergé au foyer social Joséphine Baker à Cronenbourg, qui accueille une trentaine de caravanes. Mais dans l’après-midi du vendredi 7 septembre, Valentin s’est tué en ramassant une rallonge électrique sur des tapis imbibés d’eau.
Brindisa s’est immédiatement jetée sur lui pour tenter de le ranimer, ses cris alertant la communauté, d’autres personnes tentent de prodiguer un massage cardiaque à Valentin alors que les secours sont appelés. Mais les pompiers ne trouvent pas le foyer Joséphine Baker (il n’est pas référencé sur les cartes). Quinze minutes plus tard, la famille décide de transporter elle-même la victime aux urgences de l’hôpital de Hautepierre. Sur place, médecins et soignants tenteront de le ranimer, et obtiendront des signes électriques intermittents avant de le déclarer décédé vers 23h30…
« Cet accident aurait pu être évité »
Rencontrée mardi soir, Brindisa Mihai, 27 ans, est en colère. À l’aide d’un cousin traducteur, elle détaille les circonstances du drame :
« Valentin est rentré de son travail en début d’après-midi, il était fatigué et je m’apprêtais à lui faire à manger. Il est impossible de cuisiner à l’intérieur des caravanes, elles sont trop petites, alors nos plaques électriques sont à l’extérieur. Mais la Ville (à qui appartiennent les caravanes, ndlr) a refusé que nous étendions l’auvent. Résultat nos plaques ne sont pas abritées, ni même là où nous mangeons. Il y avait de l’humidité partout. Toute la matinée, je prenais des coups de jus, je l’ai dit à Valentin. Et quand il a voulu brancher la rallonge, il ne s’est pas relevé. Je suis en colère, je pense que cet accident aurait pu être évité si la Ville nous avait seulement autorisé à nous abriter. »
Une enquête de police est en cours, et s’oriente vers l’accident domestique. Du côté de la Croix-Rouge, qui gère le site par délégation de la Ville de Strasbourg, on avoue ne pas comprendre comment ce drame a pu arriver. Jean-Jacques Muller, bénévole responsable de l’insertion pour la Croix-Rouge, détaille :
« Le site date de fin décembre 2017, il est conforme aux normes de sécurité et loin d’être au bout de ses capacités d’accueil… Un accident de ce genre était ce qu’on pouvait craindre à l’Espace 16 (derrière la gare, ndlr) ou à l’Espace Hoche (vers Illkirch-Graffenstaden, ndlr) par exemple mais là, les bornes sont neuves et limitées en ampérage… C’est incompréhensible. Il est exact que nous avions demandé à la famille de limiter son auvent, car les règles pour toutes les caravanes sont les mêmes : deux mètres maximum d’emprise. Ils étaient à 3m50… »
Même discours à la Ville de Strasbourg, où Marie-Dominique Dreyssé, adjointe au maire en charge des solidarité, pointe :
« Évidemment, si la famille avait été accueillie dans un appartement, un accident comme celui-ci ne serait pas arrivé… L’hébergement à l’année dans des caravanes est un habitat précaire mais les familles connaissent les règles de sécurité. Nous faisons en sorte que les consignes soient appliquées, mais évidemment, on ne peut pas être présent partout, tout le temps… »
Brindisa et ses deux enfants sont repartis en Roumanie, où ils conserveront le deuil de Valentin pendant une année, avant de revenir en France. La Ville de Strasbourg s’est engagée à accueillir la famille à son retour.
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