Et c’est finalement Eiffage Construction qui sort gagnant de l’appel d’offres organisé par la Ville de Strasbourg pour rénover les Bains municipaux, une opération à près de 34 millions d’euros. Trois autres groupements de candidats s’étaient proposés mais le jury, qui a débattu pendant une journée dans l’enceinte des bâtiments construits en 1908 par Fritz Beblo ont retenu le groupement qui était le plus sobre en propositions de modifications du bâti existant.
Pour ce chantier, Eiffage s’est associé à François Chatillon, architecte en chef des Monuments historiques et qui a déjà piloté le chantier de rénovation de la piscine des Amiraux, construite à Paris par Henri Sauvage entre 1922 et 1927. Cette piscine Arts décos a rouvert en novembre 2017 au même tarif que les autres équipements de la Ville et c’est ce qui est prévu à Strasbourg. La piscine des Bains doit rouvrir fin 2021, au même prix d’accès que n’importe quelle piscine de l’Eurométropole.
Un nouveau spa en ville à 22€…
Il n’en sera pas de même pour les bains romains qui doivent eux rejoindre « l’espace bien être. » Cet ensemble comprendra les bains chauds historiques auxquels seront ajoutés un spa au rez-de-chaussée avec sauna, grotte de sel (?), jacuzzi et douches massantes… Un bassin de balnéothérapie complète cet espace, pour proposer selon la saison soit un « bain de soleil minéral » ou un « jardin Fraîcheur paysagé et parsemé de brumisateurs. » L’accès à cet espace sera proposé à 22€ pour une durée illimitée (ou 25€ avec un accès à la piscine).
À côté, un « espace partagé, » ouvert sur la ville, est aménagé pour permettre l’accueil des rendez-vous du quartier de la Krutenau ou d’événements publics. Le reste de l’actuel parking est transformé en pelouse.
L’art délicat de camoufler le modernisme
Devant, l’accès des groupes et des scolaires est facilité par un nouvel accès, depuis les douves. Le grand bassin doit conserver son aspect actuel, la moitié des cabines seront conservées. François Chatillon explique que tout l’enjeu sera d’arriver à installer les nouvelles machineries derrière des moulages :
« Au début du XXe siècle évidemment, il n’y avait pas les mêmes normes d’accès, sanitaires, de ventilation et de sécurité qui sont exigées pour les piscines publiques aujourd’hui. Mais l’ensemble architectural est tellement formidable que nous avons choisi de le modifier le moins possible, nous sommes restés très prudents et sobres dans nos propositions de fonctions… Pour autant, il aura fallu beaucoup de travail pour parvenir à concilier les exigences contemporaines avec le respect de l’architecture de l’époque. »
La structure du grand bassin sera modifiée, il sera notamment moins profond, à la fois pour des questions de sécurité et pour économiser l’eau et son chauffage. En revanche, il restera fait de carrelages, pour respecter l’aspect de l’époque. Il n’y aura donc pas de cuve en inox dans le grand bassin, comme dans toutes les nouvelles piscines de l’Eurométropole. Les douches publiques seront également préservées, avec des conditions d’accès similaires à celles qui existaient avant la rénovation.
Gestionnaire de la piscine et de l’espace bien-être, Equalia prévoit d’ouvrir le lieu 139 heures par semaine, contre 70 avant sa fermeture, avec des horaires en partie nocturnes. Équalia estime qu’une vingtaine d’employés seront nécessaires pour assurer l’accueil et l’entretien de ces quelques 6 000 m² de locaux. L’entreprise exploite une centaine de centres aquatiques, patinoires et autres espaces bien-être en France et en Belgique.
Près de 40 M€ d’investissements
Le chantier est piloté par la SPL Deux-Rives, une société dont le capital est détenu par la Ville de Strasbourg et l’Eurométropole et titulaire d’une délégation de travaux et de gestion pour 35 ans. À sa charge de conduire une rénovation de 35 M€ en recevant de Strasbourg 2,4 M€ par an et en percevant des recettes estimées à 1,7 M€ par an. En bout de chaîne, Équalia doit percevoir environ 2 M€ par an de chiffre d’affaires pour le fonctionnement des espaces, un montant qui peut augmenter ou même baisser avec l’évolution des recettes.
Schéma de financement du fonctionnement
L’extension médicale, construite en 1911 et à gauche de l’entrée quand on est boulevard de la Victoire, est transformée en « Maison du Sport-Santé. » Le bâtiment accueillera des médecins et des chercheurs qui tentent de relier la pratique régulière d’un sport à l’état général d’une population, un thème cher au Dr Alexandre Feltz, adjoint au maire de Strasbourg et initiateur de plusieurs programmes de « sport-santé » à Strasbourg (voir tous nos articles). Ce chantier de 5,5 millions d’euros n’est pas piloté par la SPL Deux-Rives mais directement par la Ville de Strasbourg et les locaux seront en régie directe.
Liane Zoppas, du collectif La Victoire pour tous, qui avait porté le débat sur cette rénovation sur la place publique, accueille plutôt favorablement ces annonces :
« Je reconnais la qualité du travail de François Chatillon, question architecture nos Bains sont entre très bonnes mains. Mais je regrette qu’une partie des cabines et des vestiaires, protégés par le classement aux Monuments historiques en 2017, soient supprimés malgré la nécessité de préserver l’ensemble… Il s’agit du dernier Bain ayant gardé un ensemble aussi complet en Europe. En outre, je trouve que l’on a trop sacrifié la pratique de la natation publique à celle du bien-être et du spa. »
Les travaux doivent débuter en octobre 2019 pour une réouverture de l’ensemble des bâtiments à la fin de l’année 2021.
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