Les écoles alternatives à l’Éducation nationale fleurissent. Deux nouveaux établissements ouvriront en septembre dans le quartier du Neudorf à Strasbourg. À l’école Grandir Vert Demain, rue Saint-Aloise, trois enseignants accueilleront une vingtaine d’enfants de 3 à 11 ans. L’école Novagora, située avenue du Rhin, peut accueillir jusqu’à 50 enfants de 3 à 20 ans, accompagnés par cinq encadrants. Les écoles ont obtenu suffisamment d’inscriptions d’élèves pour être viables dès la rentrée.
« L’école traditionnelle peine à évoluer »
Grandir Vert Demain propose des méthodes d’enseignement à la croisée de plusieurs pédagogies. L’enfant est plus actif que dans l’enseignement traditionnel. Pour Tiphaine Linder, future directrice de l’école, ce succès est tant dû aux méthodes d’enseignement appliquées qu’aux effectifs des classes dans les écoles publiques :
« Le quartier est en pleine expansion et en plein embourgeoisement. Les parents ne veulent pas laisser leurs enfants dans des classes de 30 élèves. Ils viennent au Neudorf pour avoir une maison avec un jardin, ils recherchent une vie plus simple, d’où le succès des écoles alternatives. »
Pour l’école Novagora et sa future directrice Cindy Kaercher, cet engouement est dû à plusieurs facteurs :
« Les écoles alternatives ont toutes de longues listes d’attente. Cette demande de la part des familles est le fait de plusieurs facteurs : une école publique qui peine à évoluer avec son temps, et un regard sur l’enfant qui change. De plus en plus de personnes prennent conscience que l’enfant est une personne à part entière, et doit donc être considérée comme telle, et sont de ce fait à la recherche de lieux où leur individualité sera respectée. »
Financements coopératifs et participatifs
Novagora et Grandir Vert Demain ont respectivement besoin de 40 000 euros et de 22 000 euros pour se lancer. Pour cela, elles ont demandé un prêt à Alsace Active et à la NEF de 30 000 et 20 000 euros. Novagora a également lancé une campagne de financement participatif sur internet, Grandir Vert Demain fera de même prochainement.
Selon Cindy Kaercher, à l’initiative du projet de l’école démocratique Novagora :
« Les parents qui s’intéressent aux écoles alternatives ont différents profils, mais ils tous ont entamé une réflexion sur les modes d’enseignement. Cette réflexion a été déclenchée soit par leur propre expérience ou par celle de leur enfant, qui ne trouve pas sa place dans le système scolaire public. Les écoles démocratiques sont les alternatives qui se rapprochent le plus de l’enseignement à domicile. Plusieurs de nos futurs membres ne sont actuellement pas scolarisés. »
Même constat à Grandir Vert Demain :
« Les familles viennent de milieux très divers, nous avons des enfants de cadres, mais aussi des professionnels de la métallurgie. Mais tous les parents ont un regard sur l’enseignement qui a évolué. Les familles envisagent parfois l’école à domicile, et voit dans l’école alternative une solution liant la souplesse de l’école à la maison et une socialisation plus importante de l’enfant. »
Des frais de scolarité de 200 à 400€ par mois
Ces écoles sont privées et hors contrat, c’est-à-dire qu’elles sont indépendantes de l’Education Nationale. Leur fonctionnement repose entièrement sur les frais d’inscription payés par les parents. Il y a donc forcément une sélection, en fonction des moyens financiers dont disposent les familles. Les frais de scolarités à l’école Novagora sont de 250€ par mois :
« Nous n’avons pas le choix, il faut bien le personnel, les locaux et tout une série d’autres frais… Cependant, dans l’avenir, nous aimerions trouver des mécènes et proposer des bourses scolaires aux familles en proie à des difficultés financières mais dont les enfants pourraient bénéficier de nos enseignements et de nos méthodes. »
Grandir Vert Demain a, quant à elle, choisi des tarifs échelonnés selon les revenus des familles. Grâce au soutien de nombreux bénévoles, elle s’enorgueillit d’être la moins chère des écoles alternatives de Strasbourg avec des frais de scolarité de 230 euros à 400 euros par mois, de septembre à juin, cantine bio et périscolaire compris. Tiphaine Linder précise :
« Cette tarification solidaire ne couvre qu’une partie de nos frais de fonctionnement. Pour pouvoir la proposer, nous ouvrons hors temps scolaires des ateliers hebdomadaires de pratiques culturelles et artistiques pour enfants et adultes (techniques de dessin et peinture, argile, création de cosmétiques naturels, pratique de langues étrangères, chorale…). »
Deux pédagogies qui attirent pour des raisons différentes
L’équipe de l’école de Novagora a choisi la pédagogie dite « démocratique » : une relation égale entre enfants et adultes, pas d’emploi du temps ni de véritable programme, l’enfant est considéré comme étant assez autonome pour faire ses propres choix. Les enfants ont une place dans les décisions prises par l’école concernant le règlement, la cantine ou même l’embauche de personnel supplémentaire. Si elle est ouverte aux enfants de 3 à 20 ans, les huit enfants inscrits cette année ont entre 4 ans et 13 ans, et viennent de Strasbourg et du Bas-Rhin.
Selon Cindy Kaercher, les parents viennent à l’école démocratique pour cette relation spéciale à l’enfant :
« Il s’agit de revoir notre rapport à l’âge, et à la relation adulte-enfant. Nous sortons du schéma où l’adulte sait mieux que l’enfant lui-même ce qui est bon pour lui et décide à sa place, pour aller vers des rapports d’égal à égal, où chacun, quel que soit son âge, est à la fois co-créateur et co-responsable de son école. Ni adulte tout puissant, ni enfant-roi. »
Grandir Vert Demain propose une pédagogie soutenue par des applications concrètes et l’éducation à la nature. On apprend les mathématiques, l’histoire ou le français en même temps que l’on jardine ou cuisine. Les méthodes d’enseignement sont au croisement de plusieurs pédagogies, selon les situations : Freinet, Montessori ou Steiner. Pour Tiphaine Linder, le fait que sa pédagogie soit plus proche de l’enseignement classique est une chance :
« Nous veillons à l’acquisition des compétences requises par l’Education nationale, pour qu’un éventuel retour à l’école publique puisse s’effectuer simplement. »
Cette école accueille les enfants de 3 à 11 ans et propose 20 places. Une douzaine d’enfants sont aujourd’hui préinscrits, âgés de 3 à 9 ans, avec davantage d’enfants en bas âge. L’école pense déjà à déménager et à s’agrandir, pour accueillir davantage d’enfants et disposer de son propre jardin.
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