Dépassement autorisés ? Excès de vitesse !

Annie a 62 ans, une gonarthrose (arthrose du genou) sévère, que les traitements médicamenteux ne peuvent plus soulager. Sa rhumatologue a fini d’injecter tout ce qu’elle pouvait dans son genou malade. Elle boîte et ne peut plus marcher sans douleurs. Elle vient à ma consultation pour discuter d’une mise en place d’une prothèse totale du genou.

Cette intervention est complexe et lourde, elle le sait et ne veut pas se décider à la va-vite. Elle me demande conseil quant au choix du chirurgien. Je lui propose un chirurgien en clinique privée et un chirurgien en hôpital public. Les deux sont de très bons praticiens qui ont déjà opéré plusieurs de mes patients.

Le choix on l’a, si on a la bonne mutuelle

De fait, le choix, elle ne l’a vraiment que si sa mutuelle est performante.

Je lui explique : l’intervention est remboursée à hauteur de 590€ et des brouettes. Cet acte n’est pas bien coté par la sécurité sociale, ce qui équivaut en fait à un déremboursement partiel. Du coup, les chirurgiens libéraux optent tous pour un dépassement d’honoraires autorisé parce qu’ils pratiquent en secteur 2.

Là, vient le moment difficile pour Annie : la réalité des tarifs et surtout du dépassement. Pour une prothèse de genou à Strasbourg, 1 300€ en général pour le chirurgien, remboursé 590€, et 400€ pour l’anesthésiste remboursé 220€, soit 890€ de dépassement pour une intervention facturée au départ 810€ par la sécu. Total : 1 700€ la chirurgie du genou, et je passe le forfait hospitalier qui ne sera pas réglé par Annie parce qu’il n’est pas appliqué par le régime local d’Alsace-Moselle.

Annie a-t-elle vraiment le choix de ne pas payer ? Oui, si sa mutuelle de luxe rembourse des sommes aussi élevées. Non, si comme beaucoup de monde, elle a pris une mutuelle moyenne. La somme est alors trop élevée pour elle. J’explique depuis plusieurs années aux patients que d’être opéré à l’hôpital public est une alternative intéressante puisque gratuite, et la chance que nous avons ici, est qu’il s’agit d’un CHU dont la qualité est reconnue.

Les dépassements sont évitables, encore faut-il résider près d’un hôpital public et y être orienté par son médecin traitant. Mais à quand une limitation de ces fantastiques dérapages qui sont de vrais excès de vitesse. A quand les radars en médecine ?